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« MM. Armand Marrast, Louis Blanc, Ferdinand Flocon, Albert, ouvrier.'

« Ces citoyens n'ont pas hésité un instant à accepter la mission patriotique qui leur était imposée par l'urgence

« Quand le sang coule, quand la capitale de la France est en feu, le mandat du gouvernement provisoire est dans le péril et dans le salut public. La France entière l'entendra et lui prêtera le concours de son patriotisme. Sous le gouvernement populaire que proclame le gouvernement provisoire, tout citoyen est magistrat.

Français, donnez au monde l'exemple que Paris a donné à la France; préparez-vous, par l'ordre et la confiance en vousmêmes, aux institutions fortes que vous allez être appelés à vous donner.

« Le gouvernement provisoire veut la République, sauf ratification du peuple français, qui va être immédiatement consulté.

«Ni le peuple de Paris, ni le gouvernement provisoire ne prétendent substituer leur opinion à l'opinion des citoyens sur la forme définitive du gouvernement que proclamera la souveraineté nationale.

« L'unité de la nation est formée désormais de toutes les classes de la nation qui la composent;

Le gouvernement de la nation par elle-même;

« La liberté, l'égalité, la fraternité pour principes; « Le peuple pour devise et pour mot d'ordre;

Voilà le gouvernement démocratique que la France se Boit à elle-même, et que nos efforts sauront lui assurer ('). » (1) Cette proclamation portait la signature des sept membres du gouvernement provisoire et de deux des secrétaires; Flocon et Albert ne signèrent point, quoique eur signature se retrouve sur l'adresse à la garde nationale publiée en mème temps. Mais on ne retrouve plus que la seule signature des sept sur les actes portant nomination aux divers ministères. On pourrait croire que déjà les élus des démocrates réunis dans les bureaux des journaux se refusaient à ne figurer que comme simples secrétaires du gouvernement provisoire.

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HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

Deux autres mesures d'une urgence extrême furent encore arrêtées dans le cours de la délibération de cette nuit. Par l'une, le gouvernement provisoire déclarait la Chambre des députés dissoute; et, par l'autre, elle interdisait aux pairs de se réunir.

C'était couper court à toutes les intrigues dynastiques qu'auraient pu renouer les membres de ces deux corps politiques, si on ne les eût pas effacés sur-le-champ du règne des vivants.

La nuit se passa admirablement. La joie la plus vive régnait partout. Néanmoins, le service des barricades se fit avec un ordre parfait et une sévérité toute militaire par les citoyens en blouses, en habits, ou en uniforme de gardes nationaux; les mots d'ordre étaient donnés et exigés, comme dans les places de guerre. Un peuple immense garda jusqu'au jour l'Hôtel-deVille, où reposaient tant d'espérances!

CHAPITRE VII.

Ministère provisoire formé le 25 février. Nominations diverses. ces nominations.

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Bons sentiments du

Opposition que rencontre la proclamation de la République. · Tout n'est pas fini. La Préfecture de police devient le centre des républicains. Elle insiste pour que la République soit proclamée. Le peuple se range à cet avis. Démarche du citoyen Raspail à cet effet. Actes du gouvernement provisoire. Aspect de Paris dans la journée du 25 février. peuple. Sollicitude pour les monuments publics. Actes divers. - Souscription pour les blessés.-Le gouvernement provisoire garantit le travail aux ouvriers. -La République n'a pas surpris les hommes de l'avenir.-Le gouvernement se décide à proclamer la République. Nouvelle fusion du gouvernement provisoire. Question du drapeau rouge.

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· Proclamation de la République française. Plaidoyer de M. Lamartine en faveur du drapeau tricolore. Grave erreur commise à l'égard du drapeau tricolore. - Organisation des ateliers nationaux et de la garde mobile. Glorieux décret pour l'abolition de la peine de mort. - Enthousiasme qu'il excite parmi les républicains. - Proclamation des communistes. — Fête pour la proclamation de la République française.

