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L'élève relèvera tous les adjectifs qualificatifs du morceau ci-après et les écrira aux deux genres et aux deux nombres.

Sur ce modèle, il fera ensuite son propre portrait.

Le portrait du duc de La Rochefoucauld
par lui-même

Je suis d'une taille médiocre, libre (1) et bien proportionnée. J'ai le teint brun, mais assez uni; le front élevé, et d'une raisonnable grandeur; les yeux noirs, petits et enfoncés; les sourcils épais, mais bien tournés. Je serais fort empêché de dire de quelle sorte j'ai le nez fait; car il n'est ni camus, ni gros, ni aquilin, ni pointu, au moins à ce que je crois : tout ce que je sais, c'est qu'il est plutôt grand que petit, et qu'il descend un peu trop bas. J'ai là bouche forte, et les lèvres assez rouges d'ordinaire, et ni bien ni mal taillées. J'ai les dents blanches et passablement bien rangées. On m'a dit autrefois que j'avais un peu trop de menton : je viens de me regarder dans le miroir pour savoir ce qui en est, et je ne sais pas trop bien qu'en juger. Pour le tour du visage, est-il ou carré ou ovale? il me serait fort difficile de le dire. Mes cheveux noirs sont naturellement frisés, et avec cela assez épais et assez longs pour pouvoir prétendre en belle tête (2).

J'ai quelque chose de chagrin et de fier dans la mine: cela fait croire à la plupart des gens que je suis méprisant, quoique je ne le sois point du tout. J'ai l'action (3) fort aisée, et même un peu trop, et jusqu'à faire beaucoup de gestes en parlant. Voilà naïvement comme je pense que je suis fait au dehors.

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Dans la fable suivante, divisée en deux exercices, l'élève recherchera les adjectifs qui ont la même forme aux deux genres et ceux qui prennent une forme spéciale au féminin. Chaque catégorie formera une colonne. Il analysera ensuite toutes les propositions où l'attribut est un adjectif.

Les deux rats

Un jour le rat des champs, ami du rat de ville,
Invita son ami dans son rustique asile.

Il était économe et soigneux de son bien;

Mais l'hospitalité, leur antique lien,

Fit les frais de ce jour comme d'un jour de fête.

(1) C'est-à-dire dégagée, souple.

(2) Expression vieillie pour « être remarqué par ma belle tête. » (3) Le mouvement du corps.

tifs, prennent la lettre s au pluriel : Des enfants attentifs; des étoiles brillantes.

La règle est toujours appliquée aux adjectifs féminins. Pour les adjectifs masculins, voici les exceptions:

1o Ceux qui ont pour finale s ou x au singulier ne changent pas au pluriel.

2o Beau, nouveau, jumeau, hébreu prennent un x.

3o Les adjectifs en al les plus usités forment leur pluriel en aux : moral, moraux; national, nationaux; mais un certain nombre suivent la règle générale final, frugal, etc.

On évite d'employer au masculin pluriel les adjectifs dont le pluriel en aux paraît dur à l'oreille et l'on recourt à une expression équivalente.

DEGRÉS DE QUALIFICATION

120. Les adjectifs peuvent marquer la qualité simplement, ou avec comparaison, ou à un très-haut degré; de là les formes qu'on appelle le positif, le comparatif, le superlatif.

121. On distingue trois sortes de comparatifs : de supériorité, d'égalité ou d'infériorité. Ils se forment au moyen des adverbes plus, aussi, moins, placés avant l'adjectif. Il n'existe que trois comparatifs simples de supériorité :

Meilleur à la place de plus bon, qui
Moindre qui équivaut à plus petit
Pire
à plus mauvais

ne se dit pas;
les deux formes
s'emploient.

122. On distingue deux sortes de superlatifs : le superlatif absolu ou sans comparaison: Cet homme est très-riche, et le superlatif relatif, ou avec comparaison: Cet homme est le plus riche de la ville.

Ce dernier n'est autre qu'un comparatif de supériorité ou d'infériorité précédé de l'article ou d'un adjectif dé

Tout fut prêt: lard, raisin, et fromage, et noisette.
Il cherchait par le luxe et la variété

A vaincre les dégoûts d'un hôte rebuté,
Qui, parcourant de l'œil sa table officieuse,
Jetait sur tout à peine une dent dédaigneuse;
Et lui, d'orge et de blé faisant tout son repas,
Laissait au citadin les mets plus délicats.

<< Ami, dit celui-ci, veux-tu dans la misère
Vivre au dos escarpé de ce mont solitaire,
Ou préférer le monde à ces tristes forêts?
Viens, crois-moi, suis mes pas; la ville est ici près :
Festins, fêtes, plaisirs y sont en abondance.
L'heure s'écoule, ami; tout fuit, la mort s'avance:
Les grands ni les petits n'échappent à ses lois;
Jouis, et te souviens qu'on ne vit qu'une fois. >>

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Le villageois écoute, accepte la partie:

On se lève, et d'aller. Tous deux de compagnie,
Nocturnes voyageurs, dans des sentiers obscurs,
Se glissent vers la ville et rampent sous les murs.
La nuit quittait les cieux quand notre couple avide
Arrive en un palais opulent et splendide,
Et voit fumer encor dans des plats de vermeil
Des restes d'un souper le brillant appareil.
L'un s'écrie, et, riant de sa frayeur naïve,
L'autre sur le duvet fait placer son convive,
S'empresse de servir, ordonner, disposer,
Va, vient, fait les honneurs, le priant d'excuser.

