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mation du pétitionnaire. Nouvelle pétition du sieur Pugnant à la Chambre qui, cette fois, passa à l'ordre du jour.

Depuis, le sieur Pugnant prétend avoir apporté de nouveaux perfectionnements à la jauge dont il est l'inventeur; l'Académie des sciences, appelée, en 1830, par le ministre de l'intérieur, à se prononcer sur cette question, a reconnu les avantages de la jauge du sieur Pugnant qui, par une suite de compensations d'erreurs, paraît donner avec assez d'approximation les contenances des tonneaux. Je cite textuellement les paroles de M. Mathieu, rapporteur de l'Académie des sciences.

La jauge de l'administration, suivant le rapport de l'Académie annexé à la présente pétition, donne des contenances assez rapprochées pour les tonneaux longs, mais trop fortes pour les tonneaux courts; cette dernière erreur est d'autant plus forte que le tonneau est plus considérable; elle peut aller jusqu'à 20 litres pour une pièce de 650 litres, c'est-à-dire à peu près au 32o de la contenance du tonneau.

Dans une lettre en date du 8 juillet 1831, adressée à M. le préfet de police, le ministre du commerce manifeste le désir que, pour l'ordre et la régularité des perceptions, cet instrument (parlant de la jauge du sieur Pugnant), qui s'approche le plus de la vérité dans l'appréciation de la contenance des fùts, obtienne la préférence dans les administrations qui sont appelées à se servir de jauges, et qui dépendent du ministère des finances.

Votre commission, touchée de ce concours de nouvelles circonstances depuis la dernière décision de la Chambre, prenant surtout en grande considération le rapport de l'Académie des sciences, réunion d'hommes capables d'apprécier l'objet en question, jalouse en même temps de prouver aux contribuables qu'elle examine avec intérêt et sollicitude tout ce qui peut constater d'une manière équitable la perception de l'impôt, de quelque nature qu'il puisse être, est d'avis que l'attention de l'administration soit éveillée de nouveau sur l'objet des réclamations du sieur Pugnant. Elle me charge donc d'avoir l'honneur de vous proposer le renvoi de sa pétition à M. le ministre des finances. (Adopté.)

- Des habitants de Nuaillé (Charente-Inférieure) supplient la Chambre de déclarer illégale la nomination de leur maire, le sieur Dumur, et d'ordonner qu'il sera procédé à une nouvelle élection.

Neuf habitants de la commune de Nuaillé, arrondissement de Saint-Jean-d'Angely, au nombre desquels figurent deux membres du conseil municipal, exposent que le sieur Dumur, chirurgien, demeurant à Aulnay, était maire de la commune de Nuaillé, lorsque la loi de 1830 sur l'organisation municipale fut mise à exécution; qu'à raison de sa sympathie pour le gouvernement déchu, le sieur Dumur, craignant que sa réélection ne fût compromise, se serait livré, pour l'assurer, à des manoeuvres frauduleuses, en faisant inscrire sur la liste électorale des citoyens qui n'y avaient aucun droit, que malgré cela il n'eut pas le plus de voix; mais que, comme il était le protégé du sieur Pelletait, souspréfet de Saint-Jean-d'Angely, qu'il circonvenait par des moyens de séduction dont je me dispense de donner les détails à la Chambre, il fut choisi sur la liste des nouveaux élus pour continuer à exercer les fonctions de maire. Le sous-préfet fut répréhensible, disent les pétitionnaires, en

ayant fait nommer maire celui que repoussait l'opinion, d'autant que le sieur Dumur n'habitait pas la commune de Nuaillé, ce qui occasionnait à ses administrés beaucoup de perte de temps, lorsqu'ils étaient obligés de recourir à lui.

Les pétitionnaires ajoutent enfin qu'ils ont réclamé du préfet, de M. le ministre de l'intérieur, et qu'ils n'en ont obtenu aucune réponse ni satisfaction.

Votre commission a examiné, avec une sévère attention, la dénonciation des habitants de Nuaillé, qui porté atteinte à l'honneur de deux fonctionnaires publics, puisque l'un est accusé de manoeuvres frauduleuses dans l'exercice de ses fonctions, et l'autre de complaisance pour tolérer et dissimuler les actes de son subordonné.

