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«assidûment dans les mèmes églises un usage particulier dans la «< célébration des messes....

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377. « Quant à toutes les autres églises susdites, nous ôtons et « nous rejetons entièrement et absolument l'usage des missels dont a elles se servent. Nous statuons et ordonnons, sous la peine de ⚫ notre indignation, en vertu de cette constitution qui doit valoir « à perpétuité, qu'on ne pourra rien ajouter, retrancher ou changer « au missel que nous publions; mandant et commandant, en vertu << de la sainte obéissance, à tous et à chacun des patriarches et ad<< ministrateurs desdites églises, et autres personnes honorées « d'une dignité ecclésiastique quelconque, même cardinaux de la « sainte Église romaine, ou de quelque autre degré et prééminence « qu'ils soient, de chanter et lire désormais la messe selon le rit, « le mode et la règle que nous publions dans ce missel, en ayant • soin d'omettre et de rejeter entièrement, à l'avenir, toutes les au« tres manières et tous les autres rites observés jusqu'ici d'après « d'autres missels, même anciens; en sorte qu'ils n'aient pas la har« diesse d'ajouter d'autres cérémonies, ni de réciter d'autres prières « dans la célébration de la messe, que celles qui sont contenues « dans ce missel. De plus, nous concédons et accordons d'autorité apostolique, par la teneur des présentes, que l'on puisse se servir « librement et licitement de ce missel, pour les messes tant chan«tées que récitées, dans quelque église que ce soit, sans aucun scrupule de conscience, et sans pouvoir encourir aucunes peines, ⚫ sentences ou censures; déclarant aussi que nuls prélats, administrateurs, chanoines, chapelains et autres prètres de quelque nom

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« que ce soit, séculiers ou réguliers, ne pourront être tenus à célébrer la messe autrement qu'en la forme par nous statuée, ni contraints et forcés de changer l'ordre de ce missel. »

378. Il est vrai que dans plusieurs diocèses de France on s'est écarté de l'esprit de l'Église, soit en substituant un rit particulier au rit romain, soit en dénaturant plus ou moins, sans l'autorisation du vicaire de Jésus-Christ, un rit ancien et légitime, au terme des constitutions de saint Pie V. De là l'arbitraire, et par suite la variété des différents rites diocésains qui, parmi nous, fatiguent singulièrement les fidèles et le clergé. Dans le principe, les jansénistes et les parlementaires, dont on ne se défiait pas assez, ont eu beaucoup de part aux changements liturgiques; ils avaient parfaitement compris que l'usage, que le nom seul de la liturgie romaine contribuait puissamment à entretenir, parmi les fidèles et même parmi

les ministres de la religion, la piété filiale pour l'Église romaine, la mère et maîtresse des autres Églises. Mais, aujourd'hui, le dévouement des évêques pour les prérogatives du saint-siége, leur zele pour l'unité la plus parfaite, même en ce qui ne tient pas à la foi, ne tardera pas, nous l'espérons, à faire tomber partout l'arbitraire_ en matière de liturgie, et à rétablir intégralement, autant que possible, dans tous ou presque tous les diocèses de France, la liturgie romaine, sauf les modifications qui obtiendraient pour elles la sanction de celui à qui a été donné, dans la personne de saint Pierre, le plein pouvoir de gouverner l'Église universelle (1).

ARTICLE III.

Des écrits des Pères de l'Eglise comme source de tradition.

379. On donne communément le nom de Pères aux auteurs ecclésiastiques qui ont écrit sur la religion, depuis les premiers temps du christianisme jusqu'à saint Bernard, qui est considéré comme le dernier Père de l'Église. Ceux qui sont venus après pour continuer la chaîne de la tradition sont appelés simplement docteurs ou théologiens, suivant le degré d'autorité dont ils jouissent, dans l'Église. Mais, à prendre le mot de Père dans une acception plus générale, nous appelons de ce nom non-seulement les écrivains qui ont paru avant le règne de la scolastique, mais encore les papes et les évêques des premiers siècles, dont il nous reste des actes, des décrets ou des lettres, qui sont autant de témoignages de la croyance de l'Église pour le temps auquel ils se rapportent. Ici, nous ne considérons dans les Pères, ni l'éloquence des Chrysostome, des Basile et des Ambroise; ni la science des Augustin, des Jérôme et des Origène; ni le génie de Tertullien; ni le caractère de philosophe dans les Justin et les Clément d'Alexandrie; pas plus que dans les papes le titre de vicaire de Jésus-Christ, et dans les évêques celui de juges dans la foi. Nous ne les envisageons que comme de simples témoins, comme des témoins ordinaires et naturels, qui, ayant des yeux pour voir et des oreilles pour entendre,

(1) Voyez les Institutions liturgiques du R. P. dom Guéranger, abbé de Solesmes, et particulièrement la Lettre qu'il nous a adressée, en réponse à celle par laquelle nous l'avions prié de vouloir bien, dans l'intérêt du clergé, traiter du droit en matière de liturgie.

n'ont pu ignorer ni ce que l'Église croyait et pratiquait de leur temps, ni les règles de sa croyance.

