Images de page
PDF
ePub

je l'ai déja dit, c'eft une extravagance, de foutenir que les Apôtres n'ont pas tout fçû. Ce n'est pas une moindre impudence de prétendre, que, quand ils n'auroient rien ignoré, ils n'ont pas néanmoins communiqué tout ce qu'ils fçavoient. Ils ont enfeigné, dit-on, certaines chofes, publiquement à tous les Peuples, & quelques autres en fecret feulement, & à peu de perfonnes. C'eft pour cela, ajoute-t'on, que faint Paul écrivant à Timothée, lui parle de la forte: 0 Timothée, 1.Tim.6. gardez le dépôt que je vous ai confe Et ailleurs: Gardez le bon dépôt. 2. Tim. 1. Mais quel eft ce dépôt ? Est-ce quelque Doctrine particuliere ou extraordinaire? Sont-ce les chofes à quoi il l'exhorte, quand il lui dit: Je vous recommande, mon 1. Tim. 1. fils Timothée, ce que je vous ai or-, donné? Ou le précepte qu'il lui fait en ces termes: Je vous recommande, devant Dieu qui vivifie

Tim. 6.

toutes chofes, & devant Fefus Chrift, qui a rendu fous Ponce Pi late un fi éclatant témoignage à la vérité, de garder inviolablement le précepte que je vous ai impose? Or, fuivant ce qui eft écrit avant & après ces paroles, on voit évidemment que ce précepte & cette exhortation, bien loin de marquer une Doctrine secrete & miftérieufe, marquent feulement, que Timothée devoit prendre garde à ne point admettre d'autre Doctrine que celle qu'il avoit 1bid. apprise de faint Paul, & que nous avons déja confeffée, ajoute-t'il, en préfence de plufieurs témoins. Que fi par le terme de plufieurs témoins, les Hérétiques ne veulent pas qu'on entende l'Eglife, peu importe; pourvu qu'ils avouent qu'on ne peut appeller fecret, ce qui a été publié en présence de 2. Tim. 2. plufieurs témoins. D'ailleurs quoique dans un autre endroit, l'Apôtre écrivant au même Dif

ciple, l'avertiffe de communiquer ce qu'il lui écrit à ceux d'entre les Fideles qui font en état d'inftruire les autres, il ne s'enfuit nullement qu'il parle de quelque Evangile fecret. Car l'Apôtre prétend feulement parler de ce qu'il écrivoit en cette occafion.. S'il eût parlé de chofes fecrettes, éloignées de notre connoiffance, il auroit emploïé le terme de celles-là, & non de celles-ci.

[ocr errors]

A la vérité il étoit de la pru- Chap. dence, qu'en chargeant fon Difciple du miniftere de l'Evangile,. il le fit fouvenir de ne pas adminiftrer la divine parole inconfidérement, & à toute forte de per fonne, afin que fuivant le précepte de Jefus Christ, il ne parût pas donner les chofes faintes Matth. 7. aux chiens, & jetter les perles devant les pourceaux. On fçait que le Seigneur a parlé publiquement; il ne paroît pas qu'il ait voulu qu'une partie de fon Evangile fût

[ocr errors]

Matth.

IO.

Luc. 9.

renfermée fous le fecret, pour en faire un miftere à tout le monde: il paroît au contraire, qu'il commanda à fes Difciples de dire en public ce qu'ils avoient entendu en particulier; & de prêcher fur les toits ce qui leur avoit été dit à Roreille. Il leur avoit fait comprendre par une fimilitude, qu'il ne faut point cacher un feul marc d'argent, (c'eft-à-dire, une seule de fes paroles,) au lieu de le faire valoir. Il leur avoit appris qu'on Matth. 5. n'a pas accoutumé de mettre une lampe fous le boiffeau, mais fur le chandelier, afin qu'elle éclaire tous ceux qui font dans la maifon. Les Apôtres auroient donc négligé, ou n'auroient point du tout compris ces chofes, s'il eft vrai qu'ils ne les aïent point éxecutées,pour avoir caché une partie de cette lumiere, c'est-à-dire, une partie de la parole de Dieu, & de l'Evangile. Je ne fçache pourtant pas qu'ils aïent jamais craint per

fonne dans la prédication de l'Evangile : violences des Juifs, menaces des Gentils, rien ne les effraïoit. Ils préchoient librement dans l'Eglife, le faifant même dans la Sinagogue & dans les Places publiques. Bien plus, ils n'euffent jamais pu convertir les Juifs, ni faire connoître la vérité aux Païens,s'ils ne leur avoient clairement expliqué ce qu'ils vouloient

que les uns & les autres cruffent. Ils auroient encore moins caché aux Peuples, déja convertis, ce qu'ils vouloient confier à un petit nombre d'étrangers. Et quand même il feroit vrai, que dans certaines rencontres ils euffent enfeigné certaine chofe en fecret & en confidence à quelques-uns on ne peut s'imaginer que ce fuffent des chofes qui introduififfent une nouvelle Regle de Foi, contraire à la Doctrine Catholique qu'ils enfeignoient à tout le monde.

« PrécédentContinuer »