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les liant du lien indissoluble de ta loi, toi qui bénis Isaac et Rébecca, son épouse, toi qui multiplias leur génération, en accomplissant pour eux tes promesses, bénis aussi tes serviteurs, en les dirigeant dans la voie du bien, en vertu de la grâce et de l'amour pour les hommes de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, à qui appartiennent la gloire, la puissance et l'honneur, maintenant et dans les siècles des siècles. »

Ces prières terminées, les époux s'acheminent vers l'église, où se consomme la bénédiction nuptiale, après laquelle on dit la messe. L'un et l'autre communient ordinairement. Le prêtre, en mettant une seconde fois la droite de l'épouse dans celle de l'époux, dit: «Suivant le précepte divin que Dieu a transmis aux chefs de son Église, je vous donne cette épouse qui vous sera soumise, voulez-vous être son patron? » Le mari répond, en tenant sa main: « Avec la volonté de Dieu, je veux étre son patron. » Le prêtre leur place sur la tête deux couronnes; et, lorsque la cérémonie est achevée, l'épouse est conduite à la maison de l'époux, au milieu des hymnes et des chants d'allégresse. Ils portent leurs couronnes pendant huit jours ou trois jours au moins; et, pendant cet espace de temps, ils vivent séparés l'un de l'autre, dans une continence parfaite. A la fin de ces jours désignés, le prêtre revient avec le diacre reprendre les couronnes, et fait de nouveaux vœux pour la prospérité de leur mariage.

OBSERVANCES ET PRATIQUES DIVERSES DES ARMÉNIENS.

LEURS JEUNES. Nul autre peuple ne pousse aussi loin l'austérité et la mortification dans les jeûnes de l'Église; et nous avons vu qu'une des causes de leur aversion pour les Grecs, provenait des tentatives faites par ceux-ci de réformer la loi de leurs abstinences. Les jeûnes sont aussi fréquents que rigoureux. Durant tous ces jours, ils s'abstiennent de viande, de poisson, d'œufs, de beurre, de lait et de fro

mage, ne faisant qu'un repas, après le coucher du soleil. Le vin et l'huile sont aussi interdits par les anciens ca

nons.

Ils jeûnent tous les mercredis et vendredis de l'année, excepté depuis Pȧques à l'Ascension, qui est le temps où ils ont le plus de réjouissances en mémoire de la résurrection de NotreSeigneur. Ils font ensuite les dix jeûnes suivants, chacun d'une semaine : 1° celui d'après le premier dimanche de la Trinité, qu'ils appellent jeûne de pénitence; 2o le jeune de la Transfiguration; 3° le jeûne de l'Assomption; 4° le jeûne de la Croix en septembre; 5° un jeûne de pénitence après le treizième dimanche de la Trinité; 6o un autre semblable après le vingt et unième dimanche; 7° le jeûne de l'Avent; 8° celui de Noël, dont ils ne commencent pas la fête à minuit, mais le matin comme pour les autres fêtes, jeûnant la Vigile du soir; 9o un jeûne de pénitence avant le carnaval, qui dure quinze jours; 10° le grand carême qui commence dès le lundi, où l'on redouble d'austérité. On voit que les jeûnes d'obligation emportent la moitié de l'année. Il y a encore trois jeunes de dévotion pour les plus fervents, chacun de cinquante jours. Le premier est de Pâques à la Pentecôte; le second, de la Trinité à la Transfiguration; le troisième commence cinquante jours avant Noël. Il y a en outre un petit jeûne surérogatoire de l'Ascension à la Pentecôte.

Les Arméniens distinguent trois degrés dans le jeûne. Bach, qui consiste à s'abstenir non- seulement de chair, mais encore de poisson, d'œufs et de laitage. Dzuom, qui est proprement le jeune dans lequel on ne boit ni l'on ne mange jusqu'au coucher du soleil. Le navagatik est simplement ce que nous appelons l'abstinence ou la privation de viandes.

