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vêtu ses plus riches ornements; elle était tendue de magnifiques draperies rouges, comme aux plus beaux jours de la papauté. L'autel pompeusement décoré brillait dans toutes ses splendeurs. Les triumvirs, les membres de l'Assemblée constituante, les officiers de l'armée, des carabiniers et de la garde civique, le personnel des clubs, Begré consul Suisse, Pandolfini consul de la Toscane, Brown consul des États-Unis à Rome, Frééman consul des États-Unis à Ancône, et un grand nombre de démagogues, garnissaient les places occupées autrefois par les dignitaires de l'Église et les membres du sacré collége. Plusieurs musiques militaires remplaçaient la chapelle pontificale. Après le dernier évangile, le célébrant, l'abbé Spala, assisté du père Ventura et du célèbre moine Gavazzi, se rendit processionnellement à la grande loge de la basilique, d'où le Saint Père a l'habitude, en ce jour solennel, de bénir son peuple et l'univers catholique. Il tenait dans ses mains le saint-sacrement, et il était accompagné de quatre drapeaux aux couleurs italiennes. Un long roulement de tambours et le son des cloches unis aux détonnations de l'artillerie du château Saint-Ange annoncèrent son arrivée à la loge papale d'où il donna la bénédiction urbi et orbi. Un instant après, Mazzini vint se montrer au peuple et recevoir, en sa qualité de grand prêtre des sociétés secrètes, les hommages

qui n'étaient dus qu'au souverain Pontife. La célébration de la semaine sainte, en 1849, appartiendra au souvenir des plus mauvais jours de Rome.

La conduite courageuse et digne tenue par les chanoines de Saint-Pierre, en présence des exigences et des profanations du gouvernement républicain, leur méritèrent les honneurs de la plus odieuse condamnation. Au nom de Dieu et du peuple, on leur infligea une amende de cent vingt écus, pour n'avoir point exécuté les ordonnances du pouvoir révolutionnaire.

Les triumvirs prouvaient leur respect pour la légalité en statuant, dans leur omnipotence, sans commission ni tribunal constitué, un délit, et en imposant, de leur propre autorité, une amende non prévue par la loi.

Après de tels exemples de tyrannie donnés par les chefs, il n'était pas surprenant de voir les subalternes se livrer en province à l'arbitraire le plus éhonté. Au moyen âge, un duc de Bretagne battait son confesseur, quand celui-ci lui refusait l'absolution ; en 1849, un nommé Ugo Calindri, président de la province d'Ascoli, menaça de toute la rigueur des lois les curés qui refuseraient à leurs clients l'absolution du tribunal de la péni

tence.

Tandis que la Rome catholique rougissait des

parodies audacieuses auxquelles les révolutionnaires la condamnait, l'auguste exilé de Gaëte, continuant sa voie douloureuse sur les traces de celui dont il était le représentant sur la terre, attachait ses souffrances à la croix de la rédemption et donnait au monde sa bénédiction solennelle.

Uniforme, quoique très-occupée, la vie du Saint Père, à Gaëte, se partageait entre la prière, les audiences et le soin des affaires. Chaque jour, par exception aux usages de la papauté, il admettait à sa table le roi des Deux-Siciles, la reine et les princes; mais le roi répondait par une si grande discrétion à cette faveur, que chaque jour, pour en profiter, il attendait, ainsi que nous l'avons déjà dit, une invitation officielle. La conduite de Ferdinand II, comme souverain et comme catholique, à l'égard de son hôte illustre, était noble et digne. Le roi s'effaçait constamment devant le catholique, et le catholique couronné n'abordait jamais le souverain Pontife exilé qu'avec un genou en terre et marques du plus respectueux dévouement.

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Pourquoi, sire, lui disait un jour le pape, pourquoi portez-vous toujours un hausse-col comme le dernier de vos lieutenants?

<< Parce que je suis le premier lieutenant de Votre Sainteté, lui répondit le roi. »

En effet, le roi des Deux-Siciles ne se présentait devant Pie IX qu'en grande tenue, et por

De

par

tant toujours au cou le signe distinctif du service. le monde catholique, dont il a bien mérité, honneur, gloire et reconnaissance à Ferdinand II, roi de Naples et des Deux-Siciles!

CHAPITRE XX.

- Comédie au palais

Restauration du pouvoir légitime en Toscane. de l'Inquisition. - Mesures financières. - Avezzana ministre de la guerre. L'intervention des puissances catholiques est décidée. — Le père Vaures à Paris.-Situation politique de l'Europe. - L'armée des Alpes. Le général Oudinot, duc de Reggio. Il est nommé commandant en chef de l'armée expéditionnaire en Italie.-Étatmajor général.-Ordre du jour. - Embarquement.

La bénédiction pontificale donnée sur le rocher de Gaëte aux princes ainsi qu'aux hommes de paix et de bonne volonté, passant sur le front du grandduc de Toscane, arrivait au cœur de ses peuples. Revenus de leurs erreurs, les Toscans repoussaient avec énergie le joug honteux des complices de Mazzini, et une commission gouvernementale s'emparait des rênes de l'État au nom du grand duc. En même temps elle dissolvait l'Assemblée constituante qui s'était déclarée en permanence, la garde nationale, composée d'éléments anarchiques, fermait les clubs de la démagogie et procla

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