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et, suivant l'expression pittoresque de Plutarque, aplatir la terre, afin qu'il lui fût plus facile de la parcourir et de lui imprimer l'unité. Il devait ainsi préparer la grande œuvre que Dieu confia, quand l'heure fut venue, à douze pauvres pêcheurs : celle de changer la face religieuse du globe.

Pionnier de la foi du Christ, le peuple romain, qui avait aplani les difficultés de la prédication en ouvrant les routes de l'Occident aux douze apôtres, finit par renverser lui-même les autels que l'erreur avait élevés à ses passions divinisées; il dressa la croix du Golgotha sur les ruines du temple de Jupiter, et Dieu lui confia une mission surhumaine en faisant du Capitole la tête de l'univers chrétien.

Alors Rome devint la Jérusalem nouvelle; le peuple romain devint la nouvelle tribu de Judas. Dans Rome sanctifiée par le sang des martyrs, Dieu établit le pontife suprême de sa religion, et Rome, échangeant le glaive contre la croix, la force matérielle contre l'influence morale, régna de nouveau sur le monde entier.

Dieu confia dès lors à ce peuple, choisi dans ses mystérieux desseins, les traditions divines; il le revêtit de la suprématie dans les arts et permit qu'il devançât tous les autres peuples dans le culte du beau typique.

Douée de ces magnifiques priviléges, Rome devint bientôt le foyer des richesses anciennes et modernes. De même que les chrétiens de tout l'univers se complaisent, depuis des siècles, à venir s'incliner sur le sol que le sang des martyrs a rendu sacré, de même les artistes de toutes les nations accourent pour s'incliner aussi devant les merveilles de l'art antique et les triomphes de l'art chrétien. Rome fut destinée à recevoir les inspirations sublimes du Guide, du Guerchin, de Michel Ange, de Raphaël, et de tant d'autres génies, brillants météores qui ne reparaîtront plus.

Rome n'est pas seulement une ville, c'est un vaste musée, ses rues ne sont pas uniquement des voies pratiquées pour la circulation, ce sont des galeries ouvertes à l'admiration; chacune de leurs pierres présente un souvenir, un nom, un fragment d'histoire; ses églises ne renferment pas seulement dans le silence de leurs tabernacles d'or le Dieu vivant, elles possèdent les chefs-d'oeuvre des plus grands maîtres de l'art religieux.

Le Vatican, le Capitole, les galéries Sciarra, Corsini, Doria, Borghèse, etc., etc., sont des centres artistiques, qui appartiennent autant à l'univers qu'à leurs propriétaires, qui n'ont entre les mains qu'une valeur morte; ainsi le veut la loi romaine. Rome n'est donc pas uniquement la capitale de deux cents millions de catholiques, elle est encore

la propriété unique des savants et des artistes de tout l'univers. Mais en offrant aux artistes et aux savants des avantages qu'ils ne sauraient trouver ailleurs, Rome les rend ses tributaires, et prélève de l'or en échange de leur admiration. C'est cette serre chaude des arts, cette mine inépuisable de richesses, que des économistes comme Mamiani, et des révolutionnaires comme Mazzini voulaient détruire. On a vu comment les armées catholiques, conduites par la main de Dieu, se sont opposées au succès de leurs sinistres desseins.

Fiers de leurs triomphes momentanés, les sectaires avaient dit que la mission de la papauté était changée dans l'ordre providentiel, que la souveraineté temporelle du Saint-Siége allait disparaître; déjà même ils avaient substitué la tyrannie de leur puissance éphémère à l'autorité paternelle du chef de l'Église, lorsque tout à coup Dieu, soufflant sur les usurpateurs, les a dispersés au quatre vents du ciel et a remis sur son trône celui qui, suivant la magnifique expression de Bossuet, «< tient en main la balance droite au milieu de tant d'empires souvent ennemis, celui qui entretient l'unité dans le corps social, tantôt par d'inflexibles décrets, tantòt par de sages tempéraments. >>

Ils se sont donc trompés ces esprits superbes, qui un jour au Capitole avaient décrété, au nom de Dieu et du peuple, l'immortalité de leur répu

blique. Ce jour-là même ils furent parjures, car ils savaient que leur serment ne serait point ratifié par Dieu, qui a dit au prince des apôtres : « Mon Église est éternelle, les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. »

Les racines de la révolution de Rome, arrosées par le sang du ministre Rossi, n'ont produit que des fruits de mort l'arbre de la république romaine, étayé par le poignard des sociétés secrètes, n'a porté que des feuillages sinistres et sanglants. Renversé par le canon de la France, il a disparu devant les rayons de la papauté, le jour où Pie IX a retrouvé le sceptre de sa double puissance. Malgré les prodigieux efforts de l'impiété et de l'anarchie, le digne successeur des apôtres resplendissant d'un nouvel éclat est remonté sur le siége qu'on peut ébranler quelques fois, mais renverser jamais.

Pie IX, ainsi que l'a dit un illustre prélat, a repris la couronne qui ne saurait manquer au front sur lequel la main de Dieu l'a placée. Il la transmettra dans toute son infaillibilité à son successeur, ainsi qu'il l'a reçue de Grégoire XVI. Vainement les factions se liguèrent contre ́elle, l'immobilité donnée par Dieu lui-même à son Eglise triomphera toujours de la méchanceté des hommes et de la violence des persécutions.

Retablie par l'épée de la France et par les armes

des nations catholiques, la souveraineté providentielle des papes perpétuera jusqu'à la fin dés siècles sa mission divine; ainsi la papauté, après avoir sauvé si souvent l'Europe des flots envahisseurs de la barbarie, sauvera le monde de l'invasion plus redoutable encore des nouveaux barbares qui le menacent aujourd'hui.

FIN.

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