Images de page
PDF
ePub

sionnaires qui approcheraient le plus du chiffre de 970,000 francs.

Je crois que vous devez voir, par cet extrait, que réellement le public n'a pas été suffisamment éclairé lors de la nouvelle adjudication. Il fallait dire L'article 11 prescrit d'ouvrir la réadjudication sur la mise à prix des travaux déjà terminés! mais si vous croyez que ces travaux ne valent pas la somme à laquelle ils ont été estimés, vous aurez la faculté de n'en rien offrir du tout, de regarder tous les travaux achevés comme une prime qui vous est accordée; et si même vous jugez que cette prime est encore insuffisante, vous pourrez demander au gouvernement une prime en argent.

De cette manière, la question eût été clairement posée, et il est possible, il est probable même qu'il y aurait eu une réadjudication.

Maintenant, que doit vouloir le gouvernement? Il doit vouloir que la loi du 8 juin 1825 soit exécutée, et que les deux canaux dont elle prescrit l'exécution, soient entrepris et achevés. Alors, il faut renouveler l'adjudication, en mettant dans le cahier des charges tous les détails nécessaires pour éclairer complètement le public sur les conditions. Que le gouvernement donne, en outre, s'il le faut, une prime de 100 ou 200,000 francs pour appeler des adjudicataires, et l'entreprise sera soumissionnée, et le pays aura 24 lieues de canaux qu'il n'aura pas si vous adoptez le projet de loi; car il n'est question, dans ce projet, que de la partie des travaux qui se trouve dans le département de la Dordogne, et on ne parle nullement de la partie qui se trouve dans le département de la Corrèze.

J'arrive maintenant à l'affaire de l'enquête. Si mal à propos entreprise, cette enquête, remarquez-le bien, a été faite en 1832; et alors l'Administration avait certainement consulté les hommes spéciaux placés auprès d'elle pour former son conseil. Or, qu'avaient dit ces conseils? Ils avaient exprimé, dès 1831, l'avis de faire une nouvelle réadjudication à la folle enchère du premier concessionnaire. Je ne vois pas pourquoi, en 1832, l'Administration s'est écartée de cet avis; il était bon pourtant, Messieurs, à suivre.

L'ordonnance du 28 février 1831 porte, article 11: « Les formalités d'enquête ci-dessus déterminées ne seront pas appliquées aux projets de canaux déjà réunis à l'Administration, et qui sont en ce moment l'objet d'une instruction particulière.

Ainsi, et dans l'espèce, cette ordonnance n'était pas applicable; car non seulement il y avait projet présenté, mais il y avait commencement d'exécution. Pourquoi donc a-t-on suivi dans cette enquête les formes et l'ordonnance du 28 février 1831? c'est parce qu'on voulait donner un vernis de légalité à une clause qui était illégale. Mais il fallait du moins faire aussi cette enquête dans le département de la Corrèze, et non pas seulement dans le département de la Dordogne que l'on voulait favoriser, au détriment du département de la Corrèze. (Aux voix ! aux voix!)

Je demande que les travaux s'achèvent conformément à la loi de 1825, cela donnera 24 lieues de canal au département de la Corrèze.

M. Prévost-Leygonie. Je ne viens pas prolonger une discussion déjà trop longue; je ne monte à la tribune que pour relever une erreur de fait échappée à notre honorable collègue M. Jousselin. Il a supposé que la compagnie concessionnaire n'avait contracté que l'obligation

d'exécuter les travaux dans dix ans, et que par conséquent l'Administration avait eu tort de provoquer la déchéance avant l'expiration des dix années.

