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Savoie, sont alternés par quatre groupes de mains entrelacées, avec cette légende : « Fœdere Et Religione Tenemur. Ces « emblèmes et ces paroles nous paraissent « être la révélation, si longtemps cherchée, « de la pensée et du sens littéral de cette « devise des princes de Savoie, en qui le « monde a vu briller, pendant plus de huit siècles, l'honneur et la loyauté de la «< chevalerie, la foi et le dévouement du a chrétien.» Depuis que ces lignes furent écrites en 1854, le roi Victor-Emmanuel, devenu roi d'Italie, a acquis dans l'histoire le beau titre de re galant uomo.

P. A. L.

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-

Un ver-coquin (VI, 261). J'ai toujours entendu nommer ainsi un ver qui se trouve dans la tête des moutons attaqués de l'avertin, et serait la cause de leur maladie. Puis, par extension, pour taxer un homme d'extravagance, on dit qu'il a le ver-coquin, comme l'on dit également que son avertin le prend. Cependant, le Dictionnaire d'histoire naturelle de Valmont de Bomare ne tombe pas d'accord de cette désignation. Il réserve le nom de ver-coquin pour une teigne ou chenille qui attaque les vignes. Mais il n'en est pas moins d'accord de l'existence d'un ver qui rend les moutons furieux. C'est au mot Mouche du ver du nez des moutons qu'il raconte que ces mouches s'introduisent dans le nez des moutons pour y déposer leurs œufs, qui ne tardent pas à éclore. « Lorsque ces vers, qui sont très-vifs, s'avisent de se tourner ou de changer de place dans les sinus frontaux, ils piquent vivement avec leurs crochets les membranes sensibles dont ces parties sont tapissées, et dans ce moment, ils font sentir aux moutons des douleurs bien aiguës, qui sont la cause de ces espèces d'accès de vertige ou de frénésie qu'éprouvent quelquefois ces animaux, d'ailleurs si pacifiques et si doux. C'est alors qu'on les voit bondir, s'élancer et heurter leurs têtes à diverses reprises contre des arbres, des pierres, etc. >>

O. D.

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Le cardinal de Richelieu et le maréchal de Gassion (VI, 262). · - C'est Tallemant des Réaux qui dit que « le cardinal de Richelieu, en parlant de lui, ne l'appeloit presque jamais que La Guerre. » Il raconte aussi que Gassion ayant été dangereusement blessé à la prise de Thionville, on fit courir le bruit de sa mort. « On surprit une lettre de Francesco de Melo qui disoit « Nous avons perdu Thion«ville; mais les ennemis y ont perdu Gas«sion, le lion de la France et la terreur « de nos armées. » Cette lettre lui fut envoyée par la reine, à Bagnolet, où il achevoit de se guérir. » Mais le trait le plus plus fort à la louange de Gassion, que rapporte Tallemant, c'est que lorsque l'armée française s'avançait vers Rocroy, le comte de Fontaines ayant su d'un prisonnier que Gassion était dans cette armée, défendit à ce prisonnier de le laisser savoir aux Espagnols, le menaçant, s'il en parlait « de lui faire donner du pistolet par la tête. »> O. D.

Cinname, au lieu de cinnamome (VI, 278, 136). Quelle bonté, chez des savants, que de s'en aller chercher des explications (des explications raisonnées) à tel ou tel mot aventureux, relevé, parmi tant d'autres, dans les vers d'un auteur qui ne s'est jamais imposé de gêne d'aucune sorte! Il avait besoin, par hasard, d'une finale en ame, pour rimer avec dictame. Eh bien! il a sans façon amputé cinnamome, et s'en est fait cinname. Voilà tout.

Mais, nous dit-on, il aura traduit ce mot de l'italien, où... etc., etc. Mon Dieu! que de science dépensée! Est-ce que nous n'étions pas en France? Est-ce qu'en France LE CINNAMOME était une de ces choses inconnues dont les poëtes peuvent, en quelque sorte à leur gré, changer la désignation? Mais cinnamome faisait partie de l'idiome littéraire; mais les moindres bacheliers le connaissaient, car c'est tout bonnement le grec kinnamômon, le latin cinnamomum terme classique, archiclassique. Outre cela, la partie essentielle n'en est pas même kinn (ou cinn), mais justement AMOM. En effet, au mot oriental amôm, qui est le nom d'un fruit ou d'un parfum, s'était venue adjoindre, depuis les siècles du commerce de la mer Rouge, l'expression sémitique KN ou KNH, qui veut dire tige (principalement creuse); d'où, par parenthèse, nous gardons encore le mot CANNE (à sucre ou autre). Il en était résulté le vocale kinnamômon, tige à parfum. Du reste, tel n'est pas le seul composé où figure le radical amồm; il fait partie de cardamomum, nom d'une autre plante aromatique. Or, va-t-on essayer aussi de la débaptiser, celle-là? de changer le cardamome en cardame, afin d'atténuer d'autant la peccadille du grand

