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nos peres, & nous ne devons jamais les offenfer... Ma mere a droit de me dire: Ne me bles-fez pas; mais mon pere n'a pas droit de me dire, Bleffez-la. Puis donc que je fuis dans la trifte néceffité de ne pouvoir fatisfaire l'un & l'autre, je fatisferai du moins la justice..... Ne bleffant ma mere en rien, je porterai toujours toute forte de refpect à la perfonne de mon pere; mais en même tems je ne témoignerai aucun refpect pour fon injuftice.

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XVI. Du difcernement de la vraie & fauffe humilité.

Ce n'eft pas d'aujourd'hui que les perfonnes p. 4les plus humbles ont été accufées d'orgueil...... Ce qui a pu donner lieu de porter un jugement fi déraifonnable, c'eft que l'humilité a quelque: chofe de grand & de relevé. Comme les orgueilleux, dont le propre eft de s'élever, ne faiffent pas fouvent de s'abbaiffer jufque contreterre, pour arriver à leurs fins; de même les: humbles, dont le propre eft de s'abbaisser, ne laiffent pas quelquefois même de s'élever audeffus de toutes les Puiffances... Mais ils ne font pas moins humbles en s'élevant, parcequ'ils le font felon les régles de la fageffe de Dieu, auquel ils ne font pas moins foumis dans leur plus grande élévation, que dans leurs plus profonds abbaiffemens..

Il y a un faint orgueil. & une humilité criminelle, dit S. Paulin.

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Les orgueilleux ne s'humilient fous l'iniqui- p. 8.. té, qu'à caufe qu'ils n'ont pas la force & le courage de lui réfifter..... Ce n'eft pas être humque d'être foible.... L'humilité ne peut être fans la vérité qui est sa mere... C'est être humBle que de perdre tout pour ne point perdre lan

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vérité... Humilions-nous, mais n'humilions'pas la vérité.

Nous accommodons l'humilité à nos incli nations corrompues. Quand il ne s'agit que des intérêts de Jesus-Chrift, nous la faifons confifter à accorder à nos Supérieurs tout ce qu'ils nous demandent : mais quand il s'agit du moin dre intérêt temporel de notre maifon, nous leur réfiftons par toutes les voies imaginables, fans avoir égard à leur autorité..... Nous avons l'affurance de dire que c'eft la crainte de Dieu qui nous fait faire un renversement fi criminel, & que c'eft par humilité que nous confentons à perdre la vérité ; afin de conferver un bien temporel fous prétexte qu'il eft le patrimoine des pauvres; mais en effet par un orgueil ou une avarice qui eft fans excufe devant Dieu.

XVII. De la véritable obéiffance.

Quand on me commande quelque chofe d'in jufte, je ne puis rendre un plus grand service à ceux qui me font un pareil commandement que de ne leur point obéir en cela, ... puifqu'ils auroient répondu dé ma perte: & ainfi je diminue, autant que je puis, les fuites de leur péché.

Dans les commandemens injuftes des hommes, c'eft à Dieu qu'il faut obéir, & non pas aux hommes..... L'obéiffance aux hommes fe roit en quelque forte plus criminelle que la dé-fobéiffance même, puifqu'en effet il eft plus pardonnable de ne pas faire quelque bien, que: de faire le mal.

Ce n'eft pas proprement obéir aux Miniftres de Jefus-Chrift, que de fe perdre. Comme ils font les Miniftres de notre falut, nous leurobéiffons, quand nous nous fauvons.

XVIII. De l'excommunication injufte. Comme la matiére eft importante & le traité très-lumineux, j'en ferai une courte analife.

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M. Hamon rapporte d'abord le beau paffage de faint Auguftin: » La Providence divine permet fouvent que les hommes, même vertueux, foient chaffés de la communion de l'Eglife, » par des troubles & des tumultes que des perfonnes charnelles excitent contre eux : ce qui arrive, afin qu'après avoir fouffert avec » une patience extraordinaire cette ignominie & cette injure pour conferver la paix de l'Eglife, fans vouloir y former quelque nouveau fchifme, ou quelque nouvelle héréfie, ils apprennent à tout le monde par leur exemple, combien nous devons fervir Dieu avec une affection véritable & une charité fincé» re. Le deffein de ces perfonnes dans ces rencontres eft, ou de retourner après que la » tempête fera paffée, ou, s'ils ne le peuvent faire, voyant qu'elle dure toujours, & appréhendant que leur retour n'excite les mê-mes troubles, ou encore de plus grands, de garder toujours la volonté de faire du bien: » à ceux-mêmes qui les ont chaflés par leurs » violences & par leurs cabales; & fans faire » aucune affemblée particuliére, de foutenir & de confirmer toujours par jufqu'à la mort, » la profeffion de leur créance, la foi qu'ils fçavent que l'on prêche dans l'Eglife Catholique. Ces perfonnes font couronnées en fe-»cret, par le Pere qui voit dans le fecret. »