Mais, Messieurs, la compagnie concessionnaire ne s'était pas seulement soumise à exécuter les travaux dans dix années; elle s'était soumise à faire, chaque année, pour 500,000 francs de travaux. Cela résulte d'une disposition formelle de l'article 8 du cahier des charges, lequel est ainsi conçu: « La compagnie sera tenue de justifier que les dépenses qu'elle aura faites dans le cours de chaque année se seront au moins élevées à la somme de 500,000 francs. >>

M. Jousselin. Lisez tout l'article.

M. Prévost-Leygonie. Je n'ai pas copié la partie finale, parce que je l'ai crue inutile. La compagnie ayant été pendant dix-huit mois sans faire aucun travail, l'Administration a été dans son droit quand elle a provoqué la déchéance contre la compagnie concessionnaire, et que le conseil de préfecture du département de la Dordogne a été aussi dans son droit quand il a prononcé cette même déchéance. Telles sont les observations que j'avais à soumettre à la Chambre; elles me paraissent décisives. (Aux voix ! aux voix !)

M. Jousselin. Je ne répondrai à l'honorable préopinant qu'en citant l'article 8 du cahier des charges: « Le gouvernement s'engage en outre à tenir compte à la compagnie, sur le pied de 4 0/0 pendant les 10 ans que dureront les travaux, de l'intérêt des sommes qui seront successivement mises dehors pour la confection des ouvrages. Le compte des intérêts sera réglé et acquitté, dans la supposition d'une dépense annuelle de 500,000 francs. La compagnie sera tenue de justifier que les dépenses qu'elle aura faites dans le cours de chaque année se seront au moins élevées à cette somme; toutefois, elle sera libre pour accélérer le moment de sa jouissance, d'exécuter des travaux par anticipation; mais quels que soient les frais annuels dans lesquels elle s'engagera au delà de la limite de 500,000 francs, c'est toujours cette limite qui servira de base au calcul et au payement des intérêts. »

Cet article, Messieurs, n'a eu d'autre objet que de régler le payement successif des intérêts, et non pas d'obliger la compagnie à faire chaque année une certaine masse d'ouvrage. Seulement il fallait pour toucher ses intérêts, qu'elle justifiât avoir fait au moins 500,000 francs de tra

vaux.

M. Laguette de Mornay. Membre de la commission qui a été chargée de l'examen du projet de loi en discussion, je crois devoir soumettre à la Chambre quelques observations. Le rapport fait par l'honorable M. Mérilhou indique que la commission a été unanime pour l'adoption du projet de loi. Cependant, mes collègues et moi nous n'avons pas bien compris que l'article 11 du cahier des charges permit à un nouvel adjudicataire de prendre l'adjudication, sans être chargé de la confection du tout, à moins de payer 970,000 francs.

M. Legrand a parfaitement expliqué que l'article 1 permettait à l'adjudicataire, s'il ne croyait pas pouvoir s'engager dans la dépense totale, qui était encore de 4 millions, non seulement de ne pas payer 970,000 francs à l'ancienne compagnie, mais de ne payer qu'une somme moindre et même de ne rien payer du tout. Je pense, comme M. le commissaire du

gouvernement, qu'un soumissionnaire aurait pu dire Je ne puis me charger de terminer l'ouvrage, en donnant la moindre somme pour les travaux faits, parce qu'il y a trop de dépense à faire, en comparaison du revenu éventuel. Je me charge cependant de terminer l'ouvrage, si, outre les travaux faits qu'on me concédera gratuitement, on veut m'accorder une subvention de 600,000 francs. Si alors un autre soumissionnaire était venu dire: Puisque l'on ne nous oblige pas à rembourser aux anciens adjudicataires le montant des travaux faits, je me charge de finir la totalité de l'ouvrage, moyennant la remise des travaux déjà exécutés et des matériaux; et moyennant une subvention de 400,000 francs, ce second soumissionnaire aurait eu l'adjudication.

Cela, Messieurs, n'a pas paru d'une manière bien claire à la commission: je vais en donner la preuve. Je lis, page 5 du rapport: L'effet de cette mesure était de conférer à la compagnie mise en déchéance le droit d'être remboursée par les concessionnaires nouveaux du prix des ouvrages; et, un peu plus bas, l'article 11 imposait à l'adjudicataire futur l'obligation d'indemniser, comme il vient d'être dit, la compagnie déchue. Le montant de cette indemnité fut fixé à 970,000 francs.

