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peuple et l'armée défilant en silence autour du tertre héroïque, le bénirent, en souhaitant la paix du ciel et de l'éternité, au héros qui avait pris rang parmi les martyrs du Seigneur.

Le métropolitain s'étant à son tour approché du tertre, prononça un discours aussi simple que touchant qui finissait par ces paroles: La Grèce entière reconnait dans Marc Botzaris, objet de ses regrets, son second Léonidas. Elle adopte sa famille; tel est le prix de ses services. Repose dans le sein du Seigneur, ame généreuse; que la terre te soit légère, aigle de la Selléide! Adieu, Botzaris, adieu, adieu! (1)

(1) Voici l'épitaphe composée en l'honneur de Marc Botzaris :

Κοιμήσου, Λεωνίδα,

Ο Μάρκος θριαμβεύει,

Η φήμη τῷ πομπεύει
Τὰς νίκας πανταχοῦ.
Μάρκος, οὗ τόδε μνῆμα !
Καὶ ἂν ἀνοίξης ὄμμα
Κράζε μὲ μέγα στόμα
Εὐρώπη! ἡ ἄλλας

Κ' εἰς τὸν δουλείας χρόνον
Καίτοι βαρβαρωμένη,
Ἀλλὰ πολλοὺς ἐμφαίνει
Καλλίονας ἐμοῦ.

Dors, ô Léonidas, Marc Botzaris triomphe; la renommée proclame partout ses victoires.

Voilà le tombeau de Botzaris! ah! si tu revenais à la lumière tu t'écrierais:

Europe! apprends que la Grèce, quoique trop long-temps esclave, sortant enfin de la barbarie, montre qu'elle possède des enfants plus braves que moi.

CHAPITRE VI.

Constantin Botzaris succède à son frère..

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Invasion des Turcs. - Dévastation de l'Étolie. · Retraite des Hellènes. - Les Turcs pénètrent dans la Doride;-sont repoussés. - Marche de Moustaï pacha. — Il est rejoint par Omer Brionès. — Ils arrivent devant Missolonghi. — Apparition de l'escadre barbaresque. — Guerre civile du Péloponèse. — Exploits des Psariens. Mort de Hassan pacha dans l'île de Crète. Débarquement des Samiens dans l'Anatolie. — Aventure singulière arrivée aux Turcs de Taglianos. — Prétendue tête de Marc Botzaris envoyée au sultan. — Descentes diverses des insurgés dans l'Asie-Mineure. - Séjour de Khoreb, capitan-pacha, à Mitylène. Flotte grecque dans ses eaux. — - Aventure de vingt-deux chrétiens qui se sauvent de Constantinople. — Engagement entre les escadres grecque et turque. d'Aboulouboud pacha. Retour à l'ordre du gouvernement hellénique. Femmes grecques à la tête de plusieurs croisières. Rentrée des habitants de l'Attique dans leurs villages. — Défection de quelques Bulgares, évènement remarquable. — Succès des Acarnaniens. — Cara Hyscos malade se fait transporter à Ithaque. Avantage qu'il obtient sur les Turcs. Martyre du religieux Christos mis en croix. - Capitulation de l'Acrocorinthe.

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Cruautés

Préparatifs des Barbares contre Anatolico et Missolonghi. —Échec qu'ils éprouvent.— Peste dans le camp ottoman. — Levée du siége de Missolonghi et d'Anatolico. Retraite de l'armée turque. Fuite de Moustaï pacha. Il retourne à Scodra. Arrivée de Mavrocordatos à Missolonghi.

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CONSTANTIN Botzaris avait été salué polémarque par les Souliotes, qui l'invitèrent à prendre la place

du héros, dont la tombe venait de couvrir les restes inanimés. Le fils de Kitzos se rendit à leurs vœux, et le disque du soleil ayant disparu au vaste sein des mers, n'eut pas plus tôt fait place à la nuit qui enveloppa la terre (1), que les autorités civiles et militaires, réunies dans la maison de l'éparque, cessant de répandre des larmes, délibérèrent sur les moyens propres à conjurer les dangers qui menaçaient la patrie.

