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LIVRE XI.

Ce qui s'eft paffé à Port- Royal depuis la Paix de Clément IX. en 1669. jufqu'en 2679.

N

Année 1669.

I.

Suites de la

paix de Clément IX. pat

Champs.

Ous avons vu la paix de l'Eglife négociée pendant l'année 1668. confommée & fcellée au commencement de 1669. par le Bref du Pape adreflé aux IV. Evêques, & par rapport aux la fentence de M. l'Archevêque de Paris qui Religieufes de rétabliffoit les Religieufes de P. R. dans la P. R. des participation des Sacremens, dans le droit de faire corps de Communauté, dans la voix active & paffive, &c. On s'attendoit, comme il étoit naturel de le faire, que ces Religieufes étant ainfi réhabilitées dans tous leurs droits, la féparation qui s'étoit faite des deux maifons & le partage des biens feroient anéantis; que les Religieufes des Champs rentreroient en poffeffion de leur maison de Paris pour ne faire plus qu'une même Communauté avec les Soeurs de Paris comme auparavant; que par une fuite néceffaire la nomination de la Sœur Dorothée Perdreau faite par le Roi à l'Abbaye de P. R. de Paris feroit réputée caduque, & regardée comme non avenue, pour laiffer fubfifter l'établissement fait depuis 40. ans de l'Abbaye élective & trien

nale.

Ce n'étoit pas feulement la Sentence de l'Archevêque qui donnoit lieu de préfumer toutes

ces

ces fuites. L'Arrêt du confeil rendu l'année précédente emportoit tout cela avec lui, de la maniére qu'il étoit conçu. Car le Roi y déclaroit que S. S, voulantoublier tout le paffé, & étant fatisfaite de la conduite des IV. Evêques, il vouloit auffi que toutes les difputes ceffant, le paffé fut regardé comme non avenu. D'où il réfultoit que les chofes devoient être remises dans le même état qu'elles avoient été, c'eft-àdire les Bénéficiers rétablis dans leurs Bénéfiles Docteurs réhabilités en Sorbonne, les Religieufes de P. R. reftituées dans tous leurs droits. Il y avoit même quant au prétendu titre d'Abbefle de la Sœur Dorothée Perdreau des raisons propres & particulieres qui l'anéantifoient.Sa prife de poffeffion étoit nulle de plein droit, ayant été faite contre la difpofition formelle des Bulles qui ne confirmoient fa nomination par le Roi que fous deux conditions, l'une que ladite érection de l'Abbaye en titre & perpétuelle feroit agréée des deux tiers au moins des Religieufes; l'autre, que ce feroit au cas qu'il n'y eût point alors d'Abbeffe canoniquement pourvue de l'Abbaye. D'ailleurs il eft ordonné par la Bulle à l'Archevêque de Paris ou à fon Official de faire avant la fulmination les enquêtes de commodo & incommodo. Or toutes ces formaAités ont manqué abfolument, & par conféquent la Sœur Dorothée devoit encore par cet endroit perdre fon titre dont elle n'étoit pas légitimement pourvue, & l'Abbeffe de P. R. des Champs devoit reprendre fes droits fur la maifon de Paris.

Cependant il n'en fut pas ainfi. Les Jéfuites & leurs adhérans qui avoient remué Ciel terre pour faire avorter la conclufion de la

paix dans l'entre-tems de l'Arrêt du Confeil au Bref du Pape, voyant qu'ils avoient manqué leur coup; firent de nouveaux efforts pour frutrer au moins les parties intéreffées des fruits -de la paix. Ainfi malgré les mouvemens que fe donnérent les Evêques médiateurs, Mrs de Sens, de Châlons & de Laon, ni M. Arnauld, ni les Docteurs de Sorbonne exclus à son sujet, ne rentrérent point dans la Faculté. L'Archevêque à fon tour qui étoit peu content d'une paix négociée & conclue à fon infçu, & qui s'étoit fait prier longtems pour lever les cenfures portées contre les Religieufes de P. R. -des Champs, n'étoit nullement d'humeur à favorifer ces filles au préjudice de celles de Paris, qu'il vouloit maintenir dans l'état gracieux où il les avoit mifes. Il faifoit entendre à la Cour que les conteftations paffées avoient aliéné les efprits des Religieufes des -deux Maifons, & que la réunion n'étoit point praticable. D'un autre côté le Roi n'étoit point fâché de rentrer dans fon droit de nomination qu'il avoit exercé en nommant la Sœur Dorothée Abbeffe titulaire.

IT.