Eh bien! Messieurs, je dois déclarer que c'est ce montant de 970,000 francs, qu'on aurait pu se dispenser d'énoncer, qui induit en erreur les adjudicataires éventuels. Ils ont dû dire: nous ne pouvons nous charger de terminer un ouvrage entrepris légèrement, avec l'obligation de payer 970,000 francs.

Je crois que ce qu'il y aurait à faire, ce serait, avant de proposer une nouvelle loi, et cela est dans l'intérêt du département de la Corrèze, qui a intérêt d'avoir un débouché pour arriver jusqu'à Brives, ce serait, dis-je, de faire une nouvelle adjudication, à charge de terminer la totalité des ouvrages mentionnés dans la loi de 1825. On disait seulement, dans le cahier des charges, que l'adjudication serait faite à celui qui offrirait la somme la plus approchant de 970,000 francs aux anciens, actionnaires, ou à celui dont l'offre s'élèverait le plus au-dessus de zéro; et qu'enfin, s'il ne se présentait personne qui consentit à terminer l'ouvrage moyennant la concession gratuite de tous les ouvrages faits, ainsi que des terrains et des matériaux achetés, l'adjudicataire futur aurait la liberté de demander une somme, et qu'alors la concurrence s'établirait entre les compagnies et les adjudicataires qui demanderaient la moindre subvention.

Il y aurait ensuite à examiner la question de savoir si c'est le Trésor public qui devra fournir cette subvention, ou si ce serait les départements de la Dordogne et de la Corrèze, qui sont tous deux intéressés à ce que cet ouvrage se fasse. Je rappellerai à la Chambre que plusieurs honorables propriétaires du département de la Corrèze ont hasardé des fonds dans l'entreprise, qui ne paraissait pas devoir rapporter un revenu considérable. Ces mêmes propriétaires pourraient entrer dans la nouvelle compagnie d'adjudicataires, qui demanderait la plus petite somme à titre de subvention.

Je crois donc qu'il faudrait commencer par tenter une nouvelle adjudication; et, s'il ne se présentait personne, on serait toujours à temps de présenter le projet de loi actuellement en discussion, lequel supprime la partie la plus coùteuse et la moins rendante des anciens travaux,

c'est-à-dire presque toute la partie des travaux qui devait s'exécuter dans le département de la Corrèze. Je vote contre le projet de loi.

M. Mérilhon, rapporteur. La proposition qui vous est faite par M. Laguette de Mornay, nous prouve l'extrême délicatesse qu'il met dans l'exercice de ses fonctions. Il a changé d'opinion depuis qu'il a fait partie de la commission, rien de mieux. Il a exposé à la tribune les motifs de son changement, c'est fort honorable. La vérité est que la commission a été unanime pour le canal qui vous est proposé, et qu'il ne s'est élevé lors de la lecture du rapport aucune espèce de réclamation.

M. Laguette de Mornay. Cela est vrai, j'en ai mes motifs.

M. Mérilhou, rapporteur. Je suis loin de vous blâmer et de me plaindre; je fais seulement cette observation pour qu'il soit bien constant que c'est un changement purement personnel.

La proposition de M. de Mornay ne me paraît nullement admissible, et j'ose espérer que la Chambre portera le même jugement que moi, si elle a la bonté de me prêter un moment d'attention.

M. de Mornay commence par se plaindre de ce que le cahier des charges n'énonce pas assez clairement ce qu'il aurait désiré qu'il énonçât. Eh bien! il me paraît évident que le cahier des charges ne pouvait énoncer autre chose que ce qui y est énoncé, et qu'il était impossible d'expliquer autrement les choses. Il me paraît impossible aussi, lorsque le caractère d'une entreprise est fixé par une loi qui établit des conventions réciproques, irrévocables, de modifier la mise à prix, qui intervient par suite de la folle enchère. Le cahier des charges, pour arriver à cette folle enchère, ne peut contenir des clauses variables. Il faut que le cahier des charges soit calculé sur l'article 11 de la loi de 1825, dont il doit être l'exécution. Ainsi une espèce d'avantage ne peut résulter d'une nouvelle mise à prix. Maintenant y a-t-il quelque vraisemblance que des adjudicataires nouveaux se présentent pour prendre une portion de l'entreprise, réduite comme elle l'est par le projet de loi dont la Chambre est saisie en ce moment? En supposant, comme le fait de M. de Mornay, que la Chambre, venant au secours des soumissionnaires, ferait une loi qui donnerait à l'Administration le pouvoir de leur promettre une subvention quelconque, je conçois qu'on pourrait mettre à prix sur des conditions ainsi libellées.

