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vernement provisoire, auquel on reprochait de perdre la République.

Il n'y avait de vrai, dans ces bruits répandus, que quelques paroles peu bienveillantes pour le gouvernement, que quelques vœux émis pour l'exciter à entrer dans les voies révolutionnaires, tant à l'égard de l'intérieur que du dehors. Le club de Blanqui, que les rapports de la police montraient comme un foyer de conspirateurs, n'était pas plus hostile au gouvernement provisoire que bien d'autres sociétés révolutionnaires. Comme dans toutes ces réunions patriotiques, tout s'y faisait au grand jour et s'y disait à haute voix : le défaut de ces tribuns consistait dans un excès de franchise. Ce club n'avait donc pas conspiré le renversement du gouvernement provisoire; et l'aurait-il fait, qu'il n'eût jamais été en son pouvoir d'opérer cette révolution; car il ne faut. pas oublier que. Blanqui n'avait qu'une influence très-circonscrite, et qu'en ce même moment bien des républicains, à tort ou à raison, influencés par les effets de la publication, dans la Revue rétrospective, d'une pièce qui était très-défavorable au prisonnier de Tours, nourrissaient alors contre lui des préventions qui allaient jusqu'à la suspicion, jusqu'à la méfiance..

Ainsi, l'on peut affirmer que les craintes manifestées ce jour-là par bien des membres du gouvernement provisoire, à l'égard des intentions du club Blanqui, furent chimériques.

A ce nom de Blanqui, si redouté par plusieurs des hauts fonctionnaires de la République, et principalement par le maire de Paris, on mêla, dans cette triste journée, le nom du chef des communistes-icariens, Cabet, que l'on transforma aussi, lui et ses inoffensifs adeptes, en conspirateurs voulant renverser le gouvernement de la République démocratique, pour faire ré, gner le communisme.

Ce fut là encore une de ces basses calomnies de la police ou de ceux qui, tenant les fils de toutes ces intrigues réactionnai

res, lui demandaient des rapports propres à alarmer les autres membres du gouvernement provisoire. Ces rapports à la main, on troublait ainsi le sommeil de ces membres timorés et toujours prêts à se considérer comme menacés, et on les amenait à adopter les moyens combinés pour perdre les plus fermes soutiens de la Révolution.

La maison Sobrier ne pouvait être oubliée dans ces rapports; car là se trouvaient aussi des révolutionnaires ardents, qui surveillaient les tièdes et ne perdaient pas de vue la mairie et son chef. Déjà on avait ameuté les réactionnaires et les républicains modérés contre les bureaux du journal la Commune de Paris, et tous ces honnêtes gens ne parlaient de rien moins que de faire sauter cette redoutable maison ('), où l'on s'occupait sans répit des moyens propres à conserver au peuple sa conquête de Février.

Certes, il y avait dans le cercle Sobrier bien des républicains ayant l'expérience des révolutions, qui auraient voulu que le gouvernement provisoire prît l'initiative d'une propagande active des principes démocratiques; qu'il fit même une dernière guerre pour asseoir la liberté en Europe. Beaucoup parmi ces hommes, aussi dévoués qu'inflexibles à l'égard de ces principes, pouvaient déplorer l'aveuglement de l'Hôtelde-Ville; mais tous, par l'organe de Sobrier lui-même, avaient promis de soutenir le gouvernement provisoire jusqu'à la réunion de l'Assemblée nationale, et leur conduite dans cette même journée, comme dans celle du 17 mars, prouva qu'ils savaient tenir leur parole (*).

(') Le procès de Bourges nous a révélé un fait curieux : c'est qu'au moment où tous les citoyens qui allaient dans la maison Sobrier prenaient les armes, chargeaient leurs fusils et attendaient qu'on leur indiquât où il fallait marcher pour soutenir le gouvernement provisoire de la République, d'honnétes ouvriers du faubourg Saint-Antoine se présentèrent chez le général Courtais pour lui offrir de faire sauter cette maison, sur laquelle les réactionnaires avaient concentré toute leur animadversion!

() Nous avons déjà fait connaître les paroles que Sobrier prononça à l'Hôtel-de

Mais ce ne fut pas sans protester journellement contre la funeste tendance qui, en mettant en suspicion près du gouvernement tous les républicains énergiques et dévoués à la cause de la liberté, permettait aux réactionnaires de s'emparer des abords du pouvoir. On craignait, avec quelque raison, que la modération du gouvernement ne fût considérée comme une preuve de sa faiblesse, et que la réaction, dont l'audac était déjà bien grande, ne poussât l'impudence jusqu'à lever le

masque.

Dans cette prévision, les citoyens les plus influents parmi ceux qui allaient chez Sobrier, avaient mis en délibération un plan de conduite avouable. Il s'agissait, non pas, comme on l'a dit dans la fameuse enquête dont nous aurons à parler plus loin et dans le grand procès de Bourges, de renverser le gouvernement provisoire, en le remplaçant par un Comité de salut public, ce qui eût pu être considéré comme une révolution nouvelle, mais bien d'aller le renforcer dans le sens de la révolution, au cas où les réactionnaires parviendraient à dominer et à annihiler ce gouvernement issu des barricades. C'était là un droit que le peuple avait jusqu'à la réunion de l'Assemblée nationale, un droit qu'il pouvait et devait exercer, si la République eût été en péril; c'était un devoir que les vrais républicains auraient accompli le jour où les progrès de la contre-révolution eussent pu faire craindre que la réaction ne voulût donner à la France les suites de thermidor avant le règne d'un gouvernement révolutionnaire.

Mais du projet à l'exécution, il restait, au 16 avril, toute la distance de la gestation à la maturité du fruit.

Nous répétons donc que, ce jour-là, les craintes suggérées au gouvernement provisoire par les rapports des diverses

Ville le 17 mars. Nous ajouterons ici que dans la journée du 16 avril on prit les armes dans la rue de Rivoli pour aller s'opposer à toute tentative qui aurait eu pour but de dissoudre ou d'attaquer le gouvernement provisoire.

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