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TRAITE

DU SACREMENT DE L'ORDRE.

CHAPITRE PREMIER.

De la hiérarchie et de l'institution du sacrement de l'ordre.

ARTICLE I.

De la hiérarchie.

956. Il existe dans la loi nouvelle, d'après l'institution de JésusChrist, un sacerdoce visible, un corps de ministres spécialement chargé de tout ce qui regarde le culte divin, un état particulier essentiellement distinct de l'état des laïques ou du commun des fidèles, une hiérarchie comprenant différents ordres, qui ont tous plus ou moins de rapport avec le sacerdoce. Il est de foi que. « dans le Nouveau Testament, il y a un sacerdoce extérieur et visible, un pouvoir de consacrer et d'offrir le vrai corps et le vrai asang de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de remettre et de retenir « les péchés. » Il est de foi que, « outre le sacerdoce, il y a dans « l'Église catholique d'autres ordres majeurs et mineurs, par lesquels, comme par certains degrés, on monte au sacerdoce. » Il est de foi « qu'il y a, dans l'Église catholique, une hiérarchie d'insti« tution divine, qui se compose d'évêques, de prêtres et de minis<< tres (1). » Cette doctrine n'est point nouvelle : indépendamment

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(1) Si quis dixerit, non esse in Novo Testamento sacerdotium visibile et externum; vel non esse potestatem aliquam consecrandi et offerendi corpus et sanguinem Domini, et peccata remittendi et retinendi; sed officium tantum et nudum ministerium prædicandi Evangelium; vel eos, qui non prædicant, prorsus non esse sacerdotes; anathema sit. Concile de Trente, sess. xxii, can. 1. Si quis dixerit, præter sacerdotium non esse in Ecclesia catholica alios ordines, et majores et minores, per quos, velut per gradus quosdam, in sacerdo.

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de ce que nous avons dit du ministre des sacrements du baptême, de la confirmation, de l'eucharistie, de la pénitence et de l'extrêmeOnction, nous lisons dans saint Paul : « Vous êtes le corps de JésusChrist, et membres dépendants les uns des autres. Ainsi, Dieu a établi dans son Église d'abord quelques apôtres, puis des prophètes, et en troisième lieu des docteurs.... Est-ce que tous sont « apôtres? Est-ce que tous sont prophètes? Est-ce que tous sont « docteurs (1)? Jésus-Christ a donné lui-même (à son Église) quel« ques-uns pour être apôtres, quelques-uns pour être prophètes, « d'autres pour être évangélistes, d'autres pour être pasteurs et « docteurs, pour la perfection des saints par l'œuvre du ministère << et l'édification du corps de Jésus-Christ (2). » D'ailleurs, les livres saints font mention des évêques, des prêtres et des diacres. Aussi, depuis le pape saint Clément et saint Ignace, martyr, jusqu'à saint Bernard, jusqu'au seizième siècle, les Pères, les docteurs et les conciles de l'Église latine et de l'Église grecque, de l'Orient et de l'Occident, ont constamment reconnu cette hiérarchie comme un dogme catholique, comme une institution de Notre-Seigneur JésusChrist.

ARTICLE II.

De la notion de l'ordre

957. On entend ici, par ordre, le rang, le grade qu'on occupe dans la hiérarchie ecclésiastique; et, par ordination, le rit par lequel on reçoit un ordre, avec un certain pouvoir plus ou moins étendu d'exercer les fonctions qui ont rapport au culte divin.

On distingue sept ordres : le sacerdoce, qui comprend la prêtrise et l'épiscopat, qui en est la plénitude; le diaconat, le sousdiaconat, et les ordres d'acolyte, d'exorciste, de lecteur et de portier. « Comme la fonction d'un sacerdoce si saint est une chose toute divine, afin qu'elle pût être exercée avec plus de dignité << et de respect, il était convenable qu'il y eût, dans l'Église, plu

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tium tendatur; anathema sit. Ibidem, can. 11. Si quis dixerit, in Ecclesia catholica non esse hierarchiam divina ordinatione institutam, quæ constat ex episcopis, presbyteris, et ministris; anathema sit. Ibidem, can. vi. - (1) Et quosdam quidem posuit Deus in Ecclesia primum apostolos, secundo prophetas, tertio doctores... Numquid omnes apostoli ? Numquid omnes doctores? I* épít. aux Corinthiens, c. x11, v. 28, etc. - (2) Et ipse dedit quosdam quidem apostolos, quosdam autem prophetas, alios vero evangelistas, alios autem pastores et doctores. Épitre aux Éphésiens, c. iv, v. 11.