Pour diriger contre des fonctionnaires des accusations qui tendent à déverser sur eux la déconsidération, il faut que ces accusations soient appuyées de preuves irrécusables; les pétitionnaires se bornent à de simples allégations, disant qu'ultérieurement ils fourniront les preuves à l'appui de leur dire, mais ils se bornent à ce simple engagement.

Il paraît peu probable que, sous le régime Sous lequel nous vivons, où la publicité est le contrôle journalier des actes administratifs, on ait maintenu en place un magistrat qui se serait livré à des manoeuvres qui furent flétries d'une manière si sévère, même sous la Restauration. Serait-il concevable qu'un sous-préfet de la Révolution de Juillet eût fermé les yeux sur l'oubli et la déviation des principes qui doivent guider l'homme d'honneur. Cette supposition est d'autant moins admissible que nos honorables collègues de la Charente-Inférieure nous ont attesté que M. Pelletan, alors sous-préfet d'Angely, était un fonctionnaire recommandable par ses lumières et son patriotisme, et à l'abri de ces soupçons injurieux.

Ne serait-on pas alors plutôt tenté de croire que, dans un temps où l'exaltation remplace trop souvent la raison et l'équité, quelques citoyens, égarés ou circonvenus, n'aient été l'instrument aveugle d'une dénonciation calomnieuse?

Quant au reproche adressé au préfet d'avoir préféré le sieur Dumur, quoiqu'il ne figurât pas en première ligne sur la liste des candidats, votre commission l'a considéré comme il devait l'être, puéril et déraisonnable. Que deviendrait l'esprit et la lettre de la loi qui laisse au roi et à ses délégués le choix des maires et des adjoints?

Il est hors de doute que l'administration doit veiller avec une religieuse attention à l'exécution de la loi, et à ce que les droits des citoyens soient respectés et maintenus, mais aussi dans un moment où les fonctionnaires publics sont en butte à tous les traits décochés par l'envie et les mauvaises passions, il faut que ceux-ci trouvent dans le gouvernement des protecteurs et des défenseurs, autrement vous ne trouveriez bientôt plus d'hommes qui voulussent se dévouer à des fonctions gratuites, honorables sans doute, s'ils n'avaient devant les yeux que la triste perspective de rester le jouet du fouet de la satire ou d'être victimes de la calomnie. Vous avez déjà l'expérience combien il est difficile de trouver des administrateurs municipaux, n'ajoutons pas à ces difficultés en les abandonnant a l'esprit de parti.

Si les faits graves avancés par les pétitionnaires sont reconnus conformes à la vérité, des abus

de pouvoir condamnables ont été commis par des hommes revêtus d'un caractère public, et comme tels ils doivent être repoussés.

Si, au contraire, ils sont victimes de la calomnie, ceux qui en sont les auteurs doivent être sévèrement punis. Dans cette alternative, votre commission a pensé qu'il était convenable de vous proposer le double renvoi de la pétition à M. le ministre de l'intérieur et à M. le garde des

sceaux.

M. de Beauséjour. Je demande le renvoi de la pétition et l'examen des faits sur lesquels elle est fondée, parce que je suis intimement convaincu que le sous-préfet a agi, dans cette occasion, conformément aux principes et aux règles de la stricte équité. Ce sous-préfet a été luimême l'objet de calomnies qui sont le résultat d'une intrigue ourdie contre fui depuis très longtemps. J'ai entre les mains une lettre qui constate qu'à une autre époque il a été accusé d'avoir nommé des maires, et de les avoir installés sans avoir reçu préalablement leur serment, ce qui est une calomnie. Le serment a été reçu préalablement et envoyé au préfet; j'ai lu la lettre qui le constate. (Aux voix! aux voix!)

(Le double renvoi proposé par la commission est adopté.)

M. Meynard, autre rapporteur. Les porteurs d'annuités de l'emprunt d'Haïti réclament votre initiative, auprès du gouvernement, à l'effet d'obtenir par son intervention la réalisation des engagements que la république d'Haïti a pris à feur égard.

Le 29 décembre dernier, votre commission eut l'honneur de vous faire, par mon organe, un rapport détaillé sur une pétition tendant à appeler votre sollicitude sur les réclamants. Je ne reproduirai pas ici toutes les circonstances de cette négociation; elles sont encore présentes à votre mémoire. Je n'occuperai pas non plus la Chambre de la position des anciens colons; quelque entrainante, quelque pénible qu'elle soit, elle doit rester étrangère à cette discussion; c'est des prêteurs seuls, des porteurs des annuités de l'emprunt de 24 millions qu'il s'agit. C'est uniquement de leurs demandes et de leurs intérêts que j'ai à vous entretenir.