Il s'agit de savoir si vous préférerez un mode d'exécution qui assure la terminaison d'une entreprise utile à deux départements, qui ne coûte rien à l'Etat, qui se fait aux risques et périls des fortunes de ceux qui ont avancé les premiers fonds, et qui vous demandent la permission d'en avancer de nouveaux, à un mode d'exécution dans lequel l'Etat devrait venir au secours des concessionnaires, et leur promettre une somme plus ou moins considérable à titre de prime d'encouragement. Pour ma part je ne pense pas que la Chambre, qui se trouve par malheur déjà engagée dans un grand nombre d'entreprises analogues à celle-là, soit disposée à ajouter des sacrifices nouveaux à des sacrifices promis, et pour lesquels l'Etat a contracté des engagements: engagements qui ne s'exécutent pas sans qu'il n'en coûte beaucoup de regrets au gouvernement et à la Chambre, parce que la Chambre sait bien que la part que le gouvernement a prise dans

[Chambre des Députés.]

RÈGNE DE LOUIS-PHILIPPE.

ces entreprises, a toujours été malheureuse, et beaucoup trop coûteuse. M.de Mornay dit, qu'à défaut du gouvernement, les deux départements de la Corrèze et de la Dordogne devraient subvenir d'une manière quelconque.

Eh bien! je le crois également dans l'erreur à ce sujet. Il n'est pas douteux, que si les conseils généraux de ces départements avaient eu l'intention de subvenir d'une manière plus ou moins importante pour l'accomplissement de ces canaux depuis 1827 que les travaux ont cessé, et surtout depuis 1828 que la déchéance a été prononcée par le tribunal administratif, ces conseils généraux auraient voté une allocation quelconque, afin de subvenir à l'achèvement de cette entreprise. Eh bien! Messieurs, y a-t-il vraisemblance que ce qui n'a pas été fait dans les 6 années qui se sont écoulées depuis l'époque de la suspension des travaux, se fasse maintenant ? J'affirme qu'il n'en est rien, et que les conseils généraux de ces départements ne voteront pas de fonds, par la raison que ces départements sont engagés dans d'autres dépenses, et qu'au moyen des centimes additionnels qui sont leur seule ressource, ils peuvent à peine achever des communications par terre qui leur sont plus nécessaires, et sont d'une utilité tout à fait immédiate.

Est-il juste de dire, comme l'a fait le préopinant, que le département de la Corrèze soit complètement sacrifié dans cette affaire? Cette opinion, aussi émise par l'honorable M. Jousselin, me paraît de la plus complète fausseté. En effet, il est reconnu de tout le monde que les moyens de communication, les plus facilès et les moins coûteux profitent non seulement au territoire que les lignes de communication traversent, mais encore au territoire auquel aboutissent ces mêmes lignes de communication; ainsi, dans la situation actuelle, quel sera le résultat? Voici la situation topographique des lieux. La partie canalisée de la Vézère remonte jusqu'au Lardin. Voilà donc depuis le Lardin, jusqu'à l'embouchure de la Vézère dans la Dordogne, une ligne de communication qui se trouvera ouverte d'une manière moins coûteuse, plus facile et même plus rapide que celle qui existe aujourd'hui. Mais est-il à dire que l'utilité de cette ligne s'arrête au Lardin? Non! car outre la possibilité que plus tard on ouvre des communications par eau avec Brives ou la Corrèze supérieure, il existe déjà une ligne de communication par terre, beaucoup plus courte que ne le serait la communication par eau, et qui, pour tous ceux qui connaissent le pays, ne peut présenter la moindre difficulté sur l'utilité de mettre les moyens de terre en communication avec les lignes par eau, ce qui sera le résultat des travaux à entreprendre.

