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novices: ils ont aussi des établissemens appelés Hermitages, destinés à ceux qui désirent s'adonner à la contemplation et à la pénitence dans une entière solitude; mais ceux qui embrassent ce genre de vie le font par choix, leur supérieur n'ayant aucune autorité pour les y contraindre.

La congrégation s'étendit rapidement à Naples, en Portugal et en Espagne. Mais ce ne fut pas sans de grandes difficultés et sans avoir à supporter les censures des gens du monde contre ce genre de vie. Adorno et François, désirant propager leur institut, firent en 1590 un voyage en Espagne, afin de l'y introduire; leur tentative fut alors inutile, le conseil royal venait de rendre un décret pour défendre d'établir aucun nouvel ordre dans le royaume. S'ils ne réussirent pas sur-le-champ dans leur sainte entreprise, les vertus qu'ils pratiquèrent pendant leur voyage, sur-tout leur esprit de pauvreté et leur soumission à la volonté de Dieu, donnèrent d'eux dans ce pays une idée très - avantageuse et servit plus tard à lever les obstacles qu'on leur opposait. Ils virent à Valence S. Louis Bertrand, Dominicain, qui leur prédit qu'ils réussiraient dans la suite.

Au bout de deux ans le P. Adorno mourut, et le père François Carraciolo fut élu général de l'ordre. Il eut d'abord beaucoup à souffrir; on inventa contre lui mille calomnies; mais il les supporta en silence et finit par reconquérir l'estime publique. Il fut particulièrement considéré des Rois d'Espagne Philippe II et Philippe III.

La manière dont notre Saint s'acquittait des devoirs du ministère sacré, son assiduité et son zèle à faire le catéchisme et à prêcher la divine parole, édifiaient tout le monde, et contribuaient beaucoup à procurer la gloire de Dieu. Ses sermons étaient suivis des plus heureux effets. Sa conversation ordinaire était une exhortation à la vertu, et ses regards mêmes inspiraient la piété. Il cherchait sur-tout à augmenter la dévotion envers Jésus-Christ

caché sur nos autels. Dans cette vue il établit pour son institut l'adoration perpétuelle. L'on y passait en communauté une heure chaque jour devant le Saint-Sacrement, et chaque membre séparément y passait ensuite une autre heure.

François allait régulièrement, dès les premières heures du jour, au confessionnal où les pauvres étaient sûrs de le trouver. Il avait sans doute souvent présent à son esprit cette parole que le Sauveur dit aux disciples de saint Jean, et que ce bon maître donnait comme une marque de la divinité de sa mission: Les pauvres sont évangélisés (1). L'instruction chrétienne de cette partie de la société doit être pour les ministres du Seigneur un des objets les plus constans de leur zèle.

Avant sa profession religieuse, François avait vendu son bien et en avait distribué le prix aux indigens. Il demandait souvent l'aumône pour eux dans les rues : pendant le grand froid, il leur donnait tous ses vêtemens de dessous et s'abstenait de toute nourriture trois jours entiers dans la semaine pour leur distribuer sa portion. Mais sa charité ne se bornait pas à soulager le prochain dans ses besoins corporels : le salut des ames l'occupait constamment. Il montrait une grande assiduité à disposer les pécheurs au repentir, et à préparer les malades à la mort.

En remplissant ces devoirs de charité, il n'oubliait pas ceux qui étaient particuliers à sa profession. Il observait strictement la règle de son institut et était pour tous un modèle d'humilité. Quoique supérieur général, il remplissait les plus bas offices de la maison, balayait les chambres, faisait les lits et nettoyait les ustensiles de cuisine.

Ses vertus furent récompensées par de grandes faveurs spirituelles il opéra plusieurs miracles et prédit souvent l'avenir. Son zèle pour l'accroissement de sa congrégation (1) S. Matthieu, 11. 6.

le conduisit encore deux fois en Espagne, dans les années 1594 et 1598. Pendant son séjour à Madrid, il travailla avec tant d'ardeur au salut des ames, qu'on ne le désignait que sous le nom du Père prédicateur de l'amour de Dieu. Ce fut quelques années après ce second voyage qu'il se démit de la charge de supérieur. Peu de temps avant sa mort il fit le pélerinage de Lorette, et y demanda hum-` blement que son corps fùt dissous pour que son ame fût avec Jésus-Christ. Il apprit par révélation que Dieu accor

dait sa demande. Etant allé de ce lieu à une maison de sa congrégation établie dans la ville d'Agnone, en Abbruzze, il s'écria, en y entrant : « C'est ici le lieu de

