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phent bien haut. Ceci eft à obferver; car il eft vifible que c'eft ce qui influa beaucoup dans la nouvelle perfécution de P. R. tant parce que les Moliniftes étoient fort mécontens de ce Décret qu'ils prétendoient avoir été obtenu à Rome par le crédit fourd des Janféniftes, que parce qu'il finit par une difpofition qui eft très-favorable à ceux-ci, par laquelle le Pape défend de fe traiter réciproquement avec les termes odieux de parti, touchant les conteftations qui exiftent dans l'Eglife, jusqu'à ce que le faint Siége ait difcuté & jugé ces matiéres.

La Mere Abbeffe ayant été appellée viat au parloir. L'Archevêque lui répéta ce qu'il venoit de lui faire dire par M. de Saci que le Roi défendoit qu'on reçût des novices jufqu'à ce que le nombre des Religieufes fut réduit à Jo. profefles de Chaur, & qu'il ordonnoit de renvoyer les poftulantes qui étoient actuelle ment dans la maifon ; que de plus fa Majefté youloit qu'on congédiât toutes les penfionnaires, & qu'on n'en reçût point de nouvelles. Comme la Mere marqua fon étonnement fur de pareils ordres, le Prélat lui dit qu'après tout c'étoit l'efprit des Canons qui défendent de recevoir dans les Monaftéres de filles un plus grand nombre de Religieufes que la fondation. n'en pouvoit porter. L'Abbelle lui répondit que le Roi lui-même avoit jugé en 1669. que la Maifon pouvoit porter le nombre de 72. puifqu'elles étoient précisément 72. lorfque fa Majefté fit le partage des deux Maifons, & que ce fut fur ce nombre qu'il fe régla pour déterminer la portion des revenus qui feroit affignée à ce Monaftére des Champs : que d'ailleurs il ne paroiffoit pas que le motif qu'on fa

propofoit fut de foulager la Communauté comme étant trop chargée, puifqu'on ajou toit aux premiers ordres celui de renvoyer les penfionnaires ; ce qui ôtoit à la maifon un moyen de s'aider à fubfifter, fi elle avoit en trop peu de bien. L'Archevêque n'eut point de bonnes raifons à donner; il fe contenta de dire qu'il n'étoit que porteur des ordres de la Cour, & de témoigner que cela l'affligcoit & qu'il étoit réellement touché de compaffion pour la Communauté qu'il aimoit & qu'il confidéroit fort. L'Abbeffe le fupplia de vouloir bien fe charger de folliciter auprès du Roi quelque indulgence, & de préfenter à faMajefté un Mémoire qu'on remettroit entre les mains. Il promit de le faire. Elle tita même de sa bouche, que trois poftulantes qui étoient précédemment reçues & dont le Chapitre étoit tenu, ne feroient point comprifes dans l'ordre de renvoyer les poftulantes, & qu'elles pour Fojent prendre l'habit.

XXV.

renvoi.

Pour confoler, ou plutôt pour amuser les Religieufes, l'Archevêque déclara que cet or Piétextes ou dre n'étoit point particulier pour P. R. & que raisons de ce l'intention de fa Majesté étoit de fixer au nombre de so. Religieufes toutes les Communautés de fon Royaume. En finiffant il s'épuifa en éloges de la vertu des Religieufes, de l'excellente éducation qu'elles donnoient aux enfans, de la fcience & du mérite des Meffieurs amis de P. R. Mais il s'ouvrit bien franchement fur le compte de ces derniers & dit que le Roi étoit las d'entendre fouvent parler de Meffieurs de P. R. A quoi bon en effet toujours dire, Meffieurs de P. R.... Ces Meffieurs,.... & toujours, ces Meffieurs, que cela fentoit le Falliment (terme favori qu'il répéta huit ou dix

fois dans cette converfation) que fa Majefté étoit d'ailleurs très-mécontente d'une lettre que les Evêques avoient écrite en commun au Pape depuis peu, pour folliciter la cenfure des 65. propofitions de la Morale relâchée, ( elle avoit été composée par M. Nicole pour Mrs d'Arras & de St-Pons ) qu'en un mot tout cela concouroit à faire du bruit, & que le Roi vouloit y mettre fin. Il demanda enfuite à voir Mademoiselle de Vertus, qu'il affura n'être point comprife dans l'ordre de la Cour, & qu'elle avoit toute liberté de demeurer.

