Images de page
PDF
ePub

la

faire fes excufes à la Mere Abbeffe de ce qu'il avoit été obligé de faire la veille; qu'il l'avoit fait par ordre ; qu'aurefte il laifferoit à la Communauté la liberté du jardin aux heures qu'on lui marqueroit. Elle lui répondit qu'après un tel attentat & un tel scandale les Religieufes avoient pris la réfolution de ne pas mettre les pieds dans le jardin. Dès auparavant que la nouvelle garnifon arrivât, Communauté avoit délibéré de ne plus fournir à ces Mrs rien de ce qu'on fournissoit aux Gardes du Corps, pain, vin, bois, huile, chandelle, épiceries, &c. parce que cela incommodoit trop la maison. La Mere Abbeffe le déclara au Sieur Bellébat qui prit ceci pour une vengeance & en fit reproche à la Mere. Elle fe défendit en l'affurant que le parti étoit pris avant qu'ils arrivaffent. On voulut bien cependant leur fournir le pain & quelques autres chofes qu'ils auroient eu de la peine à trouver; pour le refte, la chofe demeura indécife.

Mort édi

te

la rétractation

re.

Dans ce même mois de Mai mourut cette IX. bonne Sœur ancienne Catherine de faint Paul, fane de la dont il a été parlé plus haut parmi celles qui Doyenne du s'étoient laiflé féduire pour la fignature, & Convent qui s'étoit généreusement rétractée, comme nant en main nous l'avons vu. Quelques jours avant sa mort de fa fignatu elle fouhaita qu'on fit la recommandation de l'ame auprès d'elle, dans le tems qu'elle avoit encore toute fa connoiffance. On lui donna cette fatisfaction ; toute la Communauté affemblée fit les priéres. Elle fouhaita de plus, qu'on fît la lecture publique de l'écrit fecret qu'elle avoit fait pour rétracter fa signature. Elle l'écouta avec des démonftrations de la plus humble pénitence, frapant fa poitrine &

X.

cente des Re

pleurant fa faute, comme fi c'étoit le premier jour qu'elle la pleuroit. Elle figna de 'nouveau fon écrit, & pria toutes les Sœurs de le figner comme témoins. Enfin elle demanda en grace que quand elle feroit dans l'agonie, on le lui mît entre les mains avec le cierge béni, & qu'après la mort on l'enterrât avec elle. Elle fut enterrée par les Religieufes avec la même folemnité que les autres Sœurs qui l'avoient précédée, je pourrois ajouter, & avec la même joie. Elles avoient à la vérité la douleur de les voir mourir fans Sacremens : mais la douleur étoit bien furmontée par la vue confolante de cette paix des mourantes qui tenoit du prodige à leurs yeux, & qui les affermiffoit encore davantage dans l'amour de la vérité. » C'est cela après tout, dit la Sœur Angélique lett. 16. qui confole & qui fortifie plus que des miracles. En effet l'Eglife » a été plus affermie par la mort des Apôtres & » des Martyrs, que par leurs prédications & > leurs miracles. C'eft pourquoi dans la vérité

[ocr errors]

5

notre foi trouve un plus grand foutien dans » ces effets fi fenfibles de la grace de J. C. qui paroiffent en ces ames fi innocentes & fi pures, & dans l'admirable paix qu'il leur donne, qui eft une marque de leur bonne » confcience, &c.

Dans le mois de Juin les Eccléfiaftiques Rufe inno- découvrirent une petite rufe innocente des ligieufes pour Religieufes. Comme les Sœurs Converses alfe procurer loient librement à la Communion, quelques quelquefois la Religieufes du Chour prenoient quelquefois Communion. l'habit de Converse pour communier, penfant

que le Prêtre qui difoit la Meffe & qui ne connoiffoit pas les vifages ne s'appercevroit de rien. Le Sieur du Saugey un jour crut avoir

communié la Mere Agnès. Il n'en parla point: mais il écrivit un petit billet qu'il attacha à la Carte de la Sacriftie où étoient tous les noms des Sœurs, & où l'on marquoit celles qui défircient communier. Il avoit tiré le cordon de la Mere Agnès & difoit dans fon billet qu'on pouvoit bien tromper les hommes, mais qu'on ne pouvoit pas tromper Dieu : qu'on entendroit ce qu'il vouloit dire, en regardant le cordon qui étoit tiré, & en lifant la troifiéme leçon de l'Office de ce jour-là. C'est l'endroit ou faint Chryfoftôme dit : Qu'aucun Judas n'approche de l'autel aucun avare, aucune perfonne impure & corrompue. Les Religieufes le fervirent dans le même goût & lui rendirent bien le change. Elles attachérent un billet à la même carte le lendemain, où fans s'expliquer clairement, elles difent qu'il eft étonnant que M. du Saugey ne fe fouvienne d'elles » que lorfqu'il trouve dans fon Office qu'il » eft parlé des Judas, des avares, des perfon

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

nes impures: qu'il doit faire réflexion fur > lui-même, & penfer que faint Chryfoftôme rejette auffi-bien de l'Autel les ames dures & impitoyables qui traitent leur prochain avec injuftice, que les Judas & les perfonnes impures, ce que par la grace de Dieu elles ne font pas. » Il voulut auffi faire parler M. Hamon fur cet article, parce qu'étant Sacriftain il étoit à préfumer qu'il feroit au fait de la petite fraude. M. Hamon fe tira d'affaire avec lui affez habilement, ne lui fit aucun aveu & même lui fit quelques réflexions capticules pour déranger tous les foupçons.