Avant d'entrer dans la discussion, je dois dire à la Chambre que les pétitionnaires n'invoquent point la garantie de la France; ils n'ont jamais prétendu que le Trésor fùt engagé envers eux, ils ne le prétendent pas. Ce qu'ils réclament, c'est un témoignage d'intérêt, et ce témoignage ne leur sera pas refusé si l'on prend en considération les circonstances qui se rattachent à ette affaire.

Lorsque l'ordonnance d'émancipation du 17 avril 1825 eut été acceptée par Haïti, le gouvernement haïtien envoya des commissaires à Paris pour contracter un emprunt qui lui fournit les moyens de remplir les conditions de cette ordonnance.

Les pouvoirs de ces commissaires furent déposés à la Banque de France.

Loin d'être contrarié par le gouvernement français, comme le fut l'emprunt des Cortès en 1820, l'emprunt d'Haïti fut accueilli, protégé, favorisé même par le gouvernement, qui le proclamait une opération éminemment nationale.

Le produit devait être consigné dans une caisse française, pour être distribué à des Français, en l'acquit du gouvernement d'Haïti et en exécution d'un traité ratifié par les deux Etats.

Heureusement pour nos capitalistes, la négociation n'excéda pas 24 millions; cet emprunt, accru des intérêts depuis 1828, dépasse aujourd'hui 30 millions.

A peine les prêteurs avaient retiré une annuité d'intérêts, que les payements cessent de la part d'Haïti.

On a recours à des négociations nouvelles. Le 2 avril 1831, intervient un traité qui modifie, à l'avantage d'Haïti, les conventions financières portées dans l'ordonnance d'émancipation.

Cependant, le président de la République refuse de ratifier ce traité; il propose à son tour des conditions nouvelles, il demande de réduire l'indemnité à la moitié de la somme primitive, et de se libérer, sans intérêt, par un payement annuel de 2 millions, dans l'espace de 37 ans, de la totalité de sa dette.

Je dois même observer qu'il n'offre de s'engager d'une manière positive que pour le million annuel concernant les colons; le second million, applicable à l'emprunt, ne serait pas l'objet d'un engagement absolu; il y aurait espérance fondée, mais non promesse positive.

Ces propositions constituent le dernier état des choses; mais il paraît qu'elles ont été faites par notes verbales, et que les communications sont conçues en termes tels, que si jamais des relations amicales doivent se renouveler avec Haïti, ce ne serait pas au gouvernement français, vous a dit M. le ministre des affaires étrangères, dans votre séance du 29 décembre dernier, à faire les avances, et qu'il manquerait à la dignité de la France, s'il prenait l'initiative.

Cependant, Messieurs, quelle est, dans ces entrefaites, la situation des porteurs d'annuités de l'emprunt? repoussés par leurs débiteurs directs, ajournés par le gouvernement, leur refuseronsnous cette protection morale qu'ils réclament, et verrons-nous avec indifférence nos concitoyens victimes de leur bonne foi et de leur confiance envers un gouvernement qui, à peine reconnu, se montre infidèle à toutes ses promesses comme à tous ses engagements?

L'intérêt de leur cause et la dignité de la France demandent que le gouvernement prenne des mesures pour mettre un terme à cet état de choses.

Votre commission ne dit pas qu'il soit indispensable, urgent, d'entreprendre une croisière contre Haïti, mais elle ne saurait partager cette opinion de M. le ministre des affaires étrangères, qu'il convient à l'honneur de la France d'attendre que cette république fasse les premières démarches. Une pareille situation, qui se prolongerait indéfiniment, ne pourrait qu'être avantageuse au gouvernement d'Haïti, puisqu'il ne suspendrait pas les relations commerciales de ce pays avec la France, tandis qu'elle serait très nuisible aux porteurs d'annuités dont l'intérêt serait ici subordonné à de simples formes de bienséance; nous serions dans la position d'un créancier qui, offensé par son débiteur, ne réclamerait pas son paiement, jusqu'à ce que ce dernier eût trouvé bon de prendre l'initiative, et voulût bien réparer ses torts. Évidemment, l'attente serait longue.

