Images de page
PDF
ePub

naires furent stipulés, en 1781, dans le traité de Tsarskoïé-Sélo.

Cependant les Tatars de Crimée commençaient à reconnaître que leur prétendue indépendance de la Porte leur imposait un joug non moins pesant. Dévlet-Ghirei fut remplacé par Sahim, plus dévoué aux intérêts de la Russie. La sagesse de son administration ne put le garantir contre le ressentiment du parti turc; on massacra sa garde, et l'on élut à sa place Sélim-Ghireï. Les Russes n'attendaient qu'un prétexte, car le détrônement d'un khan était un événement trop ordinaire pour motiver leur intervention, si elle n'eût été préparée de longue main. Le prince Prozorovski envahit la presqu'île, battit les Tatars, et rétablit le khan Sahim. Pendant que Catherine achetait à force de succès le droit de réclamer hautement la Crimée, comme dédommagement de ses sacrifices, elle favorisait l'émigration dans ses États des Valaques et des Moldaves, et alarmait le divan sur les suites de cette dépopulation. Les Turcs crurent que le meilleur parti à prendre était de céder à ses exigences, dans la crainte d'un résultat pire. De nouvelles clauses additionnelles au traité de Kaïnardji consacrèrent les prétentions des Russes dans la presqu'île, et étendirent leurs priviléges maritimes. M. de Saint-Priest, ministre de France, appuya ces négociations auprès de la Porte, la politique de sa cour ayant cessé d'être hostile à la Russie depuis que l'Angleterre n'avait vu qu'avec un vif mécontentement l'adoption du système de la neutralité armée.

La tranquillité ne tarda pas à être troublée sur ce théâtre de l'ambition moscovite Bâti-Ghiréï, frère de Sahim et gouverneur du Kouban, se révolta contre le khan, qui recourut à la protection des Russes; pour prix de ce service, et à leur instigation, il exigea de la Porte la cession d'Oczakof: un de ses envoyés fut cruellement traité par le pacha de Taman; Sahim demanda justice à ceux mêmes qui s'apprêtaient à le dépouiller. Toute la .presqu'ile, le Kouban et le Budziak

furent occupés militairement. Les chefs et le khan lui-même durent prêter serment à l'impératrice. Sahim échangea sa souveraineté précaire contre une pension dont il ne jouit pas longtemps. Plus tard il tomba au pouvoir des Turcs, et fut décapité à Rhodes.

Des mesures sévères furent prises contre ceux qui se montraient disposés à secouer le nouveau joug, et de sanglantes exécutions, dont le nombre a été bien exagéré, découragèrent les Tatars qui auraient eu quelque velléité d'indépendance. Ainsi quelques siècles avaient entièrement changé les rôles entre ces deux peuples. En remontant le cours de vingt règnes, on retrouve une époque où les princes russes ne recevaient la couronne que sous le bon plaisir des khans; désormais ces hordes, resserrées dans un étroit espace, étaient devenues non-seulement des tributaires, mais des sujets de ces mêmes Slaves dont ils avaient si souvent désolé les campagnes et brûlé les habitations. C'est contre la Russie que le torrent est venu se briser; retenus dans ces solitudes par l'étendue et la fécondité des pâturages, ils y ont campé cinq cents ans pour le malheur de l'humanité; mais, divisés entre eux et affaiblis par les résistances partielles des peuplades sur lesquelles pesait leur joug, ils ne purent porter leurs conquêtes dans l'Europe occidentale, et les malheurs des Russes ont garanti de ce fléau destructeur le centre de la civilisation. Quand on pense à leur manière de faire la guerre, et à l'influence que leur séjour prolongé a dû avoir sur les mœurs des vaincus, on cesse de s'étonner de la résignation courageuse du soldat russe, et des excès qu'on lui reproche après la victoire.

Les suites de l'occupation de la péninsule étaient faciles à prévoir. Ĉatherine la réunit à son empire, ainsi que le Kouban et l'île de Taman; et la Turquie, trop faible pour s'y opposer efficacement, ratifia cette conquête par un nouveau traité. On peut dire que, dès cette époque, l'Euxin devint une mer russe; les neuf dixièmes du

littoral appartenaient encore à la Turquie; mais cet empire marchait vers sa ruine d'un pas non moins rapide que les Russes s'avançaient vers le terme de leur puissance ambitieuse. Déjà leurs intrigues remuaient tout l'Orient et pénétraient jusque dans le sein même du divan.