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380. Or, le consentement unanime ou presque unanime des Pères grecs et latins sur un point de doctrine dogmatique ou morale, est une preuve irréfragable de la tradition apostolique, soit qu'il s'agisse de fixer le sens du texte sacré, soit qu'il s'agisse d'un dogme ou d'une loi dont il n'est point parlé dans les livres saints. Que personne, dit le concile de Trente, se confiant en son propre jugement, n'ait la témérité d'interpréter l'Écriture sainte d'une manière contraire au consentement unanime des Pères, dans les <«< choses de la foi et des mœurs, qui appartiennent à l'édification de « la doctrine chrétienne : ut nemo prudentiæ suæ innixus, in rebus a fidei et morum, ad ædificationem doctrinæ christianæ pertinen« tium... contra unanimem consensum Patrum, ipsam Scripturam « sacram interpretari audeat (1). » C'est ainsi qu'on l'a toujours entendu dans l'Église, comme on le voit par les actes des conciles œcuméniques de Constantinople, de l'an 869 (2); de Nicée, de l'an 787 (3); de Constantinople, de l'an 680 (4); de celui de la même ville, de l'an 553 (5); de Chalcédoine, de l'an 451 (6); d'Éphèse, de l'an 431 (7); et de celui de Nicée, de l'an 325 (8). Nous avons en outre les témoignages de Vincent de Lérins (9), de saint Augustin (10), de saint Epiphane (11), de saint Grégoire de Nazianze (12), de saint Basile (13), de saint Athanase (14), d'Eusèbe de Césarée (15), de saint Denis d'Alexandrie (16), des Pères du concile d'Antioche, de l'an 264 ou 266 (17), d'Origène (18), de Clément Alexandrin (19) et de Tertullien (20). Comment, en effet, aurait-il pu se faire que les docteurs et les évèques, qui enseignaient en Égypte et dans la Palestine, dans l'Asie Mineure et dans la Grèce, en Italie et sur les côtes d'Afrique, en Espagne et dans les Gaules, se fussent accordés, comme de concert et par un complot, à professer toujours et partout la même foi, si leur doctrine n'eût été la doctrine universelle, qui, en remontant jusqu'aux temps apostoliques, n'a pu venir que des apôtres et de Jésus-Christ?

(1) Session IV, Decret. de editione et usu sacrorum librorum. — (2) Act. x, can. 1. — (3) Définition de foi contre les iconoclastes (4) Act. x. - (5) Dé

cret contre les trois chapitres.

- (6) Act. 11.

-

- (7) Voyez le Commonitorium

de Vincent de Lérins, ch. xxix. (8) Voyez la lettre de saint Athanase ad Afros.(9) Voyez ci-dessus le n° 356. — (10) Voyez le no 355.

le n° 351.

- (11) Voyez (14) Voyez le

(12) Voyez le n° 350. (13) Voyez le n° 347. 1o 346. —(15, Voyez le n° 345. (16) Voyez le n° 343.-(17) Voyez le n° 342.

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Comment eussent-ils osé, ainsi qu'ils le font presque toujours, mettre en avant la croyance et la pratique de l'Eglise catholique, si l'Église n'eût réellement pas cru ce qu'ils rapportent dans leurs écrits?