Cette discipline austère de l'Église arménienne remonte à l'origine de son établissement. Saint Grégoire l'Illuminateur, son premier patriarche, et qui, au milieu de ses missions, mena toujours la vie d'un anachorète, fit

passer dans les institutions de ce peuple le régime sévère adopté par lui, voulant résumer dans ces pratiques toute la pensée du christianisme, qui n'était à ses yeux qu'une grande et continuelle expiation sur cette terre. Que ceux qui attaquent l'Eglise catholique comme imposant à ses fidèles des mortifications trop rigoureuses, aillent en Arménie, ils se convaincront que la privation et l'abstinence ne sont pas aussi nuisibles à l'hygiène publique que l'intempérance ou l'excès dans le boire et le manger. La beauté du sang, l'éclat du teint des femmes, la force des hommes, prouveront suffisamment à l'observateur que le régime le plus dur peut être aussi le plus sain, lorsqu'il est simple, calme et régulier. En outre, il ne faut jamais oublier que les Orientaux sont infiniment plus sobres que nous, et qu'ils ne connaissent pas tous les raffinements d'un luxe corrupteur.

ÉGLISES. - Dans l'intérieur de l'Arménie, où la pauvreté du peuple est grande à cause des exactions des pachas, les églises sont petites et simples, n'étant distinguées des maisons ordinaires que par une croix tracée sur la porte d'entrée. L'autel, suivant l'antique usage, regarde l'Orient; du reste, tout est fort simple également à l'intérieur, et elles n'ont pour ornement que quelques peintures grossières. Les fidèles n'y entrent que nu-pieds; et, lorsqu'ils passent devant la porte, ils vont en baiser le seuil.

A Constantinople, et dans les autres villes où habitent de riches banquiers et des négociants, la maison de Dieu est convenablement ornée. La façade, comme la partie intérieure, rappellent les églises des Grecs. Le grand autel, correspondant à leur bema, est voilé par deux rideaux, dont le plus grand cache le sanctuaire au peuple, ainsi que le prêtre célébrant, les diacres et ceux qui les assistent, pendant certaines parties de la messe; usage oriental qui ajoute, du reste, à la cérémonie un caractère mystérieux, plus imposant. Il rappelle ces temps de la primitive Église, où le diacre ordonnait aux profanes de sortir avant la con

** Livraison. (ARMÉNIE.)

sommation du sacrifice. Le second rideau cache seulement le célébrant au moment de la communion, comme s'il devait alors être séparé du reste des humains, et n'avoir pour spectateur que Dieu et les anges.

Toutes les églises sont sous la dédicace du Seigneur, de la Vierge, de la croix, des apôtres, de saint Grégoire l'Illuminateur, et de quelques autres saints des premiers siècles.

ZIN.

Le dimanche et les jours de fêtes, les fidèles accourent à l'église avant l'aurore. Ils y restent dans le plus grand recueillement, ne se permettant jamais d'y parler, ou de cracher sur le pavé. Les hommes tiennent ordinairement un chapelet à la main, et sont séparés des femmes. Les offices sont fort longs; ils durent cinq ou six heures. Suivant le rite de l'Église arménienne, on ne célèbre la messe qu'une fois par jour dans la même église; et, aux solennités, cette faveur est réservée aux dignitaires du clergé. ÉGLISE PATRIARCALE D'EcZMIANous empruntons au célèbre voyageur Chardin, qui visita ces lieux à la fin du dix-septième siècle, la description qu'il en donne, et qui, si nous en exceptons les remarques inconvenantes qui lui sont suggérées par son s'acesprit réformiste et intolérant, corde exactement avec celle du savant professeur Parrot, dans la relation de son Voyage au mont Ararat. « A deux lieues d'Erivan, dit-il, est le célèbre monastère des Trois Églises (*), le sanctuaire des chrétiens arméniens, s j'ose ainsi parler, et le lieu pour lequei ils ont le plus de dévotion. Les Arme niens l'appellent Eczmiazin, c'est-à dire, la descente du Fils unique engendré; et ce nom, disent-ils, a été donné à ce lieu, parce que JésusChrist s'y fit voir clairement à saint Grégoire qui en fut le premier patriarche. Les Mahométans la nomment Utchéclisse, c'est-à-dire, les trois églises, à cause qu'outre l'église du couvent, il y en a deux autres assez proches, et qu'en tout elles sont au

(*) Voy. figure no 19.

