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XIII.

ne devoit être publié que quinze jours après.
C'étoit un Jubilé extraordinaire pour deman-
der la protection du Ciel contre les Turcs. M.
de Saci paffa cinq jours à P. R. & revint à
Pomponne avec M. de Luzanci & Madame
Hippolite, qui l'avoient accompagné dans ce
petit voyage.

M. le Tourneux étant allé voir M. l'Ar

Trois Reli- chevêque dans la femaine de Pâques pour lui gieufes de rendre compte de fa miffion à P. R. fit une bonLieffe reçues à ne œuvre par occafion. Il y avoit de la diviF.R. fion à la maifon de Lieffe, & il paroifsoit qu'on

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feroit obligé à la fin d'en retirer quelques
Sœurs & de les envoyer ailleurs. M. le Tour-
neux qui en connoiffoit deux, demanda à M.
l'Archevêque permiffion d'aller les confeffer :
il ajouta qu'il lui étoit venu en penfée de pro-
pofer à P. R. d'en recevoir trois, dont deux y
avoient été autrefois, & y avoient eu une Sœur
Religieufe, qui étoit la derniere morte, fille de
grande réputation pour la fainteté. Le Prélat
confentit à tout. M. le Tourneux en écrivit fur
le champ à la Mere Abbeffe. Celle-ci affembla
fa Communauté à qui elle proposa la chose.
La bonne œuvre fut acceptée de bon cœur, &
on témoigna même être difpofé à recevoir tou-
tes celles de Lieffe qui feroient obligées de
fortir. Cinq jours après, M. le Tourneux ar-
riva avec Madame de Fontpertuis & les troisRe-
ligieufes de Lietle ; favoir, la Mere du Pile
& les Sœurs Marcelline & Catherine Wallon,
dans un caroffe loué aux dépens de M. l'Ar-
chevêque.

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Cette année 1682. fut très-fâcheufe. L'Eté fut fi pluvieux que prefque tous les biens de La terre furent gâtés. Les pluies continuelles avoient commencé à la fin de Juin par une ef

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pèce de déluge qui dura dans fa force une heure entiere. Tout fut inondé à P. R. Il y eut de grands murs renverfés, des arbres déraci-, nés; le jardin fut couvert d'un pied & demi de fable; le poiffon de l'étang fe perdit dans les prés, où on le ramaffoit après l'écoulement des eaux. Au village de S. Lambert les lits & les huches nageoient fur l'eau: les moulins furent renversés. Mais ce qu'il y a de fingulier, c'eft que cinq femaines auparavant le 12. Mai, il s'étoit fait un tremblement de terre qui avoit duré la longueur d'un Miferere vers les deux heures après minuit. Ailleurs on lereffentit plufieurs fois dans l'efpace d'un mois, & il y arriva bien des malheurs: il y eut des collines déplacées, des abyfines creufés, des maifons englouties, des clochers renversés. Les Religieufes de P. R. firent alors des prieres extraordinaires: pendant plus de quatre mois, elles firent des proceffions de pénitence à toutes les fêtes des Saints un peu confidérables qui fe rencontroient.

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XIV.

Reliques de

S. Bernard

po ées à P.R.

Ce fut dans cette année que le célébre Poëte M. Sauteuil Chanoine régulier de faint Victor, fit connoiffance avec la Maifon de P R. Il l'a bien cultivée. Car depuis ce tems-l.. PA des Reliil y venoit très-fouvent & y paffoit plufieurs gieux de Saint jours. L'occafion fut qu'il avoit à parler à M. Victor. le Tourneux, & qu'ayant fçu qu'il étoit à P. R. il l'y vint chercher. Après qu'il eut parlé d'affaires à M. le Tourneux, il lui demanda s'il ne pourroit point venir quelquefois à P. R. pour s'édifier. M. le Tourneux lui répondit qu'on n'aimoit point dans la maifon ces fortes de vifites, quand il n'y avoit point de néceffité; mais que s'il vouloit être le bien-venu, il le feroit affurément s'il faifoit la grace

aux Religieufes de leur faire voir la coule de S. Bernard qui fe conferve à S. Victor de Paris. Deux jours avant la fête de S. Bernard, le Prieur de S. Victor, M. de la Lane, accompagné de deux autres Chanoines réguliers de l'Abbaye, fçavoir M. Taconnet ancien Prieur & M. de Santeuil arriva à P. R. avec la précieuse Relique. Ils avoient eu foin avant que de partir, d'écrire à M. l'Archevêque pour l'informer de la démarche qu'ils faifoient, afir qu'il ne pût pas fe plaindre qu'on l'eût faite fans fa participation; mais ils n'attendirent point fa réponse pour partir.