381. Qu'on ne dise pas que les Pères ont pu se tromper : it ne s'agit pas ici de questions purement philosophiques, étrangeres au domaine de la révélation, mais bien des vérités, des dogmes que l'Église admet d'après l'Écriture et la tradition. Dans tel ou tel siècle, l'Eglise croyait-elle à ces dogmes? Croyait-elle, par exemple, à la présence réelle du corps de Jésus-Christ dans l'Eucharistie? Les pasteurs enseignaient-ils ce dogme aux fidèles? Y avait-il quelques prières, quelques cérémonies, quelques rites, dans son culte ou dans sa liturgie, qui fussent une preuve de sa croyance à l'égard de ce grand mystère? Sur quoi fondait-elle cette croyance? Ce sont là autant de faits sur lesquels les Pères ne pouvaient se tromper; pas plus évidemment que les docteurs d'aujourd'hui, qui, dans les différentes parties du monde chrétien, rapportent ou supposent clairement dans leurs écrits, et que l'Eglise catholique romaine croit que Jésus-Christ est réellement présent dans le sacre-. ment de l'Eucharistie, et qu'elle le croit d'après l'Ecriture, qu'elle entend comme elle a toujours été entendue par les Pères, a Patribus intellecta (1). Il suffit d'ailleurs de jeter un coup d'œil sur les ouvrages des anciens docteurs pour reconnaître qu'ils ont fait profession de suivre, non leurs propres lumières ni leur propre jugement, mais la doctrine de Jésus-Christ telle qu'elle était reçue et qu'elle se pratiquait de leur temps par les pasteurs et les fidèles. « Ils ont « conservé, comme le dit saint Augustin, ce qu'ils ont trouvé dans « l'Église; ils ont enseigné ce qu'ils ont appris ; ils ont laissé à leurs « enfants ce qu'ils avaient reçu de leurs pères (2). » Il est donc vrai de dire qu'on doit s'en rapporter au témoignage unanime ou presque unanime des Pères, pour ce qui tient à la foi et à la morale chrétienne; et que leurs écrits, leurs lettres, leurs décrets, leurs actes, sont de vrais monuments des traditions apostoliques.

382. Ce que nous disons des Pères s'applique aux docteurs et aux théologiens moins anciens. Quand tous ou presque tous sont d'accord à nous présenter un point de doctrine comme article de foi, ou comme faisant partie de l'enseignement catholique, ou comme étant fondé sur un précepte évangélique, ce concert unanime est une preuve de vérité, soit parce qu'ils enseignent sous les

(1) Concile de Trente, sess. xi, ch. 1. (2) Voyez ci-dessus le n° 355.

auspices et même au nom des évêques qui sont chargés de garder intact le dépôt sacré de la révélation; soit parce que l'Église catholique ne peut ni enseigner l'erreur, ni pratiquer ce qui est contraire à la sainteté de l'Évangile, ni même permettre par son silence que l'erreur devienne générale, par l'enseignement de ceux qu'elle charge d'expliquer la doctrine chrétienne.

383. Nous avons dit: le consentement presque unanime. Les opinions erronées de quelques anciens Pères, qui ne connaissaient point les traditions ou l'enseignement des Églises principales, ne peuvent affaiblir l'autorité de ceux qui ne pensaient point comme eux, ni même atténuer leur propre témoignage sur les points où ils s'accordent avec les autres docteurs. Quant aux questions au sujet desquelles les Pères de la primitive Église ne se sont pas suffisamment expliqués, il est nécessaire de consulter ceux qui sont venus après, ainsi que la pratique générale de l'Eglise et la liturgie, qui sont aussi, comme nous l'avons vu (1), des moyens sûrs de connaître la tradition des apôtres. Mais si, comme il arrive sur certaines questions d'un ordre inférieur, les docteurs se trouvent partagés, les uns se déclarant pour l'affirmative, les autres pour la négative, sans que l'Église ait cru devoir se prononcer, ou nous faire connaître, ni directement ni indirectement, ce que nous devons croire ou pratiquer, alors il y a doute; et dans le doute on peut à volonté, sans danger, prendre l'un ou l'autre sentiment; sauf, en certains cas, l'obligation de suivre le parti le plus sûr (2).

384. De là cette belle maxime de l'école, qu'on attribue à saint Augustin, quoiqu'elle ne se trouve point textuellement dans ses écrits : « In necessariis unitas, in dubiis libertas, in omnibus cha« ritas. » Unité dans les choses nécessaires; c'est-à-dire, sur tous les points de la doctrine de l'Église catholique, dont l'enseignement est toujours appuyé sur l'Écriture ou la tradition, et presque toujours sur l'une et l'autre ces vérités n'ont rien perdu, ni de leur prix, ni de leur certitude, parce que des hommes ignorants et présomptueux osent les contester. Liberté dans les choses douteuses quand ni l'Écriture, ni la tradition, ni les conciles, ni le saint-siége, ne s'expliquent d'une manière assez décisive pour réunir les esprits, ou qu'il s'agit d'une question que l'Église abandonne à la discussion de l'école, il est alors permis à chacun d'a

(1) Voyez le n° 363 et le n° 364. (2) Voyez la Théologie morale à l'usage des curés, tom. 1, no 92, etc.

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