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Cependant toutes les espérances de paix maritime s'évanouissent: les mesures fortes prises pour l'obtenir, demeurent sans effet. Les Anglais sourient à la pensée de la discorde rallumée de nouveau sur le Continent, et se reposent sur elle de la défense de leurs intérêts.

Voilà les maux que vous avez produits, et, je crois saus en avoir l'intention. Mais si vos dispositions sont aussi pacifiques que vous le dites, il faut vous prononcer; il faut contremander des mesures qui ont excité une si dangereuse fermentation; il faut, à ce mouvement involontairement excité, opposer un mouvement contraire, et lorsque depuis Pétersbourg jusqu'à Naples it n'a été question que de la guerre que l'Autriche allait faire, que tous vos négocians l'annoncent comme certaine, il faut, dis-je, que toute l'Europe soit convaincue que vous voulez la paix: il faut que toutes les bouches proclament vos dispositions pacifiques justifiées par vos actes comme par vos discours. De mon côté je vous donnerai toute la sécurité que vous pourrez désirer.

Voilà, Monsieur, autant qu'il m'est possible de le tracer, un léger extrait de ce que S. M. a dit à M. de Metternich. L'empereur paraissait ému, comme on doit l'être quand on traite des sujets graves, Il n'a eu que la chaleur que cette émotion devait produire; il u'a parlé qu'avec beaucoup 'd'égards de l'Empereur d'Autriche et de son gouvernement, et a dit des choses personnellement agréables à M. de Metternich. Cet ambassadeur qui, du reste, a toujours protesté des intentions pacifiques de sa cour, ne s'est point trouvé placé un seul moment dans une position embarrassante; et je Ï'ai vu, le soir, se féliciter d'être dans une cour où de telles communications pouvaient êtres faites directement, et, de cette manière, par le souverain à un ministre étranger. M. de Tolstoi partageait cette opinion. L'empereur a paru aux yeux de ceux qui ont pu l'entendre, noble, loyal, franc, observateur de toutes les convenances, y mettant une entière délicatesse, éloquent autant que sensible, et de cette sensibilité qu'excitent les grands intérêts de l'humanité; on a pu juger qu'également préparé à la guerre comme à la paix, il désirait l'une sans craindre l'autre, et on a généralement pensé qu'à un langage si franc et si noble, on ne pouvait répondre qu'en déclarant qu'on voulait la guerre, ou en prouvant par des faits plus que par des discours qu'on désirait la paix.

Vous pouvez faire, monsieur, de cette dépêche le sujet de vos entretiens avec M. de Stadion. Le gouvernement autri. chien ne pourra douter du désir sincère de l'empereur de conserver la paix. Mais l'empereur veut de la sécurité dans la paix. Si cette paix est également chère à l'Autriche, elle ne négligera donc aucun moyen de rassurer pleinement l'empereur sur ces dispositions, et c'est surtout en donnant une autre direction à l'esprit public qu'on y parviendra. Mais Нн ни2

cette direction même ne pourra résulter que d'un changement de mesure.

No. XI.

Lettre de S. M. l'empereur d'Autriche à S. M. l'empereur des François.

Presbourg, le 18 Septembre, 1808. Monsieur mon frère, mon ambassadeur à Paris, m'apprend que V. M. impériale se rend à Erfurt, où elle se rencontrera avec l'empereur Alexandre. Je saisis, avec empressement l'occasion qui la rapproche de ma frontière pour lui renouveler le témoignage de l'amitié et de la haute estime que je lui ai vouée, et j'envoie auprès d'elle mon lieutenant-général le baron Vincent pour vous porter, monsieur mon frère, l'assurance de ces sentimens invariables. Je me flatte que V. M. n'a jamais cessé d'en être convaincue, et que si de fausses représentations qu'on avait répandues sur des institutions intérieurs organiques que j'ai établies dans ma monarchie, lui ont laissé pendant un moment des doutes sur la persévérance de mes intentions, les explications que le comte de Metternich a présentées à ce sujet à son ministre les auront entièremeut dissipés. Le Baron de Vincent se trouve à même de confir mer à V. M. ces détails et d'y ajouter tous les éclaircissemens qu'elle pourra désirer. Je la prie de lui accorder la même bienveillance, avec laquelle elle la bien voulu le recevoir à Paris et à Varsovie. Les nouvelles marques qu'elle lui en donnera, me seront un gage non équivoque de l'entière réciprocité de ses sentimens, et elles mettront le sceau à cette entière confiance qui ne laissera rien à ajouter à la satisfaction mutuelle. Veuillez agréer l'assurance de l'inaltérable attachement, et de la haute considération avec laquelle je suis,

Monsieur, mon frère,

de votre majesté impériale et royale
le bon frère et ami,

(Signé) FRANÇOIS.

