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Exposons maintenant les résultats des recherches de M. Ebelmen à ce sujet, et, en examinant les deux périodes de l'affinage de la fonte, nous verrons comment il a atteint le but théorique qu'il s'était proposé.

Première période. — Au moment où la fonte affinée, c'est-à-dire la loupe, vient d'être retirée du feu, il n'y a plus dans la forge que du menu charbon. Les tuyères sont à découvert, et la gueuse, déjà chaude, placée vis-à-vis d'elle, au contrevent, est couverte des débris de fer, de scories; et, plus tard, on ajoute les parties qui se détachent de la loupe pendant le cinglage. Enfin on recouvre le tout avec un hectolitre de charbon, et l'on donne le vent, mais non la totalité; le foyer est constamment rempli de charbon. On évacue les scories pauvres de temps en temps.

C'est pendant cette opération que les deux lopins provenant de la loupe cinglée sont exposés à la température du blanc soudant vis-à-vis des tuyères et successivement, afin que les parties se rapprochant ou se soudant, on puisse ensuite les forger.

M. Ebelmen a constaté que, dans la région moyenne, où le fer est exposé à la plus haute température de la forge, le charbon qui reçoit le jet d'air atmosphérique des tuyères est converti en acide carbonique. Voici, en effet, la composition des gaz puisés par aspiration au moyen d'un appareil analogue à celui dont il s'était servi pour puiser les gaz dans l'intérieur des hauts-fourneaux, au niveau de la face inférieure des lopins :

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En puisant les gaz à la hauteur de la face supérieure des lopins, on constate la tendance de l'acide carbonique à passer à l'état d'oxyde par le contact du charbon, car ils sont composés de

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On voit d'après ces analyses, combien la région moyenne de la forge, celle où s'opère l'action immédiate de l'oxygène atmosphérique sur le carbone, est restreinte dans son étendue, et nous ajouterons combien il serait inexact de la considérer comme un espace limité par des plans parallèles.

Pendant le forgeage du fer, la fonte se désagrége et tombe dans la région inférieure sur les sornes, essentiellement formées d'oxyde de fer et de silice; elle doit être en grumeaux à l'état pâteux.

En examinant les gaz puisés dans le voisinage de la fonte placée au contrevent, lorsque le premier et le second lopin, provenant de l'éti

rage de la loupe, sont exposés au feu, M. Ebelmen les a trouvés composés de

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Il est évident que, dans ces circonstances, la fonte se trouve dans une atmosphère non oxydante ou très-peu oxydante, car il n'y a que l'acide carbonique capable de l'oxyder, et il n'est qu'en petite quantité. La décarburation s'opère donc alors, dans cette première période de l'affinage, par l'oxygène des scories riches ou de l'oxyde de fer; et c'est alors que les manipulations du forgeron consistent principalement à mettre les scories en contact avec la fonte; il peut y avoir action par cémentations et action par projection des scories contre la fonte, projection opérée par le vent des soufflets.

Lorsque la chaleur augmente, la fonte s'échauffe davantage; mais alors M. Ebelmen n'a pu se procurer des gaz, le tube dont il faisait usage pour les puiser s'obstruant par la projection des scories.

La composition des gaz puisés immédiatement au-dessus des charbons, lorsque les tuyères en sont couvertes, restait à examiner.

M. Ebelmen a trouvé les compositions suivantes aux gaz puisés, lorsque le charbon dépasse les tuyères de 0 m. 3 et pendant le réchauffage des deux lopins:

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La proportion de l'oxyde de carbone augmente donc à mesure que l'opération avance; mais il y a un terme où la couche de charbon devenant moins épaisse, la proportion de ce même oxyde décroît pendant que celle de l'acide carbonique augmente. L'hydrogène va en décroissant, parce que le charbon qui va se brûler en a été en partie dépouillé par la distillation qu'il a subie dans la région supérieure. Les analyses suivantes prouvent ce que nous disons :

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L'acide carbonique se change donc en oxyde de carbone dans la région supérieure, et le charbon perd son hydrogène par la chaleur de plus en

plus élevée à laquelle il est exposé jusqu'au moment où, parvenu dans la région moyenne, il est réduit en acide carbonique par l'oxygène atmosphérique.

