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ne voudrait faire sa femme. En aimera-t-il moins la sienne pour cela ? Or ces désirs seront d'autant plus fréquents et plus impérieux que l'obligation antinaturelle pour l'homme de n'avoir de rapports toujours qu'avec une même femme, si agréable soitelle, le conduit à la même satiété et au même désir impérieux de changement que l'amateur de langouste à qui, tous les jours, on ne servirait que de la langouste...

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ETUDES

La polygamie chez les animaux
et chez l'homme

(d'après Rémy de Gourmont) (1).

« L'homme n'est pas au sommet de la nature. Il est, dans la nature, l'une des unités de la vie, et rien de plus. Quand nous faisons l'amour, c'est bien, selon l'expression des théologiens, more bestiarum. L'amour est purement animal. »> R. DE G.

« Il n'y a d'animaux monogames que ceux qui ne font l'amour qu'une fois dans leur vie. Il y a des

(1) « Physique de l'amour, Essai sur l'instinct sexuel. » Edition du Mercure de France (Extraits du chapitre xv).

monogames de fait ; il n'y en a pas de nécessaires, dès que l'existence de l'animal est assez longue pour lui permettre de se reproduire plusieurs fois. Les femelles des mammifères en liberté fuient presque toujours le mâle qui les a déjà servies: il leur faut du nouveau : la chienne n'accueille qu'à la dernière extrémité le chien de la précédente saison. Ceci me semble la lutte de l'espèce contre la variété. Le couple est formateur de variétés. La polygamie les ramène au type général de l'espèce... Ni les conditions de la monogamie absolue ni celles de la promiscuité absolue ne semblent se rencontrer à l'heure actuelle dans l'humanité, ni chez les animaux ; mais on voit le couple, en plusieurs espèces animales et humaines, soit à l'état de tendance, soit à l'état d'habitude... Il faut aussi distinguer entre la polygamie vraie et la polygamie successive ; entre la monogamie d'une saison et celle de la vie entière. Une classification méthodique serait d'ailleurs impossible, car, chez les animaux comme chez l'homme, il faut compter, en matière sexuelle, avec le caprice : quand une fidèle colombe est fatiguée de son amant, elle prend son vol et forme bientôt, avec quelque mâle adultère, un nouveau couple. Le couple est naturel, mais non le couple permanent. L'homme ne s'y est jamais plié qu'avec peine.

Au dessus des insectes, généralement polygames (on trouve pourtant parmi eux des couples), les vertébrés offrent quelques exemples d'une sorte de monogamie (le lézard, par exemple, forme avec sa lézarde un couple qui, dit-on, dure plusieurs années. Leurs amours sont ardentes : ils se serrent étroitement ventre à ventre). Les oiseaux sont généralement considérés comme monogames, sauf les gallinacés

et les palmipèdes ; mais les exceptions apparaissent si nombreuses qu'il faudrait nommer les espèces une à une. La fidélité des pigeons est légendaire : c'est peut-être une légende. Le pigeon mâle a en effet des tendances à l'infidélité et même à la polygamie. Il trompe sa compagne ; il va jusqu'à lui infliger la honte d'une concubine sous le toit conjugal! Et ces deux épouses, il les tyrannise, il se les asservit en les batttant. La pigeonne, il est vrai, n'est pas toujours d'humeur facile. Elle a ses caprices. Parfois, se refusant à son compagnon, elle déserte, va se livrer au premier venu... Parmi les mammifères, les carnivores, les rongeurs pratiquent souvent une certaine monogamie, au moins temporaire. Les renards vivent en couples, s'occupent de l'éducation des renardeaux. On voit leurs vraies mœurs dans le vieux «< Roman du Renart » Renart vagabonde, cherchant proie et aubaines, cependant que dame Hermeline, sa femme, l'attend au logis, en son repaire de Maupertuis. Le renard apprend à ses enfants l'art de tuer et de dépecer : leur apprentissage se fait sur le gibier encore vivant que le mâle pourvoyeur apporte à la maison. Le lapin est fort rude en amour; le hamster, autre rongeur, devient souvent carnivore, durant la saison du rut; on dit qu'il dévore volontiers ses petits et que la femelle, craignant sa férocité, le quitte avant de mettre bas... Le lapin est-il vraiment monogame? Peut-être d'une monogamie saisonnière ou de nécessité. Le mâle, en tout cas, ne s'occupe nullement des petits, sinon pour les étrangler; aussi la femelle, sitôt pleine, se réfugie-t-elle dans un terrier isolé. Leur accouplement, qui a surtout lieu vers le soir, se répète souvent jusqu'à cinq ou six fois par heure, les fe

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