Je suis ensuite assez surpris de voir défendre les intérêts de personnes et de pays qui ne se plaignent pas. En effet, je ne comprends pas comment les honorables préopinants qui sont étrangers au département de la Corrèze prétendraient mieux entendre les intérêts des localités mêmes. Je suis non seulement porteur de plusieurs enquêtes faites dans les communes inférieures au Lardin, mais encore d'une pétition adressée à la Chambre par le canton qui est supérieur au Lardin, et qui par conséquent se trouverait sans intérêt dans la question, d'après l'opinion de MM. Jousselin et de Mornay. Eh bien, les pétitionnaires de ce canton, qui se composent des plus grands propriétaires, des maires, des ajoints et des membres des conseils muni

[13 avril 1833.]

cipaux, les pétitionnaires dont la pétition a été
par moi communiquée ce matin à l'honorable
M. Jousselin, n'hésitent pas à réclamer l'ouver-
ture de cette ligne de communication, par les
motifs que j'ai eu l'honneur d'exposer; c'est-à-
dire en indiquant que la ligne de communica-
tion est avantageuse non seulement aux terri-
toires qu'elle parcourt, mais encore aux terri-
toires auxquels elle aboutit. Il y a plus je suis
également en possession d'une liasse assez con-
sidérable de lettres émanées des principaux
négociants de la ville de Brives, lettres dont j'ai
offert la communication à M. Jousselin. Il en
résulte que la ville de Brives réclame, de la ma-
nière la plus pressante, l'ouverture de cette ligne
de communication, qui la mettra en rapport, par
une voie de terre directe, avec une ligne navi-
gable qui ira directement jusqu'à la Dordogne.

Si les autorités que je viens de citer ne suf-
fisent pas, je dirai que, dans le sein de la com-
mission chargée par vos bureaux d'examiner le
4 députés formant la députation de la Corrèze.
projet qui vous est soumis, se trouvaient les
Sur 7 députés qui composent la députation de la
Dordogne, 2 seulement faisaient partie de la com-
mission; les 3 autres membres appartenaient à
différents départements: l'un au département
de Seine-et-Õise, le second au département de
l'Ain, et le troisième au département d'Indre-et-
Loire. Peut-on dire que, dans une commission
où cette résolution a été adoptée à l'unanimité,
où les membres de la députation de la Corrèze
ont fait valoir toute l'utilité de ce projet, peut-on
dire que les intérêts de ce département aient été
sacrifiés? Non, ils ont été appréciés et protégés.
Les véritables organes de ces intérêts, les dépu-
tés de la Corrèze, ont parfaitement compris qu'un
canal qui mettait leur département en commu-
nication avec la ligne navigable était une chose
des travaux qui ouvraient
utile pour le pays; que
la Vézère ne pouvaient être inutiles à la Corrèze,
puisque c'était le commencement d'entreprises
ultérieures, dont le succès de celle-ci ne peut
manquer d'amener la création et le développe-
ment. (Aux voix ! aux voix!)

M. Jousselin. Je demande la parole. (Non! non! Aux voix!) M. le rapporteur vous a dit que ceux qui ne partageraient pas son opinion pourraient le contredire. Je crois être dans cette nécessité. La commission me paraît avoir été entièrement dans l'erreur (La clôture! la clôture !) relativement aux dispositions de l'article 11 du cahier des charges. Il suffit, pour s'en convaincre, de lire les pages 5 et 17 du rapport.

Ainsi, l'unanimité de la commission, que l'honorable rapporteur vient de rappeler, ne peut pas avoir la même force que dans toute autre circonstance elle pourrait avoir.

Je suis un peu surpris, je dois le dire, de ne pas voir monter à la tribune MM. les députés de la Corrèze pour défendre les intérêts de leur département qui me paraissent avoir été sacrifiés (Aux voix? aux voix!)