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nombre de trois. La première, la principale qui s'appelle Eczmiazin, comme l'on a dit, est un bâtiment fort massif et fort vaste, et qui est tout de grosses pierres de taille. Les pilastres, qui ont septante pieds de hauteur, sont de lourdes masses de pierre. Le dôme et les voûtes en sont aussi. Le dedans de l'église n'a aucun ornement de sculpture ni de peinture. Les chapelles sont du côté de l'Orient. Il y en a trois au fond de l'église. Celle du milieu est grande et a un autel de pierre, à la façon des chrétiens orientaux, assez bien orné. Celles des côtés n'ont point d'autel; mais une sert de sacristie, et l'autre de trésor. La raison pour la quelle on n'y trouve point d'autel, c'est que, dans la créance des Armépiens, de même qu'en celle de tous les autres chrétiens d'Orient, l'on ne célèbre les saints mystères de la communion eucharistique qu'une fois le jour, en une église, et lors seulement qu'il s'y trouve quelque fidèle pour y participer. Ainsi il n'est pas nécessaire d'y avoir plus d'un autel en chaque église.

« Les moines du lieu font voir dans la sacristie plusieurs parements fort beaux et fort riches, des croix et des calices d'or, des lampes et des chandeliers d'argent d'une extraordinaire grandeur. On y voit, dans le trésor, plusieurs châsses d'argent et de vermeil doré. Les principales reliques du lieu sont, au rapport des moines qui en ont la garde, le haut du corps de sainte Ripsymée, un bras et une jambe de sainte Caïane, un bras de saint Grégoire, surnommé l'Illuminateur, à cause qu'il convertit l'Arménie.

!

« Au centre de l'église, il y a une grande pierre de taille carrée, de trois pieds de diamètre, et de cinq pieds d'épaisseur. Les Arméniens disent que c'est l'endroit où saint Grégoire, leur apôtre, vit Jésus-Christ. Ils assurent que Jésus-Christ fit, autour de ce saint, avec un rayon de lumière, le dessin de l'église d'Eczmiazin, et qu'il lui commanda de faire bâtir l'église sur la figure qu'il avait tracée. Ils ajoutent qu'au même temps la terre s'ou

vrit à l'endroit où est cette pierre ; que Notre-Seigneur jeta là, dans l'abîme, les diables qui étaient dans les temples d'Arménie, et y rendaient des oracles; et que saint Grégoire fit aussitôt couvrir cette ouverture d'un marbre.

«Ils_ajoutent qu'Abbas le Grand, roi de Perse, enleva ce marbre, le mit au trésor royal de Perse, et fit mettre en la place la pierre dont nous avons parlé.

«Le grand clocher a été nouvellement rebâti. Il y a six cloches; la plus grosse est de douze cents pesant. Un des petits clochers fut abattu il y a quarante ans ; et depuis on ne l'a pas fait relever, faute d'argent, disent les moines. Le premier monastère de cette église fut båti par Nersès, vingt-neuvième patriarche d'Arménie. Les Tartares le ruinèrent; et, si l'on en veut croire la chronologie du lieu, il a été cinq fois abattu à rez-de-chaussée. Il est à présent bâti de briques. Il y a, dans le couvent, des logements pour tous les étrangers qui le viennent visiter, et pour quatre-vingts moines. Ils ne sont d'ordinaire que douze à quinze. Les patriarches d'Arménie sont obligés de résider à ce couvent. Le patriarche d'Eczmiazin a quelque vingt évêchés sous lui.

« Les deux autres églises qui sont proches d'Eczmiazin s'appellent l'une Sainte-Ripsymée, et l'autre SainteCaiane, du nom de deux vierges romaines, qui, dit-on, s'enfuirent en Arménie durant la neuvième persécution, et qui furent martyrisées au même lieu où ces églises sont bâties. Sainte-Caïane est à la droite du monastère, à sept cents pas seulement. SainteRipsymée est à la gauche, à deux mille pas. Ces deux églises sont à demi ruinées; il y a longtemps qu'on n'y fait plus le service. »

Les revenus du couvent d'Eczmiazin étaient autrefois beaucoup plus considérables. Trente-trois villages en dépendaient; et, aujourd'hui, trois sont restés seulement au patriarche. Il perçoit un ducat d'impôt personnel par individu, et vingt pour cent des différents produits. Les pèlerinages et les aumônes sont aussi une des ressources

du couvent, qui comptait encore, en 1833, dans les cloîtres, quatorze évêques, quarante-cinq ou cinquante vartabieds, sept ou buit diacres.