La réception de la Relique fe fit avec une grande folemnité. Elle fut portée en proceffion dans le Cloître en arrivant. Après la proceffion le Prieur ouvrit la Châffe où il y avoit d'un côté la coule de S. Bernard, & de l'autre, le eilice, les gants & le peigne de S. Thomas de Cantorberi, qu'on fait avoir fait quelque féjour à S. Victor de Paris. Toutes ces Reliques furent bailées par toutes les Religieufes. Avant que de les refferrer, le Prieur offrir à la M. Abbeffe de couper quelque morceau de la couTe pour lui en faire préfent. Elle l'accepta avec grande joie. La Châffe fut enfuite déposée fuz une crédence dans le chœur. Le jour de la fête de S. Bernard, les Chanoines Victorins venus de Paris firent Prêtre, Diacre & fous-Diacre & le Prieur de S. Paul, dont le bénéfice est près de Chevreuse autre Victorin, fit Prê¬ tre affiftant. Le foir on fir une feconde proceffion avec la Châffe, avant que de la rendre & lorfqu'elle fut fortie de la clôture, on l'expola à la vue des gens du dehors pour fatis. faire leur piété. Le lendemain Mrs de S. Vi or reportérent la Châsse à Paris, après avoir

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laiffé un procès-verbal de tout ce qui s'étoit fait, & entre autre de la portion de la coule qui avoit été donnée à la Maison. Les quatre Chanoines réguliers & cinq témoins fignérent l'acte. Il ne manqua rien à la folemnité. Il y cut deux fermons. Le Pere Taconnet prêcha après les premieres Vêpres de la Fête, & M. d'Arnaudin le lendemain après les fecondes. Le Sermon du Pere Taconnet fe trouve écrit dans les Journaux parce qu'apparemment les Religieufes en avoient demandé copie. Il eft afforti à la cérémonie. L'Orateur fait valoir so l'union que la Providence a voulu qu'il y eût entre le monaftere de S. Victor & l'Ordre de Citeaux, par le choix qu'elle avoit fait dans les premiers tems de Guillaume de Cham peaux, Chanoine de S. Victor & depuis Evê que de Châlons, pour benir S. Bernard Ab»bé de Clairvaux, en la place de l'Evêque de Langres qui étoit mort alors. Il remarque que comme Melchifedech en béniffant Abra» ham, avoit béni dans fa perfonne tous les defcendans, fuivant la penfée de S. Paul; l'Evêque de Châlons de même avoit béni dans la perfonne de Bernard toute fa glorieufe poftérités de telle maniére cependant que celui qui bénit & ceux qui font bénis puifent toute la fainteté les uns & les autres dans » la même fource qui eft Jefus Chrift, dont la fainte onction découlant fur le Chef fe répand fur tout l'habillement, & defcend juffur les franges de la robe. Il ajoute que S. Bernard de fon côté conferva stoute fa vie s une étroite liaison, un refpect & une confiance filiale pour Guillaume; & qu'il témoigna toujours une grande affection aux Chanoines de S. Victor, dont il follicitą

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les intérêts auprès du S. Siége dans l'affaire du » Martyre du Bienheureux Thomas de S. Vic>> tor; & dans la maifon defquels il daigna lodans le féjour qu'il fit à Paris.

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Le Prédicateur fait enfuite une morale fur le S.habit (la Coule) qu'il eft venu offrir à leur » vénération : il dit que l'habit eft ce qu'il y a » de moindre dans ce qui refte des Saints ; que » c'est l'efprit de Dieu réfidant en eux qui fait la relique la plus précieufe; que faint « Bernard nous dit par cet habit extérieur qu'il a porté, que nous devons penfer à nous revêtir comme il l'a fait d'un autre habit qui eft l'efprit de Jefus. Chrift, induimini D. J. C. qu'en effet faint Bernard déclare qu'il lui >> importe peu d'être moine blanc ou noir, Bé» nédictin ou Chanoine régulier, & que foit » que nous foyons de Clugni ou de Cîtcaux, » ou d'entre les Clercs réguliers, nous devons

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tous nous réunir fous un feul habit qui eft » Jefus-Chrift: Sive ergo Cluniacenfes, five » Cirtercienfes, five Clerici Regulares, concurramus omnes pariter in unam tunicam. » Le Pere Taconnet dont nous venons d'entendre le Sermon, paroîtra dans la fuite à P.R.en qualité de Supérieur. Pour couronner toute cette fête, la Mere Angélique fit faire auffitôt après un pélerinage à Clairvaux, & chargea un bon Eccléfiaftique d'y dire la Meffe fur le tombeau de faint Bernard pour la maison de P. R. D'un autre côté elle fit demander à M. l'Archevêque par le Curé de faint Benoît, permiffion verbale d'honorer à l'avenir la Coule de faint Bernard: ce qui fut accordé le trois Octobre. Enfin une derniere fuite de cette cérémonie, fut que Poëte Santeuil prit goût à P. R. & s'habitua à y venir fréquemment.

le

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