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le gouvernement lui-même découvrait ses plaies hideuses par des blâmes directs ou des ordonnances dénonciatrices plutôt que répressives.

Le 27 mars, le ministre de la guerre publia trois ordres du jour dont l'un commence par ces

mots :

« Il faut signaler de la part des fournisseurs de fourrages l'abus inique et déloyal de leur position. Ils ne craignent pas de profiter des circonstances actuelles pour éluder les conditions de leurs contrats et pour donner aux chevaux une nourriture inférieure sous le rapport de la qualité et de la quantité convenues. »

La puissance de ces grands hommes d'État était si négative que le ministre de la guerre se contente de signaler un délit qu'il n'a pas la force ou le courage de punir.

La veille, le même ministre avait publié un autre ordre non moins curieux et débutant par

ces mots :

« Les demandes de grades dans l'armée augmentent chaque jour à un point honteux. Nonseulement il est impossible de satisfaire à toutes, mais cela ne se doit pas. >>

De son côté, le directeur-général de la sûreté publique publiait coup sur coup plusieurs ordonnances contre des actes illégaux commis par Ciceruacchio et sa bande. Impuissante à faire le bien,

la république ne pouvait même pas prévenir le mal, conséquence inévitable de son principe: elle portait fatalement le poids de sa tache originelle.

CHAPITRE XIX.

Cri de guerre en Piémont: - Faible écho à Rome.
-Création d'un triumvirat. - Bataille de Novarre.

Décret ridicule.
Le roi Charles-

Albert. Consternation du parti républicain. — Appel aux aventuriers. Le Pô décrété fleuve national. Pasquin. -Changement de ministère. La semaine sainte profanée. - Ferdinand II, roi des Deux-Siciles.

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Tel était l'état des choses à Rome lorsque, sur un autre point de la Péninsule, le roi Charles-Albert, rêvant toujours, avec le sceptre suprême, l'indépendance de l'Italie, en appelait de nouveau au Dieu des batailles et faisait retentir le cri aux armes! Ce cri belliqueux ne trouva qu'un faible écho dans Rome. La république n'avait de la force et du courage que pour la persécution de pauvres prètres et de faibles femmes. Néanmoins, le gouvernement romain répondit à l'appel du roi Charles-Albert en nommant un comité de la guerre et en déclarant par décret que tous les citoyens de

puis l'âge de dix-huit ans jusqu'à cinquante-cinq, faisaient partie de la garde civique mobilisable pour les hommes de dix-huit à trente ans. La commission exécutive rendit aussitôt une ordonnance qui mobilisait douze bataillons répartis de la ma

nière suivante :

6 bataillons ordinaires,

3 bataillons de carabiniers,

2 bataillons universitaires,

I bataillon de douaniers (Finanzieri).

De son côté, l'Assemblée constituante adressait aux peuples de la république romaine la proclamation suivante signée par son président C.-L. Bo

naparte :

Citoyens,

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<< Le canon italien, précurseur des batailles et de la victoire, tonne de nouveau dans les plaines de la Lombardie. Aux armes! Il nous faut maintenant, non pas de vains discours, mais des faits! Les phalanges républicaines, s'unissant à celles qui se rassemblent sous les Alpes et aux autres soldats de l'Italie, voleront au combat. Qu'il n'y ait d'autre émulation que celle de la valeur et des sacrifices! Malheur à celui qui, dans ce moment suprême, jetterait la division parmi les frères ! !

« Des Alpes jusqu'à la mer il n'y a pour nous ni vraie indépendance, ni vraie liberté, tant que l'Autrichien foulera le sol sacré de la patrie,

<< La patrie réclame de vous hommes et argent; levez-vous donc, et à sa demande, répondez: aux armes! »

En même temps, la commission exécutive enlevant les troupes de ligne à la juridiction des préfets de province, les plaçait sous les ordres uniques du ministre de la guerre et ordonnait un triduo solennel pour inaugurer par les bénédictions du ciel la guerre de l'indépendance.

Dans leur présomption, les républicains de Rome n'implorent pas le ciel, mais assurés de ses bénédictions, ils entonnent par anticipation le Te Deum de la victoire.

Au milieu de ce grand nombre de décrets rendus par l'Assemblée constituante, il s'en trouve quelques-uns dont le ridicule l'emporte encore sur l'inopportunité. C'est ainsi que le 25 elle décide par ordonnance la reprise des fouilles au Forum, et accorde à cet effet un crédit de 16,800 écus.

Le lendemain 26, elle prohibe la chasse aux cailles sur le littoral de la Méditerranée, de Civita-Vecchia, à Prastra, etc. Puis, considérant que dans la gravité des circonstances, il était nécessaire de concentrer le pouvoir sans que l'Assemblée elle-même suspendît l'exécution de son mandat, elle décrète la dissolution du comité exécutif et institue un triumvirat auquel elle confie le gouvernement de

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