mon repos. » Presque aussitôt saisi d'une fièvre violente, il fit une confession générale et désira recevoir le saint Viatique à son approche il se leva de son lit, se mit à genoux, et reçut son divin Hôte avec les sentimens de la piété la plus vive. Il dicta pour tous les membres de sa communauté une lettre, dans laquelle il leur recommandait la fidélité à l'observance de la règle, et les exhortait, dans les termes les plus touchans, à la pratique de tous les préceptes et de tous les conseils de l'Évangile. Il reçut l'Extrême-Onction avec une dévotion exemplaire, supporta ses souffrances avec une patience inaltérable, et jusqu'au dernier moment il eut sur les lèvres les noms sacrés de Jésus et de Marie. Sa confiance dans les plaies du Sauveur, l'espérance qu'il montrait de posséder Dieu dans le ciel, étaient si grandes qu'elles édifiaient et touchaient vivement ceux qui l'entouraient. C'est avec ces beaux sentimens, qui l'avaient animé pendant toute sa vie, que ce saint homme termina sa carrière. Il expira le 4 Juin 1608, dans la quarante-quatrième année de son âge. Ses restes précieux, transférés à Naples, attirèrent un grand concours, et il s'opéra plusieurs miracles par son intercession. Le procès de sa canonisation fut bientôt

commencé; plusieurs de ses miracles furent certifiés et approuvés par les Papes Benoît XIV et Clément XIII. II fut béatifié par Clément XIV. D'autres miracles furent approuvés par Pie VI, et sans les troubles d'Italie, ce Pontife eût lui-même prononcé la canonisation. Elle était réservée à Pie VII, qui en promulgua la bulle le 24 mai 1807.

Ainsi fut récompensé ce prêtre humble et fervent. Sa naissance lui donnait droit aux honneurs, ses talens à de grandes distinctions, et sa fortune à tous les plaisirs du monde. Mais sur son lit de mort, peut-il regretter d'avoir, pour l'amour de Dieu et du prochain, renoncé aux honneurs, aux dignités, aux plaisirs? Un religieux qui a été infidèle à sa règle en gémit à sa dernière heure, mais celui qui l'a toujours fidèlement observée rend alors grâces au Seigneur de ce qu'il a mis à couvert l'innocence de son ame sous l'abri de la religion.

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Troisième ou quatrième siècle.

DOROTHÉE était prêtre, ou, selon quelques auteurs, évêque de Tyr, en Phénicie. Les anciens martyrologes attestent qu'il souffrit beaucoup pour la foi sous l'Empereur Dioclétien. On dit qu'il ne mourut point de ses tourmens, et qu'il vécut jusqu'au règne de Julien l'Apostat. Saint Théophane, Anastase le bibliothécaire, et les Grecs modernes, ajoutent qu'il reçut la couronne du martyre à Odyssopolis, en Thrace (1).

(1) La synopse des vies des prophètes, des apôtres et des disciples

Eusèbe parle de deux autres Dorothée; l'un fut martyrisé sous Dioclétien, dont il était chambellan. Il avait donné aux Empereurs de grandes marques de zèle et de fidélité, et s'était acquis par-là une haute considération. Il est honoré, avec saint Gorgone, le 9 Septembre. Eusèbe, Hist. 1. 8, c. 1 et 6.

L'autre, qui florissait dans le même siècle, était prêtre de l'église d'Antioche. Il joignait à une éminente sainteté, une grande connaissance de l'Ecriture et de la langue hébraïque. L'Empereur l'honora de son amitié, et le considéra toujours comme un homme d'un mérite extraordinaire. Eusèbe, ibid. 1. 7, c. 32; et Nicéphore Calixte, 1. 6, c. 35.

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CE saint, surnommé le Thébain, parce qu'il était de Thèbes, en Egypte, se retira d'abord dans un monastère. Il y passa quelque temps à se former aux exercices de la vie ascétique, sous les plus habiles maîtres de la perfection monastique, après quoi il se renferma dans une caverne, située dans un désert qui était sur la route de Nitrie, et à neuf milles de la ville d'Alexandrie : là, il vécut d'une manière très-austère, joignant un travail con

de Jésus-Christ, ne peut être attribuée à notre Saint, quoiqu'elle porte le nom de Dorothée de Tyr; elle vient de la plume d'un Grec moderne, qui montre son peu de jugement par les fables qu'il y débite. Cet ouvrage est une des principales sources où a puisé le crédule Nicéphore Calixte, qui donna une histoire ecclésiastique dans le quatorzième siècle. Voyez Bellarmin, de Scriptor. Tillemont, etc.

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