Images de page
PDF
ePub
[ocr errors]

adopte la résolution telle qu'elle a été prise par la chambre des députés (1).

Pendant la séance MM. l'abbé de Montesquion et Ferrand sont introduïts dans la salle des séances. Le premier, ayant obtenu la parole, annonce que le Roi lui a ordonné de porter à la chambre des pairs le projet de loi relatif à la liberté de la pressé.

Il assure que la chambre verra dans la loi proposée une nouvelle preuve de la sollicitude du Gou vernement pour calmer ses agitations et ses inquiétutes. La censure que la loi établit ne se propose point, dit-il, de comprimer la pensée, ni d'étouffer la vérité; elle veut au contraire favoriser les bonnes lettres, qui n'ont reçu aucun honneur de ce déluge de pamphlets, écrits sans étude et sans art, dont nous avons été inondés; elle est favorable aux bons au teurs, et n'est importune qu'à ceux qui en usurpent le nom (2).

Ce n'est pas à vous, ajoute le ministre, que nous devons exposer les dangers d'une liberté illimitée ; ces principes absolus, qui sacrifient les générations présentes à des générations qui n'existeront jamais, tie pénètrent point dans cette enceinte. Après tant d'é

(1) Vid. sup., pag. 270.

(2) M. l'abbé de Montesquiou n'a jamais envisagé la question sous son véritable point de vue : il ne peut voir dans la presse qu'un moyen de produire des ouvrages purement littéraires,

preuves cruelles, la Nation a cherché son repos dans un systême de prudence et de sagesse dont vous faites une des plus belles parties : toutes nos lois doivent être empreintes de ce même contrępoids dont notre constitution a donné la première idée.

Le ministre, ayant ainsi parlé, donne lecture du projet de loi, et M. le président en ordonne le renvoi dans les bureaux (1).

Un membre obtient la parole pour faire une proposition à la chambre; il demande que la chambre fasse une adresse au Roi à l'occasion de sa fête, pour lui exprimer les sentimens de respect dont elle est pénétrée pour Sa Majesté. La chambre décide qu'il y a lieu de s'occuper de la proposition ; elle en renvoie le développement au samedi 20 août, jour auquel la séance est ajournée.

Séance du 20. L'auteur de la proposition faite dans la dernière séance observe que chez toutes les

(1) Après la lecture du projet de loi, le comité des pétitions fait son rapport. Aucune des demandes adressées à la chambre ne mérite son attention. Il est cependant une pétition qui mérite d'être remarquée; elle est signée de quarante-trois habitans de la rue de Tournon ou des environs du Luxembourg, et a pour objet de faire rendre au public le passage de la rue de Tournon au jardin, par la Cour du Palais. Qu'on vienne nous dire ensuite que nous n'avons point d'esprit public, et que nous ne savons pas nous occuper des affaires de l'Etat!

nations un jour est plus particulièrement consacré à féliciter chaque personne; qu'en France c'est la fête du patron que chacun a adopté ; que celle de SaintLouis ne peut manquer d'offrir à la chambre des pairs le motif d'une démarche particulière auprès de Sa Majesté. Le proposant ajoute que c'est dans cette vue qu'il a rédigé un projet d'adresse, dont il donne lecture à l'assemblée,

Un membre pense que la proposition faite à la chambre ne peut manquer de tirer à conséquence. Dès qu'une adresse aura été présentée au Roi sur des objets étrangers à ceux dont la chambre doit s'occuper, elle servira de prétexte pour en proposer une autre elle servira de titre pour la faire adopter; et d'adresse en adresse, on retombera dans les inconvéniens qui ont eu lieu sous le dernier gouvernement. Il est donc nécessaire d'examiner avec le plus grand soin la proposition dont il s'agit."

[ocr errors]

Un autre membre ajoute que les sentimens exprimés dans l'adresse qui vient d'être lue sont ceux de tous les membres de l'assemblée. Chacun d'eux,' sous ce rapport, serait sans doute empressé de l'adopter. Mais il est, à son avis, une question importante et préalable à cette adoption: c'est de savoir s'il convient de faire des adresses au Roi sur des objets qui n'ont aucun rapport ni avec la législation, ni avec la politique. L'affirmative sur ce point menerait à des conséquences embarrassantes, et qui changeraient entièrement la nature des rapports établis par la constitution entre les deux chambres et

le Roi. L'opinant, sans entreprendre de décider la question, invoque à cet égard les lumières et l'avis de ses collègues.

Un pair, en appuyant l'observation précédente, pense qu'il convient d'exprimer à Sa Majesté, mais d'une autre manière, des sentimens dont l'expression, soumise aux formes, rigoureuses que le réglement a prescrites pour la délibération des adresses perdrait nécessairement de sa chaleur et de sa vivacité. Témoignons de vive voix à Sa Majesté, dit-il, les sentimens qu'elle nous inspire, mais renonçons à une forme qui ne peut convenir à la circonstance, Les adresses que les chambres font au Roi, doivent être rares, si l'on veut qu'elles produisent quelque effet. Les multiplier, ce serait les anéantir. Il y a trois semaines qu'une adresse a été présentée. Ne, nous hâtons pas de la faire suivre d'une autre. Le réglement, en soumettant les adresses des deux chambres aux formes prescrites pour l'adoption des lois, a montré avec quelle réserve on devait user de ce moyen. L'opinant conclut, de ces réflexions, qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le projet d'adresse.

La chambre consultée, adopte cette conclusion, Elle se forme, ensuite, en bureaux pour examiner

projet de loi sur la liberté de la presse. A cinq heures et demie elle se réunit, et ordonne que la discussion en assemblée générale aura, lieu mardi, prochain 23 août,

Séance du 23. A midi les pairs se réunissent en

211

>

[merged small][ocr errors][merged small]

Un membre (M. le comte Cornudet) dit que si la loi proposée ne renfermait qu'une pure suspension provisoire du libre exercice de la presse exprimé et garanti par la charte, il n'éleverait pas la voix. Mais ajoute-t-il, l'institution de la censure préalable que la loi proposée établit, est évidemment un systême d'Etat dont on veut faire unité avec l'article 8 de la charte constitutionnelle. Cette charte évidence sort du préambule de la loi, et le but est formellement avoué par le ministre de Sa Majesté, en ses exposés des motifs de la loi à la chambre des pairs.

J

La liberté de la presse est proclamée par notre charte comme sauve-garde de la liberté politique et civile, comme une garantie du droit individuel de pétition.

C'est sous ce rapport, et uniquement sous ce rapport, qu'elle est rangée dans le droit public des Francais, art. 8 de la charte, titre 1er

14:

Faire entrer dans la discussion de la loi proposée et le zèle des bonnes études et le soin des réputations domestiques, c'est chercher à faire perdre de vue le véritable objet du débat (1).

La charte détermine le rapport des sujets au prince et du prince aux sujets; elle déclare les priviléges de ceux-ci et les droits de ceux-là.

[ocr errors]

(1) Ce n'est cependant que sous ce rapport qu'elle a sété envisagée par le ministre..

« PrécédentContinuer »