Tant de succès semblaient permettre de tout oser. On parlait à Pétersbourg de la prise de Constantinople comme d'un événement prochain; le nom de Constantin, donné au second des fils de Paul, annonçait, selon les uns, l'intention de relever l'ancien empire grec, ou, selon d'autres, de fonder, après quinze siècles,, une nouvelle ère de la paix de l'Eglise. Comme pour ajouter à ce qu'il y avait de probable dans ces conjectures, on avait donné à ce prince une nourrice grecque, et il apprit à parler la langue des descendants des Thucydide et des Épaminondas. Les Turcs eux-mêmes, sur la foi d'une vieille tradition, annonçant qu'ils seront chassés de l'Europe par une nation blonde, semblaient accep ter fatalement leur avenir, bien résolus toutefois à reculer, autant que possible, cette époque indéterminée.

Catherine affectait d'encourager au sein même de sa cour ces espérances prématurées, sachant combien il importe de préparer les esprits aux changements importants. Si les événements Jui ménageaient une réussite complète, ce résultat déjà prévu avait moins de retentissement en Europe; si elle se voyait obligée d'ajourner encore ses vastes projets, elle s'y préparait du moins par des envahissements successifs, et elle pouvait attribuer ce repos à sa modération et à son désintéressement.

Grégoire Orlof et Panin n'étaient plus; et la mort de Landskoï, le plus beau et le plus aimable de tous ceux que l'impératrice distingua, l'avait plongée dans la plus vive douleur. Elle la surmonta comme il convenait à une femme de son caractère, en s'occupant d'entreprises et de créations utiles. Elle défraya des voyages scientifiques, organisa l'instruction publique, établit des écoles nor

males, pressa l'achèvement des canaux qui devaient faire communiquer la Caspienne à la Baltique, et ordonna de substituer la qualification de sujet à celle d'esclave qui était en usage dans les suppliques. Il faut convenir, au reste, que le mot ne changeait rien à la chose, et peut-être était-ce donner trop d'importance à une formule sans autre signification que celle qui s'appliquait à la condition politique de tout Russe. Dans les pays libres, n'at-on pas conservé jusque pour des rapports de particulier à particulier des formules qui semblent accuser le vasselage et la servitude?

On chargea des colléges de surveillance de créer des hôpitaux, et des dotations considérables furent affectées à ces fondations. De nombreux hospices s'ouvrirent pour les femmes en couche, pour l'inoculation, pour les enfants trouvés. Les maladies secrètes, qui sévissent avec plus de force dans un climat rigoureux et sur les classes pauvres, furent traitées dans des maisons spéciales. Le mot discrétion était marqué sur le linge employé dans ces établissements; c'était doubler le bienfait par une délicatesse ingénieuse. Elle institua des écoles militaires, et ne négligea rien de ce qui pouvait contribuer à faire fleurir les sciences, les arts et les lettres. Eile avait remarqué qu'une éducation génerale est une mauvaise préparation à la vie sociale dans un pays où les classes mettent une distinction entre les individus pour ne point donner à la jeunesse l'idée d'une égalité qui devait disparaître pour elle à son entrée dans le monde, elle établit une pension de jeunes filles où les différences sociales étaient observées dans l'éducation, dans les occupations, et jusque dans les vêtements.

Elle réunissait chaque année les principaux ministres des différents cultes dans un banquet qu'elle appelait le dîner de tolérance, et s'efforçait de corriger ainsi par les mœurs et l'égalité devant Dieu, ce qu'il y avait de tranché et d'exclusif dans la constitution politique de son empire. Quand

les jésuites furent bannis du reste de l'Europe, elle les accueillit dans ses Etats, et leur permit de fonder un séminaire à Mohilef. Elle comprit que cet ordre n'était point à craindre dans cet état de persécution générale, et qu'en se chargeant de l'éducation de la jeune noblesse, les jésuites pouvaient rendre à la Russie d'importants services.