Au fortir du parloir il fit appeller M. de Saci, à qui il donna encore des démonftrations toutes particuliéres d'eftime & d'amitié, telles en un mot que lui de Saci ne pouvoit point fe perfuader qu'il eût aucun mauvais deffein ni fur lui, ni fur les autres Eccléfiaftiques qui demeuroient à P. R. Il ne fut pas longtems dans cette agréable erreur. Comme il reconduifoit le Prélat à fon caroffe, celui-ci lui dit, en affectant une maniére gracieufe & comme de bonne amitié, que l'intention du Roi étoit auffi, que ni luini aucun de ces autres Eccléfiaftiques ne'aémeurât dans la maison & qu'il lui confeilloit de fe retirer au plûtôt. Il partit après ce gracieux adieu, n'ayant vu aucune autre perfonne du dehors que M. de Saci: le Prélat n'ayant point fait appeller aucun de ces Meffieurs, & eux ayant ignoré abfolument qu'il fut venu dans la Maison. Il a voulu cependant dans la fuite leur faire un crime de ce qu'ils n'avoient pas daigné le préfenter devant lui pour lui rendre leurs refpects. Les Meres penférent auffitôt après cette attaque à donner l'habit aux trois Poftulantes reçues; elles en écrivirent à M. le Curé de S.

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Benoît, qui n'ofa pas paffer outre fans parlèr à M. l'Archevêque, & celui-ci le refufa tout net. Ni la parole expreffe qu'il avoit donnée à l'Abbeffe & à Mademoiselle de Vertus ni les follicitations preffantes de plufieurs perfonnes de quelque confidération, entre autres de M. Iffali célébre Avocat, pere d'une des trois filles dont il s'agiffoit, ne produifirent rien. Le Prélat tint ferme pour le refus allégant qu'on avoit mal entendu, & qu'il avoit feulement confenti que deux Novices reçues fiffent profeffion.

On fit auffi des démarches auprès de lui en faveur des Penfionnaires. Le Préfident de Guedreville qui avoit fa fille en penfion à P. R. eut une conférence avec l'Archevêque. Il alla le voir, lui témoigna fa furprise de ce qui fe paffoit, le pria de lui dire s'il y avoit quelque défordre à P. R. qui l'eut obligé d'en venir à cette extrémité. Sur l'affurance que le Prélat lui donna de la conduite irréprochable de la Maison, & de la bonté de l'éducation qu'on y recevoit, le Magiftrat dit que c'eft ce qui ne faifoit qu'augmenter fon étonnement, parce qu'il n'étoit pas aifé de s'imaginer pourquoi l'on interdifoit l'éducation des enfans à une Communauté dont on témoignoit tant de fatisfaction, & qui réuffiffoit fi bien dans ce miniftére. » C'eft précisément d'où vient le mal, » dit l'Archevêque. Le mérite de ces filles leur donne trop de réputation : la penfion qu'elles >tiennent leur procure des connoiffances, même parmi les gens de condition : cela forme des >> amis qui s'uniffent avec ceux de cette Maifon, & qui font ensemble des pelotons & des liaifons que le Roi n'aime point, &qui peuvent être très-dangereufes pour la tranquil Y S

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XXVI.

Deux actes

lité de l'Etat. » Le Préfident fe récria, proteftant que cela étoit bien éloigné de l'efprit de cette Maifon : que pour lui, bien loin qu'on cût voulu cultiver fon amitié quand il avoit été à P. R. jamais aucun de ces Meffieurs ne lui avoit fait l'honneur de lui tenir la moindre conversation. L'Archevêque ne fut pas sans replique. Il dit que trois raifons donnoient lieu à la Cour de craindre de ce côté-là : que 1o. ces Meffieurs entretenoient un commerce avec les étrangers de tout pays; que 2°. il y avoit à P. R. de quoi loger 200. perfonnes; 3°. que le grand nombre de perfonnes retirées tant au dedans qu'au déhors ne pouvoient pas vivre certainement des revenus de l'Abbaye qui étoient modiques : qu'ainfi il y avoit lieu de conjecturer qu'ils vivoient des affiftances qu'ils recevoient de leurs amis, & que le Roi craignoit qu'on ne pût fe fervir de ces mêmes aumônes dans des occafions & pour des affaires qui ne lui plairoient point. Cette politique rafinée étoit toute du crû de M. l'Archevêque felon les apparences, ou bien il la tenoit des ennemis bien connus de la Maison, qui cherchoient ainfi à amuser le public & à abuser la Cour.

Les Religieufes de P. R. de leur côté firent. le lendemain deux actes au fujet de la trifte faits par les conjoncture. Le premier fut une Requête Religieufes à adreffée à Jefus-Chrift le grand Pafteur des ce sujet.

ames, qu'elles mirent entre les mains d'une Sœur qui venoit de mourir & qu'elles enfévelirent avec elle dans fa foffe. Les Suppliantes représentent à Jesus-Chrift l'injuftice du traite ment que les hommes exercent envers elles en: haine de la vérité. Elles implorent fon affi

tance pour pouvoir demeurer fermes dans

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