Le campagnard bénit sa nouvelle fortune.
La vie en ses déserts était àâpre, importune:
La tristesse, l'ennui, le travail et la faim...
Ici l'on y peut vivre; et de rire. Et soudain,
Des valets à grand bruit interrompent la fête.
On court, on vole, on fuit; nul coin, nulle retraite.
Les dogues réveillés les glacent par leur voix;
Toute la maison tremble au bruit de leurs abois.
Alors le campagnard, honteux de son délire :
<< Soyez heureux, dit-il; adieu, je me retire,
Et je vais dans mon trou rejoindre en sûreté
Le sommeil, un peu d'orge, et la tranquillité. »

ANDRE CHENIER.

terminatif : Vous êtes mon meilleur ami. Cette étoffe est la moins belle de tout l'étalage.

On peut regarder comme de véritables comparatifs et superlatifs les adjectifs supérieur, sublime; inférieur, infime; intérieur, intimne (1).

123. Les augmentatifs lourdaud (de lourd), criard (de crieur), et les diminutifs aigrelet (de aigre), rougeâtre (de rouge), marquent des degrés de qualification et se rapprochent par là des comparatifs et des superlatifs.

SYNTAXE

EMPLOI DE L'ADJECTIF

124. L'adjectif est employé comme épithète ou comme attribut.

125. Comme épithète, il précède ou suit immédiatement le substantif auquel il se rapporte : Un sage conseiller, un prince magnanime, une dure nécessité.

126. Comme attribut, il est uni au substantif par le verbe être ou un autre verbe d'état : L'hiver a été long. Le temps devint pluvieux. Vous paraissez inquiets.

127. La place de l'adjectif employé comme épithète n'a souvent d'autre règle que l'harmonie de la phrase. On dit un homme riche, une table ronde, et non un riche homme, une ronde table; tandis qu'on dit indifféremment un riche propriétaire, un propriétaire riche; un ferme appui, un appui ferme.

En général, on évite de placer un adjectif de plusieurs syllabes avant un substantif qui n'a qu'une ou deux syllabes: un cœur insensible, une fête solennelle, et non un insensible cœur, une solennelle fête.

(1) La forme du superlatif latin est passée en français dans quelques mots, comme généralissime, grandissime, rarissime, savantissime. A l'exception du premier, ils emportent tous un sens de blâme ou d'ironie.

L'élève rendra cette fable en prose et développera la leçon morale qu'elle renferme.

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L'élève soulignera les adjectifs qualificatifs du morceau suivant et analysera ceux qui sont modifiés par un adverbe, en distinguant les degrés de qualification. Il fera l'analyse logique des trois premières phrases et de la

dernière.

Les lois militaires chez les Romains

Une des plus belles parties (1) de la milice romaine était qu'on n'y louait point la fausse valeur. Les maximes du faux honneur, qui ont fait périr tant de monde parmi nous, n'étaient pas seulement connues dans une nation si avide de gloire. On remarque de Scipion et de César, les deux premiers hommes de guerre et les plus vaillants qui aient été parmi les Romains, qu'ils ne se sont jamais exposés qu'avec précaution, et lorsqu'un grand besoin le demandait. Les Romains ne voulaient point de batailles hasardées mal à propos, ni de victoires qui coûtassent trop de sang; de sorte qu'il n'y avait rien de plus hardi, ni tout ensemble de plus ménagé que les armées romaines.

On peut croire que, dans un peuple si sagement dirigé, les récompenses et les châtiments étaient ordonnés avec grande considé ration. Outre que le service et le zèle au bien de l'État étaient le moyen le plus sûr pour s'avancer dans les charges, les actions militaires avaient mille récompenses qui ne coûtaient rien au public, et qui étaient infiniment précieuses aux particuliers, parce qu'on y avait attaché la gloire, si chère à un peuple belliqueux. Une couronne d'or très-mince, et le plus souvent une couronne de feuilles de chêne ou de laurier, devenaient inestimables parmi les soldats, qui ne connaissaient point de plus belles marques que celles de la vertu, ou de plus noble distinction que celle qui venait des actions glorieuses. BOSSUET.

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Pour habituer l'élève à reconnaître les degrés de qualification et l'ellipse qui suit ordinairement les comparatifs, le maître fera analyser les phrases suivantes grammaticalement et logiquement.

I. La sobriété rend la nourriture la plus simple très-agréable. C'est elle qui donne, avec la santé la plus vigoureuse, les plaisirs les plus purs et les plus constants.

II. Rien n'est plus absolu que l'empire de l'esprit sur le corps.

(1) Dans le sens où nous dirions aujourd'hui côtés.

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