SCENE IL. GERONTE, LISETTE. GÉRONTE, sans voir Lisette. Ma foi, je tiendrai bon. Quand on est bien instruit, bien sûr d'avoir raison, Mais moi, je veux la paix, le bien et la justice : LISETTE. Quoi! sérieusement? GÉRONTE. Comment! tu m'écoutois? LISETTE. Tout naturellement. Mais n'est-ce point un rêve, une plaisanterie ? GÉRONTE. Qui m'en empêcheroit? je tiendrai ma promesse ; Que la donation, que je suis prêt à faire, N'aura lieu pour Chloé qu'en épousant Valere: Voilà mon dernier mot. LISETTE. Voilà parler, cela i GÉRONTE. Il n'est point de parti meilleur que celui-là. LISETTE. Assurément. GÉRONTE. C'étoit pour traiter cette affaire, Qu'Ariste vint ici la semaine derniere. La mere de Valere, entre tous ses amis, Et l'affaire sera finie incessamment; Je n'écouterai plus aucun avis contraire; Et ce soir au plus tard je les attends ici. Fort bien. LISETTE. GÉRONTE. Toujours plaider m'ennuie et me ruine; Des terres du futur cette terre est voisine, LISETTE, Rien n'est plus convenable. GÉRONTE. Et puis d'ailleurs, ma niece Ne me dédira point, je crois, de ma promesse, Ils se voyoient beaucoup, n'étant encor qu'enfants; LISETTE. Cela n'est pas douteux. GÉRONTE. Encore une raison Pour finir : j'aime fort ma terre, ma maison; Lui laisser mes projets. J'ai vu naître Valere : LISETTE. Rien de mieux: mais... GÉRONTE. Quoi, mais ? J'aime qu'on parle net. LISETTE. Tout cela seroit beau : mais cela n'est pas fait. Eh! pourquoi donc ? GERONTE. LISETTE. Pourquoi ? pour une bagatelle Qui fera tout manquer. Madame y consent-elle ? GÉRONTE. Qu'importe? ses conseils ne seront pas suivis. LISETTE. Ah! vous êtes bien fort, mais c'est loin de Florise: Elle n'a pour conseil que ce monsieur Cléon, Un mauvais cœur, un traître, enfin un homme horrible, Et pour qui votre goût m'est incompréhensible. GÉRONTE. Ah! te voilà toujours. On ne sait pas pourquoi Il te déplaît si fort. LISETTE. Oh! je le sais bien, moi. Toujours la calomnie en veut aux gens d'esprit. LISETTE, Mais je ne parle pas seulement de son style. Voilà le beau portrait qu'on m'a fait de son ame, |