L'émulation militaire était excitée par des avantages et des distinctions; l'ordre de Saint-George, fondé en 1769, et partagé en quatre classes suivant l'échelle des grades, était la récompense de quiconque s'était signalé par un fait d'armes remarquable, depuis le soldat qui enlevait un drapeau jusqu'au général qui gagnait une bataille rangée ou enlevait d'assaut une ville forte de premier rang. En 1783, elle créa l'ordre de Saint-Vladimir, qui fut affecté au mérite civil et militaire; mais bientôt la faveur et l'intrigue éludèrent l'esprit de ces institutions, et l'abus des distinctions leur ôta une grande partie de leur lustre et de leur prix.

Pour assurer ses nouvelles acquisitions dans le Caucase, elle attira des colons étrangers qui acceptèrent la mission périlleuse de cultiver ces contrées magnifiques sans cesse menacées par les montagnards. Le meilleur moyen de dompter à la longue leurs mœurs féroces, était de les resserrer dans une ceinture de pays cultivés, défendus par des forteresses, en leur montrant d'un côté l'abondance et l'ordre, et de l'autre, la pauvreté et la guerre.

Le cabinet de Versailles, représenté à Saint-Pétersbourg par M. de Ségur, se rapprochait de la ligne politique de Catherine, à mesure que l'Angleterre semblait s'en écarter; et cette tendance se manifestait par un échange de bons offices: la Russie traitait les commerçants français avec faveur, et, de son côté, la France adhérait à l'acte de la neutralité armée.

Le midi de l'empire se ressentait encore des dévastations causées par les dernières guerres; cependant les

bords de la mer Noire et de celle d'Azof se repeuplaient; les restes des Cosaques zaporogues et quelques autres peuplades y furent transportés ; établis dans ces pays fertiles, adossés d'un côté à la mer, et de l'autre resserrés par des provinces en état de réprimer leurs brigandages, ils virent leurs mœurs s'adoucir, en conservant toutefois quelque chose de leur caractère guerrier et aventureux.

Potemkin, pour prix de ses victoires en Crimée, avait été nommé gouverneur général des contrées récemment conquises, et grand amiral de la mer Noire; Catherine lui conféra le surnom de Taurique (Tavritcheskoï). On assure qu'il aspirait à la viceroyauté de ces provinces; et il sollicitait vivement sa souveraine d'aller visiter ces lieux célèbres, dont l'histoire se mêle aux annales des premiers peuples civilisés. Ce voyage fut résolu en 1787. Jamais marche triomphale ne fut environnée de tant de pompe. Catherine partit accompagnée d'une cour nombreuse et brillante. De grands feux, allumés de distance en distance. éclairaient la route pendant la nuit. A Kief, l'impératrice reçut l'hommage des grands de Pologne; là elle s'embarqua avec sa suite sur des galères richement pavoisées, et descendit le cours du Dniepr; A Kanief, elle reçut à bord le roi de Pologne. A Krementchouk, elle descendit dans un palais improvisé où se trouvaient réunies toutes les recherches du luxe : douze mille soldats lui donnèrent le spectacle d'un combat simulé; jusqu'à Kherson les bords du fleuve et les campagnes environnantes offrirent à ses regards une suite variée des plus riantes décorations; les paysans, en habits de fête, étaient groupés sur son passage; les beaux troupeaux de l'Ukraine animaient partout le paysage, et dans les endroits inhabités, des villages factices, semblables à ceux qu'on représente dans nos théâtres, formaient un horizon à souhait. Telle n'était pas l'Ukraine, depuis si longtemps dévastée par des guerres sanglantes; mais telle sans doute la verront nos

neveux, quand les bienfaits d'une longue paix, sous une administration éclairée et paternelle, auront développé toutes les ressources du sol, et régénéré le génie de ses habitants.

A Kherson, l'impératrice trouva Joseph II et un grand nombre d'étrangers que cette solennité avait attirés. Sur la porte d'Orient, on lisait cette inscription en langue grecque: Ici est le chemin de Byzance.

