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PSYCHÉ. Mes volontés suivent les vôtres;

Je n'en saurais plus avoir d'autres :
Mais votre oracle, enfin, vient de me séparer
De deux sœurs et du roi mon père,
Que mon trépas imaginaire

Réduit tous trois à me pleurer.

Pour dissiper l'erreur dont leur ame accablée
De mortels déplaisirs se voit pour moi comblée,
Souffrez que mes sœurs soient témoins
Et de ma gloire et de vos soins.
Prêtez-leur, comme à moi, les ailes du Zéphyre,
Qui leur puissent de votre empire,
Ainsi qu'à moi, faciliter l'accès;
Faites-leur voir en quel lieu je respire;
Faites-leur de ma perte admirer le succès.

L'AMOUR. Vous ne me donnez pas, Psyché, toute votre ame;
Ce tendre souvenir d'un père et de deux sœurs
Me vole une part des douceurs

Que je veux toutes pour ma flamme.

N'ayez d'yeux que pour moi, qui n'en ai que pour vous : Ne songez qu'à m'aimer, ne songez qu'à me plaire; Et, quand de tels soucis osent vous en distraire... PSYCHÉ. Des tendresses du sang peut-on être jaloux? L'AMOUR. Je le suis, ma Psyché, de toute la nature. rayons du soleil vous baisent trop souvent; Vos cheveux souffrent trop les caresses du vent; Dès qu'il les flatte, j'en murmure:

Les

L'air même que vous respirez

Avec trop de plaisir passe par votre bouche;
Votre habit de trop près vous touche;
Et, sitôt que vous soupirez,

Je ne sais quoi, qui m'effarouche,

Craint, parmi vos soupirs, des soupirs égarés.

Mais vous voulez vos sœurs; allez, partez, Zephyre;

Psyché le veut, je ne l'en puis dédire.

(Zephyre s'envole.)

SCÈNE IV.

L'AMOUR, PSYCHE

L'AMOUR. Quand vous leur ferez voir ce bienheureux séjour, De ces trésors faites-leur cent largesses,

Prodiguez-leur caresses sur caresses;

Et du sang, s'il se peut, épuisez les tendresses,
Pour vous rendre toute à l'amour.

Je n'y mêlerai point d'importune présence ;
Mais ne leur faites pas de si longs entretiens :
Vous ne sauriez pour eux avoir de complaisance,
Que vous ne dérobiez aux miens.

PSYCHÉ. Votre amour me fait une grace,

Dont je n'abuserai jamais.

L'AMOUR. Allons voir cependant ces jardins, ce palais,
Où vous ne verrez rien que votre éclat n'efface.
Et vous, petits Amours, et vous, jeunes Zéphyrs,
Qui pour armes n'avez que de tendres soupirs,
Montrez tous à l'envi ce qu'à voir ma princesse
Vous avez senti d'allégresse.

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Il se fait une entrée de ballet de quatre Amours et quatre Zéphyrs, interrompue deux fois par un dialogue chanté par un Amour et un Zéphyr.

L'AMOUR, PSYCHÉ.

LE ZEPHYR. Aimable jeunesse,

Suivez la tendresse;
Joignez aux beaux jours
La douceur des Amours.
C'est pour vous surprendre
Qu'on vous fait entendre
Qu'il faut éviter leurs soupirs,
Et craindre leurs désirs :
Laissez-vous apprendre
Quels sont leurs plaisirs.

1LS CHANTENT ENSEMBLE.

Chacun est obligé d'aimer

A son tour;

Et plus on a de quoi charmer,

Plus on doit à l'Amour.

LE ZEPHYR SEUL. Un cœur jeune et tendre

Est fait pour se rendre;

Il n'a point à prendre

De fâcheux détour.

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LES DEUX ENSEMBLE.

Que l'emploi d'un amant.

S'il faut des soins et des travaux

En aimant,

On est payé de mille maux

Par un heureux moment.

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