Telles sont les actions qui se passent dans la première période de l'affinage; parlons de celles qui s'accomplissement durant la seconde. (La suite prochainement.)

DE LA STATISTIQUE FORESTIÈRE

A PROPOS DES RENSEIGNEMENTS DEMANDÉS PAR M. LE MINISTRE DES FINANCES RELATIFS AU DÉFRICHEMENT.

Les renseignements demandés par M. le ministre des finances aux agents forestiers à l'occasion du défrichement, constituent à eux seuls une statistique forestière complète. En accordant à peine six semaines pour cet immense travail, le ministre témoigne hautement de sa confiance dans le zèle, l'activité et les lumières des agents auxquels il le demande; il donne lieu de croire aussi que les matériaux de ces documents, recueillis de longue main dans les archives de l'administration, sont tout prêts à étre mis en œuvre, et n'ont plus besoin que d'être dépouillés pour cette circonstance. Sans cela, en effet, ce ne serait pas en six semaines, ce ne serait ni en six mois ni même en six années qu'on pourrait mener à fin une œuvre aussi considérable et aussi compliquée. Pour qu'elle soit accomplie aujourd'hui, il a fallu sans doute que, dès sa réorganisation, l'administration des forêts se soit occupée de ces importantes études : il a fallu qu'elle ait préparé et expédié des instructions successives afin de donner aux recherches la direction et l'unité qui leur étaient nécessaires; il a fallu qu'elle ait eu des sommes considérables à consacrer aux dépenses occasionnées par ces travaux extraordinaires; il a fallu enfin qu'elle ait trouvé partout des agents réunissant aux connaissances variées que ces travaux supposent, cette exactitude de détails, cette rectitude de jugement, cette persévérance laborieuse qui peuvent seules préserver la statistique des erreurs auxquelles elle est si exposée. Cela prouve que pendant leur séjour à l'école, les élèves ont dû recevoir l'instruction préalable pour ces divers travaux, qu'ils ont dû être pratiquement exercés aux observations, aux expériences et à la méthode qui les constituent'.

M. Legrand a fait espérer l'année passée à l'école de compléter son enseignement par la création d'une chaire d'économie politique et de statistique.

2 Les commissions d'aménagement ont dû sans doute aussi concourir activement à ces résultats, et laisser d'utiles monuments de leurs travaux.

De telle sorte que, dès leur entrée en fonctions, ils ont pu, sous la direction des agents plus expérimentés auprès desquels ils ont été placés, contribuer activement à cette opération importante, en consacrant tous les loisirs que leur laisse le service actif, aux observations et aux recherches dont on leur avait fait comprendre l'utilité et dont on leur avait inspiré le goût. Grâce à cet heureux concours d'efforts continués depuis une vingtaine d'années, il est donc à présumer que les archives forestières réunissent maintenant tous les documents désirables, non-seulement sur l'étendue du sol forestier, sur sa culture, son exploitation et sa surveillance; mais sur les notions géologiques et météorologiques nécessaires an sylviculteur, sur le mouvement de la production et de la consommation des bois, de l'importation et de l'exportation, des prix de vente en forêts et sur les marchés, sur la quotité et les résultats des reboisements et des défrichements, en un mot, sur tout ce qui forme la base de l'économie forestière et l'objet récent de la circulaire de M. le directeur général 1. Ainsi chaque conservation possède aujourd'hui, sans doute, sa statistique où chaque forêt a son histoire, sa topographie, son compte ouvert et son bilan. On conçoit toute l'utilité de ces archives pour les conservateurs comme pour les agents auxquels elles restent ouvertes, surtout au moment où ils arrivent pour la première fois dans une résidence nouvelle. Quelques jours passés à les consulter leur procurent les connaissances nécessaires pour les opérations qui leur sont confiées, conuaissances qu'ils n'eussent acquises, sans cela, qu'après bien des années de tâtonnements et d'études, au prix de bien des écoles et souvent au détriment du trésor. Les observations et les succès de leurs devanciers comme leurs erreurs ou leurs fautes servent également à les éclairer, et en les mettant au courant de ce qui a été tenté et exécuté avant eux, leur révèlent ce qu'ils doivent tenter ou exécuter eux-mêmes, soit pour les aménagements et les exploitations, soit pour l'entretien et les repeuplements, soit pour la surveillance et les estimations, etc. Dès lors les bois ne se trouvent plus exposés aux bévues et aux incertitudes de l'inexpérience, et sont moins compromis par la mobilité que les exigences et parfois peutêtre les complaisances de l'organisation administrative entretiennent dans le personnel du service.

