<< Il faut prononcer ce oui, » dit Richelet. C'est aussi l'avis de l'Académie : « Le oui et le non; » et de nos paysans. Ceux-ci prononcent très souvent oui comme ouete, avec le son du digamma très marqué voui. (Cf. Bibliot. des Enf., p. 135.) 6o Ourse. Ce mot n'est aspiré que quand il est précédé de l'article la: La ourse. Cet usage me paraît avoir été introduit par ces bateleurs étrangers qui font profession de faire danser des ours sur les places, et qui en profitent pour écorcher la langue. Je les ai entendus maintes fois de mes propres oreilles encourager leurs bêtes en disant : « Dansez, la ourse! >> eunourme. 7° Quelques mots, prononcés d'une manière emphatique pour mieux appuyer sur la pensée, paraissent aspirés, mais en réalité ne le sont pas. Ainsi l'on dira: « Il'teu ancien, ancien. Un bœu L'apparence de l'aspiration provient dans ces mots de l'absence de liaison, si fréquente dans le dialecte blaisois. C'est à peu près comme si l'on prétendait que l'absence d'élision dans ce vers rend aspirée la voyelle initiale d'imponere ou de Ossam : Ter sunt conati imponere Pelio Ossam. (Géorg. I. 281.) CHAPITRE II. De la prononciation des liquides L et R.. REGLE COMMUNE. Toutes les fois que dans une syllabe qui termine un mot, lour se trouvent placés après une consonne et avant un e muet, le dialecte blaisois les supprime complètement dans la prononciation; Ex: table, boucle, souffle, il étrangle, peuple; membre, encre, esclandre, il souffre, maigre, pampre, etc., prononcez tabe, bouque, souffe, il étrangue, peupe, nombe, enque, etc. C'est par suite de cette habitude de prononciation qui a régné au moyen-âge et même jusqu'au XVIe siècle, comme on peut le voir par les exemples qui suivent, qu'un grand nombre de mots ont perdu en français l'l de la syllabe muette finale. C'est ainsi que bouticle, Christofle, damaticle, démoniacle, guimple, thériacle, sont devenus boutique, Christophe, dalmatique, démoniaque, guimpe, thériaque. Traistre, larron, simoniacle, Tu cuides donc faire miracle... Mes va ailleurs vendre thriacle. (M. du S. d'Orl. vs. 11920.) Se mons me voy a dangereux article C'est que d'ouvrir l'est droite ma bouticle. (') (Les 7 dames de Rhétoriq.) Le seigneur qui sert saint Christofle. (Fr. Villon; cf. du Bart. p. 97. - 1583.) L'oriflamme est une bannière Aucun poi plus forte que guimple (2) De cendal rousoyans et simple. (Guill. Guyart.) Ils avaient donné pour eux parer guimples et chaperons (St-Palaye.) Venez voir les lauriers environner ses temples. (Les Dél. de la poés. fr. p. 75.) (1) On trouve encore dans Cotgrave bouticle et bouticlier. (2) Cl. Lais inéd. p. 11. Dans les terminaisons de cette nature, les l et les r ou ne sonnaient pas, ou ne se prononçaient que d'une manière à peine sensible, comme on peut en juger par les exemples suivants : Je ferai proier en chapitre Que diex ses pechiez li acquite. (Le Département des livres, Bull. du Bouq. I. 44.) Maistre Jehan de Meun ce rommant Parfist aussi comme je treuve, (R. de la Rose, vs. 4153.) (M. du S. d'Orl. vs. 8121.) Ce que demandrez, vous l'arez, (Id. vs. 18801.) Orde vieille, putain, truande, Veci pour moy trop grant esclandre. (F. du Mun. p. 247.) Pourtant que on se donne garde; Y ne faut qu'un coup pour tout perdre. En lieu de bien ne peut point estre. (Les dicts des oiseaux.) Son rollet, plein de point en point, Au pilier s'est heurté la tête. (P. Gromet.) Ces lettres se prononçaient si peu que souvent même on les supprimait complètement dans l'écriture; Ex.: Esplingues que je rencontre pour la dernière fois dans GaultierGarguille, « Un cent d'esplingues, » est devenu par métathèse épingle en français, et par suppression de l'l, épingue, en blai sois. Tartre comme bouticle a perdu sa liquide : tarte, boutique. Je trouve encore au XVIIe siècle dans la Fleur des chansons (p. 198): L'autre jour ma femme fit Une tartre de fromage (*) De même pour arbalètre, et tourtre, et fisicle, auj. physique. Canons, ars et arbalestres Trop doubtoint avoir nouveaulx mestres. (Liv. du bon Jeh. p. 516.) Ne de lui (du fromage), talent ne me prend, Car fisicle le me défend. (R. du Renart. vs. 7315.) (1) Cette pièce se trouve dans un manuscrit du XVIIe siècle eu ma possession. Quiche rat en son Dietre fr.-lat. admet martre et marte. 2) V. Gaultier-Garguille LIII. note, éd. Delahays. Voir encore Mist. du S. d'Orl. vs. 17886, Chartres, certes; vs. 19300, étendre, rendent; vs. 11289, lectres, faites; vs. 9872, lectres, secrètes; vs. 12575, Euvertre. Voir aussi Liv. du bon Jehan, pag. 431, autre, faute. On supprimait même le son de l'r au milieu des mots et l'on disait, comme aujourd'hui en blaisois, un abre (arbre), du mabre (marbre), ou pour parler plus correctement, dbe, mabe. Son bruyt, son loz, sa vertu, sa louange Sont renommez en Puille et en Calabre. Il fait trembler France comme feuille en l'arbre. Ch. hist. I, 394.) CHAPITRE III. De la prononciation de la liquide R. On peut poser en règle générale que dans le dialecte blaisois l'r ne sonne pas à la fin des mots, mais comme il y a quelques distinctions à faire et quelques exceptions à signaler, je diviserai cette question pour mieux l'éclairer, et je traiterai successivement des syllabes finales ar, er, ir, or-our, ur-eur. AR. Dans cette terminaison I'r sonne presque toujours et l'a, comme je l'ai dit ailleurs, s'y prononce de ce son voisin de l'o, que je n'ai pu mieux indiquer par signes, qu'en le notant a.. J'ai lieu de croire qu'autrefois l'r ne sonnait pas plus dans cette terminaison que dans les autres, et j'ai entendu souvent des vieilles gens de la campagne qui ne l'y prononçaient point, ou qui le faisaient sonner d'une manière à peine sensible, de manière à lui donner l'apparence d'une légère aspiration. Aujourd'hui cette |