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Le mot

Le roi Elisabeth (VI, 281). suédois, dont nous avertit M. Y, avait déjà été signalé par M. Augustin Thierry, dans la neuvième de ses Lettres sur l'Histoire de France. « Aujourd'hui même, en langue suédoise, un commandant de pêche est appelé not-kong. Un Français, traduisant ce mot littéralement, le rendrait par ceux de roi des filets, et croirait qu'il y a là quelque peu d'emphase poétique. Cela se dit pourtant sans figure et doit être pris à la lettre. L'expression n'est poétique que dans notre langue, à cause du sens magnifique et absolu du mot roi, qui ne peut plus rendre celui de kong. » Mais Pigault-Lebrun, moins savant, il est vrai, que Augustin Thierry, prétend que ce mot veut dire roi « partout comme en France. » (Dans le roman de Jérôme, Ire p., ch. IV.) O. D.

Barabras (VI, 284, 227). · Ce sont, à ce qu'il paraît, des Nubiens, déjà très-basanés, mais pourtant moins noirs que des nègres. Laorty-Hadji (que ce nom soit un vrai nom, un pseudonyme ou un anagramme) pense qu'ils sont identiques aux anciens Egyptiens. « Dans les Barabras d'aujourd'hui, habitants de la basse Nubie, on remarque une foule de caractères physiques qui leur sont communs avec ceux des momies trouvées dans les hypogées. Les Berbers ou Barabras ont les membres proportionnés et robustes, etc. » Puis, il cite à l'appui de son opinion Champollion le jeune, à qui il emprunte entre autres cette phrase: « Les anciens Egyptiens appartenaient à une race d'hommes tout à fait semblables aux Kennous ou Barabras, habitants actuels de la Nubie. » O. D.

Les Barabras, ou Barbariens, membres d'une peuplade de Nubie, vers la troisième cataracte. Ces gens qui forment, avec les Abyssins et les Gallas, une race intermédiaire entre les variétés blanche et noire, ont le teint noir-gris, les cheveux frisés non crépus, le nez souvent droit ou aquilin. Ils sont laborieux, viennent à Alexandrie comme les Biskris à Alger, et se distinguent, à première vue, des autres Africains. R. DE S.

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Le manuscrit de « la Nouvelle Héloïse » et des « Confessions (VI, 284, 230). Ces manuscrits sont à la bibliothèque du Corps législatif. M. Cousin leur a consacré divers articles dans le Journal des Savants (septembre et novembre 1848). Notons, en passant, que le Manuel du Libraire fait observer que divers éditeurs (Naigeon, Bancarel, et spécialement Fayolle), trop confiants dans ces manuscrits, ont adopté comme bonnes nombre de phrases qui avaient évidemment été rejetées par l'auteur. « C'est surtout l'Emile et les Confes«sions qui ont souffert de ces corrections

maladroites, ainsi qu'on peut le voir dans « les Avertissements de l'édition donnée » par Petitain. » Disons aussi, d'après l'Athenæum français, 24 décembre 1855, p. 1130, que de nombreux manuscrits de Rousseau existent à la bibliothèque de Neufchâtel. En a-t-on tiré tous les secours qu'ils peuvent offrir? G. TURBEN.

Tout de go. Entregent (VI, 284, 227).Voici ce que je trouve dans le Dictionnaire de Littré: «L'étymologie de go a été trouvee par M. Fr. Michel d'après des textes du XVIe siècle. Go, ou gob, tient à gober, et tout de go signifie tout comme en gobant, en avalant. Le radical gob paraît appartenir au celtique: gaélique, gob, gab, bouche; irlandais, gob, bouche, bec; kimry, gwp, bec. Gob, dans un patois anglais, a le sens de michoire, et y vient probablement du celtique. L'anglais gob, bouchée, vient du français.

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« Entregent est une expression métaphorique empruntée à la fauconnerie. Etym. Entre et gens, c'est-à-dire, pour les faucons, l'habitude de vivre sans s'effrayer des gens, et pour les hommes, l'habitude, l'adresse à se conduire entre les gens. Cette expression remonte au moins au XVe siè cle. La forme entrejan me paraît venir d'une fausse étymologie qui ferait dériver ce mot de entre jambes. E. Q.

