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mait en présence d'une foule immense, réunie sur la place du Grand-Duc, la restauration de la monarchie légitime.

par

La nouvelle du rétablissement de l'ordre à Florence fut un nouveau coup de foudre pour les chefs de la république romaine. Ceux-ci, comprenant que le jour de la justice approchait, faisaient des efforts inouis pour retenir le sceptre qui s'échappait de leurs mains. Cernés de toutes parts, assiégés par la réaction des pays voisins, menacés l'intervention des puissances étrangères, ils se débattaient vainement dans leur faiblesse, sè croyant forts parce qu'ils étaient violents, et invincibles parce qu'ils avaient juré au nom de Dieu et du peuple que leur république serait sauvée. En attendant ils faisaient de l'énergie avec les excès de toute nature. La nuit ils demandaient à l'orgie l'inspiration d'un nouveau crime. Le jour ils faisaient vendre par leurs marchands des caricatures tendant à pervertir de plus en plus le sens moral et religieux du peuple, des pamphlets à la père Duchesne contre les personnes les plus sacrées, des brochures sur la manière de défendre une ville assiégée, de se fortifier dans les maisons, de repousser l'ennemi avec la poix et l'huile bouillante, de s'ensevelir enfin dans les ruines de la patrie en faisant sauter les monuments publics et les édifices particuliers.

Les attaques contre les personnes, contre les prètres surtout, devenaient de plus en plus violentes.

A cette époque, le peuple fut convié à un singulier spectacle disposé depuis un mois. On lui ouvrit les portes du palais de l'Inquisition, afin qu'il pût voir et toucher les preuves de la tyrannie des siècles passés.... La mise en scène avait été préparée avec soin; un charnier voisin avait fourni les principaux décors; en effet, on voyait çà et là répandus sur le sol des ossements blanchis auprès des instruments de torture. Un squelette de femme, orné de magnifiques cheveux noirs, produisait surtout un effet prodigieux ; cependant, pour peu qu'un connaisseur eût examiné cette fantasmagorie révolutionnaire, il aurait reconnu, à travers ces monceaux d'ossements humains, des fémurs, des humérus et des tibias de chiens dont le témoignage poudreux hurlait contre les cruautés des inquisiteurs. C'est ainsi que les dramaturges révolutionnaires faisaient de l'histoire et dépensaient la fortune du peuple. Cependant l'argent qu'ils prodiguaient de la sorte devenait de plus en plus rare, il diminuait à mesure que le mauvais vouloir des imposés augmentait. D'un autre côté, l'emprunt forcé continuait à ne produire que des résultats négatifs. Pour parer à cet état de choses, le triumvirat, s'armant de la menace, fulmina un violent

de

décret contre les récalcitrants. En même temps, il publia un autre décret qui ordonnait l'émission de deux cent mille écus en billets de vingt-quatre baioques. La république romaine avait si peu crédit qu'elle était forcée de recourir aux chiffons de la rue pour battre monnaie sa fortune se retrempait ainsi aux sources de son origine. L'une et l'autre n'avaient rien à s'envier.

Six jours avant, les triumvirs avaient décrété l'émission de nouveaux bons du trésor jusqu'à concurrence de deux cent cinquante-et-un mille cinq cent quatre-vingt-quinze écus, et, six jours après, ils publièrent un autre décret pour émettre deux cent mille écus de monnaie crosa, cette monnaie fausse dont nous avons déjà parlé.

Par un décret du 19 avril, ils autorisèrent la banque romaine à émettre deux cent mille écus de billets avec cours forcé, sous la condition de remettre au gouvernement deux cent mille écus en billets, moyennant une égale somme en consolidés romains au taux de quatre-vingt-un. Enfin dans leur détresse, ils lancèrent un nouveau décret avec ce considérant :

« Le gouvernement républicain,

<< Vu l'urgence de frapper la plus grande quantité possible de monnaie pour subvenir aux besoins publics, autorise l'achat des matières d'argent avec une prime de 10 pour cent. »

A cette époque un Génois, dont le nom avait grandi dans les désordres politiques à ce point, qu'un jour l'un de ses amis intimes lui demandant qu'elle était sa marraine, il répondit : la révolution, Avezzana, après avoir passé vingt ans de sa vie à vendre des cigares à New-York et quelques jours à dresser des barricades à Gènes, arrivait à Rome. Le gouvernement républicain s'empressa de lui confier un portefeuille : il fut nommé ministre de la guerre. Alors la situation des États romains était des plus critiques, Rome touchait à l'un de ces moments suprêmes qui décident du sort des nations. Les conférences de Gaëte avaient été ouvertes le 30 mars, entre les plénipotentiaires de la France, de l'Autriche, de Naples et de l'Espagne. Après avoir examiné si le rétablissement du souverain Pontife, dans ses États, ne pouvait pas s'effectuer par des voies pacifiques, et cette question ayant été résolue négativement, les plénipotentiaires reconnurent d'un accord unanime que l'intervention armée des puissances catholiques était devenue indispensable autant qu'urgente; cependant, les hésitations de l'ambassadeur français, non point sur le fond, mais sur la forme de l'intervention, ne répondaient point aux légitimes impatiences de ses collègues placés, nous devons le dire, dans une position autrement favorable que celle où se trouvait notre représentant.

En effet, les indécisions du ministère français inspiraient au duc d'Harcourt un langage qui, tout en exprimant les meilleures intentions à l'endroit de Pie IX, tendait à perpétuer une situation que les lenteurs de la diplomatie rendaient chaque jour plus difficile. La nécessité de l'intervention ayant été reconnue indispensable, les ambassadeurs se séparerent, déterminés à agir avec la plus grande rapidité.

Sur ces entrefaites, un modeste moine de l'ordre des Conventuels, le père Vaures qui, avant l'avènement de Pie IX, vivait en première ligne sous les rayonnements de la papauté, arrivait à Paris.

Admis en la présence du Président de la république, il lui rappela qu'un jour le pape Grégoire XVI lui pardonnant les erreurs politiques de sa jeunesse, l'avait béni disant : « Ma bénédiction portera bonheur au jeune prince et lui permettra de rendre un immense service à l'Ëglise.

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Ce souvenir passant par une tombe eut une grande influence sur la détermination du Président: l'intervention de la France fut dès lors décidée.

A cette époque la situation politique de l'Europe était des plus graves. La lutte décisive était partout engagée entre le principe de la dissolution,

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