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« Le gouvernement de Sa Majesté a peine à croire qu'un gouvernement aussi désireux que celui de France s'est déclaré l'être, de respecter la tranquillité des États voisins et de maintenir la paix de l'Europe, puisse persister à vouloir accomplir un mariage qui menace la tranquillité de ces États d'un danger immédiat, et peut compromettre gravement la paix européenne.

« La manière dont ce mariage projeté a été arrangé, les vues politiques qu'il révèle relativement à l'avenir, les conséquences qu'il pourrait avoir, non-seulement pour les relations amicales entre la Grande-Bretagne et la France, mais aussi, dans beaucoup de cas qu'il est permis de supposer, pour la paix de l'Europe, toutes ces considérations engagent le gouvernement britannique à faire des représentations sérieuses contre ce projet, et à exprimer l'espoir fervent qu'il ne sera pas mis à exécution.

« Le gouvernement de Sa Majesté, désirant donner à cette communication la forme la plus amicale qui soit compatible avec une expression complète et authentique de ses sentiments, ne vous charge point d'incorporer dans une note la substance de la présente dépêche; mais je vous invite à vouloir bien en donner lecture à M. Guizot et à lui en envoyer officiellement copie.

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V

NOTE ADRESSÉE PAR L'AMBASSADEUR DE FRANCE A LA DIÈTE

ET AU SUNDERBUND

A SON EXC. M. LE PRÉSIDEnt de la dièTE EN SUISSE

« Le soussigné, ambassadeur de S. M. le roi des Français près la confédération suisse, a reçu l'ordre de son gouvernement de faire à S. Ex. M. le président de la diète suisse et à M. le président du conseil de guerre du Sunderbund la communication suivante : Le gouvernement du roi, animé du plus vif désir de voir toutes les parties de l'Europe continuer à jouir des bienfaits de la paix, inspiré par les sentiments les plus sincères d'amitié pour la nation suisse, et fidèle aux engagements que la France, comme l'une des puissances signataires du traité de Vienne de 1815, a contractés envers la confédération suisse, a vu avec le plus profond regret le commencement de la guerre civile entre les cantons qui composent cette confédération.

« Désirant faire ses efforts et employer ses bons offices dans le but d'aplanir les différends qui ont été la source de toutes ces hostilités, le gouvernement du roi s'est mis en communication à ce sujet avec les gouvernements d'Autriche, de la Grande-Bretagne, de Prusse et de Russie; et trouvant ces gouvernements animés des mêmes motifs, il a résolu, de concert avec ses alliés, de faire une offre collective de la médiation des cinq puissances, dans le but de rétablir la paix et la concorde entre les cantons dont se compose la confédération suisse. Le soussigné est, en conséquence, chargé d'offrir la médiation de la France pour cet objet, et conjointement avec celle des quatre autres puissances.

« Si, comme l'espère le gouvernement du roi, cette offre

est acceptée, une suspension immédiate des hostilités aura lieu entre les parties belligérantes, et continuera jusqu'à la conclusion définitive des négociations qui s'ensuivront,

<< Dans ce cas, il sera en outre nécessaire d'établir immédiatement une conférence composée d'un représentant de chacune des cinq puissances, d'un représentant de la diète, et d'un représentant du Sunderbund.

« La base sur laquelle on propose d'opérer une réconciliation entre la diète et le Sunderbund consiste à faire disparaître les griefs que met en avant chacune des parties. Ces griefs paraissent être, d'une part, l'établissement des jésuites en Suisse et la formation de la ligue séparée du Sunderbund; de l'autre, la crainte des agressions des corps francs, et le dessein attribué à la diète de détruire ou de violer la souveraineté séparée des différents cantons.

<< Voici donc les conditions que le gouvernement du roi proposerait pour le rétablissement de la paix en Suisse :

<< D'abord les sept cantons du Sunderbund s'adresseraient au Saint-Siége pour lui demander s'il ne convient pas, dans l'intérêt de la paix et de la religion, d'interdire à l'ordre des jésuites tout établissement sur le territoire de la confédération helvétique, sauf une juste et suffisante indemnité pour toutes les propriétés en terres et maisons qu'ils auraient à abandonner.

:

<< En second lieu, la diète, confirmant ses déclarations précédentes, prendrait l'engagement de ne porter aucune atteinte à l'indépendance et à la souveraineté des cantons, telle qu'elle est garantie par le pacte fédéral d'accorder à l'avenir une protection efficace aux cantons qui seraient menacés par une invasion des corps francs, et de n'admettre, s'il y a lieu, dans le pacte fédéral aucun article nouveau sans l'assentiment de tous les membres de la confédération.

<< Troisièmement, les sept cantons du Sunderbund dissoudraient alors formellement et réellement leur ligue séparée.

Quatrièmement, et enfin, dès que la question des jésuites

serait complétement résolue, ainsi qu'il est indiqué au paragraphe 1er, les deux parties licencieraient leurs forces respectives et reprendraient leur attitude ordinaire et pacifique.

« Le soussigné est chargé d'exprimer le vif espoir du gouvernement du roi que cette équitable proposition sera accueillie avec empressement par les deux parties belligérantes; il est chargé en outre de solliciter une prompte réponse de la diète.

« Le soussigné prie S. Ex. M. le président de la diète d'agréer l'assurance de sa haute considération.

Comte DE BOISLECOMTE, ambassadeur de France.

Båle, le 30 novembre 1847.

FIN DES NOTES ET DOCUMENTS HISTORIQUES

TABLE DES MATIÈRES

Livre treizième. — I. Solution définitive du différend hollando-belge.
Crise ministérielle. Difficultés nombreuses. Cabinet provisoire.

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