No. XII.

Lettre de S. M. l'empereur Napoléon, aux rois de Bavière de Saxe, de Westphalie, de Wurtemberg, au grand-duc de Bade, et au Prince-Primat.

Monsieur mon frère, les assurances données par la cour de Vienne que les milices étaient renvoyées chez elles et ne seraient plus rassemblées, qu'aucun armement ne donnerait plus d'inquiétude pour les frontières de la confédération; la lettre ! ci-jointe que je reçois de l'empereur d'Autriche, les protestations réiterées que m'a faites M. le baron de Vincent et plus que cela, le commencement de l'exécution, qui a déjà lieu en ce moment en Autriche de différentes promesses qui ont été

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faites, me portent à écrire à V. M. que je crois que la tran quillité des états de la confédération n'est d'aucune manière menacée, et que V. M. est maîtresse de lever ses camps, et de remetrre ses troupes dans leur quartiers, de la manière qu'elle est accoutumée de la faire. Je pense qu'il est conve nable que son ministre à Vienne reçoive pour instruction, de tenir ce langage, que les camps seront réformés et que les troupes de la confédération et du protecteur seront remises en situation hostile la toutes les fois que l'Autriche ferait des armemens extraordinaires et inusités: que nous voulons enfin tranquillité et sûreté. Sur ce, etc.

Erfurt, le 12 Octobre, 1808.

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Lettre de S. M. l'empereur Napoléon à S. M. l'empereur d'Autriche.

Erfurt, le 14 Octobre, 1808. Monsieur mon père, je remercie V. M. 1. et R. de la lettre qu'elle a bien voulu m'écrire, et que M. le baron de Vincent m'a remi Je n'ai jamais douté des intentions droites de V. M. mis je n'en ai pas moins craint un moment de voir les hostilités se renouveler entre nous. Il est à Vienne une faction qui affecte la peur pour précipiter votre cabinet dans des mesures violentes qui seraient l'origine de malheurs plus grands que ceux qui ont précédé. J'ai été le maître de démembrer la monarchie de V. M, ou du moins de la laisser moins puissante. Je ne l'ai pas voulu. Ce qu'elle est, elle l'est de mon vœu. C'est la plus évidente preuve que nos comptes sont soldés et que je ne veux rien d'elle. Je suis toujours prêt à garantir l'intégrité de sa monarchie. Je ne ferai jamais rien contre les principaux intérêts de ses états. Mais V. M. ne doit pas mettre en discussion ce que quinze ans de guerre ont terminé. Elle doit défendre toute proclamation ou démarche provoquant la guerre. La dernière levée en masse aurait produit la guerre, si j'avais pu craindre que cette levée et ces préparatifs fussent combinés avec la Russie. Je viens de licencier les camps de la confédération. Cent mille hommes de mes troupes vont à Boulogne pour renouveler mes projets sur l'Angleterre. Que V. M. s'abstienne de tout armement qui puisse me donner de l'inquiétude ou faire une diversion en faveur de l'Angleterre. J'ai dû croire, lorsque j'ai eu l'honneur de voir V. M. et que j'ai conclu le traité de Presbourg, que nos affaires étaient terminées pour toujours, et que je pourrais me livrer à la guerre maritime sans être inquiété ni distrait. Que V. M. se méfie de ceux qui lui par lant des dangers da sa monarchie, troublent ainsi son bonheur,

telui de sa famille et de ses peuples. Ceux-là seuls sont dangereux ceux-là seuls appellent des dangers qu'ils feignent de craindre. Avec une conduite droite, franche et simple, V. M. rendra son peuple heureux; jouira elle-même du bonheur dont elle doit sentir le besoin après tant de troubles, et sera sûr d'avoir en moi un homme décidé à ne jamais rien faire contre ses principaux intérêts. Que ses démarches montrent de la confiance, qu'elles en inspirent. La meilleure politique d'aujourd'hui, c'est la simplicité et la vérité. Qu'elle me confie ses inquiétudes; lorsqu'on parviendra à lui en donner, je les dissiperai sur-le-champ. Que V. M. me permette un dernier mot; qu'elle écoute son opinion, son sentiment; il est bien supérieur à celui de ses conseils.

Je prie V. M. de lire ma lettre dans un bon sens, et de n'y voir rien que ne soit pour le bien et la tranquillité de l'Europe et de V. M.

No. XIV.

Rapport de M. le comte de Champagny à S. M. l'Empereur. Paris, le 2 Mars, 1809.

Sire,

J'ai l'honneur de mettre sous les yeux de V. M. le précis de mon entretien de ce jour avec monsieur l'ambasseur de la cour de Vienue.