[ocr errors]

Six mois après il fut queftion de la même chofe. Le Sieur Rey qui avoit pris la place de M. du Saugey, comme nous allons le dire,

demanda à la Mere Abbeffe s'il n'y avoit pas des Sœurs du Chœur qui communiaffent en habits de Converses. La Mere répondit qu'elle n'avoit rien à lui dire là-deffus. Il lui expofa les raifons qu'il avoit de foupçonner. Il dit qu'il avoit remarqué qu'on lui demandoit quelquefois avec une curiofité affectée lequel des deux Eccléfiaftiques diroit la premiére Meffe: que lui-même avoit trouvé quelquefois qu'il lui reftoit quelques hofties confacrées après avoir donné la communion : qu'il appercevoit auffi quelquefois de nouveaux vifages en donnant la communion : que M. l'Archevêque l'avoit averti de bien prendre garde qu'on ne le trompât fur cet article: queM. du Saugey l'avoit affuré que de fon tems il ne communioit pas tant de perfonnes, que lui difoit en communier. La Mere le laiffa tout dire, & il ne put tirer d'elle aucune réponfe pofitive. Réflexions de Le Lecteur entendra avec plaifir la queftion M. Hamon à traitée par un des hommes les plus intelligens ce sujet.

XI,

dans les chofes fpirituelles. C'eft M. Hamon,
dans la relation de fa vie écrite par lui-même
tout-à-fait dans le goût des Confeffions de S.
Auguftin. Il raconte qu'on lui propofa une
fois le cas, pour avoir fon avis, & il le difcute
au long dans fon écrit ; fçavoir fi les Religieu-
fes du Chœur pouvoient prendre le manteau
gris & communier comme Converfes. Hexpofe
le pour & le contre. Il dit que d'un côté, quel-
que
foient les Miniftres de J. C. nous devons
les regarder comme J. C. & leur obéir com-
me à lui, & par conféquent nous foumettre
à l'interdit de la Communion & ne point cher-
cher à les tromper : que d'ailleurs l'exemple du
Centenier nous montre qu'on peut fe fanctifier
par l'humble privation du Sacrement, quand
il paroît que telle eft la volonté de Dieu. Mais

[ocr errors]

M. Hamon s'étend enfuite au long fur les raifons qui militent pour le parti contraire, & qui tendent à juftifier la conduite des Religieufes qui emploient cette pieufe & innocente tromperie. » Il me femble, dit-il, que fi 'une perfonne avoit beaucoup de foi & un dé» fir ardent de J. C. l'Evangile nous donneroit lieu de faire quelque exception pour le cas » préfent. Car je trouve que le pauvre paralytique qui ne pouvoit entrer dans la maison où » étoit J. C. par la porte qui étoit la voie or» dinaire, ayant été defcendu par une ouver»ture qu'on fit au toit, J. C. ne reprit point » ceux qui l'avoient defcendu, & loua même leur foi.... C'eft pourquoi je ne m'éloignerois pas de croire qu'en voyant la foi de ces Religieufes, il leur diroit ce qu'il dit au paralytique: Confide, fili, remittuntur tibi peccata tua. Ayez confiance, mon fils, vos péchés vous font remis.... Ne voyons-nous pas de même que l'hémorrhoïffe voulut en >> quelque forte tromper J. C. comme il s'agi»roit ici de tromper fes Miniftres ? Il faut >> demeurer d'accord que les Religieufes ont été » aussi maltraitées des médecins, que l'avoit » été cette pauvre femme, qua multa fuerat perpella à medicis.... On pourroit donc faire ce qu'elle a fait, fi on avoit la même foi » qu'elle... Il femble que la Madeleine fuiɔɔvant le mouvement de fon amour n'eût point » demandé permiffion, & qu'elle eût emporté » J. C. fi effe eût cru pouvoir l'emporter. Car » voici comme elle parloit: Dites-moi où vous » l'avez mis, & je l'emporterai... C'est un heu>> reux crime que de trouver Jefus & de le pren» dre... Je trouvois encore quelque chofe dans » l'Ecriture qui donnoit quelque jour là-dessus.

« PrécédentContinuer »