En outre, ces documents locaux réunis à l'administration centrale y pouvant être rapprochés et comparés, se contrôlent et se complètent l'un par l'autre. La lumière qui en résulte éclaire les décisions de l'autorité supérieure qui, placée à ce point de vue élevé d'où elle embrasse les faits dans leur ensemble, peut surveiller, avec connaissance de cause, toutes les branches du service, et leur imprimer à toutes le mouvement et la direction. Il est facile de juger à quelle étendue de vue, à quelle justesse d'appréciation doivent parvenir des hommes qui, après avoir acquis 1 Voir Bulletin, page 161.

une expérience personnelle, en passant par tous les échelons du service actif, arrivent à l'administration centrale, et y trouvent ouverte cette statistique générale et progressive qui leur révèle non plus pour une seule contrée, mais pour toutes les contrées de la France, les résultats constatés des diverses opérations accomplies dans le service des forêts.

La pratique forestière est sans doute d'une nécessité indispensable pour former le forestier; mais elle ne suffit pas seule pour l'administrateur, surtout lorsque l'administration doit s'étendre à un pays aussi vaste que la France, et qui comprend des régions et des zones aussi diverses. Le praticien s'absorbe dans les détails de ses opérations; son horizon s'arrête à celui de sa localité. Celui de l'administrateur doit s'agrandir à mesure qu'il s'élève, et embrasser dans son cercle les horizons divers audessus desquels il est placé.

Lorsque, dans cette condition, l'administrateur doit à la statistique une carte fidèle de toute la région administrative, un tableau exact et précis de toute l'œuvre du passé; lorsqu'il trouve ainsi toujours sous ses yeux et sous sa main les antécédents et les analogies qui peuvent éclairer ses décisions et ses mesures, l'administration cesse d'être une espèce de jeu de hasard d'où le bien et le mal s'échappent à l'aventure, pour s'élever à toute la certitude d'une science régulière et positive.

Mais ce n'est pas seulement à l'administration des forêts, à ses agents qu'une bonne statistique forestière est appelée à rendre de précieux services; elle ne serait pas moins utile aux autres branches de l'agriculture et à tous les propriétaires de bois qu'elle éclairerait sur leurs intérêts. Nous osons donc appeler sur ce point l'attention du ministre des finances et la sollicitude du directeur général. Si de l'enquête qu'ils provoquent il pouvait sortir la publication d'une statistique forestière bien faite, ce serait là un résultat d'une grande importance, et il ne faudrait pas plaindre l'argent qu'on aurait dépensé pour l'obtenir. L'administration forestière ayant réuni déjà les documents qui en sont la base, il ne s'agirait que de les assembler, de les contrôler et de les mettre en œuvre, et le gouvernement a trop à cœur les intérêts de la sylviculture et de l'agriculture pour refuser les fonds nécessaires à un travail d'une utilité aussi incontestable. Ajoutons que l'administration forestière est seule en mesure de l'accomplir, puisque, seule de toutes les branches de l'agriculture, elle a une organisation régulière, hiérarchique, qui couvre de son réseau tout le territoire, et qui lui permet de donner ainsi à cette grande et vaste entreprise l'ensemble, la régularité, la proportion, l'exactitude et l'unité qui doivent y présider. Il n'appartient donc qu'à elle d'élever un pareil monument. Nous osons ajouter que c'est son devoir et que ce sera sa gloire, puisque par là elle se placera au niveau, sinon en tête des autres branches des sciences agricoles en arrière desquelles on l'accuse d'être restée jusqu'à ce jour. L'administration des mines, celle des douanes,

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