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DE L'EUCHARISTIE.

692. L'eucharistie est ainsi appelée, action de grâces, parce què Jésus-Christ, en l'instituant, rendit grâces à son Père, et qu'en offrant le corps et le sang de Notre-Seigneur nous rendons à Dieu de dignes actions de grâces pour les bienfaits dont il nous a comblés. On l'appelle encore la cène du Seigneur, parce que le Seigneur l'a instituée en célébrant la cène avec ses disciples; communion, parce qu'elle unit les fidèles à Jésus-Christ d'une manière toute particulière, et qu'elle les unit entre eux comme mémbres d'un seul corps, dont Jésus-Christ est le chef; saint sacrement, saints mystères, parce que c'est le plus saint, le plus auguste des sacrements; viatique, parce qu'elle est la nourriture spirituelle des fidèles pendant le pèlerinage de cette vie ; synaxe ou assemblée, parce que les chrétiens s'assemblent pour la célébration de l'eucharistie; eulogie ou bénédiction, parce que la bénédiction accompagne la consécration du pain et du vin; oblation ou sacrifice, parce que, dans l'eucharistie, on offre d'une manière non sanglante Jésus-Christ, qui s'est offert sur la croix pour la rédemption du genre humain ; enfin, sacrement de l'autel, parce que le mystère de l'eucharistie, étant tout à la fois sacrement et sacrifice, s'opère sur nos autels. Ce traité se divise naturellement en deux parties : dans la première nous parlerons de l'eucharistie comme sacrement; dans la seconde, de l'eucharistie comme sacrifice.

DE L'EUCHARISTIE COMME SACREMENT.

CHAPITRE PREMIER.

De la notion et de l'institution du sacrement de l'eucharistie.

693. Conformément au dogme catholique, on définit le sacrement de l'eucharistie: « un sacrement de la nouvelle loi, qui « contient véritablement, réellement et substantiellement, sous les espèces du pain et du vin, le corps, le sang, l'âme et la di« vinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui l'a institué lui-même « pour en faire la nourriture de nos âmes. »>

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694. Ici se présentent sept questions: la première, si l'eucharistie est un vrai sacrement; la seconde, si Jésus-Christ a institué lui-même ce sacrement; la troisième, si le corps et le sang de Jésus-Christ sont réellement présents dans le sacrement de l'eucharistie; la quatrième, s'ils y sont présents par transsubstantiation; la cinquième, si Jésus-Christ est tout entier présent sous chaque espèce et sous chaque partie de l'une et l'autre espèce; la sixième, s'il y est présent d'une manière permanente; la septième, s'il doit être adoré dans l'eucharistie.

ARTICLE I.

L'eucharistie est-elle un vrai sacrement?

695. Il est de foi que l'eucharistie est un vrai sacrement de la loi évangélique. Le concile de Trente est exprès (1). Telle est d'ailleurs la croyance de toutes les Églises d'Orient et d'Occident. Les novateurs du seizième siècle eux-mêmes sont d'accord avec nous sur ce point. En effet, l'eucharistie réunit toutes les conditions requises pour un sacrement proprement dit. C'est un signe sen

(1) Sess. vil, des Sacrements en général, can. 1. — Voyez, ci-dessus, le

n° 578.

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sible; car les espèces du pain et du vin conservent leur forme extérieure, même après que la substance de ces deux éléments a été changée au corps et au sang de Jésus-Christ. Ce signe figure trois choses. La première est la passion du Sauveur : « Toutes les fois « que vous mangerez ce pain et que vous boirez ce calice, vous << annoncerez la mort du Seigneur (1). La seconde est la grâce de Dieu qui nous est donnée par ce sacrement : « Ma chair, dit Notre-Seigneur, est véritablement une nourriture, et mon sang << est véritablement un breuvage. Celui qui mange ma chair et boit « mon sang demeure en moi, et moi en lui (2). » La troisième est la vie éternelle, que le Sauveur nous a promise : « Si quelqu'un « mange de ce pain, il vivra éternellement (3). » On voit que le signe eucharistique est un signe qui a la vertu de produire la grâce; mais il n'a cette vertu que par l'institution de Jésus-Christ. C'est lui-même qui a institué l'eucharistie, comme nous le verrons dans l'article suivant. L'eucharistie est donc un vrai sacrement.

ARTICLE II.

Jésus-Christ a-t-il institué le sacrement de l'eucharistie?

696. Il est de foi que Jésus-Christ a institué le sacrement de l'eucharistie (4) ce sacrement ne pouvait être institué que par lui, puisqu'il contient son corps et son sang, sous les espèces du pain et du vin. Aussi nous lisons dans l'Evangile que l'heure étant arrivée de passer de ce monde à son Père, et voulant rester avec les siens jusqu'à la fin des siècles, il institua le sacrement de l'eucharistie pour nous témoigner l'excès de son amour, pour continuer dans l'Église le sacrifice qu'il devait offrir sur la croix, et nous en appliquer le prix, principalement en se donnant à nous par la sainte communion. Il l'institua la veille de sa passion: célébrant la Pâque avec ses apôtres, « il prit du pain, le bénit en ren« dant grâces à Dieu son Père, le rompit, et le donna à ses disciples, « en disant : Prenez et mangez; ceci est mon corps: hoc est corpus meum. Ensuite, prenant la coupe, il rendit grâces, et la leur donna, en disant: Buvez tous de ceci; car ceci est mon sang de « la nouvelle alliance, qui sera versé pour plusieurs en rémission « des péchés: Hic est enim sanguis meus Novi Testamenti, qui

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(1) Ir épître aux Corinthiens, c. xi, v. 26. —(2) Saint Jean, c. vi, v. 56 et 57. — (3) Ibidem, v. 59. — (4) Voyez, ci-dessus, le no 578.