En 1822, comme les Kurdes poussaient leurs incursions jusqu'à la porte du couvent d'Eczmiazin, pour lever des contributions, et que deux religieux avaient succombé à leurs mauvais traitements, le patriarche, avec tout son clergé, se retira dans les provinces russes. Le commandant de la province accueillit tous ces illustres fugitifs avec les plus grandes marques de distinction, et leur donna pour domicile le couvent de Sanaïn en Somkéthie. Dans le dernier traité de paix que la Russie a conclu avec la Perse, elle a obtenu la cession du couvent d'Eczmiazin, et le patriarche a pu rentrer en possession de son siége. Le Catholicos actuel se nomme Éphrem, et en 1833 il entrait dans sa quatrevingt et unième année. Il avait payé dix mille francs au schah de Perse pour le droit de son installation.

Cet impôt, prélevé par les rois musulmans sur les patriarches d'Eczmiazin ou de Constantinople, a souvent forcé ceux-ci, comme nous l'avons remarqué plus haut, de se livrer à une coupable simonie, afin de s'acquitter des dettes qu'ils contractaient pour leur nomination. Aussi les voyait-on vendre au poids de l'or le myron ou l'huile sacrée, et exiger d'un évêque, pour son ordination, des sommes considérables.

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La liturgie arménienne, telle qu'elle est encore suivie dans les églises, est fort ancienne. On la fait remonter à Mesrob, ce même saint qui inventa les lettres de l'alphabet, vers le commencement du cinquième siècle, et qui présida à la traduction des livres saints. Mesrob était versé dans la connaissance des lettres païennes et de la littérature classique de la Grèce; en outre, c'était un homme d'oraison et fort avancé dans les voies de la vie spirituelle: son style et ses compositions portent le cachet de ce double caractère. La partie de la liturgie concernant le saint sacrifice de

la messe est la plus parfaite. Les livres qui servent à la liturgie et au culte sont le Jamakirk, ou bréviaire réglant les exercices spirituels de chaque jour, et contenant les prières que l'on doit réciter aux divers moments de la journée, lesquels sont le milieu de la nuit ou l'heure de la résurrection de JésusChrist; l'aurore, ou l'heure à laquelle Jésus-Christ apparut aux deux Marie, près du sépulcre; le lever du soleil, ou le moment de son apparition à ses disciples; neuf heures, ou l'instant du crucifiement; midi, ou le moment de l'obscurcissement de la terre couverte de ténèbres; trois heures, seconde heure canonique à laquelle le Fils de l'homme rendit l'esprit; le soir, alors qu'il est descendu de la croix et enseveli; le couvre-feu, ou l'heure à laquelle il descendit aux limbes pour délivrer les âmes des justes; et enfin l'heure du coucher. Le Charagan, ou Collier de perles, recueil d'hymnes et de proses à la louange de Dieu et des principaux saints de l'Église d'Arménie, est un ouvrage d'un ascétisme tendre et élevé. On peut ajouter le Saghmos, ou livre des psaumes de David, avec les leçons choisies des prophètes, des Évangiles et des Épîtres; le Djachots ou Missel; le Khorhertader, également pour la messe; et le Machdots, liturgie attribuée à un savant et pieux moine du neuvième siècle de notre ère, et qui sert aux différentes cérémonies du culte.

L'ordre des cérémonies et des prières du suprême sacrifice badarak ne ressemble aucunement à notre rit romain. La messe n'étant dite qu'une fois chaque jour, se célèbre toujours avec une certaine solennité. L'officiant, les diacres et les acolytes, ont des vêtements sacerdotaux d'une forme particulière qui n'est pas sans majesté. La tiare des patriarches et leur chasuble rappellent la mitre pontificale et le pectoral des grands prêtres hébreux.

Le pain mystique est préparé par un diacre la veille du sacrifice. Ils ne suivent point dans sa préparation le rit des autres Orientaux, puisqu'il le font sans levain, ainsi que les maronites.

