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Et ainsi les fidèles n'ont aucun prétexte de suivre ces relâchements qui ne leur sont offerts que par les mains étrangères de ces casuistes, au lieu de la saine doctrine qui leur est présentée par les mains paternelles de leurs propres pasteurs. Et les impies et les hérétiques n'ont aucun sujet de donner ces abus pour des marques du défaut de la providence de Dieu sur son Église, puisque l'Église étant proprement dans le corps de la hiérarchie, tant s'en faut qu'on puisse conclure de l'état présent des choses que Dieu l'ait abandonnée à la corruption, qu'il n'a jamais mieux paru qu'aujourd'hui que Dieu la défend visiblement de la corruption.

* Car, si quelques-uns de ces hommes qui par une vocation extraordinaire ont fait profession de sortir du monde et de prendre l'habit de religieux pour vivre dans un état plus parfait que le commun des chrétiens, sont tombés dans des égarements qui font horreur au commun des chrétiens et sont devenus entre nous ce que les faux prophètes étaient entre les Juifs, c'est un malheur particulier et personnel qu'il faut à la vérité déplorer, mais dont on ne peut rien conclure contre le soin que Dieu prend de son Église; puisque toutes ces choses sont si clairement prédites et qu'il a été annoncé depuis si longtemps que ces tentations s'élèveraient de la part de ces sortes de personnes; et que quand on est bien instruit on voit plutôt en cela des marques de la conduite de Dieu que de son oubli à notre égard.

XX. Vous ignorez les prophéties si vous ne savez 398

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que tout cela doit arriver. Princes, prophètes, pape et même les prêtres. Et néanmoins l'Église doit subsister. Par la grâce de Dieu nous n'en sommes pas là. Malheur à ces prêtres ! Mais nous espérons que Dieu nous fera la miséricorde que nous n'en serons point. 1 St Pierre. c. 2. Faux prophètes passés, image des futurs.

XXI. Ce qui nous gâte pour comparer ce qui s'est passé autrefois dans l'Eglise à ce qui s'y voit maintenant, c'est qu'ordinairement on regarde saint Athanase, sainte Thérèse et les autres, comme couronnés de gloire.........' et comme des dieux. A présent que le temps a éclairci les choses, cela paraît ainsi. Mais au temps où on le persécutait, ce grand saint était un homme qui s'appelait Athanase; et sainte Thérèse une fille. Elie était un homme comme nous, et sujet aux mêmes passions que nous, dit St Pierre 2 pour désabuser les chrétiens de cette fausse idée qui nous fait rejeter l'exemple des saints, comme disproportionné à notre état c'étaient des saints, disons-nous, ce n'est pas

comme nous.

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Que se passait-il donc alors? S' Athanase était un homme appelé Athanase, accusé de plusieurs crimes, condamné en tel et tel concile pour tel et tel crime. Tous les évêques y consentaient et le pape enfin. Que dit-on à ceux qui y résistent? Qu'ils troublent la paix, qu'ils font schisme, etc.

Nous remplaçons par ces points trois ou quatre mots illisibles. 2 Les paroles que Pascal attribue ici à Saint Pierre, sont de Saint

Jacques, ch. V. 17. Elias homo erat similis nobis passibilis.

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* Quatre sortes de personnes zèle sans science; science sans zèle; ni science, ni zèle; zèle et science. Les trois premiers le condamnent, et les derniers l'absolvent et sont excommuniés de l'Église et sauvent néanmoins l'Église. -Zèle, lumière.

RÉFLEXIONS

SUR LA MANIÈRE DONT ON ÉTAIT AUTREFOIS REÇU DANS L'ÉGLISE; COMME ON Y VIVAIT; COMME ON Y ENTRE ET COMME ON Y VIT AUJOURD'HUI '.

Dans les premiers temps les chrétiens étaient parfaitement instruits dans tous les points nécessaires au salut; au lieu que l'on voit aujourd'hui une ignorance si grossière qu'elle fait gémir tous ceux qui ont des sentiments de tendresse pour l'Église.

On n'entrait alors dans l'Église qu'après de grands travaux et de longs désirs on s'y trouve maintenant sans aucune peine, sans soin et sans travail.

On n'y était admis qu'après un examen très-exact. On y est reçu maintenant avant qu'on soit en état d'être examiné.

On n'y était reçu alors qu'après avoir abjuré sa vie passée, qu'après avoir renoncé au monde, et à la chair, et au diable.

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On y entre maintenant avant qu'on soit en état de faire aucune de ces choses.

Enfin il fallait autrefois sortir du monde pour être reçu dans l'Église au lieu qu'on entre aujourd'hui dans l'Église au même temps que dans le monde. On connaissait alors par ce procédé une distinction essentielle du monde d'avec l'Église.

On les considérait comme deux contraires, comme deux ennemis irréconciliables, dont l'un persécute l'autre sans discontinuation, et dont le plus faible en apparence doit un jour triompher du plus fort; en sorte que de ces deux partis contraires on quittait l'un pour entrer dans l'autre; on abandonnait les maximes de l'un pour embrasser les maximes de l'autre; on se dévêtait des sentiments de l'un pour se revêtir des sentiments de l'autre ; enfin on quittait, on renonçait, on abjurait le monde où l'on avait reçu sa première naissance, pour se vouer totalement à l'Église où l'on prenait comme sa seconde naissance; et ainsi on concevait une différence épouvantable entre l'un et l'autre; au lieu qu'on se trouve maintenant presque au même temps dans l'un et dans l'autre; et le même moment qui nous fait naître au monde nous fait renaître dans l'Église; de sorte que la raison survenant ne fait plus de distinction de ces deux mondes si contraires. Elle est élevée dans l'un et dans l'autre tout ensemble. On fréquente les sacrements, et on jouit des plaisirs du monde; et ainsi, au lieu qu'autrefois on voyait une distinction essentielle entre l'un et l'autre, on les voit maintenant confondus et mêlés, en sorte qu'on ne les discerne plus.

De là vient qu'on ne voyait autrefois entre les chrétiens que des personnes très-instruites; au lieu qu'elles sont maintenant dans une ignorance qui fait horreur; de là vient qu'autrefois ceux qui avaient été régénérés par le baptême et qui avaient quitté les vices du monde pour entrer dans la piété de l'Église, retombaient si rarement de l'Église dans le monde; au lieu qu'on ne voit maintenant rien de plus ordinaire que les vices du monde dans le cœur des chrétiens.

L'Eglise des saints se trouve toute souillée par le mélange des méchants; et ses enfants, qu'elle a conçus et nourris dès l'enfance dans son sein, sont ceux-là mêmes qui portent dans son cœur, c'est-à-dire jusqu'à la participation de ses plus augustes mystères, le plus cruel de ses ennemis, l'esprit du monde, l'esprit d'ambition, l'esprit de vengeance, l'esprit d'impureté, l'esprit de concupiscence et l'amour qu'elle a pour ses enfants l'oblige d'admettre jusque dans ses entrailles le plus cruel de ses persécuteurs.

Mais ce n'est pas l'Eglise à qui on doit imputer les malheurs qui ont suivi un changement de discipline si salutaire, car elle n'a pas changé d'esprit, quoiqu'elle ait changé de conduite. Ayant donc vu que la dilation du baptême laissait un grand nombre d'enfants dans la malédiction d'Adam, elle a voulu les délivrer de cette masse de perdition en précipitant le secours qu'elle leur donne; et cette bonne mère ne voit qu'avec un regret extrême que ce qu'elle a procuré pour le salut de ses enfants est devenu l'occasion de la perte des adultes.

Son véritable esprit est que ceux qu'elle retire dans

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