M. Bédoch. Je demande la parole pour un fait personnel. Député de la Corrèze, je prie l'honorable préopinant de croire que ni moi ni les autres députés de ce département nous n'avons négligé ses intérêts. Nous avons vu les avantages et les inconvénients, et après avoir balancé le tout, nous avons cru que ce qu'il y avait de mieux à faire était d'adopter le projet de la commission.

(L'article 1er est mis aux voix et adopté.)

[merged small][ocr errors]

M. Jousselin. Je propose de remplacer ces mots: ne recevront, jusqu'à la fin de l'article, par ceux-ci recevront leur entière exécution.

En relevant la compagnie de la déchéance, vous lui imposez les obligations qui résultaient de la loi de 1825, et vous faites, sous un double rapport, un acte de justice.

M. Legrand, commissaire_du_roi. Messieurs, l'amendement que propose M. Jousselin tend à rendre à l'entreprise des canaux de la Corrèze et de la Vézère les limites qui lui sont assignées par la loi du 8 juin 1825. Dès lors, le projet de loi sur lequel vous délibérez deviendrait complètement inutile, puisqu'il a précisément pour but de modifier cette loi dans cette partie de ses dispositions. Nous avons reconnu que l'ensemble des ouvrages compris dans la loi du 8 juin 1825 constituait une opération abandonnée par les capitalistes, et inaccessible à un nouveau spéculateur. Nous avons ouvert une enquête pour savoir dans quelle proportion il fallait réduire les travaux, et nous vous proposons de les arrêter à la limite indiquée par le pays.

M. Jousselin (de sa place). Vous induisez la Chambre en erreur vous n'avez pas consulté le pays; vous n'avez pas entendu le département de la Corrèze, qui était éminemment intéressé dans la question.

M. Legrand, commissaire du roi. Je suis bien obligé de répéter les mêmes réponses, puisqu'on m'adresse les mêmes questions.

Nous n'avons pas consulté le département de la Corrèze, parce que nous avons reconnu dès le principe que les travaux situés sur le territoire de la Corrèze devaient être détachés de l'opération, si nous voulions qu'elle devint possible, et que la spéculation put s'y attacher : nous aurions été inconséquents avec nous-mêmes si nous eussions poussé l'enquête sur le territoire de la Corrèze; la partie de l'entreprise que nous considérions comme susceptible d'être continuée et achevée n'intéressait que le département de la Dordogne; c'est à ce département seul que nous devrions nous adresser, et, encore une fois, c'est au point désigné par les organes naturels des besoins et des vœux de la contrée que le projet de loi limite l'opération. Si la compagnie avait pu reprendre toutes les obligations que lui imposait la loi du 8 juin 1825, ainsi que le demandé M. Jousselin, une loi nouvelle n'était pas indispensable; le temps fixé pour l'exécution des travaux n'étant pas encore expiré, le relief de la déchéance aurait pu être accordé par un acte de justice gracieuse.

M. Jousselin. Mon amendement n'est pas inutile, car l'Administration qui a fait prononcer mal à propos la déchéance n'a pas le droit de détruire ce qu'elle a fait ; une loi est nécessaire pour relever de la déchéance prononcée le premier concessionnaire. Je consens volontiers à ce qu'il en soit relevé, mais je veux que du moins il soit soumis aux obligations qui lui étaient imposées par l'ancien cahier des charges.

M. le Président. L'amendement est-il appuyé? (Non! non!) L'amendement n'étant pas appuyé, je n'ai pas à le mettre aux voix.

M. Lavialle de Masmorel. Je demande la parole. (Aux voix ! aux voix!)

M. Jousselin. M. Lavialle est le député de Brives, il doit être entendu dans cette discussion.

M. Lavialle de Masmorel. Je demande qu'à la fin de l'article, au lieu des mots jusqu'au Lardin, on mette: jusques et y compris le Lardin. M. Mérilhou, rapporteur. Nous sommes parfaitement d'accord.

M. Legrand, commissaire du roi. L'amendement paraît tout à fait inutile.

(L'article amendé par M. Lavialle est mis aux voix et adopté.)

