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repentit quelque tems après & fit fur un papier fa rétractation. Elle ne voulut pas cependant fe déclarer pendant plufieurs années. Elle le fit en 1670. par un autre papier qu'elle mit entre les mains de fes Supérieures. Marie-Aimée en fit autant la même année 1670. Je m'arrêterai ici fur l'article de la Sour Melthilde pour rapporter la conduite qu'elle tint à P. R. de Paris où elle demeura fix mois avec les Sœurs fchifmatiques. C'eft elle-même qui en a fait la Relation. Losfqu'elle fut ramenée du lieu de fon exil, elle fut très-affligée de fe trouver avec des filles pour lefquelles elle n'avoit ni affection ni eftime. Elle fe lia feulement avec da Sœur Euphrófine de Creil & la Sœur Aimée Buzanval, qui malgré leur fignature confervoient toujours une grande amitié pour les Meres. Lorfqu'il fut queftion de l'élection de la Sœur Dorothée pour Abbeffe, elle lui donna fa voix par ce motif particulier, qu'elle craignoit qu'on ne fit venir une Abbeffe étrangere, ce qui auroit fermé la porte pour toujours au retour des Meres à P. R. de Paris. La Sœur Dorothée & la Sour Flavie tâchoient de la gagner par toute forte de moyens. Elles réuffirent du moins à la faire concourir à la réception des nouvelles profeffes que fit la Sœur Dorothée éluë Abbeffe en 1665. Elle eut auffi la foibleffe en 1668. de figner une lettre commune à M. l'Archevêque pour le prier d'obtenir du Roi que la Sœur Dorothée eût la nomination de S. M. & devint Abbeffe perpétuelle. Cependant la Sœur Melthilde & fes compagnes étoient fort obfervées par les fchifmatiques, parce qu'on fe doutoit qu'elles avoient communication au dehors. Mais on ignoroit que parmi les Confeffeurs qui ve

noient à la maison il y en avoit qui autorifoient ces Sœurs dans leur attachement aux Meres, & dans leur conduite à l'égard des fchifmatiques. Lorfque l'on commença en 1668. à parler de la paix de l'Eglife, ces trois Sœurs en eurent une grande joie, parce qu'elles croyoient entrevoir le rappel des Meres à Paris ; & depuis ce tems-là elles fe déclarérent bien résolument fur l'intrufion de la Sour Dorothée, & dirent qu'elles ne la reconnoitroient jamais pour Abbeffe. Les Bulles de Rome arrivérent alors, & la Sœur Dorothée prit poffeffion folemnelle de l'Abbaye. La Sœur Melthilde & les deux autres refuférent conftaniment d'y affifter. Depuis ce tems-là elles furent encore plus foigneufement obfervées pour les communications au dehors. La Sœur Melthilde qui étoit Sacriftine, fut ôtée de la Sacriftie. On vifita fecrettement fon pupitre ou fa caffette pour fouiller dans fes papiers: mais on ne trouva rien; elle y avoit mis ordre. En 1670. des amis leur confeillérent d'écrire à M. l'Archevêque pour lui demander d'être envoyées à P. R. des Champs avec les Meres. Ce n'eft pas qu'elles euffent encore aucun fcrupule fur leur fignature, mais c'est qu'elies ne pouvoient plus fupporter le dérangement de la Maifon de Paris; & quoiqu'elles appréhendaflent quelques reproches des Meres fur leur fignature, elles aimoient mieux encore en courir les rifques que de faire un plus long fejour dans une Communauté aufli dérangée. Elles obtinrent de M. l'Archevêque leur renvoi, à P.R.D. C. & y furent conduites. Les Meres les reçurent avec beaucoup d'amitié,& elles de leur côté marquérent une grande joie de fe voir réunies à elles. Elles demandérent pardon à la

Communauté des fautes qu'elles avoient faites en fe féparant d'elles & en prenant part à l'élection de la Sœur Dorothée; mais elles ne dirent mot de leur fignature. La Sœur Melthilde avoit prié la Mere Agnès de ne lui en point parler. On fit ce qu'elle fouhaitoit. Peu à peu elle eut quelque fcrupule ; tantôt c'étoit une petite parole à mots couverts que lui lâchoit la Sœur Angélique de S. Jean, une autrefois c'étoit une lecture de piété qu'elle entendoit ; elle s'adreffoit auffi à M. de Sacy qui entretenoit l'inquiétude de fa confcience à ce fujet. Enfin elle ouvrit les yeux & demanda à la Mere Agnès ce qu'elle avoit à faire. La Mere lui dit qu'il falloit faire une nouvelle rétractation par écrit, & dépofer l'écrit en mains sûres. Ce qu'elle fit le 26. Mars 1670. Elle a perfévéré dans la bonne voie où elle étoit rentrée, pendant 26. ans entiers, depuis 1670. jufqu'en 1696. qu'elle mourut bien éprouvée par une terrible infirmité. Dieu lui envoya une paralyfie qui s'étendit fur tous fes membres les uns après les autres: enforte qu'elle ne pouvoit plus fe rendre aucun fervice abfolument. Il falloit qu'on la remuât dans fon lit, ne pouvant pas changer de place par elle-même, non pas même fe fecourir de fes mains pour chaffer les mouches qui l'incommodoient au vifage. Elle fouffrit toutes ces peines avec une grande patience, & reçut auffi de fes Sœurs toutes les marques poffibles de la plus tendre charité. On obfervera que la Sœur Melthilde en 1690. étoit dans les premiéres charges. Dans l'acte qui fut fait pour la guérison miraculeufe de la Sœur Gertrude du Valois en cette année, on trouve fa fignature, & elle figne comme Sous-prieure. C'est la preuve de