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L'Auteur commente ce paffage. Il remarque que faint Auguftin demande 1°. une très-grandepatience. C'eft pourquoi il faut s'exercer à cette vertu dans les chofes communes, pour la pofféder dans les grandes ; fouffrir fans peine les..

13.

Pf. ro8.

repréhenfions de fes Supérieurs ; ne pas chercher fes aifes & fes commodités. Le débordement des eaux & la grande inondation, renverseront l'édifice de la patience qui ne fera pas bâti fur le fondement d'une mortification parfaite. 2°. Un grand attachement pour l'Eglife; grand défir d'y rentrer; tendre amour pour elle, quand on n'y rentreroit pas; lui rendre fervice en ce qu'on peut, par exemple, en confirmant sa foi par le témoignage qu'on lui rend. 30. L'amour des ennemis & des perfécuteurs. Le Démon fçait bien que ceux qu'il fait injuftement chaffer de l'Eglife, n'en font pas effectivement chaffés devant Dieu mais il fe fert de cette fauffe excommunication, afin qu'excitant dans leur cœur la vengeance, ils fe précipitent euxmêmes dans une plus grande excommunication, en ceffant d'aimer leurs ennemis. La juftice feule des perfonnes ne fuffit pas fans celle de la caufe: La juftice feule de la cause ne fuffit pas fans celle des perfonnes.

Il montre enfuite que ces excommunications injuftes, bien loin de nuire, attirent la bénédiction du Seigneur. Ils maudiront, & vous II. Corinth. Seigneur, vous bénirez. Nous ne pouvons rien contre la vérité, nous n'avons de pouvoir que pour la vérité. Balaam, tout méchant homme qu'il étoit, l'avoue: Il eft impoffible de maudire celui que Dieu ne maudit point; & lui-même à la fin, fe vit comme forcé à bénir le peuple qu'il étoit chargé par le Prince infidéle de maudire. Après ces premiéres réflexions, il prouve le danger qu'il y a à trop craindre l'excommunication injufte. Il dit qu'à la fin il pourroit arriver un très-grand mal, fi on s'accoutumoit ainfi à trembler à la feule vue de ce phantôme. On veut, pour nous ébranler, nous faire croire que nous offenfons Dieu, comme

Sennacherib penfoit intimider Ezéchias en luž foutenant qu'il avoit offensé fon Dieu, quand il avoit renversé les autels qui avoient été élevés, contre la défense de la loi, dans d'autres lieux que le Temple. Ezéchias n'avoit que fa confcience à confulter: il voyoit qu'il n'avoit rien à craindre, puifqu'il n'étoit pas coupable. On n'a rien à craindre quand l'excommunication ne tombe pas tant fur nous que fur J. C. comme il arrive, lorfqu'on ne condamne en nous que l'amour de la Vérité & de la juftice. C'eft J. C. qui eft perfécuté, quand on perfécute fes membres, de quelque maniére qu'on les perfécute: mais quand ce font fes dons qu'on perfécute en nous, c'eft doublement qu'on le perfécute.

Il apporte en exemple des piéges qu'on tend aux ames fimples, Job tenté par fa femme qui fui difoit: Bénis Dieu & meurs. Elle ne lui dit pas, Maudis le Seigneur, elle l'auroit révolté ; mais, bénis, dans l'efprit de cette femme fonifie maudis. De même on nous dira: C'est Du qui vous commande d'obéir, rendez gloire à Dieu en obéiffant : mais dans le fond cela veut dire, bleffez la Vérité & la Juftice. Les Saints doivent mettre leur innocence & leur humilité, auffi bien que Job, à fe croire innocens. Ce feroit abandonner la Vérité que de ne fe pas croire en affurance quand on la fuit.

Il obferve qu'il faudra toujours refpecter les perfonnes à l'exemple de faint Paul, qui outragé par un Pontife de la Synagoge, demeure dans le refpect, réfiftant à fon impiété.. L'injuftice & le menfonge font à rejetter jufques fur l'autel: les moindres veftiges de Jefus-Chrift font à honorer jufque fur la pous fére.

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