Je prie V. M. d'agréer l'assurance du respect avec lequel je suis, etc. etc.

(M. l'ambassadeur d'Autriche est venu au minstère aujourd'hui, 2 Mars, et il est entré à trois heures l'après-midi dans le cabinet du ministre de S. M. avec lequel il a ́eu l'entretien suivant.

L'ambassadeur d'Autriche.-M. le comte, je viens de vous annoncer l'arrivée du comte de Mier; il a mis neuf jours à se rendre de Vienne à Paris. Il a trouvé la route encombrée de neiges et de troupes. Je suis autorisé à vous prévenir que le courier prochain in'apportera la réponse de ma cour à différentes notes que vous m'avez adressées au sujet de cet officier italien insulté à Trieste, et de l'acte de violence exercé contre un homme d'Udine. S. M. l'empereur, mon maître, a ordonné à cet égard des recherches dont on n'avait pas encore reçu à Vienne le résultat.

Le ministre. J'espère alors, M. l'ambassadeur, que votre courier aura à m'annoncer la répression de ces attentats, dont j'ai regretté d'avoir si souvent de justes plaintes à vous porter.

L'ambassadeur.—J'ai aussi reçu l'ordre de ma cour de prévenir V. Exc. qu'ainsi que je l'avais prévu, le retour de l'empereur Napoléon, l'ordre douné aux princes de la confédération du Rhin, et enfin quelques articles insérés dans les jour naux Français et allemands, ont donné à ma cour de justes, inquiétudes, et qu'elle a cru devoir faire sortir ses troupes du

pied de paix où elles ont été jusqu'à présent: mais que l'empereur mon maître, toujours animé des mêmes sentimens, ne prend cette mesure que parce qu'il y soit forcé, et qu'il conserve tonjours, à l'égard de la France, les dispositions les plus pacifiques.

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Le Ministre.-Est-ce que vous voulez nous faire la guerre, M. l'ambassadeur ?

L'Ambassadeur.-Si nous avions voulu vous faire la guerre, nous n'aurions pas attendu ce moment: avant le mois de Janvier nos troupes auraient été sur le Rhin.

Le ministre. Cela n'eût pas été si facile, M. de Metternich. Les moyens que nous avons à vous opposer en ce moment existaient au mois de Janvier.

L'Ambassadeur. --Mais l'empereur était en Espagne...

Le ministre.-Oui, mais en 1805 vous étiez à Ülm, qu'il était encore à Boulogne, et il n'est pas arrivé trop tard......... Soyez vrai. Si vous faites marcher des troupes, c'est que la faction anglaise à pris le dessus à Vienne; on affecte des alarmes pour séduire et entraîner l'empereur. Ceux qui sont au fait et qui dirigent ce qui se passe chez vous, n'en ont pas. D'ailleurs, ils ne peuvent en avoir. Comment seriez-vous alarmé dans ce moment, lorsque vous ne l'étiez pas au mois d'Août dernier ? Alors l'empereur n'était pas eu Espagne; alors il couvrait toute l'Allemagne de ses troupes; il occupait sur vos dernières la Silésie et le grand-duche de Varsovie; les troupes de la confédération du Rhin étaient campées, et cependant vous restiez tranquilles. Vous voudriez attendre les événemens; actuellement vous feignez des inquietudes; vous vous alarmez du retour de l'empereur, comme s'il avait dû rester toujours en Espagne; vous vous plaiguez d'un avis donné aux princes de la confédération, comme si ces avis qu'a rendu nécessaires la continuation de vos armemens, étaient autre chose que l'avis de se tenir prêts; et vous m'annoncez que vous faites marcher vos troupes? Pas un homme n'a bougé de la part de la confédération ni de la France. Si vous n'avez pas fait la guerre à l'empereur, vous lui avez ôté la sécurité de la paix; vous avez précipité son retour; vous l'avez empêché de poursuivre les Anglais en personne et de leur fermer le chemin de la mer; vous avez arrêté des expeditions projetées contre l'Angleterre; des troupes qui se rendaient à Toulon et à Boulogne ont suspendu leur marche à Lyon et à Metz par les menaces que vous avez faites. Vous avez servi l'Angleterre. Parlerai-je de cette fermentation dout on agite les états autrichiens? de cette opinion qu'on a dirigée contre la France. Ses insultes faites à Trieste à des officiers français et italiens? de l'assassinat de nos couriers, si long-tems impuni? des articles de la gazette de Presbourg? des fausses nouvelles répandues sur l'Espagne? de l'accueil fait à Trieste aux officiers de la frégate espagnole envoyée par les insurgés?

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