ce que j'ai avancé, que jufqu'à la fin de fa vie elle ne s'étoit point démentie.

Revenons à la rentrée de la Sœur Melthilde & de fes deux compagnes dans la Communauté de P. R. des Champs. La joie de la maison ne fut pas la même, forfque le mois suivant on y amena de la part de l'Archevêché deux autres Soeurs pour y demeurer auffi, fçavoir, une Sœur Blandine & une Sœur Marthe. Les Religieufes des Champs avoient demandé une Sœur Nicole; & celle-ci en effet avoit fon obédience deM.l'Archevêque. Elles furent donc fort furprifes lorfqu'elles virent qu'on ne l'amenoit point, & qu'on préfentoit à fa place la Sœur Blandine dont elles ne vouloient point parce qu'elle étoit abfolument livrée au parti de la Sœur Dorothée. Elles prirent la réfolution de ne la point recevoir & de lui refufer l'entrée tout net. L'Eccléfiaftique qui la préfentoit eut beau montrer fon obedience qui n'étoit que d'un Grand-Vicaire, elle-même eut beau pleurer & protefter de fon changement, les Meres tinrent ferme ; & ayant fait figne à l'autre qu'elles agréoient, de fortir doucement hors du parloir & de s'en aller à la porte du Couvent, elles la firent entrer. Pour la Soeur Blandine, après bien des résistances de fa part, on la fit monter par force dans le caroffe qui l'avoit amenée, pour la reconduire à Paris.

IV.

Opérations

Dans les premiers jours de Mai M. Puffort, Rapporteur nommé par le Confeil, écouta la des CommifSoeur Dorothée à P. R. de Paris fur l'article faires du Condes faux emplois dont elle étoit accufée. Elle feil & conduifatisfit pas M. le Rapporteur, fe défenditte de l'Archefort mal & demanda fix femaines pour éclair- vêque au fujer de la fépara cir tous ces articles. M. Chamillard fe joignit tion.

ne

à elle & appuya fa demande. Mais M. Puffort refufa les délais demandés, & dit qu'il alloit rendre compte au Roi de l'état où en étoient les chofes & lui préfenter le projet d'Arrêt. 11 n'eut pas plus d'égard à ce que le même M. Chamillard & lad. Sœur demandoient encore, fçavoir, que l'Arrêt n'ordonnât pour le présent que la féparation des deux. Maifons, & que la partition des biens fût remife à des arbitres qui feroient à loifir l'eftimation des fonds. L'intention de la Sœur Dorothée étoit de gagner du tems pour imaginer des dépenfes extraordinaires qui confommeroient un dépôt de 15000. liv. qui étoit chez un Notaire, & de fe faire adjuger par le crédit de fes amis deux Fermes voifines de la maifon des Champs, le petit P. R. & Champ-garnier, qu'elle fouhaitoit avoir dans fon lot, pour fe conferver encore un pied dans cette Maifon. Le Sr Hilaire. menoit toute cette affaire habilement auprès de M. Puffort, aidé d'ailleurs des confeils d'amis refpectables, de M. le Nain entre autres. M. Puffort de fon côté fentoit fort bien tant la mauvaise foi des filles de Paris, que la droiture de celles des Champs. Les affaires néanmoins ne tournérent pas en tout point aufsi. bien qu'on l'auroit fouhaité.

Cependant l'Archevêque jouoit fon perfonordinaire. Il affectoit de ne point tremper nage dans toutes les manœuvres de la Communauté de Paris. Il avoit fait faire à Madame de Longueville une propofition, d'envoyer à P. R. des Champs les Soeurs de Paris avec dix mille livres de revenus qu'on leur affureroit, & de. ramener celles des Champs à Paris. C'étoit un tour d'adreffe, pour fe débarraffer des follicitations de M. le Prince dont il a été fait

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