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les Eccléfiaftiques de M. de Péréfixe. » Voilà, ajoute-t'elle, comment il nous a fait célé»brer la Paffion, non pas en la prêchant, mais >> en la renouvellant. Elle finiffoit fa lettre en priant le Curé de voir M. l'Archevêque, & de lui repréfenter qu'il n'étoit plus poffible après un tel fcandale, que le Sieur Poligné reftât dans la Maison, & qu'elle étoit même refolue, à ne point le laifler prêcher le jour de Pâques, comme il s'y attendoit. En effet il avoit indifpofé & au dehors & au dedans tous ceux & celles qui ne l'avoient point connu jufques-là pour ce qu'il étoit. M. l'Hermite fon confrere ne lui avoit point diffimulé combien il improuvoit fon procédé, & perfonne ne vouloit plus abfolument fe confeffer à lui. M. l'Hermite de fon côté déclaroit qu'il ne vouloit plus demeurer avec lui.

La Mere ayant reçu le Samedi-Saint au foir fa réponse de M. le Curé de faint Benoît qui approuvoit qu'on ne laiffât point prêcher led. Sieur à Pâques, lui fit donner par le Sacriftain le jour de Pâques dans la matinée un petit billet qui portoit que la Cominunauté `ne s'attendoit point à un Sermon l'après-midi : que les Anges & Jefus-Chrift parlant aux femmes dans ce mystére, les Sœurs tâcheroient de fejoindre à elles pour l'écouter. Le Prédicateur ne voulut point perdre fon apprêt, & dit abfolument qu'il prêcheroit, qu'il ne prenoit point fes ordres des filles, qu'il fçavoit ce qu'il avoit à faire. La Mere appréhendant quelque fuite fâcheufe, fi elle tenoit ferme dans cette rencontre, pria les Sœurs qui n'y auroient pas trop de répugnance, d'affifter à la prédication. Le Sermon fut monté fur le même ton que celui du Vendredi-Saint ; mais

c'étoit une confufion d'idées & un défordre qui annonçoit un homme tout hors de lui. On prit patience, & on écrivit de nouveau à M. le Curé de faint Benoît, à qui on envoya de longs extraits des deux Sermons pour les montrer à M. l'Archevêque. Le Sieur Poligné le Lundi de Pâques partit pour Paris fans prendre congé des Meres ; il alla voir le Curé de faint Benoît avec qui il ne s'expliqua pas beaucoup, & enfuite M. l'Archevêque qui ne put l'approuver. Ainfi M. le Curé obtint aifément du Prélat le renvoi dud. Eccléfiaftique. Il retourna le 6. de Mai pour prendre fes hardes, & ne parla qu'à Mademoiselle de Vertus, difant qu'il n'ofoit point demander la Mere Abbeffe. Il ne voulut pas même dîner à la Maison.

V.

fe firent à P.

Le 26. Mai, les deux Novices qui reftoient Réflexions firent profeffion : c'étoit la Sœur Benoife & la fur quelques Sœur le Juge. Celle-ci étoit niéce de M. Hallé profettionsqui Chanoine de Beauvais. M. l'Archevêque dif- R. dans le féroit depuis quelque tems d'en donner la tems de la permiffion, quoiqu'il eût bien déclaré dès le perfécution. commencement que les ordres du Roi ne comprenoient point les Novices. Il l'accorda néanmoins. On fera peut-être étonné & de la réfolution de ces filles, qui ofent s'engager, non pas à la veille, mais dans le feu même de la perfécution, & du procédé des Meres, qui ne craignent point d'expofer à la plus grande tentation qui puiffe fe trouver dans la vie, deux jeunes filles qu'elles reçoivent à la profeffion. S'il m'eft permis d'exprimer librement ma pensée, je dirai que ce qui s'est fait alors, ne me paroîtroit pas bon à imiter communément, ni à faire régle pour d'autres. Je pense d'un autre côté que nous ne devons pas

VI.