Après le combat nocturne du 20 août, les Hellenes, rentrés dans leurs positions, n'avaient pas tardé à voir reparaître les barbares, qui avaient reçu des renforts considérables de la Thessalie. Conduits par quelques laches transfuges (ἀχαρακτηρίστους προδότας), enfants dénaturés de la Grèce qui les vit naître, ils attaquèrent deux mille Hellènes retranchés sur le mont Amphrysse. Leurs chefs, qui étaient Makrys et Zongos (car Hyscos, en proie à une fièvre brûlante, avait été obligé de quitter le commandement), peu inquiets du nombre des ennemis, avaient soutenu leur choc de façon à montrer que l'esprit de Marc Botzaris animait le cœur de ses compagnons d'armes. Chargés à diverses reprises, ils étaient restés maîtres du terrain, et les infidèles avaient été obligés de se retirer avec perte de six cents hommes.

(1) L'auteur de ce récit fait allusion à ces vers d'Homère : Εν δ' ἔπεσ ̓ ὠκεανῷ λαμπρὸν φάος ἠελίοιο,

Ελκον νύκτα μέλαιναν ἐπὶ ζείδωρον άρουραν.

Sans se laisser abattre par cet échec, les mahométans, toujours guidés par les transfuges, ayant réussi à tourner les défilés du mont Amphrysse, en prenant des sentiers qui n'étaient connus que des chevriers, parvinrent, le 26 août (7 septembre), à se trouver en mesure d'attaquer les Hellènes de front et par leur flanc gauche. Alors un combat terrible s'engagea; et les chrétiens, qui résistaient depuis quatre heures de temps, pendant lesquelles ils tuèrent ou blessèrent plus de mille ennemis, ne comprirent le danger de leur position, qu'en se voyant presque entourés par un nombre considérable d'assaillants, qui se pressaient pour les ac

cabler.

Les Hellènes à cet aspect se débandent! Aussi rapides à la course que des chevreuils, ils escaladent les montagnes, franchissent les précipices, et gagnent les forêts du mont Thymphreste, où ils se rallient à des signaux convenus. Presque tous se retrouvent, car dans le conflit sanglant d'où ils sortaient, ils n'avaient eu que sept hommes tués et quinze blessés. Douze de ces derniers avaient été laissés en sûreté avec des vivres dans une caverne ignorée de l'ennemi; et leurs frères d'armes en rapportaient trois qui avaient été blessés. C'étaient Monogènes, fils bien-aimé de Metcho Kondoïanis, stratarque des Béotiens; le Souliote Tzigouri Tzavellas, et le Thesprote Démétrius Contozès de Plichivitzas. On les confia aux soins de quelques nomades, car il fallait fuir. On manquait de munitions, et l'ennemi suivait de si près les Hellènes,

qu'ils durent passer précipitamment l'Événus, pour se réfugier chez les Doriens de Cravari. Deux phalanges grecques qui défendaient les appróches du pont de Tatareïna, se trouvant isolées lorsque les chrétiens eurent abandonné le mont Amphrysse, furent également contraintes de se retirer dans le Zygos ou Aracynthe. Ainsi les ponts, les gués de l'Achéloüs et les défilés se trouvèrent simultanément abandonnés par le fait de la trahison des transfuges qui guidèrent les barbares jusque dans les montagnes de Cravari, où ils arrivèrent presque en même temps que les Grecs de la division de Hyscos. Victorieux à Platanos (1), qu'ils réduisirent en cendres, les Turcs envahissaient des lieux regardés jusqu'alors comme inaccessibles, en chassant devant eux les populations et les soldats, qui ne commencèrent à leur disputer le terrain, qu'en entrant dans les météores ou escarpements de la Doride. Les Turcs pénétraient en cet instant dans l'Apodotie, canton situé entre l'Étolie Épictète et l'Ophionie (1), lorsque les Valaques Cossiniotes, unis aux Hellènes qui avaient battu en retraite, les attaquèrent au pied du mont Couporachi, chaîne centrale du Callidrome, les battirent et les repoussèrent, après deux jours entiers d'efforts et de succès, vers Carpenitzé, où Moustaï pacha venait d'établir son quartier-général.

Ce sérasker ayant ordonné de transporter les blessés à Tricala en Thessalie, informé que

(1) Voyage dans la Grèce, T. III, c. 87, p. 225.

le Vlo

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