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général Cordova était digne, sous tous les rapports, de représenter la noble Espagne dans l'œuvre de la restauratiou pontificale.

Le 3 juin, l'armée espagnole qui, quelques jours après atteignit le chiffre de neuf mille hommes de toutes armes, lève le camp de Gaëte et marche sur Fondi. Le 4, elle entre sans coup férir à Terracine et pousse ses avant-postes jusqu'à Velletri, où bientôt le général Cordova établira son quartiergénéral, pour attendre les événements.

Cependant les travaux du siége de Rome s'avançaient avec rapidité, sous la direction spéciale du général Vaillant, l'un des hommes les plus distingués que l'arme du génie compte en Europe.

Les journées des 6 et 7 juin se passent à établir des batteries, pour combattre les pièces de l'ennemi, formidablement établi sur les remparts de la ville et sur le mont Testaccio.

De leur côté, les chefs de la république romaine redoublent d'énergie: ils entassent proclamations sur proclamations, ils mettent tout en œuvre pour enflammer le courage des combattants et augmenter les moyens de résistance; les presses de la ville gémissent sous le feu de leur éloquence; les ordonnances en formes d'exhortation se succèdent sans intervalle; l'une engage les femmes à ne point redouter les bombes et les boulets qui, disent les triumvirs, ne sont dangereux que pour les pierres ;

l'autre promet aux braves des médailles d'or, d'argent ou de cuivre, d'une valeur proportionnée aux actes de courage et de dévouement; celle-ci, enjoint, sous des peines sévères, aux faibles et aux lâches qui ne veulent point se servir de leurs armes, de les livrer à des mains plus sûres ; cellelà impose à tous les citoyens, sans distinction d'âge, de sexe et de condition, l'obligation de travailler aux fortifications et aux barricades : « Les mains délicates, disent les triumvirs, les mains blanches et parfumées qui deviennent noires et calleuses en maniant la pioche et la pelle, sont aussi honorables que les cicatrices obtenues aux jours de la bataille. Un assez grand nombre de dames romaines répondent à ces appels incessants. Tandis que les unes se consacrent au service des blessés qui remplissent les hôpitaux et les ambulances; les autres confectionnent des cartouches. La coquetterie trouve même son bénéfice à ces exercices, étrangement en-dehors de la nature et des habitudes de la femme; c'est en robe de bal, en manches courtes, et décolletées, qu'elles se rendent chaque jour aux lieux qui leur sont désignés. Là, de leurs mains accoutumées à froisser des rubans et des fleurs, elles remuent des monceaux de poudre. Ainsi, celles que la Providence a façonnées au rôle de la procréation, préparent, en chantant

des airs guerriers, des moyens de destruction.

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CHAPITRE XXV.

La Fête-Dieu.—Parade religieuse. — Opérations militaires.-Sortie du 12 juin. —Sommation aux Romains.—Elle est repoussée. – Proclamations des autorités romaines. - Continuation des hostilités. Combats.-Expédition de Porto d'Anzio. - Brillants combats et faits divers. -Sortie des chemises. -Journée du 13 juin à Paris. - Ara rivée de M. de Corcelles au camp. - Position stratégique de l'armée. — Affaire du 21 juin.— Bombardement.— Mauvais vouloir de l'agent consulaire anglais. - Manoeuvres hostiles à la France.-Sang-froid du prince de Ligne. - Expédition de Tivoli.

Il était écrit que la révolution de Rome, semblable au chaos, renfermerait dans une incroyable confusion, tous les éléments, excepté ceux du bien. Les hommes qui avaient dépouillé la papauté de son pouvoir temporel, voulurent encore usurper ses prérogatives spirituelles. Or, le 6 juin, les grands prêtres de la démagogie, déposant la tiare, sans toutefois déposer l'épée, décrétèrent ainsi la célébration de la Fête-Dieu :

<< Romains!

<< Demain est le jour consacré à fêter l'hostie

de paix et d'amour. La cour romaine le célébrait avec une pompe solennelle et une grande démonstration de luxe. La guerre allumée sous vos murs empêche l'accomplissement de cet acte religieux. Le peuple connaît et condamne ceux qui en sont cause. Néanmoins, l'acte de religion ne doit pas être omis. Que chaque cure, que chaque chapitre, le célèbrent dans l'intérieur de leur église. Les humbles prières des chrétiens, s'élevant sans faste vers le ciel, en seront mieux accueillies, et pour l'expiation des péchés et le secours au peuple pieux et confiant en ce Dieu qui bénit et défend la cause des opprimés. »

Cette pièce, édifiante au point de vue révolutionnaire, et signée par le ministre de l'intérieur, contenait une attaque indirecte contre l'auguste personne de Pie IX. La haine et l'hypocrisie servaient d'ostensoir à l'hostie de paix et d'amour. Quoi qu'il en soit, les fidèles plus ou moins consciencieux de la révolution célébrèrent la fête recommandée à leur dévotion. Les Lombards se firent remarquer par leur recueillement; il appartenait aux plus vaillants défenseurs de Rome de donner l'exemple de la piété; la foi est toujours la compagne du courage. Depuis le commencement du siége, les Lombards en fournissaient la preuve. Les premiers, ces braves jeunes gens avaient protesté contre les saturnales anti-religieuses de Cicernuc

chio. Dévoués au sanglant sacrifice d'une idée, ils marchaient à la mort, la poitrine couverte du signe de la rédemption; un chapelet servait de dragonne à leurs épées, l'image de la vierge leur servait de cocarde. Les Lombards étaient les vendéens de la révolution. L'erreur politique elle-même a ses martyrs.

Dans la journée du 8, les travailleurs français élargissent la tranchée de manière à faciliter les communications. Ils tracent deux boyaux en avant de la parallèle; une batterie de mortiers est armée pour lancer des bombes sur le bastion 6. Enfin, le brave général Morris, dirigeant sur la rive gauche du Tibre une forte reconnaissance de cavalerie, ramène au camp plusieurs convois chargés de matières combustibles et d'approvisionnements de

toute nature.

Un incident qui faillit coûter la vie au duc de Reggio, signala cette journée. Le commandant en chef venait de quitter la Villa-Santucci, il s'avançait avec le général Vaillant, lorsqu'il aperçut plusieurs soldats du 36me de ligne menaçant de fusiller deux paysans qui pleuraient et sollicitaient leur grâce au nom de leurs femmes et de leurs enfants. Quel est leur crime? demanda le général Oudinot. Ils conduisent aux Romains deux charriots, chargés de fascines, pour gabionner des barricades, répondit un sergent de voltigeurs.

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