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[Chambre des Députés.

il est une autre partie administrative. Les gouverneurs font des visites dans les différentes habitations. J'ai reçu, il y a peu de jours, les résultats d'un recensement fait à l'ile de Bourbon, qui constate une augmentation, de 1830 à 1831, de la population noire de l'ile, mais qui établit aussi rigoureusement que cette augmentation n'est nullement due à la traite, mais qu'au contraire elle est la suite du bon système établi dans les habitations de Bourbon. Dans les colonies occidentales, le problème se résout de la même manière.

D'après ces considérations, vous ne pouvez pas manquer de repousser l'amendement de M. Isambert quant à l'affranchissement, et celui de M. de Tracy quant au recensement.

M. le général Lafayette. Messieurs, je n'ajouterai qu'un mot aux excellentes observations qui viennent de vous être présentées par mon ami, M. de Tracy. Notre honorable collègue, M. Charles Dupin, a rendu justice à mon respect pour le nom de milice; je n'ai pas oublié l'honneur que j'ai eu, il y a près de 60 ans, de combattre avec les milices américaines. Je viens pourtant appuyer le vœu qui vous a été exprimé de substituer le mot gardes nationales à celui de milices, ou plutôt de le rétablir, car il a existé dans les colonies depuis 89 jusqu'en 1826, époque à laquelle la Restauration prétendait à la destruction de la garde nationale en France.

Ce sentiment est permis à celui de vos collègues qui, le premier, dès le 16 juillet 89, eut l'honneur d'appliquer cette qualification à la France armée pour la conquête de la liberté, de l'égalité et de l'ordre public, et qui a conservé dans son cœur ce premier anneau d'une chaîne qu'il a eu le bonheur de retrouver en 1830, comme elle avait été formée dès les premières années de la Révolution.

J'ai un autre motif pour demander ce rétablissement le nom de garde nationale s'amalgame intimement avec le principe vital de son existence, la nomination des officiers par les citoyens.

Je sais que ce principe a été faussé sous le despotisme impérial et pendant la Restauration: maís il a été reconquis par la Révolution de Juillet, le même jour et en même temps que l'imprescriptible principe de la souveraineté du peuple, et même antérieurement à toutes les autres combinaisons, ce qui désormais rend ce principe d'élection à jamais indestructible.

M. Dulong. Le but de l'amendement proposé par notre honorable collègue, est de laisser à la loi toutes les matières essentiellement de son domaine; en l'écartant, on admettra, que par cela seul qu'une loi aura dit qu'une ordonnance peut traiter ces matières, la Charte ne serait pas violée. C'est ce singulier argument que faisait M. le ministre en descendant de la tribune. Cependant l'article de la Charte est clair, son interprétation est facile: il veut que toutes les matières qui, en France, sont du domaine de la loi, doivent être également du domaine de la loi dans nos colonies. J'en appelle à tout homme de bonne foi, les matières comprises dans l'amendement de M. Isambert seraient-elles en France du domaine d'une ordonnance ou du domaine de la loi?

La Charte ne sera pas satisfaite parce que la loi aura remis ces matières au domaine de l'ordonnance; vous l'aurez violée, sinon formellement, mais indirectement, ce qui est un plus grand mal, car la violation claire et manifeste

éveille tous les esprits, dès lors il n'y pas cor-
ruption dans le sens de la loi. Lorsqu'au con-
traire elle se glisse, s'insinue pour ainsi dire à
l'insu d'un grand nombre d'esprits, bientôt cette
première violation en entraine d'autres, et on
ne tarde pas à s'apercevoir que le système gé-
néral d'un pays est violé dans ses dispositions
les plus virtuelles.

Examinons donc, aujourd'hui qu'il s'agit d'une première violation que l'on couvre de mots spéciaux, si la Charte peut le permettre. Je ne crains pas de dire que non; toutes les matières énoncées dans l'amendement de M. Isambert, sont du domaine de la loi. Il ne s'agit pas ici de l'organisation du régime municipal, mais seulement d'en établir les bases. Cela peut-il appartenir à l'ordonnance?

Pour la liberté du culte et celle de l'enseidit que c'étaient gnement, M. le rapporteur vous a là des lois générales, également applicables aux colonies comme à la metropole. Ce raisonnement n'est pas exact: par cela que la Charte n'est pas applicable dans toutes ces dispositions aux colonies, il faut que l'on consacre par des lois à part les principes dont on veut les faire jouir; car si tous les articles de la Charte étaient applicables aux colonies, nous n'aurions pas besoin aujourd'hui de faire une législation distincte.