-Le sultan, comme pour protester contre cette exploration menaçante, envoya quelques vaisseaux de guerre croiser à la hauteur de Kherson : Catherine se contenta de dire : « Voyezvous ces Turcs, on dirait qu'ils ne se souviennent plus de Tchesmé. »

Après avoir parcouru la Tauride, Catherine visita la Crimée (*); elle

(*) Cette contrée, dès la plus haute antiquité, avait ses souverains particuliers. Conquise par les Taures, peuple de la Scythie européenne, d'où vient le nom de Tauride, prise par Mithridate, roi de Pont, reprise par les Romains, soumise depuis aux rois du Bosphore, elle demeura aux empereurs d'Orient dans le partage de l'empire. Les Khazares, appelés Huns par Procope, s'y établirent ensuite. On les y trouve encore du temps de Constantin Porphyrogénète. Ils donnèrent à ce pays le nom de Khazarie, qui lui resta jusqu'au quatorzième siècle, bien qu'il fût déjà envahi par les Tatars. A cette époque, toute la contrée était déjà divisée entre deux peuples, les Khersonites et les Bosphoriens; ils eurent de fréquents démêlés, à la suite desquels les limites de ces derniers furent successivement réduites, d'abord jusqu'à Caffa, puis à quarante milles d'étendue par delà le détroit.

Parmi les villes anciennes, en commençant par la côte occidentale, on remarquait Chersone, l'Héraclée Chersonésius, que Pline dit aussi avoir été appelée Mégarice. Peutêtre, ajoute Peyssonnel, est-ce la ville nommée Kozlof par les Russes, et Guslévé par les Tatars. Constantin Porphyrogénète donne une indication qui paraît concluante: v τῷ μέτρῳ δὲ λίμναι καὶ λίμενες εἰσὶν ἐν αἷς Χέρσωνιται ἅλας ἐργάζονται. (Entre la ville et le Borysthène, il y a des ports et des étangs où les Khersonites font le sel).

En effet, entre le Dniepr et Kozlof on trouve les salines de Pérékop (ou Orkapi). 23 Livraison. (Russie.)

s'arrêta à Baktchésaraï, et logea dans le palais des khans, où l'on meubla quelques salles à l'européenne pour la recevoir (*). L'impératrice sut se concilier, moins encore par sa générosité que par les grâces de son accueil, les chefs les plus distingués des anciennes familles tatares; mais les Turcs ne négligèrent aucuns moyens pour semer la méfiance au sein de ces populations, et jusque dans les retraites inaccessibles du Caucase.

Catherine, à son retour, eut à Poltava le spectacle d'une bataille simulée,

L'ancien cap Kotou μéτwney (front de bélier), paraît avoir eu quelque influence sur la dénomination russe de Kozlof, de Kosel, en russe, bouc, bélier.

Après la pointe d'Ayoudag commence la côte orientale. En la suivant du sud au nord, on trouve Soudag, qui est l'ancien Cytœum, que Ptolémée a sans doute présenté comme trop enfoncé dans les terres, à moins que le retrait de la mer n'ait laissé cette partie de la côte à découvert. On remarque ensuite la Théodosie des anciens, aujourd'hui Caffa, ville commerçante que les Turcs, à cause de sa position et de son commerce, appelaient la Constantinople de la Crimée. On n'y trouve plus que quelques monuments du temps des Génois et du Bas-Empire. Les noms de Bosphore et de Panticapée paraissent devoir s'appliquer à une seule et même ville. C'est sur le même emplacement que s'élève aujourd'hui Jénikalé.

Pour les villes de l'intérieur, l'ancienne Satarcha est probablement Tchéterlik; le Cimmerium de Ptolémée n'est autre que Eski-Krim. La ville de Portacra était peutêtre Kara-Sou.

Baktchésaraï ou Bakhtchisaraï est le nom de l'ancienne capitale de la Crimée. Ce mot est composé de bakhtché, jardin, et saraï, palais. Elle occupe, selon toute apparence, l'emplacement de Badatium ou Palatium, le Пartov de Strabon. L'ancienne ville se trouvait peut-être à l'extrémité orientale du vallon de Baktchésaraï, sur une roche élevée, ou bien à l'endroit nommé par les Tatars Téré-Kirman (le château de la cime), à une demi-lieue de la ville actuelle, vers l'extrémité septentrionale de la vallée de Katchi.