"sieurs et divers ordres de ministres, chargés d'office de ce qui «tient au sacerdoce; de sorte que ceux qui ont reçu d'abord la « tonsure cléricale arrivassent ensuite aux ordres majeurs, en ⚫ passant par les ordres mineurs. Car les saintes Lettres ne font « pas seulement mention des prêtres; elles parlent aussi trèsclairement des diacres, et indiquent positivement les choses auxquelles on doit faire attention dans leur ordination. Et l'on • voit que, dès le commencement de l'Église, les noms des ordres « suivants étaient en usage, ainsi que les fonctions propres à chacun d'eux, c'est-à-dire de l'ordre de sous-diacre, d'acolyte, - d'exorciste, de lecteur et de portier, quoiqu'en degré différent; « car le sous-diaconat est mis au rang des ordres majeurs par les « Pères et par les saints conciles, dans lesquels il est aussi très« fréquemment parlé des autres ordres inférieurs (1). » Le sacerdoce, le diaconat et le sous-diaconat sont appelés ordres majeurs, sacrés; et les ordres d'acolyte, d'exorciste, de lecteur et de portier sont appelés ordres mineurs, moindres, parce qu'ils sont inférieurs aux ordres sacrés. Quant à la tonsure, elle n'est point un ordre proprement dit, mais une préparation aux ordres; Præambulum ad ordinem, dit saint Thomas.

ARTICLE III.

L'ordre est-il un sacrement?

958. Il est de foi que l'ordre ou l'ordination sacrée est un vrai sacrement de la loi nouvelle. Anathème à celui qui dira « que « l'ordre ou l'ordination sacrée n'est point vraiment et proprement « un sacrement institué par Notre-Seigneur Jésus-Christ; ou que « c'est une invention humaine, imaginée par des gens ignorants des choses ecclésiastiques; ou que ce n'est qu'une certaine ma« nière de choisir les ministres de la parole de Dieu et des sacre«ments. » Ainsi s'exprime le concile de Trente (2), qui se fonde sur le témoignage de l'Ecriture, la tradition des apôtres, et le consentement unanime des Pères (3).

(1) Concile de Trente, sess. xxi, ch. 1. — (2) Si quis dixerit, ordinem, sive sacram ordinationem, non esse vere et proprie sacramentum, a Christo Domino institutum, vel esse figmentum quoddam humanum, excogitatum a viris rerum ecclesiasticarum imperitis; aut esse tantum ritum quemdam eligendi ministros verbi Dei et sacramentorum; anathema sit. Ibidem, can. n. — (3) Ibidem, ch. III.

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959. En effet, voici ce que dit l'Apôtre, écrivant à Timothée : << Ne négligez point la grâce qui est en vous, qui vous a été donnée, suivant une révélation prophétique, par l'imposition des mains des prêtres (1). Je vous exhorte à ranimer la grâce que ⚫ vous avez reçue par l'imposition de mes mains (2). » Nous lisons aussi dans les Actes que les apôtres ordonnèrent les sept diacres par la prière et l'imposition des mains : « Ils les amenèrent en présence des apôtres, qui leur imposèrent les mains en priant: Et orantes imposuerunt eis manus (3). » Dans le même livre, il est dit que Paul et Barnabé établirent des prétres en chaque Église (4). Au lieu du verbe constituere, le texte grec se sert du verbe qui exprime l'imposition des mains. Suivant l'apôtre saint Paul, « c'est Jésus-Christ lui-même qui a donné (ou a fait) les « uns apôtres, les autres prophètes, d'autres évangélistes, d'au« tres pasteurs et docteurs (5). » Or, d'après ces différents textes, on trouve dans l'ordination tous les caractères d'un vrai sacrement; savoir: un rit extérieur et symbolique, qui consiste dans l'imposition des mains; la vertu de conférer la grâce, et l'institution divine. Dieu seul peut attacher la grâce à un signe extérieur ou matériel. Aussi, les saints Pères ont-ils toujours regardé l'ordination comme un sacrement proprement dit.