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Voici deux vers de Corneille dans Mélite :

C'est assez qu'une femme ait un peu d'entre[gent, La laideur est trop belle étant teinte en argent.

Dès 1644, Corneille a ainsi modifié ces deux vers:

L'argent dans le ménage a certaine splendeur Qui donne un teint d'éclat à la même laideur.

Entregent paraît être une expression métaphorique empruntée à la fauconnerie. Nous lison's dans un passage du Ménagier de Paris, où il est question du jeune oiseau qu'on dresse: «Il vous convient continuer à le tenir souvent sur le poing, et entre gent, tant et si longtemps que vous pourrez.» (Tome II, p. 290.) Et un peu

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plus loin: «En cest endroit d'espreueterie, le conuient plus que deuant tenir sur le poing, et le porter aux plais et entre les gens aux églises et ès autres assemblées. >> (Ibidem, p. 296.)

Ce mot a eté employé par Montaigne, par d'Aubigné dans ses Tragiques (1. II); on le trouve dans Cotgrave, qui donne même entregenté. Mais en 1680, Richelet remarque qu'il a vieilli, et il ne figure ni chez Furetière, ni dans la première édition du Dictionnaire de l'Académie. Plus tard, il a été remis à la mode par Rousseau, et recueilli par Mercier dans sa Néologie. L'Académie, dans sa dernière édition (1835), le considère comme un terme familier, mais ne le traite plus ni de néologisme ni d'expression vieillie.

(CH. MARTY-LAVEAUX, Lexique

de la langue de Corneille, dans la collection des Grands Ecrivains, dirigée par M. Régnier.) To let go, (laisser) aller. Même sens, même prononciation.

A gogo, Satyre Ménipée, en Bourgogne, etc. Allez, allez, ne vous gênez pas! E. B.

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- M. Littré (Vo Go) dit à ce sujet : a Hist., XVIe s. Une boure (la femelle d'un canard), qui là estoit, le print et l'avala de gob. FR. MICHEL, Argot. Le print subitement et l'avalla tout de gob. ID., ib... Il l'avala tout de gob sans mascher, etc. ID., ib.

Etym. Voy. GOBER. Ces textes, qu'a découverts M. Fr. Michel, lui ont fait aussi découvrir l'étymologie de go; il est clair que go ou gob tient à gober, et que tout de go signifie tout comme en gobant, en avalant. >>

A la bonne heure! voilà une étymologie plus gauloise que le gallico de Le Duchat, et plus vraisemblable que le go ahead de Ménage. DICASTÈS.

Signification du mot lord» (VI, 284, 241). Ce mot s'applique d'abord à la Divinité. Dans le Dictionnaire anglais de Walker, je trouve : « Divine Being, Jehova, « Monarch, Ruler, Nobleman; a general << name for a peer of England; an hono«rary title applied to officers, as Lord « Chief Justice, Lord Mayor. » Avant d'être

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créé comte Russell par la reine Victoria, lord John ne l'était que par courtoisie. Un lord chief justice, un lord chancelor, ne le sont que pro tempore. C'est par erreur que le célèbre chancelier Bacon est très-généralement appelé lord Bacon; il fut sir Francis Bacon, puis baron Verulam, puis viscount Saint-Albans, et lord high chancelor, mais point lord Bacon. P. A. L.

Edition originale de « Candide » (VI, 285). M. V. de V. ignore peut-être que la suite de ce roman, intitulee Ile partie, n'est pas de Voltaire, mais bien de Thorel de Champigneulles. Voici le titre d'une brochure relative à cet admirable roman : Remercîment de Candide à M. de Voltaire (par de Marconnay). Halle et se vend à Amsterdam, 1760, pet. in-8 de 20 pages. L. WILLEM.

Trouvailles et Curiosités.

Opinion d'un célèbre cardinal sur l'infaillibilité papale. Peu de personnes ont témoigné un zèle comparable à celui qui animait en Espagne, vers la fin du XVe siècle, le cardinal Torquemada (ou de Turre cremata). Ce terrible inquisiteur admet cependant très-bien la possibilité qu'un hérétique devienne souverain pon-` tife, et pour prouver cette assertion, qu'il n'oserait pas sans doute reproduire s'il était notre contemporain, il s'appuie sur l'histoire de la papesse Jeanne, reconnue comme successeur de saint Pierre par la catholicité tout entière. Transcrivons le passage latin, il est curieux : « Cum ergo constet quod aliquando mulier a cunctis catholicis putabatur Papa, non est incredibile quod aliquando hæreticus habeatur pro Papa. » (Summa de ecclesia.)