Deux lettres

de la Mere

facilement prononcer contre des perfonnes auffi remplies de l'efprit de Dieu qu'étoient ces Meres. On voit d'abord qu'elles ont fatisfait à ce que prefcrit la difcrétion, ayant eu grand foin de ne point diffimuler à ces deux jeunes filles l'état préfent des chofes, & tout ce qu'il y avoit de danger pour l'avenir. Elles avoient auffi recommandé fpécialement l'affaire aux priéres de la Communauté pendant tout le tems du délai de la profeffion. Ainfi les reproches qu'on pourroit leur faire se réduiroient à n'avoir pas refufé la profeffion aux deux Novices. Mais auroient-elles pu le faire fans une espéce d'injuftice; ces jeunes filles y ayant un droit acquis par leur admission une fois faite en chapitre: Quant à celles-ci, il eft vrai que la démarche eft hardie, & que perfonne peut-être n'auroit ofé la leur confeiller. Mais fìlaiflées à elles-mêmes & à leur confcience elles perfiftent dans leur réfolution; fi bien pourvues des bonnes qualités requifes dans une Religieufe, & en même tems bien informées de tous les rifques qu'elles courent, elles ne peuvent pas vaincre l'attrait puiflant qui les porte à faire le facrifice, il semble qu'on ne peut pas les condamner comme coupables du péché de tenter Dieu, puisqu'après tout la protection qu'elles fe promettent que Dieu leur accordera dans l'occafion des épreuves, n'eft point dans l'ordre des chofes miraculeuses,mais dans l'ordre commun de la grace qui foutient les bonnes ames contre les ennemis de leur falut.

Revenons à la fuite de l'Hiftoire. M. le Curé de S. Benoît vint à P. P. aux Rogations, & Angélique à y féjourna jufqu'au huit de Juillet. On fait M. l'Archevê que l'Eglife de S. Benoît étant deflervie par

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Chapitre de Chanoines, le Curé eft plus libre de s'abfenter que dans une paroiffe ordinaire. Ce fut lui qui officia à toutes les Fêtes & à plufieurs fervices ou enterremens qui fe rencontrérent, mais furtout à la proceffion de la Fête-Dieu. H y porta le S. Sacrement. Car il faut fçavoir que l'ufage étoit établi à P. R. lequel fubfifte encore à préfent dans la Maison de Paris, que la proceffion du S. Sacrement fe fit au dedans, enforte que les Eccléfiaftiques y entroient, & même les féculiers pour le tems de la cérémonie. Lorfque le Curé s'en retourna à Paris, la Mere Abbefle lui mit en main une lettre pour M. l'Archevêque que je tranfcrirai toute entiere, parce qu'elle m'a paru le mériter pour fa beauté. C'eft une fupplique réitérée pour le rétabliffement de la Communauté dans fes droits. C'eft une chose admirable de voir la Mere Angélique demander fi fouvent la même chofe, & le faire toujours d'une manière tou

te neuve.

»Monfeigneur, Je ne prendrois pas la li>>berté de vous interrompre de tant de grandes » Occupations inféparables de votre charge, fi sje ne fçavois que M. Grenet qui veut bien » vous préfenter cette lettre, vous doit parler de nous; & que comme nous fommes une petite partie de votre troupeau, vous facri fierez, Monfeigneur, quelques momens de » votre application dans le tems qu'il aura » l'honneur de vous entretenir, pour vous in

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former par lui de l'état de cette Communau» té. Le féjour qu'il a fait ici, lui en a donné >> une entiere connoiffance, & je ne doute pas, Monfeigneur, qu'il ne vous témoigne com» bien il m'a trouvée fenfible à la reconnoiffance que nous devons avoir des marques Tome II.

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que vous nous avez données de votre équité > en deux occafions confidérables. Permetteznous, Monfeigneur, de regarder ces premiéres graces comme quelques gouttes d'eau qui tombent du Ciel fur une terre altérée, & qui lui font efpérer après une longue féchereffe une pluie qui lui rendra la fécondité & » l'abondance. Votre parole, Monfeigneur

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auroit ce pouvoir; elle a fermé les nuées, 55 elle peut les rouvrir. Mais de notre part tout » le mérite que nous ofons prétendre vient de »notre filence, puisqu'il eft un effet de notre foumiffion. Vous nous fites fçavoir, Monfeigneur, lorfqu'on vous fit voir la Requête que nous avions deffein de présenter, qu'il n'étoit pas encore le tems de parler; & nous nous fommes tus fort religieufement jufqu'ici. Mais, Monfeigneur, oferions> nous vous demander jufqu'à quand ? Nous fommes fi peu de chofe, qu'il eft aifé qu'on nous oublie toujours, fi nous ne parlons jamais. Ne feroit-il pas permis de vous expofer qu'il y a longtems que nous fouffrons ? පා Dieu nous accorde bien la liberté de nous en plaindre à lui-même & nous le faifons fouvent, parce qu'il ne s'importune point par nos larmes. Auffi n'ont-elles pas pour ob>> jet des biens temporels qu'on ne doit ni aimer ni regretter, mais les ames que Jelus>> Christ a tant aimées, & qu'il veut que nous >> aimions. Il demande des Pafteurs, à qui il

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en commet la conduite, qu'ils l'aiment plus » que les autres. Ainfi, Monseigneur, nous » devons préfumer que le rang où il vous a mis » vous obligeant de l'aimer davantage, vous

entrerez auffi plus avant dans les fentimens » de tendreffe qu'il a pour fes brebis, dont

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