(*) Voyage en Tauride, par Mouravief Aspostol.

28

qui put lui donner une idée de celle qui ouvre réellement l'ère de la puissance militaire des Russes. En réveillant ces idées degloire, Potemkin préparait sa souveraine à de nouveaux triomphes. On a avancé sérieusement que la guerre qui éclata la même année entre la Russie et les Turcs n'eut pour motif que l'ambition personnelle du favori, qui voulait obtenir le grand cordon de Saint-George: il faut être doué d'une foi bien robuste pour admettre une telle opinion, et, en même temps, il faut s'obstiner à ne voir, dans toute la suite du règne de Catherine, que des événements purement fortuits que le hasard se serait plu à lier les uns aux autres de la manière la plus logique, c'est-à-dire la plus favorable à la grandeur de ses peuples.

La Porte alarmée sortit enfin de son apathie; l'ambassadeur russe fut eufermé au château des Sept-Tours, et l'on réunit avec promptitude des moyens formidables de defense: mais ces préparatifs, faits à la hâte, accusaient le défaut d'organisation et de suite, et l'empire du croissant, placé entre le double péril de rester stationnaire, tandis que ses voisins s'instruisaient dans les sciences militaires, ou de risquer des réformes odieuses aux musulmans, semblait condamné à une ruine prochaine par les nécessités de la paix comme par celles de la guerre. La Russie, qui voulait une rupture, était prête; elle s'était assuré des intelligences dans les pays qui environnent la Turquie, et sur lesquels le divan n'exerçait plus qu'une influence balancée et douteuse: Héraclius, tsar de Géorgie, que les Russes venaient de secourir contre un moine italien, dont le courage l'avait mis en péril (*),

(*) Ce moine avait été envoyé comme missionnaire pour prècher l'Evangile en Perse. Il aima mieux réformer le Coran. Banni avec les prosélytes qu'il avait attachés à ses nouvelles doctrines, il s'avança vers la Géorgie, soumettant sur son passage les beys, les agas et les pachas. Il battit trois fois Héraclius, et ajouta à son nom celui de Mansur (victorieux). Vaincu à son tour, il fut en

se dévouait entièrement aux intérêts de ses protecteurs. Tout ce qui professait la religion grecque faisait des vœux pour l'anéantissement des infidèles.

L'Europe était loin de voir sans inquiétude cette croisade bien moins religieuse que politique. Les peuples mêmes qui avaient préparé l'agrandissement prématuré de la Russie en recherchant son alliance au péril de l'équilibre général, tremblaient sur les suites de tant d'envahissements successifs. L'Autriche se trouvait entraînée dans l'alliance russe par l'ambition irréfléchie de Joseph. Les nouveautés introduites par ce prince dans ses États de Hollande, avaient causé une effervescence qui se déclara par un soulèvement. L'indépendance des ÉtatsUnis d'Amérique était un exemple attrayant pour les peuples; la Hollande essaya de le suivre, et bientôt la France poussa les conséquences des mêmes principes jusqu'à un point qui serait sa condamination s'il n'eût été en même temps son salut. L'Angleterre avait excité la Porte à la guerre; mais elle ne pouvait compter que sur la Prusse, qui s'était associée timidement à cette démarche, n'osant se déelarer ouvertement contre les forces réunies des deux empires. La France affaiblie suivait la politique de l'Autriche, et n'y trouvait que le dédommagement d'être opposée à l'Angleterre. Le Danemark, auquel la Russie avait cédé le Holstein, ne pouvait se montrer hostile au cabinet de Saint-Pétersbourg. Gustave III, ne consultant qu'un courage chevaleresque, osa seul affronter la dominatrice du Nord. Sa flotte, d'abord battue, prit bientôt une éclatante revanche; le moment était favorable, si ses efforts eussent été appuyés par une escadre anglaise; cette diversion dans les provinces baltiques, à l'instant où les forces de l'empire étaient occupées en Turquie, tandis que le successeur du grand Frédéric flattait la Pologne d'une régénération

voyé à Saint-Pétersbourg, où Catherine lui donna de l'emploi et prit soin de sa fortune,

[ocr errors]
« PrécédentContinuer »