Dans votre séance du 29 décembre, la Chambre prononça l'ordre du jour sur une pétition semblable. Permettez-moi de dire, Messieurs, que ce fut l'effet d'une erreur. Dans les discours des divers orateurs qui se succédèrent à la tribune, la question fut traitée comme s'il s'était agi

d'une garantie que les prêteurs demandaient au gouvernement on craignit que le Trésor ne fût en cause, on passa à l'ordre du jour.

Mais, je le répète, Messieurs, les pétitionnaires ne réclament pas la garantie de la France, ils reconnaissent que le Trésor ne leur doit rien, ils n'invoquent que la protection de l'État, et cette haute tutelle qui doit accompagner les intérêts nationaux partout où ils sont engagés ou compromis. Ils se présentent en dernier ressort aux députés de la France, non pas comme des contractants invoquant le bénéfice d'une caution, mais tout simplement comme citoyens lésés par un gouvernement étranger, invoquant la haute intervention des représentants du pays, à l'effet d'obtenir protection et assistance de la part de leur propre gouvernement.

Ils demandent l'exécution d'un traité politique et commercial ratifié par le roi, dans lequel le gouvernement avait stipulé pour eux, traité resté sans effet par le dédaigneux rejet du Président de la république d'Haïti.

Voilà ce que demandent les pétitionnaires, mais sans arrière-pensée, sans qu'on puisse en induire une espèce de garantie, qui n'est jamais entrée dans leur pensée et qu'ils reconnaissent ne leur être pas due.

Un ordre du jour, en témoignant de l'indifférence de la France pour l'intérêt d'un grand nombre de citoyens français, ne pourrait que réagir contre eux d'une manière funeste. Il semblerait sanctionner la conduite déloyale des Haïtiens, tandis que la pétition, prise en considération, doit produire un effet salutaire sur les esprits; ce sera la réparation d'une erreur produite par la connexité du sujet en délibération avec des intérêts presque identiques.

En examinant attentivement l'état où se trouvent les négociations et en considérant les propositions contenues dans la note verbale du 10 janvier 1832, votre commission a pensé que le Ministère attendrait en vain de nouvelles offres de la part d'Haïti, s'il ne les provoque pas par quelques mesures énergiques. L'honneur du pays et l'intérêt des citoyens les réclament. Le gouvernement du roi lui doit appui et protection, et il saura trouver dans sa force les moyens de terminer au plus tôt les transactions avec Haïti.

Votre commission n'a point eu à s'occuper de ces moyens; le choix en appartient au gouvernement et nous ne doutons pas que, dans leur emploi, il ne concilie l'énergie avec la prudence, et qu'il ne satisfasse à la dignité de la France sans compromettre les droits qu'il est appelé à défendre.

En conséquence, votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le président du conseil des ministres. (Appuyé! appuyé!)

(La Chambre ordonne le renvoi de la pétition à M. le président du conseil.)

M. Piscatory, autre rapporteur. Le sieur Lahiteau, ancien ingénieur de la marine, demande que, par une solennelle délibération, la Chambre confère au roi le titre d'empereur.

Votre commission m'a chargé, Messieurs, de vous proposer l'ordre du jour. (Adopté.)

M. Posme expose à la Chambre qu'il a rendu des services à la patrie, que, pendant la Révolution, il a plusieurs fois arraché des victimes aux échafauds de la terreur; que, depuis, il a été ruiné par les deux révolutions. Agé de 75 ans,

très pauvre, ne pouvant plus travailler, il demande une récompense nationale due aux services qu'il a rendus à l'humanité et à la patrie. Sur une telle pétition, l'ordre du jour doit être proposé à la Chambre; cependant, votre commission, prenant en considération les services et l'infortune du pétitionnaire, m'a chargé de vous proposer, Messieurs, de renvoyer la demande de M. Posme au ministre de l'intérieur, qui après avoir vérifié les faits, pourra peut-être accorder des secours à un vieillard malheureux, et qui a des droits à l'estime publique.

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Quelques voix Renvoi au ministre du commerce et des travaux publics!

(Ce dernier renvoi est ordonné par la Chaubre.) L'ordre du jour est le rapport sur le projet de loi des céréales.