A l'époque où écrivait Torquemada, personne ne révoquait en doute l'authenticité des récits des vieux chroniqueurs au sujet de la femme qui « eut l'Église en gouvernement » (expression de Martin Franc dans son Champion des dames, écrit vers 1450). Aujourd'hui cette légende est universellement rejetée; notons toutefois qu'en 1845, un professeur hollandais, M. Kist, a écrit un gros livre pour démontrer qu'elle reposait sur un fait réel; un historien distingué, Luden, dans son Histoire du peuple allemand, liv. VI, p. 513517, en admet la vraisemblance. J. L.

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No 129.]

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L'INTERMÉDIAIRE DES CHERCHEURS ET CURIEUX.

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gonautes, sur une singulière invention de Pythagore. Voici les propres mots du « scoliaste: Il y a un ieu de l'inuention « de Pythagoras, qui se fait auec vn mi« roir en ceste sorte. La lune estant au plein, quelcun escrit dans un miroir tout « ce qu'il veut, avec du sang, et ayant ad« uerti vn autre, il se tient derrière luy, et « tourne vers la lune les lettres escrittes << dans le miroir; alors cet autre-là, fichant « son regard attentiuement dans le globe « de la lune, y lict tout ce qui est escrist « dans le miroir, comme s'il estoit escrit « dans la lune.» Notons d'abord que les miroirs des anciens étaient de métal. Méziriac, aussi savant mathématicien que littérateur, cherche à expliquer ce jeu par les règles de la catoptrique (science des miroirs); mais il ne paraît pas y croire beaucoup, son bon sens naturel l'emportant sur son respect religieux pour les anciens (il eût rendu des points à Boileau sur ce sujet). Il ne dit pas qu'il en ait fait l'essai. Pour moi, qui n'y crois pas du tout, (j'aimerais mieux le croire que d'y aller voir), j'ai pensé que les lecteurs de l'Intermé 'diaire ne liraient pas sans intérêt ce passage d'un auteur grave de l'antiquité. Si l'un d'eux essaye de renouveler des Grecs le jeu de Pythagore, et qu'il réussisse, je le prie d'en informer, par la voie de notre commun ami l'Intermédiaire, son tout dévoué collaborateur, E. G. P.

P. S. Surtout pas de supercherie! Je suis peu crédule et ne me rendrai qu'à bon escient.

Prix d'une saignée au XVIIe siècle. Puisque l'Intermédiaire s'occupe en ce moment de cette question, permettezmoi de lui communiquer une quittance donnée pour une saignée faite à la dauphine en 1688. C'est une quittance sur parchemin :

« En la présence des conseillers du Roy, Notaires, garde-notes au Châtelet de Paris, soussignez, Pierre Dionis, chirurgien du corps de Madame la Dauphine, a confessé avoir receu de Estienne Rollot, escuyer, sieur de Latour, conseiller secrétaire du Roy, Maison, Couronne de France et de ses finances, Trésorier général de la dicte dame La Dauphine, la somme de cent cinquante livres tournois, à luy ordonnée pour une seignée du bras qu'il a faict à Madicte Dame la Dauphine le quatre juin dernier.

« Dont quittance, faict et passé à Paris, en nostre estude, l'an mil six cens quatrevingt-huict, le vingt-huictiesme jour de juillet avant midy, et a signé :

« DIONIS. » Pour copie conforme: E. T.

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[25 mai 1870.

Trois anagrammes. A propos d'anagrammes, peut-être les trois suivants ne sont-ils pas connus de tous les lecteurs de l'Intermédiaire:

1° Napoléon, empereur des Français: Un pape serf a sacré le noir démon. 2o Marguerite de Valois : Salve virgo, mater Dei.

3o Hoc est enim corpus meum, hic est calix sanguinis mei, novi et æterni testamenti, mysterium fidei, qui pro vobis et pro multis effundetur in remissionem peccatorum: Calvine, non est rei figura. Luthere, non est panis. Corpus est Dei optimi maximi, effusi mihi semetipsum communicantis in cibum. Nosce quo ritu et mysterio te reum redemit. TH. PASQUIER.