Le 25 février au matin, la population de Paris apprit, par les actes du gouvernement provisoire, affichés sur les murs de la capitale, qu'un Conseil provisoire était chargé d'administrer la France, sous l'impulsion du gouvernement créé la veille, et que ce Conseil était composé de :

MM. Dupont (de l'Eure), président du Conseil, sans portefeuille;

Lamartine, ministre des affaires étrangères;
Crémieux, ministre de la justice;

Ledru-Rollin, ministre de l'intérieur;

Michel Goudchaux, ministre des finances;

François Arago, ministre de la marine;
Le général Bedeau, ministre de la guerre;
Carnot, ministre de l'instruction publique et des cultes;
Bethmont, ministre du commerce;

Marie, ministre des travaux publics.

Les mêmes actes officiels annonçaient encore la nomination du général Cavaignac au gouvernement de l'Algérie;

La transformation de la Préfecture de la Seine en mairie de Paris, ayant pour maire le député Garnier-Pagès, et pour adjoints les citoyens Guinard et Recurt. Les autres mairies étaient conservées, ainsi que les maires d'arrondissement, sous le titre

de maires-adjoints.

Le colonel Courtais, ancien député, était nommé commandant général de la garde nationale parisienne et des troupes appartenant à la 1re division militaire.

La préfecture de police devait être placée sous la dépendance du maire de Paris, et constituée sous un autre titre. Enfin, la garde municipale était dissoute.

Le peuple, qui n'approfondit guère les choses qu'on lui présente sous un aspect patriotique, était trop habitué aux formes monarchiques pour concevoir tout à coup une organisation, même temporaire, en dehors des sentiers battus par les royautés il se montra donc généralement satisfait des dispositions et des choix faits par le gouvernement provisoire. C'était assez pour lui de voir tomber les municipaux et abaisser la police, objets de sa haine, pour applaudir à tout ce que lui présentait la même main réparatrice.

:

Mais les démocrates, ceux surtout qui professaient, dans toute leur rigueur, les principes républicains proclamés par nos pères, furent péniblement affectés en voyant se perpétuer ces titres fastueux inhérents aux monarchies: ils auraient voulu que le gouvernement provisoire substituât à la qualification de ministres, surtout pour des fonctions destinées à recevoir la sanction populaire, des dénominations qui ne rappelassent plus un passé exécré.

Ils se montrèrent aussi très-étonnés de voir cumuler dans les mains des membres du gouvernement les fonctions de ministres et autres importantes, que ces membres semblaient

accaparer au détriment de tant d'autres bons citoyens non moins capables de les remplir. Les démocrates pensaient, non sans raison, qu'un gouvernement nouveau, en opposition tranchée avec celui qui tombait, ne pouvait être fondé que par des hommes nouveaux, que par ceux qui n'avaient cessé de combattre la royauté et le système monarchique.

Au lieu de ces hommes nouveaux, que voyaient-ils ?

Ils voyaient, au sommet de l'ordre de choses que l'on édifiait d'anciens députés, dont l'opposition à la monarchie n'avait jamais laissé apercevoir des instincts républicains. Les démocrates se demandaient donc si c'était avec de pareils hommes qu'on prétendait fonder une République. Et, parcourant la liste de ces nominations, parmi lesquelles ils ne voyaient guère, à l'exception d'un seul, que des noms qui auraient pu figurer aussi bien sur les listes de la monarchie constitutionnelle, ils se communiquaient entre eux leurs tristes pressentiments, convaincus que les premières fautes commises par la révolution pouvaient léguer bien des mauvais jours à la France.

Comme le peuple tout entier, les chefs démocrates auraient voulu que la République fût proclamée sur les barricades, encore fumantes du sang des martyrs de la liberté: ils ne pouvaient se rendre compte de l'opposition que le vœu du peuple avait rencontrée à l'Hôtel-de-Ville. Et même après la proclamation du gouvernement provisoire, ils ne voyaient qu'une chose de positive, c'était la mise en question de la forme de gouvernement inaugurée par les acclamations gé

nérales.

f

On sut alors que la franche proclamation de la République avait trouvé une vive opposition de la part de quelques membres du gouvernement provisoire ('), et que la majorité de ce

(") Chose étrange! les deux hommes sur lesquels le peuple comptait le plus, les deux hommes que l'on regardait comme de vieux républicains rectilignes, MM. Dupont (de l'Eure) et F. Arago, furent ceux qui se prononcèrent le plus fortement

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