« Art. 3. La compagnie sera tenue de terminer, dans le délai de 5 ans, les travaux qui restent à exécuter entre les limites indiquées à l'article précédent. (Adopté.)

M. le Président. Article 4.

M. Legrand, commissaire du roi. La commission a proposé la suppression de cet article, et le gouvernement a adhéré.

M. Jousselin. Il faut mettre la suppression aux voix.

M. Teste. C'est tout à fait inutile. Si la Chambre ne vote que trois articles, il est évident que la loi ne pourra en avoir quatre.

M. le Président. Si personne ne reprend l'article retiré par le gouvernement, il est inutile de le mettre aux voix.

La Chambre passe au scrutin sur l'ensemble de la loi. En voici le résultat :

[blocks in formation]

M. le Président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi tendant à autoriser la concession des travaux à faire dans le département de la Manche, pour canaliser la rivière de Vire et pour ouvrir un canal de jonction depuis le Poribet jusqu'au hameau de Cap.

«Art 1er. Le gouvernement est autorisé à procéder, par la voie de la publicité et de la concurrence, à la concession des travaux à faire dans le département de la Manche: 1° pour canaliser la rivière de Vire, depuis Saint-Lô jusqu'au Poribet; 2° pour ouvrir un canal de jonction entre cette rivière et celle de Taute, depuis le Poribet jusque un peu au-dessous du hameau de Cap.

[ocr errors]

La commission propose d'amender ainsi cet article:

«Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à procéder, par la voie de la publicité et de la concurrence, à la concession des travaux à faire dans le département de la Manche, pour canaliser la rivière de Vire, depuis Saint-Lô jusqu'au Poribet; pour ouvrir un canal de jonction entre cette rivière et celle de Taute, depuis le Poribet jusqu'un peu au-dessous du hameau de Cap.

M. Baude, rapporteur. Le seul changement apporté par la commission consiste dans la suppression de 1o, 2o, d'où l'on pouvait inférer qu'il y aurait deux concessions, tandis qu'il ne doit y en avoir qu'une.

M. Enouf. Je demande qu'on mette: Jusqu'à la hauteur du hameau de Cap.

(L'article 1er ainsi amendé, est adopté.)

«Art. 2. La durée de la concession sera perpétuelle pour le canal à ouvrir entre les rivières de Vire et de Taute; pour le surplus de la ligne navigable, elle n'excédera pas 99 ans.

La concession sera donnée au rabais sur le prix du tarif ci-annexé. »

La commission propose d'amender ainsi l'article :

«Art. 2. La durée de la concesssion n'excédera pas 99 ans.

» La concession sera donnée au rabais sur cette durée.

«Elle comprendra, à perpétuité, l'usage de la chute d'eau de la Tringale, déduction faite du volume nécessaire au service de la navigation.

[ocr errors]

M. Baude, rapporteur. Ce qui déterminait la commission à demander que le rabais portât sur la durée, c'était la difficulté de s'exprimer en fractions de centimes, et la confusion qui pouvait en résulter dans les comptes. Des observations faites dans la localité, et soutenues par l'Administration, la ramènent à la rédaction du gouvernement, et à faire porter le rabais, non pas sur la durée de la concession, mais sur le prix du tarif. Elle se borne à remarquer qu'on peut éviter l'espèce d'embarras qui résulterait du fractionnement des centimes, en déterminant le rabais sur l'allongement de l'étendue à parcourir. Ainsi, on pourra conserver le même terme, si le gouvernement, après avoir consulté les autorités locales, n'y voit pas d'inconvénients. La somme à payer restera la même, seulement elle correspondra à un parcours un peu plus long. C'est ainsi que dans le canal de Saint-Quentin, au lien d'être de 5,000 mètres, la distance sur la première partie du canal est de 5,183 mètres, et sur la seconde de 5,194. Nous nous réunissons à la rédaction du gouvernement, en ce sens, que la concession sera faite au rabais sur le prix du tarif ci-annexé.