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Une erreur du « Correspondant. En 1860 M. le baron Gaston de Flotte publia un petit volume fort curieux: Bévues parisiennes les Revues, les Journaux, les Livres (in-12, chez Dentu); depuis dix ans, il serait facile de joindre des additions nombreuses à cette foule de bévues; je me bornerai à en signaler une que je rencontre dans un des derniers cahiers du Correspondant (no du 25 mars 1870, p. 1177). Je transcris littéralement :

« Tout le monde a entendu parler du « célèbre Baillet, le dénicheur de saints. Pourquoi saluez-vous si bas cet homme? « demandait-on au curé de Saint-Sulpice qui, du plus loin qu'il l'apercevait, lui a tirait son chapeau. J'ai peur, répondit « le spirituel M. Languet qui construisait << alors sa belle église, qu'il ne déniche «mon Saint-Sulpice. »

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Ce n'était pas Baillet qui fut surnommé le dénicheur de saints, ce fut le docteur de Sorbonne, Jean de Launoy, personnage singulier et d'un esprit indépendant. Dom Bonaventure d'Argonne a dit de lui : « Il était redoutable au ciel et à la terre; il a plus détrôné de saints du paradis que dix papes n'en ont canonisé. Tout lui faisait ombrage dans le Martyrologe, et il recherchait tous les saints les uns après les autres, comme en France on recherche la noblesse. >>

Ce n'était point le curé de Saint-Sulpice, c'était celui de Saint-Roch qui, tremblant pour son patron, s'inclinait jusqu'à terre devant le terrible dénicheur. L'auteur dont le travail a été inséré dans le Correspondant a perdu de vue que Languet, le créateur de l'église Saint-Sulpice, était contemporain de Louis XV, tandis que Launoy était mort le 10 mars_1678, et Baillet, le 21 janvier 1706. B. T.

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L'Intermédiaire

DES CHERCHEURS ET CURIEUX

(CORRESPONDANCE littéraire, NOTES and QUERIES français.)

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Que deviennent les Arènes de Paris? Les conserve-t-on? Va-t-on les détruire?

On nous pose de divers côtés ces questions. On nous reproche en quelque sorte de n'en avoir pas reparlé depuis l'annonce de la découverte (VI, 225). Tant rien que n'est décidé, il est difficile de répondre aux questionneurs. Mais nous pouvons leur dire que les délais accordés ont profité à l'étude de l'affaire, et que les hommes d'Etat finiront peut-être par la comprendre et l'accepter. On a presque entièrement déblayé l'arène. On y a trouvé tout un petit musée de fragments antiques: on pouvait s'y attendre. Mais un autre trésor, et bien extraordinaire, était caché dedans un squelette gigantesque, trois autres squelettes enfouis ensemble têtebêche, puis deux autres, et un septième enfin. Une nécropole sous le sol, de véri

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tables corps fossiles: un nid de problèmes archéologiques. Rien de plus curieux, de plus fantastique... Les sociétés savantes de France se sont jointes aux corps savants de la capitale pour demander la conservation d'une ruine aussi intéressante, aussi importante à tous les points de vue. Une interpellation de M. Lafond de Saint-Mür (12 mai), une pétition déposée par M. Glais-Bizoin (2 juin), ont saisi le Corps législatif. Mais adhuc sub judice...

En attendant, un grand et cordial repas vient de réunir amis et ennemis des Arènes, et comme il est de règle

Que, dans un bon dîner, il faut de mauvais vers,

un Anglais de distinction y a fait lire les suivants, que nous nous sommes procurés (c'était notre devoir) pour les offrir à nos questionneurs:

STANCES

DE SIR FRANCIS GOODSTUFF, MEMBRE DE LA CHAMBRE DES COMMUNES ET DE LA SOCIÉTÉ DES ANTIQUAIRES DE LONDres.

Il l'a dit, le divin poëte: « Un jour viendra
« Où tout ce que la tombe a recélé naguère,
« Tout ce que dans son sein a renferme la terre,
« Tout ce qu'ensevelit la commune poussière,
« A des regards surpris soudain reparaîtra.

Fatidique décret pour la vieille Lutèce !
Elle a connu la loi faite à l'humanité;
Elle a senti la main du Barbare irrité;
Par le fer et le feu son sol fut dévasté,

>>

Et la nuit des tombeaux enfouit sa jeunesse...

Vingt siècles ont passé. Le palais de César
Seul avait survécu des premières années,
Avec ses grands arceaux, ses voûtes ruinées:
Dernier représentant des sombres destinées,
Des antiques débris seul débris mis à part.

Quant au peuple gaulois, rien qui vous le rappelle,
Qui retrace aux enfants l'image des aïeux,
Plus rien enfin qui parle à l'âme, par les yeux,
De l'ancien municipe ou des temples des dieux,
Du Mercure indigène ou de Cypris la belle...

TOME VI. -

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