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l'importance qu'elle donne à tout ce qui peut intéresser la prospérité de l'Etat, doivent rassurer tous les citoyens sur les futures destinées de la France. Convaincue par l'expérience que la liberté publique et la prospérité de l'Etat sont les seules bases solides du trône, la chambre des pairs saura s'opposer aux entreprises qui tendraient à mettre l'arbitraire à la. place des lois et en même temps qu'elle éclairera le Roi sur les perfides insinuations de ses courtisans elle arrêtera les effets des erreurs dans lesquelles la chambre des députés pourrait être entraînée (1).

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Observations sur les propositions et sur les rapports faits à la Chambre des Députés, depuis le 12 juillet jusqu'au 28 du même mois.

Séance du 12. M. AUBERT demande la modification des articles 17, 18 et 19 de la loi du 22 frimaire an 7, et de l'article 5 de la loi du 27 ventose

(1) Le public n'ignore pas que le ministre de l'intérieur n'est presque pas sorti des bureaux de la chambre des députés, tant qu'on y a discuté le projet de loi relatif à la

censure,

an 9, sur l'enregistrement. Il rappelle les abus que fait la régie des domaines de la faculté que ces articles lui accordent de demander l'expertise en cas de mutation; et il propose une loi dont l'objet est de les prévenir.

La proposition faite par M. Aubert est assurément fort sage; mais peut-être le serait-elle plus, si elle était plus étendue, et si elle avait pour objet d'obtenir la révision générale des lois sur l'enregistrement. Il n'est en législation aucune matière qui ait donné lieu à tant de procès et à tant de d'instructions que celleci. Si je disais que les extensions, les restrictions et enfin tous les commentaires de l'administration de l'enregistrement, composent près de dix-neuf volumes in-fol., on croirait que c'est une exagération ridicule; cependant que l'on consulte les employés de la régie, et l'on verra que c'est l'exacte vérité.

On assure même que la perception des droits n'est pas uniforme sur toutes les parties de la France : ce qui prouverait qu'on perçoit des droits plus forts que ceux qui sont fixés par les lois. La chambre des députés pourrait au reste consulter les administrateurs, et se faire rendre compte des entraves ou des vices de la perception des droits; personne n'est à même de connaître les vices de la loi, mieux que ceux qui sont chargés d'en prouver l'exécution, si ce n'est peut-être les magistrats qui l'appliquent journellement. Sous ce rapport la Cour de cassation pourrait rendre de grands services, et il serait d'autant plus convenable de la consulter, qu'elle est chargée par la loi de faire

remarquer, toutes les années, à la puissance légistative, les vices de la législation.

Séance du 14. M. le chevalier de Poiféré de Cère développe la proposition qu'il avait faite sur l'exportation et l'importation des produits bruts. Il observe que les véritables sources de la prospérité nationale sont dans leurs produits agricoles, et que les métaux et les autres matières auxquelles les hommes attachent un grand prix, ne sont que des valeurs fictives qu'ils sont convenus de donner et de recevoir en échange pour les productions nécessaires à leurs besoins ou à leurs goûts.

On voit que M. de Poiféré ne partage pas l'opinion de M. J.-B. Say, qui pense que la monnaie n'est ni un signe ni une mesure, mais qu'elle a une valeur intrinsèque et indépendante de l'effigie. «La monnaie serait seulement un signe, dit-il, si elle n'avait point de valeur par elle-même; bien loin de-là, sa valeur intrinsèque, quand on fait une vente ou un achat, est tout ce qu'on considère en elle. En vendant une marchandise contre une pièce de cinq francs, on ne la troque pas contre la figure ou le nom de cette pièce, mais contre la quantité d'argent qu'on sait y être

contenue.

» Cela est si vrai, que si le Gouvernement frappait des écus en étain, ils ne vaudraient pas autant que des écus en argent. Leur dénomination fût-elle la même, le nombre qu'on en demanderait pour une même denrée serait fort différent : s'ils n'étaient qu'un signe les uns vaudraient les autres.

» Si la force, l'adresse, ou bien des circonstances politiques extraordinaires ont quelquefois soutenu la valeur courante des monnaies, lorsque leur valeur intrinsèque a décliné, ce n'a jamais été que pendant un temps fort court. L'intérêt personnel parvient bien vîte à découvrir si la marchandise qu'il reçoit vaut moins que celle qu'il donne, et il trouve toujours le moyen de se soustraire aux désavantages d'un échange inégal.

» Ce qui est un signe, c'est un billet de banque payable à la première réquisition; il est le signe de l'argent qu'on peut recevoir au moment qu'on veut, sur la présentation de cet effet. Mais quant à la monnaie d'argent qu'on reçoit à la caisse, elle n'est pas le signe, elle est la chose signifiée » (1).

M. de Poiféré de Cère ne s'arrête pas au reste sur cette opinion, qui ne lui sert pour ainsi dire que de transition. Passant à l'examen de la question principale, il pense avec Sully que les peuples sont liés par leurs communs besoins ; qu'un intérêt réciproque les invite à de mutuels échanges, et que par une conséquence nécessaire, la balance doit se décider en fa

(1) On jugerait fort mal des raisons de M. Say, si on ne les jugeait que d'après ce passage: pour en sentir toute la force il faut lire le chapitre XI du livre fer. de la deuxième édition de son Traité d'Economie politique. Cet ouvrage, un des plus utiles qui aient été publié depuis bien longtemps, devrait être le manuel de toutes les personnes qui s'occupent d'administration.

veur de ceux qui produisant plus, peuvent fournir aux autres plus qu'il n'en retient.

Que penser, ajoute-t il, de ce systême absurde de prohibition qui depuis plusieurs années, a pesé sur la France, et qui dans un engagement universel de choses, de denrées, nous a fait éprouver toutes les angoisses des privations et de la pauvreté ?

Le premier résultat des lois qui prohibent l'expor tation, est de produire l'engorgement et l'avilissement des denrées. Dès-lors l'intérêt personnel, ce conseiller si clairvoyant et si actif pour tous les hommes, les porte à abandonner une culture pour se livrer à une autre. Bientôt la masse de la denrée avilie diminue, et comme la prévoyance n'a pu fixer l'équilibre dans cette marche rétrograde, on est quelquefois entraîné dans un vide qu'on n'est plus le maître de combler, et qui en certain cas, menace de tout engloutir

Après avoir ainsi fait sentir les inconvéniens qui résultent des entraves mises à l'exportation, M. de Poiféré de Cère fait voir les avantages qui doivent être la suite du système contraire, et il propose une loi, en cinq articles, par laquelle il pourvoit à l'intérêt de l'agriculture, et prévient en même temps les dangers qui pourraient résulter d'une exportation trop considérable des objets nécessaires à la France.

Dans la séance du même jour, M. Hardouin fait un rapport sur le projet de loi présenté à la chambre en forme de réglement. Déjà nous avons quelques observations sur ce projet ; et nous allons nous bor

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