L'hostie est ronde; elle est aussi grande que celle des Latins, mais plus épaisse. Outre les hosties de la communion, ils en bénissent simplement quelques autres plus grandes et plus minces pour les distribuer aux fidèles à la fin de la messe. Leur distribution remplace chez eux celle du pain béni.

Le corps de la messe est rempli de prières pleines d'onction et de sublimité. Après avoir mis le vin dans le calice, le prêtre dit : « Seigneur, notre Dieu, dont la puissance est inscrutable et la gloire incompréhensible, toi dont la miséricorde est immense et la piété infinie, jette les yeux de ton inénarrable amour sur ce peuple et sur ce saint temple, verse sur nous et sur nos coassociés dans la prière ta miséricorde et la piété.

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Pendant qu'on chante le célèbre Trisagion dont nous avons parlé, le célébrant récite cette autre oraison : « Dieu clément, qui habites au milieu des saints, les chérubins te louent et te glorifient avec le Trisagion; toute la milice céleste t'adore, toi qui as fait passer toute créature du non-être à l'être, qui as formé l'homme à ton image et à ta ressemblance, qui l'as orné de toutes tes grâces et lui as appris à rechercher la sagesse et l'intelligence; toi qui n'as pas méprisé le pécheur et qui lui as imposé seulement la pénitence; toi qui nous as permis, serviteurs indignes que nous sommes, de nous tenir en ce moment devant la gloire de ton saint autel pour t'offrir cette prière de glorification. Seigneur, reçois de la bouche des pécheurs la bénédiction trois fois sainte, et conserve-nous par l'effet de ta clémence; remets-nous nos péchés volontaires ou involontaires; purifie notre âme, notre esprit et nos corps; accorde-nous de te servir dans la sainteté tous les jours de notre vie, par l'intercession de la sainte Vierge et de tous les saints qui t'ont été agréables pendant ce siècle, parce que tu es Notre-Seigneur saint, et qu'à toi appartiennent la gloire, la principauté et l'honneur, dans tous les siècles des sièclés. »

Les premiers missionnaires catholi

ques qui vinrent en Arménie, totalement étrangers aux mœurs et au largage du pays, portèrent contre ses habitants cette accusation grave qu'ils étaient encore livrés aux superstitions de l'idolâtrie. Ils alléguaient, comme preuve, les offrandes d'animaux qu'ils faisaient à certaines solennités, et auxquelles ils donnaient le nom de badarak, nom qui désigne également le sacrifice mystique de la messe; mais ils ne savaient pas que ces dons volontaires, faits par aumône ou comme accomplissement d'un vou, pour être répartis entre les pauvres, étaient une institution éminemment chrétienne, puisqu'elle astreignait le riche à donner aux indigents, à certains jours de l'année, une part de son superflu. Il faudrait aussi bien regarder, comme une tradition du paganisme, l'offrande du pain béni qui se pratique encore dans les églises catholiques. Jean VI l'Historien raconte qu'un martyr du huitième siècle s'écriait du haut de la croix où l'avaient suspendu les Musulmans : Seigneur, en ce jour, fête annuelle de saint Georges, j'avais coutume de vous offrir un bélier: eh bien, aujourd'hui, je m'offre moimême, pour la gloire de votre nom, à la place de cette victime.» Est-ce là le langage d'un païen?

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Nersès le Gracieux, dans son traité appelé Enthanragan, donne au sujet de cette offrande les détails suivants, qui ne sont pas sans intérêt : « La victime peut être un bœuf ou une brebis, ou quelque autre animal pur, sans en exclure les volatiles. Les prêtres appor tent l'offrande à la porte de l'église, placent le sel devant l'autel, et lisent le passage des saintes Écritures adapté à la circonstance, mentionnant le nom de la personne qui fait ce don, et priant Dieu de lui accorder la rémission de ses péchés. On présente alors le sel à l'animal, puis on l'égorge. Une portion appartient au prêtre, l'autre est distribuée aux pauvres, et le reste est réparti entre les amis ou les parents. Tout doit être mangé avant le lendemain matin. Ce sacrifice n'est pas considéré comme propitiatoire, à la ma

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