L'article 2 serait alors ainsi conçu :

« Art. 2. La durée de la concession n'excédera pas 99 ans.

« La concession sera donnée au rabais sur le prix du tarif ci-annexé.

« Elle comprendra, à perpétuité, l'usage de la chute d'eau de la Tringale, déduction faite du volume nécessaire au service de la navigation. » (Adopté.)

«Art. 3. Les concessionnaires percevront les droits déterminés par le tarif annexé à la présente loi, et jouiront du droit de pêche dans toute l'étendue de la navigation concédée. » (Adopté.)

«Art. 4. Les actes de vente des terrains qui serviront d'emplacement au canal et aux ouvrages faits par le concessionnaire, ne seront passibles, pour frais d'enregistrement, que du droit fixe de 1 franc » (Adopté.)

Tarif des droits de navigation à percevoir sur la rivière de Vire et sur le canal de jonction de

cette rivière avec la Taute.

Amendé par la commission.

1o Les droits de navigation seront perçus par tonneau de 1,000 kilogrammes de chargement effectif, et par distance de 5 kilomètres.

Les fractions de distance seront comptées comme si la distance entière eût été parcourue. 2o La perception sera faite à la remonte comme à la descente.

[ocr errors]

3o Il sera payé, pour tous objets autres que les engrais et amendements, quinze centimes par tonneau et par distance. >>> 15 4° Il sera payé, pour la tangue et autres engrais et amendements, sept centimes et demi par tonneau et par distance.

5o Les bateaux vides paieront un centime par tonneau de leur chargement possible, à moins qu'ils n'aient une fraction de chargement effectif donnant lieu à une perception supérieure, auquel cas le péage sera dû sur ce chargement.

6o Les barques consacrées au transport des marchandises ou des voyageurs, et jaugeant moins de 4 tonneaux, où les bateaux servant aux riverains pour le transport de leurs produits agricoles, et dans les limites seulement de leur exploitation, ne seront assujettis à aucun droit, tant qu'ils ne quitteront pas le même bief; s'ils passent d'un bief dans un autre, ils payeront un droit fixe de un franc au passage de chaque écluse....

n

7 1/2

1 fr. » Les contestations qui pourront s'élever sur la perception des droits seront jugées administrativement conformément à l'article 4 de la loi du 20 mai 1802 (30 floréal an X).

Voici le résultat du scrutin :

Nombre des votants..
Majorité absolue.
Boules blanches.
Boules noires.

...

(La Chambre a adopté.)

232

117

227

5

L'ordre du jour appelle la discussion sur les projets de loi relatifs l'état des citoyens et au régime législatif dans les colonies.

La discussion générale est ouverte. M. Dariste a la parole.

M. Dariste. Messieurs, n'attendez pas de moi que je traite à fond toutes les questions coloniales, ce serait trop présumer de mes forces et de votre indulgence. Je me propose de vous présenter quelques réflexions sur l'état d'un pays que j'ai habité pendant 30 années, et d'une population que j'ai connue; je me propose surtout de défendre les colons contre des imputations quelquefois fausses, souvent exagérées. Puissent mes efforts leur concilier votre bienveillance, détruire cette prévention qui environne leur cause, et faire place à la justice, qui est l'intérêt de tous !

Messieurs, entre les nègres et les blancs, les maîtres et les non libres, il s'est formé, dans nos colonies, une troisième population qui, jusqu'à ces derniers temps, a vécu dans un état mixte ; la population des hommes de couleur, les uns esclaves, les autres libres, mais libres sans aucun droit social, sans aucune participation aux fonctions publiques.

Cet état d'infériorité n'avait point pour origine une nécessité absolue; ce n'est que dans la suite des temps, et lorsqu'il a fallu discuter, qu'on a été porté à élever le préjugé à la dignité du raisonnement. La différence des races, le souvenir et leur rapprochement à l'état de non libre, ont imprimé sur le front des hommes de couleur une déconsidération d'où est né le préjugé qui pesait sur cette classe, mais que les mœurs et la

« PrécédentContinuer »