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voyer à Paris un officier-général d'une loyauté éprouvée. Le général Regnault de Saint-Jeand'Angely sera le fidèle interprète de sa pensée : cet officier-général venait de partir pour Civita-Vecchia lorsqu'une estafette arrivée à franc étrier de cette ville remit au général Oudinot une dépêche télégraphique transmise de Paris, le 28 mai, à sept heures du soir. Elle était conçue en ces termes :

«Le ministre des affaires étrangères au général Oudinot:

<«< Tout retard serait désormais funeste à l'approche de la saison des fièvres. La voie des négociations est épuisée. La mission de M. de Lesseps est terminée. Nous confirmons notre dépêche précédente relative au général Vaillant.

« Concentrez vos troupes. Entrez dans Rome aussitôt que l'attaque vous présentera la presque

certitude du succès.

« Si vous manquez de moyens d'attaque, faitesle-moi savoir immédiatement. >>

La mise à l'ordre de cette dépêche excite parmi les troupes des transports unanimes de joie. Le général Regnault de Saint-Jean-d'Angely, dont la mission n'avait plus d'objet, est rappelé au moment où il s'embarquait pour la France. Il remet les dépêches dont il était porteur à son aide-decamp qui poursuit son voyage jusqu'à Paris.

La question trop longtemps pendante sous les murs de Rome est désormais vidée. La politique expectante de la diplomatie est condamnée. L'action militaire va reprendre tout son empire.

Le duc de Reggio s'empresse d'annoncer en ces termes, aux triumvirs, sa rupture avec M. de Lesseps et les ordres qu'il venait de recevoir du gouvernement français :

«<< Messieurs,

« Je reçois à trois heures de l'après-midi la lettre par laquelle vous témoignez le regret que j'aie refusé de m'associer à la convention que M. de Lesseps, ministre plénipotentiaire, a cru devoir arrêter avec vous, sous la date du 31 mai, à huit heures du soir.

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« L'événement a justifié ma détermination par deux dépêches émanées du ministre de la guerre et de celui des affaires étrangères, sous la date des 28 et 29 mai. Le gouvernement français m'a déclaré ce qui suit : « La voie des négociations est épuisée. La mission de M. de Lesseps est termi«< née. » Aussitôt la réception de ces dépêches, je me suis empressé de faire connaître leur contenu à M. de Gérando, chancelier de l'ambassade. Le chef d'état-major de l'armée expéditionnaire a chargé cet agent diplomatique de donner officiellement communication au gouvernement romain d'une décision qui rappelle M. de Lesseps et qui me re

place dans la plénitude des pouvoirs d'un commandant en chef.

« M. de Lesseps s'est chargé de vous remettre, hier soir, à dix heures, la note dont copie est cijointe.

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J'y déclarais, vous le voyez, messieurs, que dans le cas où, après vingt-quatre heures, l'ultimatum du 29 mai ne serait point accepté, l'armée française reprendrait sa liberté d'action.

N'ayant pas reçu de réponse à cinq heures du soir, j'écrivais le même jour à M. de Lesseps :

« N'oubliez pas de dénoncer immédiatement la fin de l'armistice, si vous n'obtenez sans retard une solution entièrement conforme à la déclaration du 29 de ce mois.

Aujourd'hui, aussitôt après la réception des dépêches télégraphiques ci-dessus mentionnées, j'ai fait prévenir les avant-postes romains que la trève consentie verbalement par M. de Lesseps était expirée et que la suspension des hostilités cessait complétement.

<< A trois heures et demie, le premier juin mil huit cent quarante-neuf, je charge M. le chancelier de l'ambassade d'avoir l'honneur de vous faire cette nouvelle notification.

« Le général en chef,

« OUDINOT De Reggio. »

En même temps, fort de la dépêche qu'il vient

de recevoir, le commandant en chef écrit ainsi au général de l'armée romaine :

« Général,

« Les ordres de mon gouvernement sont positifs. Ils me prescrivent d'entrer dans Rome le plus tôt possible. J'ai dénoncé aux autorités romaines l'armistice verbal que, sur les instances de M. de Lesseps, j'avais consenti à accorder momentanément. J'ai fait prévenir par écrit vos avant-postes que l'une et l'autre armée avaient le droit de recommencer les hostilités. Seulement, pour donner le temps à ceux de nos nationaux qui voudraient quitter Rome et sur la demande de M. le chancelier de l'ambassade de France la possibilité de le faire avec facilité, je diffère l'attaque de la place jusqu'à lundi. »

En réponse à la lettre du commandant en chef de l'armée française, le général Roselli fit une demande d'armistice de quinze jours sous le prétexte de s'opposer à la marche des Autrichiens sur Rome. Le duc de Reggio refusa, disant que les troupes autrichiennes ne dépasseraient pas les lignes qu'elles occupaient. Ensuite il chargea M. de Gérando, chancelier de l'ambassade de France, de prévenir les personnes qui désiraient abandonner la ville, qu'un refuge assuré leur serait ouvert au monastère de Saint-Paul.

En attendant, la plus grande activité règne au

camp de l'armée française. Du haut de leurs remparts, les Romains peuvent suivre les divers mouvements de nos troupes. Une compagnie de chasseurs à pied vient renforcer les bataillons établis au Ponte-Mario, tandis que, pour donner le change à l'ennemi et intercepter les convois de diverses natures qui approvisionnent la ville, la cavalerie pousse de fréquentes reconnaissances sur la rive du fleuve.

Sur ces entrefaites, les triumvirs annonçaient ainsi aux Romains la reprise des hostilités :

<< Citoyens,

« Non-seulement le général Oudinot a refusé son adhésion à la convention faite entre nous et l'envoyé extraordinaire de la France, mais il nous a dénoncé la rupture de l'armistice et déclaré son armée libre de nous attaquer.

« Quoi qu'il arrive, les Romains feront leur devoir et nous le nôtre. Déjà Dieu et le peuple nous ont donné la victoire dans une première lutte avec l'homme qui nous menace. Dieu et le peuple nous la donneront encore. »

Rome est située à cheval sur le Tibre, qui la sépare en deux parties inégales du nord au sud. La partie orientale la plus considérable est protégée par l'enceinte aurélienne; elle renferme quelques collines peu élevées. La partie occidentale qui comprend la cité Léonienne, ainsi ainsi que

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