Ainsi une loi peut seule statuer sur la liberté des cultes et sur celle de l'enseignement, sauf à laisser à l'ordonnance à régler les mesures de police, comme cela a lieu en France, où, à côté du principe consacré par la Charte, se trouve le droit de règlement laissé au pouvoir exécutif.

Quant aux conditions d'affranchissement et de recensement, je répondrai à un argument auquel M. le rapporteur a paru attacher une grande importance. Moi aussi je suis de l'avis de l'Assemblée constituante, et voici pourquoi: Après avoir laissé, par une première loi de 1790, aux conseils coloniaux le soin de statuer, en effet, sur les conditions de l'affranchissement, l'Assemblée constituante reconnut le vice de cette loi; elle s'aperçut que les conditions imposées à l'affranchissement par les conseils coloniaux en paralysaient l'accomplissement.

Qu'a-t-elle fait? Par deux lois, l'une de 1791 et l'autre du commencement de 92, elle a remis ce droit à la législation. L'Assemblée constituante a donc fait ce que nous réclamons; je dis l'Assemblée constituante et non pas la Convention; et certes, si la Convention l'avait fait, ce ne serait pas pour nous un motif de rejeter son héritage, car enfin la Convention aussi a rendu un grand nombre de lois dont le pays s'honore; elle a, par son énergie, sauvé la France de l'invasion étrangère.

Mais enfin c'est la Constituante qui a rendu ce service à l'humanité. Vous montrerez-vous en arrière d'une assemblée qui légiférait à une époque où, pour la première fois, on parlait de la liberté des esclaves, lorsqu'il s'agit de fixer l'état civil d'une classe de personnes qui sont dans la position la plus affreuse?

Il est impossible de laisser à un seul pouvoir le soin de régler les affaires de ce genre. J'appuie l'amendement de notre honorable collègue M. Isambert.

M. le Président. Je vais mettre aux voix cet amendement.

Plusieurs membres : La division!

(Les parties relatives au régime municipal, à la liberté des cultes et de l'enseignement, à l'or

ganisation des gardes nationales, sont successivement mises aux voix et rejetées.)

M. le Président. Je vais mettre aux voix les questions de l'affranchissement et du recensement, puisque tous les orateurs ont reconnu qu'elles étaient inséparables.

M. Laurence. M. le ministre de la marine me semble avoir commis une erreur tout à l'heure, en expliquant dans son sens les conséquences qu'on demande d'introduire dans l'article 2. Dans aucun pays au monde les lois ne se sont montrées indifférentes sur les manières dont peut s'acquérir la qualité de citoyen. II n'est aucun pays dans lequel la législature, quand il y en a une, se soit dépouillée du droit de fixer, de définir clairement, non seulement les conditions du droit de cité, mais les formes sous lesquelles il doit s'acquérir. Si, dans notre Code civil, vous lisez de quelle manière la qualité de Français peut se perdre, vous y lisez aussi de quelle manière elle s'acquiert. Il ne faut pas perdre de vue que l'esclave en état de servitude est une chose et non pas un homme, qu'aussitôt qu'il passe de la servitude à la liberté, d'une chose qu'il était, il devient un citoyen, et conséquemment qu'à partir de ce jour, il devient admissible à tous les droits s'il réunit les conditions de capacité déterminées par les lois. Comment comprendre alors que l'exercice de ces droits étant confié aux autorités coloniales, elles n'imposeront pas des conditions tellement sévères que la liberté serait presque impossible.

Cette disposition nouvelle me paraît d'une haute gravité. Pour moi, je me refuse à reconnaître à un pouvoir exécutif quelconque, le droit de faire les citoyens. Envisagée sous ce point de vue, la question est très grande.

Le gouvernement avait lui-même spontanément introduit, l'année dernière, la disposition que nous réclamons aujourd'hui, et même la législation n'était que temporaire; il fallait, au bout de 10 ans, la soumettre à la revision de la législature. Je ne sais pas par quel motif cette disposition a disparu du projet de loi; s'il le fallait, je la reprendrais comme sous-amende

ment.