M. Duchâtel, rapporteur (1). Messieurs, la loi du 15 avril 1832, a prononcé l'abolition des prohibitions éventuelles, qui, lorsque les prix dépassaient certaines limites, arrêtaient l'entrée ou la sortie de céréales. Elle a substitué à ces prohibitions des droits variables et gradués selon les prix. Mais les tarifs établis par cette loi n'ont qu'une existence temporaire; l'article 6 de la loi les soumet à revision dans la session qui doit suivre les récoltes de 1832, et l'article 2 porte, en termes exprès, que les droits ne seront perçus que jusqu'au 1er juillet 1833.

Si donc il n'intervenait aucune disposition législative nouvelle, les tarifs cessant d'être en vigueur, à dater du 1er juillet prochain, et la prohibition éventuelle étant abolie d'une manière définitive, les grains étrangers pourraient entrer dans nos marchés sans payer de droit; c'est le résultat de cette double circonstance, que l'abolition de la prohibition est permanente, et que les tarifs ne sont que temporaires.

Or, de quelque façon que l'on envisage la loi de l'an dernier, et quelque jugement que l'on porte sur le système de ces tarifs, toujours est-il que personne, même parmi ceux qui reprochent à la loi de ne pas se montrer assez favorable aux intérêts des consommateurs, ne voudrait exposer brusquement notre agriculture à la concurrence sans limite des grains étrangers.

Une mesure législative est donc indispensable et urgente; il ne saurait y avoir sur ce point de dissentiment.

Mais cette mesure doit-elle être définitive ou temporaire? Devons-nous nous occuper de la revision des tarifs, ou nous borner à continuer l'expérience commencée l'année dernière? Voilà toute la question.

Votre commission a pensé, comme le gouvernement, que le moment n'était pas encore venu de travailler à l'établissement d'un tarif durable, que les faits n'étaient pas recueillis en assez grand nombre, que le système nouveau n'avait pas été essayé pendant un assez long espace de temps. La Chambre ne s'est pas trouvée, il y a un an, suffisamment éclairée : elle a cru que la sagesse lui commandait de procéder par essais. La prudence donne encore aujourd'hui le même conseil, il n'est survenu aucune lumière subite qui puisse diriger votre jugement, et les faits nouveaux, loin de vous porter à précipiter votre décision, doivent, au contraire, vous inviter à suspendre toute détermination définitive.

(1) La commission est composée de MM. Pons, Parant, le baron Laugier de Chartrouze, Fulchiron, Harlé fils, Fournier, Duchâtel, André, Auguis.

II y a un an, lorsque la dernière loi fut rendue, le prix des grains était très élevé; on pouvait n'être pas sans inquiétude sur la subsistance des classes pauvres. Aujourd'hui, par l'effet d'une récolte abondante, les prix sont faibles, et les consommateurs n'ont aucun sujet de crainte. Sous le rapport de cet intérêt, qui doit exciter si vivement la sollicitude de la Chambre, il n'y a donc aucun péril à maintenir provisoirement l'état actuel des choses. C'est sous l'empire de la loi de 1832, que les grains sont descendus à des prix qui satisfont les consommateurs.

Quant aux producteurs, leur intérêt nous semble également garanti. La Chambre, nous n'en doutons pas, partagera cette opinion, si elle porte son attention sur les effets produits par le nouveau système. Sous le régime de l'ancienne loi, les frontières auraient été ouvertes pendant une grande partie de l'année : c'est durant cet espace de temps que l'importation a été le plus considérable; depuis le moment où la baisse des prix aurait fermé l'accès des frontières, l'importation a été d'abord réduite à de très faibles quantités, puis bientôt elle est devenue presque nulle. La quantité de froment, introduite par l'effet de l'abolition du système prohibitif, n'a été, en 1832, que de 525,000 hectolitres. Il n'est entré, en janvier 1833, que 1,393 quintaux métriques de tous grains; l'importation s'est bornée, en février, à 5,852 quintaux métriques.

Pour que vous puissiez mieux apprécier les effets de la loi du 15 avril, nous avons joint à ce rapport des tableaux dont les chiffres, puisés aux sources officielles, indiquent l'état des prix et des droits, depuis le 1er janvier 1832, jusqu'au 1er mars dernier, le mouvement de l'importation par mois et par grandes sections des frontières, enfin la situation des entrepôts. Cette situation est de nature à rassurer les producteurs contre des alarmes sans fondement; au 1er mars dernier, les entrepôts ne contenaient que 80,210 quintaux métriques de grains de toutes espèces. L'entrepôt de Marseille figure à lui seul dans cette quantité, pour 70,622 quintaux.