▪ pro multis effundetur in remissionem peccatorum (1). Faites • cela en mémoire de moi (2). » Ces paroles, qu'on appelle les paroles de l'institution, s'adressent et aux apôtres et aux évêques leurs successeurs, et aux simples prêtres qui participent au sacerdoce de Jésus-Christ.

ARTICLE III.

Le corps et le sang de Jésus-Christ sont-ils réellement présents dans le sacrement de l'eucharistie?

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697. Il est de foi que le sacrement de l'eucharistie contient véritablement, réellement et substantiellement le corps, le sang, l'âme et la divinité de Notre-Seigneur, c'est-à-dire, Jésus-Christ tout entier. Voici le décret du concile de Trente : « Si quelqu'un nie que le sacrement de la très-sainte eucharistie contienne véritablement, réellement et substantiellement le corps et le sang « avec l'âme et la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et par « conséquent Jésus-Christ tout entier, disant qu'il y est seulement « comme en signe, en figure, ou en vertu; qu'il soit anathème (3). » On voit par ce décret, premièrement, que Jésus-Christ est véritablement présent dans l'eucharistie, vere; ce qui est dirigé contre tous ceux qui, à l'exemple de Zwingle et de Calvin, prétendent qu'il n'y est qu'en signe ou en figure; secondement, qu'il y est réellement présent, realiter; ce qui est contre les mêmes hérétiques, qui, pour tromper les simples, répètent que le corps de Jésus-Christ est présent dans l'eucharistie, mais qu'il n'y est présent que par la foi, et non en réalité; troisièmement, qu'il y est présent substantiellement, substantialiter. Le concile a voulu atteindre Calvin, qui, pour paraître tenir un langage catholique, disait que le corps de Jésus-Christ est présent dans l'eucharistie, par la vertu qui en émane dans notre âme, tout en enseignant qu'il n'était que dans les cieux quant à la substance. L'anathème du concile de Trente tombe directement sur les sacramentaires, c'est-à-dire, sur les zwingliens, les calvinistes, et sur ceux des anglicans et luthériens qui ne regardent l'eucharistie que comme un

(1) Saint Matthieu, c. xxvi, v. 26, etc. (2) Saint Luc, c. xxII, v. 19. (3) Si quis negaverit, in sanctissimæ eucharistiæ sacramento contineri vere, realiter et substantialiter corpus et sanguinem una cum anima et divinitate Domini nostri Jesu Christi, ac proinde totum Christum; sed dixerit tantummodo esse in eo, ut in signo, vel figura, aut virtute; anathema sit. Sess. xIII, can 1.

simple sacrement, et nient la présence réelle, renouvelant l'erreur de Bérenger, mort en 1088. Quant à Luther, il admettait la présence réelle, mais il rejetait la transsubstantiation.

698. Quoique les décisions de l'Église suffisent bien certainement pour fixer la foi du vrai chrétien, cependant, pour confondre l'hérésie, nous établirons le dogme de la présence réelle par l'Écriture sainte, par l'enseignement des Pères, des papes et des conciles des premiers siècles, et par la croyance générale et constante de l'Église universelle.

SI. La présence réelle se prouve par l'Écriture sainte.

699. Les livres saints nous offrent trois preuves de la présence réelle la première se tire des paroles qui expriment la promesse de Jésus-Christ; la seconde, des paroles de l'institution de l'eucharistie; et la troisième, des paroles de saint Paul concernant la communion.

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PREMIÈRE PREUVE,

Tirée des paroles de la promesse de Jésus-Christ.

700. Après avoir parlé de sa mission et de la nécessité de la foi à sa divinité, Jésus annonce aux Juifs le grand mystère qu'il devait opérer un jour; et s'exprime en ces termes : « Je suis le pain vivant; quiconque mangera de ce pain vivra éternellement ; et « ce pain que je donnerai moi-même, c'est ma chair qui sera li« vrée pour la vie du monde (1). » A ces paroles, les Juifs étonnés s'écrièrent : « Comment peut-il, celui-là, nous donner sa chair à «< manger (2)? » Ils croyaient donc qu'il s'agissait d'une manducation réelle de la chair de Jésus-Christ. La promesse d'une manducation figurée, purement symbolique, n'eût fait aucune impression sur eux. Or, au lieu de les calmer en disant qu'il ne parlait que de la foi ou de la figure de son corps, Jésus confirma ses premières paroles, et le sens qu'on leur donnait, par des paroles plus fortes encore. Écoutons-le: « En vérité, en vérité, je vous le dis: « Si vous ne mangez la chair du Fils de l'homme, et si vous ne bu

(1) Ego sum panis vivus, qui de cœlo descendi. Si quis manducaverit ex hoc parte, vivet in æternum; et panis quem ego dabo, caro mea est pro mundi vita. Saint Jean, c. vi, v. 51 et 52.—(2) Litigabant ergo Judæi ad invicem, dicentes: Quomodo potest hic nobis carnem suam dare ad manducandum? Ibidem, v. 53.

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