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gime également éloigné des abus à jamais détruits par la générosité de l'illustre Pie IX, et de l'anarchie de ces derniers temps. »

Ce langage équivoque ne satisfit personne, on devait s'y attendre; il plaçait deux partis extrêmes dont l'un opprimait l'autre, dans les mystères de l'inconnu. Quoi qu'il en soit, il était le complément textuel d'une série d'instructions données par le cabinet. Le ministère concédait d'ailleurs, au commandant en chef, le droit de ne pas s'arrêter à la résistance que par hasard il pourrait rencontrer de la part d'un gouvernement non reconnu de l'Europe.

Le 26 à midi, Montecchi, ministre des travaux publics, se présenta au général Oudinot. Il venait réclamer au nom du gouvernement romain, le débarquement des volontaires lombards à Porto d'Anzio, et la restitution des armes saisies à leur entrée dans le port. En présence des obstacles qui s'opposaient au retour des Lombards, dans leur pays occupé par les Autrichiens, le général avait accueilli favorablement la première demande, sous la condition expresse que ces soldats ne seraient pas débarqués dans les États pontificaux, avant le 4 mai; il refusa la seconde. Montecchi repartit immédiatement pour Rome, avec le capitaine d'artillerie Fabart, aide de camp du général en chef. Ce dernier avait pour mission spéciale, de secon

der le colonel Leblanc et de faire connaître immédiatement à Civita-Vecchia, le véritable état des choses. Sur ces entrefaites, le lieutenant d'état-major Féraud avait rapporté des dépêches importantes. Il était onze heures du soir; les officiers que le général avait envoyés à Rome pour y étudier l'esprit public, lui rendaient compte de leurs observations basées sur l'appréciation des personnes graves avec lesquelles ils s'étaient mis en-relation. Il résultait clairement de leur rapport, que le tableau que nous avons fait de la situation de Rome n'était point assombri. Il était évident qu'une poignée de révolutionnaires déterminés tenaient en échec les bons citoyens, et ralliaient à leur cause, les masses flottantes qui se groupent autour des pouvoirs naissants. Ces hommes presque tous étrangers, dominaient par la menace et la violence; cependant, il ne paraissait pas douteux, d'après les indices recueillis sur les lieux mêmes, qu'une démonstration armée sous les murs de Rome, ne fit éclater un mouvement réactionnaire, et n'ouvrît les portes de la ville aux troupes expéditionnaires. Dès lors, une reconnaissance sérieuse et immédiate étant reconnue nécessaire, le général en chef résolut de se porter en avant.

En attendant, le lieutenant Féraud repartit de nouveau avec la double mission d'établir l'avantgarde du bataillon de chasseurs à Palo et de signi

fier au triumvirat romain que l'armée française était en marche sur Rome pour y entrer avec les dispositions les plus bienveillantes.

Le retour du capitaine Fabart, revenu dans la soirée du même jour, ne fit que confirmer le général Oudinot dans sa résolution de marcher sur la căpitale des États romains.

« Mon général, lui dit cet officier, j'ai vu de près les chefs de parti; malgré leur forfanterie je suis convaincu que l'intervention française sera acceptée avec reconnaissance dans les États pontificaux si une énergique démonstration a lieu immédiatement contre le foyer de la démocratie italienne. L'apparition de nos troupes sous les murs de Rome est donc urgente. >>

Cette affirmation coïncidait parfaitement avec les avis de la diplomatie. Les ministres de la France à Rome et à Gaëte avaient des raisons pour croire que la plupart des soldats romains ne voudraient pas mesurer leurs épées à celles des soldats français; et ils pressaient le général Oudinot de hâter son mouvement. «En avant, général, lui écrivait le duc d'Harcourt à la date du 26, il est important que vous hâtiez votre marche sur Rome; votre arrivée subite et inattendue a étonné et terrifié; c'est une situation dont il faut profiter. Si vous laissez aux mauvais sujets de Rome le temps de se remettre de leur premier effroi, ils prépareront des

moyens de résistance, et feront verser du sang, ce qu'on désirerait éviter.

« A Gaëte on voudrait que nous fussions des agents passifs et non des médiateurs. Nous ne pou vons éviter cette mauvaise et mesquine position qu'en allant sans retard à Rome. Malgré la rodomontade romaine vous ne trouverez pas de résistance dans cette ville : la majorité sera pour vous dès que vous lui ferez appel.

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A la même date le comte de Rayneval écrivait au général, dans un sens identique.

Des appréciations semblables prenaient leur source dans de puissantes considérations. La majorité de la garde civique, malgré les éléments anarchiques qui s'étaient introduits dans ses rangs, était sympathique à la France, regardée à cette heure plutôt comme un moyen de salut que comme un instrument d'oppression.

pour

Avant de donner ses derniers ordres le départ, le général en chef, prenant CivitaVecchia pour la base de ses opérations et reconnaissant la nécessité d'occuper fortement cette place, en nomma le colonel Blanchard gouverneur, et plaça sous ses ordres six compagnies du centre du 36° régiment de ligne, une section du génie et un détachement de personnel d'artillerie. Ensuite, il publia une nouvelle proclama

tion (1) et ses mesures prises, la colonne expéditionnaire se mit en route le 28 avril à six heures du matin. Elle formait une division aux ordres du général Regnault d'Angely et marchait dans l'ordre

suivant:

BRIGADE MOLLIÈRE.

Cinquante chasseurs du 1er régiment, formant l'unique détachement de cavalerie dont se composait alors le corps expéditionnaire ;

Le 20° de ligne;

Le 33° de ligne;

La 13° batterie du 3o régiment d'artillerie;
La 3 compagnie du 2o régiment du génie.

BRIGADE LEVAILLANT (Charles).

Dix compagnies du 66° de ligne;

Douzième batterie du 3 régiment d'artillerie; Une compagnie du génie.

La veille, ainsi que nous l'avons dit, le premier bataillon de chasseurs à pied avait pris position à Palo. Le 29 avril, le corps expéditionnaire venait d'établir son bivouac à Castel di Guido, situé à seize kilomètres de Rome, lorsque le commandant en chef, voulant connaître le plus tôt possible les dispositions des troupes romaines, donna ordre au capitaine Oudinot, son officier d'ordonnance,

(1) Voir les documents historiques. N. 6.

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