M. Dupin ainé. Notre honorable collègue confond l'affranchissement avec le passage au droit politique. L'affranchissement en lui-même est la cessation de l'état d'esclavage. L'état d'esclavage est cet état contre nature, qui fait qu'un homme est considéré comme la propriété d'un autre homme, qu'il n'est pas une personne, mais une chose; qu'il est dans le domaine de la propriété de son maître, au même titre qu'un meuble, un cheval ou tout autre animal.

Qu'est-ce que l'affranchissement? C'est l'acte qui fait cesser cet état contre nature, qui fait passer l'homme de la condition de chose à la condition de rersonne civile, c'est la cessation de prééminence, à titre de propriétaire, d'un homme sur un autre homme.

L'homme, ainsi affranchi, devient un homme libre. Mais faut-il en conclure pour cela que le maître, en lui conférant la liberté lui a conféré aussi des droits politiques? Un tel droit ne peut pas être reconnu au maître; un maître ne peut conférer que ce qui lui appartient. Ainsi l'affranchi est personne libre et rien de plus; et vous avez reconnu vous-mêmes dans la loi que vous venez de voter, qu'un homme libre n'est pas un homme politique, et dans l'article en discussion vous voyez que le pouvoir législatif se réserve

de faire des lois pour régler les droits des affranchis.

Ainsi, un maître ne peut faire que des affranchis; il ne peut pas faire des hommes politiques, à moins, comme l'a dit M. le ministre de la marine, qu'on ne veuille introduire un affranchissement forcé, une expropriation pour cause d'utilité publique. Probablement l'on n'a pas l'intention de faire un emprunt à ce sujet, de forcer les maîtres des colonies aux affranchissements; nous voulons que ce soit une législation qui leur plaise, qui leur soit agreable et non odieuse; qu'ils soient intéressés à pratiquer, parce qu'ils ont concouru à la faire; car cette disposition n'a été arrêtée qu'après avoir entendu les individus malheureusement propriétaires d'hommes, car je ne suis pas partisan de l'esclavage. C'est dans l'intérêt de la liberté progressive qu'il faut laisser l'affranchissement dans le domaine de l'ordonnance, en laissant à la loi à fixer les conditions des droits politiques. Je désire que la loi passe, pour qu'ils en jouissent le plus tôt possible.

M. Salverte. Le préopinant me semble être tombé dans l'erreur en répondant à M. Laurence. Il s'agit ici de constater légalement l'affranchissement. Sera-ce par une loi, sera-ce par une ordonnance? Vous voyez donc qu'il ne s'agit pas ici de conférer des droits politiques, il s'agit d'affranchissement. Et la preuve qu'il faut que l'affranchissement soit fégalement constaté, c'est la nécessité où l'on a été de réclamer en faveur des patronnés, de prouver qu'ils avaient été réellement affranchis. Je vous rappellerai l'excellent plaidoyer de l'honorable préopinant, où il a parfaitement prouvé qu'un patronné devait être libre: mais en le lisant, on a senti que pour soustraire à l'arbitraire, à l'influence des passions et à l'intérêt personnel les malheureux qui se trouvaient dans cette situation. il fallait que la législation fùt fixe. Rien ne s'oppose donc à ce que cela soit établi par la loi. Bien plus, comme l'a fait observer M. Laurence, dans aucun pays l'état des personnes n'est sorti du domaine de la loi. C'est la loi fondamentale qui fixe les bases, et des lois de détail qui déterminent les conditions, et ce ne sont jamais les règlements. Sans doute, nous ne voulons pas des affranchissements par contrainte, mais des affranchissements volontaires de la part des maîtres, puisqu'il faut employer cette pénible expression. Sans doute, il faut que la forme de l'affranchissement leur soit agréable et non pas odieuse, nous sommes d'accord avec l'honorable préopinant; mais quelle étrange conséquence en a-til tirée? C'est que le règlement de ces formes reste dans le domaine des ordonnances, et qu'une loi rendue par les trois pouvoirs de l'Etat serait essentiellement odieuse aux propriétaires des colonies. Croyez-vous qu'elle serait rendue sans les avoir consultés? Les lois mêmes dont nous nous occupons ont été rédigées après avoir entendu les délégués des colonies, c'est-à-dire les délégués des propriétaires; car on a rarement entendu avec beaucoup de faveur les délégués des mulâtres et des noirs. Ainsi, il serait parfaitement possible que les formes d'affranchissement convenables, agréables aux propriétaires, soient réglées par la loi. Or, comme il s'agit de l'état des personnes, que l'état des personnes ne peut être fixé que par la loi, j'insiste pour l'adoption de ce paragraphe

