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Il fe perdroit, Madame.

AGRIP PINE.

Il fe feroit juftice.

Mais, Burrhus, allons voir jusqu'où vont ses transports, Voyons quel changement produiront fes remords; S'il voudra déformais fuivre d'autres maximes.

BURRHUS.

Plût aux Dieux que ce fût le dernier de ses crimes!

FIN.

VARIANTES

DE BRITANNICUS.

447

La Préface qui étoit autrefois à la tête de cette Tragédie, ne reffemble point à celle qu'on y lit aujourd'hui. Cette différence, & les traits fingu liers dont elle eft remplie, ont déterminé à l'im primer & à la placer ici.

»

DE

PREFACE.

E tous les Ouvrages que j'ai donnés au Public, » il n'y en a point qui m'ait attiré plus d'applaudiffe» mens ni plus de cenfeurs que celui-ci. Quelque foin » que j'aie pris pour travailler cette Tragédie, il fem»ble qu'autant que je me fuis efforcé de la rendre » bonne, autant de certaines gens se sont efforcés de » la décrier. Il n'y a point de cabale qu'ils n'ayent >> faite, point de critique dont ils ne fe foient avifés. » Il y en a qui ont pris même le parti de Néron con» tre moi. Ils ont dit que je le faifois trop cruel. Pour » moi je croyois que le nom feul de Néron faifoit en» tendre quelque chofe de plus que cruel. Mais peut>> être qu'ils raffinent fur fon Hiftoire, & veulent dire » qu'il étoit honnête homme dans fes premières an» nées. Il ne faut qu'avoir lu Tacite, pour favoir que, » s'il a été quelque temps un bon Empereur, il a tou

» jours été un très-méchant homme. Il ne s'agit point » dans ma Tragédie des affaires du dehors. Néron eft >> ici dans fon particulier & dans fa famille. Et ils me » dispenseront de leur rapporter tous les paffages qui » pourroient aifément leur prouver que je n'ai point » de réparation à lui faire.

» D'autres ont dit, au contraire, que je l'avois » fait trop bon. J'avoue que je ne m'étois pas formé >> l'idée d'un bon homme en la perfonne de Néron. Je » l'ai toujours regardé comme un monftre. Mais c'eft » ici un monftre naissant. Il n'a pas encore mis le feu » à Rome. Il n'a pas encore tué fa Mère, fa Femme, » fes Gouverneurs. A cela près, il me femble qu'il lui >> échappe affez de cruautés, pour empêcher que per» fonne ne le méconnoiffe.

» Quelques-uns ont pris l'intérêt de Narciffe, & le >> font plaints que j'en euffe fait un très-méchant hom» me & le confident de Néron. Il fuffit d'un paffage » pour leur répondre. Néron, dit Tacite, porta impa>> tiemment la mort de Narciffe, parce que cet affran>>> chi avoit une conformité merveilleuse avec les vices >> du Prince encore cachés: Cujus abditis adhuc vitiis » mirè congruebat.

>>> Les autres fe font fcandalifes que j'euffe choifi un » homme auffi jeune que Britannicus pour le Héros >> d'une Tragédie. Je leur ai déclaré dans la Préface » d'Andromaque le fentiment d'Ariftote fur le Héros » de la Tragédie; & que, bien loin d'être parfait, il

faut toujours qu'il ait quelque imperfection. Mais je leur dirai encore ici qu'un jeune Prince de dix-fept ans, qui a beaucoup de cœur, beaucoup d'amour, beaucoup de franchise & beaucoup de crédulité qualités ordinaires d'un jeune homme, m'a semblé • très-capable d'exciter la compaffion. Je n'en veux pas davantage.

» Mais, disent-ils, ce Prince n'entroit que dans fa > quinzième année lorsqu'il mourut. On le fait vivre, » lui & Narciffe, deux ans plus qu'ils n'ont vécu. Je

n'aurois point parlé de cette objection, fi elle n'avoit » été faite avec chaleur par un homme, qui s'est don» né la liberté de faire régner vingt ans un Empereur » qui n'en a régné que huit: quoique ce change>>>ment soit bien plus considérable dans la Chronolo»gie, où l'on fuppute les temps par les années des >> Empereurs.

» Junie ne manque pas non plus de Cenfeurs. Ils » disent que d'une vieille coquette, nommée Julia » Silana, j'en ai fait une jeune fille très-fage. Qu'au>> roient-ils à me répondre, fi je leur difois que cette >> Junie eft un Perfonnage inventé, comme l'Emilie » de Cinna, comme la Sabine d'Horace? Mais j'ai à » leur dire que s'ils avoient bien lu l'Hiftoire, ils y >> auroient trouvé une Junia Calvina, de la famille >> d'Augufte, fœur de Silanus, à qui Claudius avoit » promis Octavie. Cette Junie étoit jeune, belle, &, » comme dit Sénèque, feftiviffima omnium puellarum.

» Elle aimoit tendrement fon frère ; & leurs ennemis, >> dit Tacite, les accuferent tous deux d'incefte, quoi» qu'ils ne fussent coupables que d'un peu d'indifcri• » tion. Si je la présente plus retenue qu'elle n'étoit, je » n'ai pas oùi dire qu'il nous fût défendu de rectifie » les mœurs d'un Perfonnage, fur-tout lorsqu'il n'ei

>> pas connu.

» L'on trouve étrange qu'elle paroiffe fur le Thé » tre après la mort de Britannicus. Certainement à » délicatesse est grande de ne pas vouloir qu'elle dif » en quatre vers affez touchans qu'elle paffe che » Octavie. Mais, difent-ils, cela ne valoit pas la pe » ne de la faire revenir; un autre l'auroit pu racon» ter pour elle. Ils ne favent pas qu'une des régles da » Théâtre est de ne mettre en récit que les chofes qui » ne se peuvent paffer en action; & que tous les An>> ciens font venir fouvent fur la Scène des Acteurs >> qui n'ont autre chose à dire, finon qu'ils viennent » d'un endroit, & qu'ils s'en retournent en un autre.

>> Tout cela eft inutile, difent mes Cenfeurs. La » Piéce eft finie au récit de la mort de Britannicus, & » l'on ne devroit point écouter le refte. On l'écoute » pourtant, & même avec autant d'attention qu'au» cune fin de Tragédie. Pour moi j'ai toujours com» pris que la Tragédie étant l'imitation d'une action >> complette, où plufieurs perfonnes concourent, cette >> action n'est point finie, que l'on ne fache en quelle >> fituation elle laiffe ces mêmes perfonnes. C'est aint

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