Si donc le système de la loi du 15 avril mérite un reproche, ce n'est pas, certes, celui de sacrifier les intérêts des producteurs. Les droits dont cette loi a frappé l'entrée des grains étrangers, empêchent dans l'état des prix toute introduction de quelque importance; les frontières se ferment devant des tarifs comme devant les défenses formelles de la loi. Mais votre commission a pensé qu'il ne s'agissait pas, en ce moment, de peser les mérites ou les défauts de la loi du 15 avril; cet examen appartient à la discussion d'une loi définitive. Ce qu'il suffit de constater aujourd'hui, c'est que, dans les circonstances où nous nous trouvons, il n'y a danger pour aucun intérêt à prolonger la durée de la loi; dans cette transaction temporaire, les consommateurs ont pour eux l'abondance, et cette même abondance, en élevant les droits d'entrée toujours fixés en raison inverse des prix, devient aussi la garantie des producteurs. Les deux intérêts qui, au fond, sont unis, bien qu'en apparence distincts, peuvent donc consentir à une trêve; c'est cette trêve dont le projet de loi a pour objet de régler les conditions.

Point de doute, ni de difficulté sur le caractère de la loi qui va être soumise à votre délibération; elle est essentiellement provisoire: c'est un simple ajournement que le gouvernement nous demande. Votre commission est d'avis de l'accorder; mais ici s'élève une question, faut-il

fixer le terme de l'ajournement, ou convient-il de le laisser indéfini?

Dans le projet du gouvernement, il n'y a pas de terme fixé. Après un mùr examen, et une comparaison approfondie des inconvénients et des avantages des deux systèmes, votre commission a pensé, comme le gouvernement, que ne pas assigner de terme était le parti le plus sage.

Les raisons données en faveur d'un ajournement à terme fixe, sont les suivantes : on a dit que la loi qu'il s'agit de proroger n'est que temporaire, et que, par conséquent, la loi de prorogation ne doit pas avoir un caractère de permanence qui manque à la loi primitive; on a dit encore que la nécessité d'une revision des tarif à une époque plus ou moins rapprochée étant établie dans tous les esprits, il fallait contraindre le gouvernement à s'en occuper, et que le meilleur moyen de lui rappeler ce dévoir était de ne donner de durée à la loi que pour un temps déterminé. Par là, le gouvernement se trouverait obligé de porter la question devant les Chambres, réduit comme il serait à l'alternative, ou d'obtenir une loi nouvelle, ou de laisser le commerce des grains sans régime légal, et les producteurs sans protection.

Ces raisons n'ont pas prévalu auprès de votre commission; il n'est pas nécessaire, en effet, d'indiquer un terme dans la loi pour qu'elle ait le caractère d'une loi provisoire; ce caractère lui est imposé par la force même des choses, par les déclarations du gouvernement, et enfin par les termes dans lesquels nous nous proposons de la rédiger. Quant à l'avantage de replacer la question sous le contrôle des Chambres, votre commission a été d'avis que le but pouvait être atteint sans recourir à cette sorte de moyen coercitif; le gouvernement, en effet, manquerait à tous ses devoirs, s'il essayait de convertir par son inaction une loi temporaire en loi permanente; l'initiative qui appartient à tous les membres de cette Chambre lui rappellerait bientôt l'obligation qui pèse sur lui; on n'a pas d'ailleurs à craindre un pareil oubli pour une matière qui touche de si près au repos et à la tranquillité du pays; les questions que soulève la législation sur le commerce des grains, sont au nombre de celles qui viennent réveiller d'ellesmêmes, par leur gravité et par leur importance, la sollicitude du gouvernement.

