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et vous faire parvenir l'une et l'autre, si j'avois le moindre espoir de succès. Mais ne l'ayant pas trouvée l'année suivante, étant encore sur les lieux, quelle apparence qu'au bout de plusieurs années, où tous les renseignemens qui me restoient encore se sont effacés, je puisse retrouver la trace de cette petite et fugace plante? Elle n'est point ici au Jardin du Roi, ni, que je sache, en aucun autre jardin, et très-peu de gens même la connoissent. A l'égard du carthamus lanatus, j'en joindrai de la graine aux échantillons d'herbiers que j'espère vous envoyer à la fin de l'hiver.

J'apprends, madame la duchesse, avec une bien douce joie, le parfait rétablissement de mon ancien et bon voisin M. Granville. Je suis très-touché de la peine que vous avez prise de m'en instruire, et vous avez par là redoublé le prix d'une si bonne nouvelle.

Je vous supplie, madame la duchesse, d'agréer, avec mon respect, mes vifs et vrais remercimens de toutes vos bontés.

LETTRE XIV.

A Paris, le 22 octobre 1773.

J'ai reçu, dans son temps, la lettre dont m’a honoré madame la duchesse, le 7 octobre; quant à celle dont il y est fait mention, écrite quinze jours aupa

ravant, je ne l'ai point reçue: la quantité de sottes lettres qui me venoient de toutes parts par la poste me force à rebuter toutes celles dont l'écriture ne m'est pas connue, et il se peut qu'en mon absence la lettre de madame la duchesse n'ait pas été distinguée des autres. J'irois la réclamer à la poste, si l'expérience ne m'avoit appris que mes lettres disparoissoient aussitôt qu'elles sont rendues, et qu'il ne m'est plus possible de les ravoir. C'est ainsi que j'en ai perdu une de M. de Linnæus que je n'ai jamais pu ravoir, après avoir appris qu'elle étoit de lui, quoique j'aie employé pour cela le crédit d'une personne qui en a beaucoup dans les postes.

Le témoignage du souvenir de M. Granville, que madame la duchesse a eu la bonté de me transmettre, m'a fait un plaisir auquel rien n'eût manqué, si j'eusse appris en même temps que sa santé étoit meilleure.

M. de Saint-Paul doit avoir fait passer à madame la duchesse deux échantillons d'herbiers portatifs qui me paroissoient plus commodes et presque aussi utiles que les grands. Si j'avois le bonheur que l'un ou l'autre, ou tous les deux, fussent du goût de madame la duchesse, je me ferois un vrai plaisir de les continuer, et cela me conserveroit pour la botanique un reste de goût presque éteint, et que je regrette. J'attends là-dessus les ordres de madame la duchesse, et je la supplie d'agréer mon respect.

LETTRE XV.

A Paris, le 11 juillet 1776.

Le témoignage de souvenir et de bonté dont m’honore madame la duchesse de Portland, est un cadeau bien précieux que je reçois avec autant de reconnoissance que de respect. Quant à l'autre cadeau qu'elle m'annonce, je la supplie de permettre que je ne l'accepte pas. Si la magnificence en est digne d'elle, elle n'est proportionnée ni à ma situation ni à mes besoins. Je me suis défait de tous mes livres de botanique, j'en ai quitté l'agréable amusement, devenu trop fatigant pour mon âge. Je n'ai pas un pouce de terre pour y mettre du persil ou des œillets, à plus forte raison des plantes d'Afrique ; et, dans ma plus grande passion pour la botanique, content du foin que je trouvois sous mes pas, je n'eus jamais de goût pour les plantes étrangères qu'on ne trouve parmi nous qu'en exil et dénaturées dans les jardins des curieux. Celles que veut bien m'envoyer madame la duchesse seroient donc perdues entre mes mains; il en seroit de même et par la même raison de l'herbarium amboinense, et cette perte seroit regrettable à proportion du prix de ce livre et de l'envoi. Voilà la raison qui m'empêche d'accepter ce superbe cadeau ; si toutefois ce n'est pas l'accepter que d'en

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garder le souvenir et la reconnoissance, en désirant qu'il soit employé plus utilement.

Je supplie très-humblement madame la duchesse d'agréer mon profond respect.

On vient de m'envoyer la caisse ; et, quoique j'eusse extrêmement désiré d'en retirer la lettre de madame la duchesse, il m'a paru plus convenable, puisque j'avois à la rendre, de la renvoyer sans l'ouvrir.

LETTRE

A M. DU PEYROU.

10 octobre 1764.

TRAITE historique des plantes qui croissent dans la Lorraine et les Trois-Évêchés, par M. P. J. Buc'hoz, avocat au parlement de Metz, docteur en médecine, etc.

Cet ouvrage, dont deux volumes ont déjà paru, en aura vingt in-8°, avec des planches gravées.

J'en étois ici, monsieur, quand j'ai reçu votre docte lettre; je suis charmé de vos progrès. Je vous exhorte à continuer; vous serez notre maître, et vous aurez tout l'honneur de notre futur savoir. Je vous conseille pourtant de consulter M. Marais sur les noms des plantes, plus que sur leur étymologie; car asphodelos, et non pas asphodeilos, n'a pour racine aucun mot qui signifie ni mort ni herbe, mais tout au plus un verbe qui signifie je tue, parce que les pétales de l'asphodèle ont quelque ressemblance à des fers de pique. Au reste, j'ai connu des asphodèles qui avoient de longues tiges et des feuilles semblables à celles des lis. Peut-être fallut-il dire correctement du genre des asphodèles. La plante aquatique est bien nénuphar, autrement nymphæa, comme je disois. Il faut redresser ma faute sur le

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