M. Dupin aîné. Puisque notre honorable collè

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gue a bien voulu me citer, je désire qu'il entende
bien dans quel sens j'ai pris la défense des pa-
tronnés; c'est précisément cette classe d'hommes
qui me servira à établir la distinction que j'ai
faite entre l'affranchissement, en tant qu'il n'est
que la mise en dehors de la main du propriétaire,
et le passage au droit politique. Qu'étaient les
patronnés? C'étaient des hommes affranchis par
leurs maitres, auxquels on donnait la qualité
d'hommes libres, bien qu'ils ne pussent exercer
aucun droit. Quoiqu'il n'y eût point de loi, j'ai
soutenu que l'affranchissement produisait un
effet essentiel et naturel, indépendant même de
la législation; que par cela seul qu'il y avait eu
abdication de propriété, le patronné était homme
libre, sans droits politiques, mais libre de fait.
Dans les colonies, on voulait ne reconnaître
que deux catégories : l'une composée des indi-
vidus qui, comme les colons, seraient en pos-
session de tous les droits, et l'autre des indi-
vidus qui seraient esclaves. On se refusait à
reconnaître la situation de l'homme qui n'est
plus esclave par le fait de l'affranchissement.
J'ai soutenu que par cela qu'il n'était plus esclave,
il était libre de fait; il était à peu près dans la
situation où se trouve, dans un pays, un étranger
non naturalisé. Il ne s'ensuit pas qu'il faille une
loi pour régler les conditions et les formes d'un
affranchissement. Les conditions et les formes
de l'affranchissement, c'est la volonté du maître;
il prend à son choix celle du testament, celle de
la dotation. S'il n'est pas libre dans son choix,
vous lui prendrez son esclave, et c'est une por-
priété, peu favorable, il est vrai, mais tant
qu'elle gardera le nom de propriété elle est res-
pectable.

Ainsi, les conditions et les formes de l'affranchissement sont du domaine des ordonnances, du domaine réglementaire et de contrat avec les propriétaires, sans lesquels vous ne pouvez rien faire. Ainsi l'exemple des patronnés, invoqué par M. Salverte, est, au contraire, un argument contre lui.

M. Laurence. Je n'ai pas entendu parler de l'exercice exclusif des droits politiques, cela résulte de la situation ultérieure de la personne. Je me suis expliqué de manière à faire comprendre que l'esclave ne devait exercer ses droits, que tout autant que cette capacité lui aurait été accordée par la loì; mais il s'agit des droits civils d'un homme, et la question, mise sur ce terrain, me paraît loin d'être résolue par des observations présentées tout à l'heure, qui se raportent à un etat de choses complètement différent. Je ne dirai pas ce que mon savant collègue sait mieux que moi, c'est que, dans la législation que nous prenons tous les jours pour modèle, dont nous invoquons sans cesse l'autorité, des milliers de lois conservent les conditions et jusques aux formes de l'affranchissement.

Permettez-moi de choisir un exemple propre à frapper tous les yeux. L'adoption dans la loi française est sujette à des formes, ces formes sont réglées par la loi. Il en est de même de tout ce qui se rapporte à la naissance. On arrive à la vie civile par la naissance; la naissance est constatée par la loi; on arrive à la vie de famille par l'adoption, parce que l'on entre dans une famille que la nature ne nous avait pas donnée; eh bien, la loi s'occupe des formalités qui accompagnent cet acte. Est-ce que l'esclave qui ne peut vivre hors de la société, qui n'était qu'un véritable animal, partageant la condition des animaux,

une propriété transmissible et vendable même
sur un marché ainsi qu'un boeuf, un cheval,
lorsqu'il entre dans la cité, ne naît pas en quel-
que sorte à la vie civile ? C'est là son acte de nais-
sance; il s'agit de la constater, ce sont les condi-
tions de son arrivée dans le monde physique qu'il
s'agit de régler ou par une loi, ou par une ordon-
nance; je persiste à croire que tout ce qui touche
à l'état des personnes n'est pas trop environné
de garanties en le mettant dans le domaine la loi.
(La dernière partie de l'amendement est re-
jetée.)