Si les arguments, en faveur d'un terme défini, n'ont pas obtenu l'assentiment de votre commission, il lui a paru, d'un autre côté, que la fixation d'un terme aurait de graves inconvénients; si la loi doit expirer à une date fixe, ni le gouvernement, ni les Chambres n'ont plus la liberté nécessaire pour discuter d'aussi difficiles questions; il faut, ou faire la loi trop à la hâte, ou recourir au moyen d'une prorogation nouvelle, votée sous l'empire de la nécessité, après avoir mis tous les intérêts en mouvement, et troublé toutes les relations du commerce par des débats devenus sans objet. Quel délai, d'ailleurs, conviendrait-il de prendre? Si on le choisit trop rapproché, on se fait illusion à soi-même; car, à moins qu'il ne survienne dans les circonstances quelque changement inattendu, il est certain que, dans une année, l'expérience ne sera pas encore assez avancée pour permettre d'entreprendre l'œuvre d'une revision des tarifs. Si, au contraire, on adopte une époque éloignée, alors ne court-on pas le danger de renvoyer la revision trop loin, et de suspendre pour trop longtemps l'obligation imposée au gouvernement de nous

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présenter un travail complet. Enfin, et c'est le motif le plus grave, toutes les époques ne sont pas également convenables pour la discussion d'une loi sur le commerce des grains; dans un moment d'extrême abondance, la balance penchera du côté des producteurs; dans un temps de disette, la nécessité d'assurer la tranquillité publique et la subsistance de la population fera négliger toute autre considération.

Il est donc impossible de déterminer d'avance l'époque où il conviendra de discuter une loi sur les grains; c'est d'après les circonstances que le moment doit être choisi, et il faut abandonner l'appréciation des circonstances au gouvernement averti et éclairé par les Chambres. A soulever trop souvent de pareilles questions, et à les soulever sans dessein d'arriver à un résultat positif, il y a de véritables dangers; tous les intérêts demeurent en suspens, toutes les relations commerciales sont entravées; il n'y a sécurité pour aucune entreprise; et les producteurs et les consommateurs ont à souffrir de cette incertitude qui arrête le commerce et inquiète la production.

Votre commission vous propose donc, Messieurs, d'adopter le projet de loi avec un léger changement de rédaction. Pendant la durée de cette trêve qui va régner entre les différents intérêts, le gouvernement étudiera les faits, le système de la loi du 15 avril, en s'appliquant à

des circonstances diverses, révélera ses inconvénients et ses avantages; nous pourrons alors, instruits par l'expérience, demander des changements, et établir un système plus durable; chacun fera valoir ses principes, et réclamera, selon ses opinions, ou une liberté moins restreinte, ou le maintien de la protection. Entre ces opinions diverses, votre commission a dù se tenir dans une stricte neutralité; elle n'avait mission que de poser les bases d'une transaction temporaire, commandée par les circonstances, et non d'exprimer un jugement sur ces hautes questions d'économie publique, qui auraient exigé de plus longues recherches et un examen plus approfondi.

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TABLEAUX DES PRIX RÉGULATEURS; DES DROITS D'ENTRÉE PAR TERRE ET PAR MER; DES IMPORTATIONS ET DES EXPORTATIONS.

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fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c. fr. c.

1re unique. MÉDITERRANÉE..... 23 26 23 20 23 54 25 18 24 87 26 15 30 27 24 48 22 14 21 80 21 32 19 85 19 80 19 98 20 21

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21 47 21 85 22 19 23 94 24 83 25 56 25 30 21 03 16 81 16 79 16 86 16 77 16 88 17 08 16 89

Novembre.

Décembre.

pes au Doubs.... 23 26 22 83 23 20 23 81 23 53 25 62 30 78 27 07 23 15 22 31 21 18 20 26 20 56 20 55 20 28
Terre, Haut et Bas-
Rhin..........

Océan du Nord au Calvados.......

Océan de la Loire-In

23 79 23 66 24 07 26 84 27 62 27 53 33 70 28 17 23 55 21 68 20 33 20 14 20 48 20 03 18 52

21 79 21 63 22 23 22 67 24 25 24 15 25 94 25 02 23 38 19 37 18 49 16 84 16 53 16 60 15 91

férieure à la Cha-21 20 21 39 22 07 23 84 25 62 26 14 25 59 24 76 18 62 16 77 16 11 76 20 16 12 15 93 16 01 rente Inférieure..

Terre de l'Aisne aux

Ardennes........ 20 76 20 56 20 59 21 35 23 18 23 88 27 21 26 36 24 35 18 87 17 39 16 69 16 81 16 63 16 02
Océan de la Manche

au Morbihan..... 21 90 21 53 22 79 24 95 24 90 24 66 25 10 24 23 22 28 18 21 17 16 16 97 16 77 16 44 16 34

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