On employa M. le Prince auprès de l'Archevêque pour obtenir quelque chofe de lui. Son La Cour fouAlteffe fe fervit d'un motif particulier pour ration des haite la fépaengager le Prélat à acquiefcer à fes demandes. deux Maifons Il repréfenta que Madame la Ducheffe de Lon- & le partage gueville fa four avoit quelque deffein de fe des biens retirer à P. R. de Paris: & ce fut-là ce qui donna lieu à un bruit qui fe répandit dans la fuite, qu'on avoit mis en délibération fi on ne feroit pas un échange, & fi on ne tranfporteroit point les Religieufes de Paris à la maifon des Champs avec le titre d'Abbeffe perpétuelle pour cette Maifon, en donnant aux Tome II.

pour

Religieufes des Champs la maifon de Paris. Quoiqu'il en foit, la démarche de M. le Prince n'eut point de fuite. Dans le même tems on cut vent que le Roi vouloit faire juger cette affaire dans fon Confeil. C'est quoi l'on dreffa un placet pour le préfenter au Roi au nom de la Mere Agnès ; & celle-ci écrivit d'abord une lettre très-refpectueuse à M. Colbert pour le prier d'être favorable à la Communauté. Le placet ne fut pas reçu du Roi comme on l'auroit fouhaité. S. M. déclara qu'elle vouloit la féparation des deux Maifons, & nomma des Commiffaires pour avifer aux moyens de l'exécuter. La Mere Abbeffe de Ligny avoit écrit auparavant à M. le Tellier & à M. de Lionne pour les remercier des bons offices qu'on pouvoit fuppofer qu'ils avoient rendus à la Maison, & pour les enga

ger

à mots couverts à lui accorder leur protection dans ce qui reftoit à faire. Les Commiffaires nommés par le Roi étoient M. le Chancelier & Mrs le Tellier, de Lionne, Colbert > Villeroi, d'Aligre, de Seve, Poncet, Boucherat & Puffort. Čelui-ci étoit rapporteur, homme droit & affez bien intentionné pour P. R.

On confeilla aux Religieufes de faire fecrettement une oppofition en Cour de Rome tous les changemens qu'on y propoferoit au fujet de P. R. furtout à l'expédition d'aucunes Bulles, parce qu'il avoit couru une rumeur que la Soeur Dorothée pourroit bien permuter fon Abbaye avec quelque autre Abbeffe, afin de laiffer les Religieufes des Champs en procès avec une étrangere. Les Commiffaires tinrent leur premiére affemblée le 3. Avril les fentimens fe trouvérent longtems partagés : des Confeillers non prévenus contre P. R. des

:

la

Champs cherchoient à temporifer, tels que Mrs le Tellier, de Lionne & Puffort. M. Hilaire Piet étoit l'agent de cette affaire pour les Religieufes, comme de toutes les autres qu'elles avoient eues par le passé ; & il les fervoit avec un zéle & un courage non communs. Il mit M. Puffort au fait de tout; il contredit avec lumiére des mémoires & des piéces préfentées au Confeil par le Docteur Chamillard; il découvrit les faux & les doubles emplois de la Soeur Dorothée, & refuta les prétentions artificieufes de cette fille, telle que celle-ci : Elle conteftoit des rembourfemens faits par Maison des Champs, comme faits mal à propos, & jufqu'à la concurrence, difoit-elle, de deux cent foixante mille livres, & elle vouloit faire prendre cette fomme à la Maifon des Champs pour tenir lieu de partie des fonds qui lui feroient adjugés par le partage. La vérité eft, qu'on avoit amorti plufieurs penfions qu'on faifoit à Mrs Arnauld, de Sacy, Floriot, &c. & qu'on les avoit remboursés des fonds qu'ils avoient autrefois mis à rente fur la maifon de P. R. Le 24. Avril les Religieufes fignérent un acte d'oppofition contre la féparation des deux Maifons & le partage des biens, pour en faire tel ufage qu'il conviendroit & qu'il feroit poffible d'en faire.

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Plufieurs

Elles eurent dans ce même tems la confolation de recevoir les trois Sœurs de Paris qui Soeurs de Paris étoient repentantes de leur fignature, Melthilde viennent troudu Foffé, Euphrofine de Creil, & Marie-Ai- ver leurs Memée Buzanval. Melthilde eft celle qui après res aux avoir figné & rétracté fa fignature, figna de Champs nouveau, & enfin fit une feconde rétractation. Soeur MelthilEuphrofine étoit une des fept premiéres qui de du Foflé. fignérent dans la maifon de Paris. Elle s'en

en

tre autres la

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