(Le premier paragraphe de l'article 2 est
adopté.)

M. le Président. Je vais mettre aux voix le paragraphe 2.

M. de Podenas. Je n'ai que quelques observations à présenter à la Chambre sur le paragraphe 2 de l'article qui est dans ce moment l'objet de ses débats. M. le ministre de la marine verra dans sa sagesse s'il n'y aura pas quelques fruits à en recueillir dans un avenir peu éloigné. Je ne veux point formuler mes réflexions en une proposition. Pour peu que le projet de loi vint à subir le plus léger changement de rédaction, il ne pourrait pas être adopté par les trois pouvoirs dans le cours de cette session qui touche à son dernier terme. La session qui va suivre sera beaucoup trop courte pour qu'on puisse s'en occuper utilement. Ce n'est donc que vers le milieu de l'année 1834 que le projet serait converti en loi de l'Etat. Or, cette époque est beaucoup trop éloignée; et il importe essentiellement à nos colonies d'être appelées à jouir le plus promptement possible des bienfaits d'une législation constitutive. Point d'amendement, afin que la loi soit plus rapidement votée, et étende de suite son utile influence à nos possessions d'outre-mer.

Ce n'est pas sans étonnement que je vois le paragraphe 2 refuser au pouvoir législatif de la métropole le droit de déterminer les lois pénales applicables aux personnes non libres. Cette prérogative lui est seulement réservée, lorsqu'il s'agit de préciser les crimes de nature à entraîner la peine de mort. Hors de ce cas unique, cette attribution est remise au domaine des ordonnances, après avoir toutefois préalablement entendu les conseils coloniaux, ou leurs délégués. Sans doute, comme l'a dit l'honorable rapporteur de votre commission, la vie de tout individu qui habite le sol français, doit être placée sous l'égide du législateur; mais la vie est-elle donc tout pour l'homme? l'esclave n'a-t-il plus cette qualité? Son honneur ne lui est il pas aussi précieux qu'à l'homme libre? sa personne ne doit-elle pas aussi être mise à l'abri contre l'abus des peines afflictives et infamantes sous la protection de la loi? les travaux forcés à perpétuité, à temps, la réclusion, la flétrissure, ne sont-ils donc rien pour lui? Messieurs, il suffit de faire ressortir devant vous la disposition qui vous est présentée pour que vous en aperceviez l'irrégularité. Quand il s'agit de frapper un individu, quel qu'il soit, de peines afflictives et infamantes, la raison, la justice, l'humanité, prescrivent également l'action du pouvoir législatif, et non celle du pouvoir ministériel.

N'allez pas croire, cependant, Messieurs, que j'entende attribuer à la loi la fixation des pénalités à infliger aux esclaves dans tout ce qui concerne les règles de la subordination et de la dépendance vis-à-vis de leurs maîtres. Loin de moi une telle idée qui bouleverserait tout notre sys

tème colonial Je n'entends parler ici que des crimes et delits ordinaires, et c'est à leur égard que je dis qu'ils ne peuvent appartenir qu'au seul régime de la loi, et non des ordonnances.

Aux Etats-Unis, en Angleterre, c'est le pouvoir législatif qui détermine les crimes et les peines qui leur sont applicables relativement à l'esclave. Dans ce dernier pays même, et pour quelquesunes de ses colonies, la loi a consacré l'établissement d'un magistrat spécialement chargé de la protection des esclaves.

La France ne saurait longtemps consacrer un régime qui placerait l'homme non libre, sous le rapport des pénalités, en dehors du concours du pouvoir législatif.

Je soumets ces réflexions à M. le ministre de la marine, afin que, plus tard, lorsque la loi que Vous faites aura fait sentir à nos colonies ses immenses bienfaits, il vous propose de placer sous le régime législatif tous les crimes et délits quelconques qui seraient commis par les personnes non libres, et les peines à leur appliquer. (Le second paragraphe, ainsi que l'ensemble de l'article 2, sont adoptés.)

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FIN DU TOME LXXXI

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M. Garnier-Pgès, etc

M. Dupin, etc. Adoption provisoire et nullité

du scrutiu...

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Chambre des pairs. - Présentation par M. Thiers,
ministre du commerce et des travaux publics,

Chambre des députés. - Rapport par M. Renouard
sur le projet de loi concernant la vente des ré-

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