LÉLIE. Et que lui puis-je dire? MASCARILLE. Il est vrai, c'est tomber d'un mal dedans un pire. LÉLIE. Que faire ? MASCARILLE. Je ne sais. LÉLIE. C'en est trop à la fin, MASCARILLE. Monsieur, si vous aviez en main force pistoles, Trufaldin, qui la garde, est en quelque souci; LÉLIE. Quoi? c'est... MASCARILLE. Que monsieur votre pere Est un autre vilain qui ne vous laisse pas, Comme vous voudriez bien, manier ses ducats; Mais tâchons de parler à Célie un moment, Sa fenêtre est ici. LÉLIE. Mais Trufaldin, pour elle, Fait de jour et de nuit exacte sentinelle. Prends garde. MASCARILLE. Dans ce coin demeurez en repos. O bonheur ! la voilà qui sort tout à propos. SCENE III. CÉLIE, LÉLIE, MASCARILLE. LÉLIE. Ah! que le ciel m'oblige, en offrant à ma vue CÉLIE. Mon cœur, qu'avec raison votre discours étonne, Ah! leurs coups sont trop beaux pour me faire une injure. Je mets toute ma gloire à chérir leur blessure, MASCARILLE. Vous le prenez là d'un ton un peu trop haut; Ce style maintenant n'est pas ce qu'il nous faut. Profitons mieux du temps, et sachons vîte d'elle Ce que... TRUFALDIN, dans la maison. MASCARILLE, à Lélie LÉLIE. O rencontre cruelle ! Ce malheureux vieillard devoit-il nous troubler? MASCARILLE. Allez, retirez-vous; je saurai lui parler. SCENE IV. TRUFALDIN, CÉLIE, LÉLIE retiré dans un coin, MASCARILLE. TRUFALDIN, à Célie. Que faites-vous dehors? et quel soin vous talonne, Autrefois j'ai connu cet honnête garçon, Et vous n'avez pas lieu d'en prendre aucun soupçon. MASCARILLE. Est-ce là le seigneur Trufaldin? CÉLIE. Oui, lui-même. MASCARILLE. Monsieur, je suis tout vôtre; et ma joie est extrême De pouvoir saluer en toute humilité Un homme dont le nom est par-tout si vanté. TRUFALDIN. Très humble serviteur. MASCARILLE. J'incommode peut-être; Mais je l'ai vue ailleurs, où in'ayant fait connoître TRUFALDIN. Quoi! te mêlerois-tu d'un peu de diablerie? CÉLIE. Non, tout ce que je sais n'est que blanche magie. MASCARILLE. Voici donc ce que c'est. Le maître que je sers Sous quel astre ton maître a-t-il reçu le jour ? MASCARILLE. Sous un astre à jamais ne changer son amour. CÉLIE. Sans me nommer l'objet pour qui son cœur soupire, Elle n'est pas d'humeur à trop faire connoître Les secrets sentiments qu'en son cœur on fait naître; Mais je les sais comme elle, et, d'un esprit plus doux, Je vais en peu de mots te les découvrir tous. MASCARILLE. O merveilleux pouvoir de la vertu magique! CÉLIE. Si ton maître en ce point de constance se pique, MASCARILLE. C'est beaucoup; mais ce fort dépend d'un gouverneur Difficile à gagner. CÉLIE. C'est là tout le malheur. MASCARILLE, ά part, regardant Lélie. Au diable le fàcheux qui toujours nous éclaire! CÉLIE. Je vais vous enseigner ce que vous devez faire. Cessez, ô Trufaldin, de vous inquiéter; C'est par mon ordre seul qu'il vous vient visiter, Et je vous l'envoyois, ce serviteur fidele, Vous offrir mon service, et vous parler pour elle, Dont je vous veux dans peu payer la liberté, Pourvu qu'entre nous deux le prix soit arrêté. MASCARILLE, à part. La peste soit la bête ! TRUFALDIN. Ho! ho! qui des deux croire? Ce discours au premier est fort contradictoire. MASCARILLE. Monsieur, ce galant homme a le cerveau blessé ; TRUFALDIN. Je sai ce que je sai. J'ai crainte ici dessous de quelque manigance. (à Célie.) Rentrez, et ne prenez jamais cette licence. Et vous, filous fieffés, ou je me trompe fort, Mettez, pour me jouer, vos flûtes mieux d'accord. SCENE V. LÉLIE, MASCARILLE. MASCARILLE. C'est bien fait. Je voudrois qu'encor, sans flatterie, Il nous eût d'un bâton chargés de compagnie. |