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960. Nous pourrions citer saint Ignace, évêque d'Antioche et martyr (6), Tertullien (7), saint Grégoire de Nysse (8), saint Chrysostome (9), saint Jérôme (10), saint Léon (11), les Pères du concile général de Chalcédoine de l'an 451, le pape Anastase II (12), saint Grégoire le Grand (13), et autres docteurs grecs et latins. Qu'il nous suffise de rapporter ce que dit saint Augustin. Voici ses paroles : « Que les donatistes nous expliquent « pourquoi le caractère du baptême est ineffaçable, tandis que d'après eux, celui de l'ordre ne l'est pas... Si ce sont deux sacre«ments, comme personne n'en doute, pourquoi l'un se conserve«rait-il, tandis que l'autre se perdrait (14)? Évidemment, ce

(1) Noli negligere gratiam quæ in te est, quæ data est tibi per prophetiam cum impositione manuum presbyterii. 1o épître à Timothée.—(2) Admoneo te, ut resuscites gratiam Dei, quæ est in te per impositionem manuum mearum. Tre épître à Timothée, c. 1, v. 6. — (3) Actes des apôtres, c. vi, v. 6. (4) Et cum constituissent illis per singulas ecclesias presbyteros. Ibidem, c. xiv, v. 22. — (5) Épître aux Éphiésiens, c. IV, v. 11. — (6) Lettre aux fidèles de Smyrne. (7) Des Prescriptions, c. XL. (8) Discours sur le baptême de Jésus-Christ. (9) Liv. m, du Sacerdoce, c. iv. (10) Dialogue contre les lucifériens. (11) Lettre xi, alias LXXXI. (12) Lettre à l'empereur Anastase. — (13) Liv. Iv, sur le premier livre des Rois, c. v. - (14) Si nos male facimus, ipsi explicent,

grand docteur regardait l'ordre comme un sacrement; il en parle comme du baptême, comme d'un dogme reçu dans l'Église au commencement du cinquième siècle.

961. Enfin, à toutes ces autorités on peut ajouter la croyance, la pratique générale et non interrompue de toutes les Eglises, de l'Église latine et de l'Église grecque, des Églises d'Orient et de celles d'Occident. Dans toutes les parties du monde chrétien et dans tous les temps, ainsi que nous l'avons vu en parlant des sacrements en général, on a mis l'ordre, l'imposition des mains, au nombre des sacrements institués par Notre-Seigneur JésusChrist.

ARTICLE IV.

Quels sont les ordres qui ont le caractère de sacrement?

962. Il est hors de doute, dans l'Église, que le sacerdoce est un sacrement; c'est un dogme qui n'est contesté par aucun catholique. Le concile de Trente frappe d'anathème quiconque dira que par l'ordination de la prêtrise il ne s'imprime point de caractère, ou que celui qui a été une fois prétre peut de nouveau devenir laïque (1). L'ordination, qui imprime un caractère sacramentel, est évidemment un sacrement.

963. Mais l'épiscopat est-il un sacrement? Imprime-t-il un caractère distinct du caractère du simple prêtre? Quoique tous les docteurs s'accordent à reconnaître que l'évêque est supérieur au prêtre, ils ne s'accordent pas à regarder l'épiscopat comme un sacrement proprement dit. Plusieurs théologiens pensent que l'épiscopat n'est pas un sacrement qui diffère du sacerdoce; qu'il n'imprime pas un nouveau caractère, mais qu'il confère seulement une puissance plus étendue, un plus grand pouvoir sur les choses saintes; ce n'est, suivant eux, qu'une extension, que la plénitude, le complément, le faite du sacerdoce. Mais il est plus communément reçu que l'ordination des évêques est un sacrement distinct de la prêtrise. En effet, cette ordination nous offre tout ce qui constitue un vrai sacrement. On y trouve le rit exté

quomodo sacramentum baptizati non possit amitti, et sacramentum ordinatı possit amitti.... Si enim utrumque sacramentum est, quod nemo dubitat; cur illud non amittitur, et illud amittitur? Liv. 11, contre la lettre de Parménien, c. xın. —(1) Si quis dixerit, per sacram ordinationem.... non imprimi charac terem ; vel eum qui sacerdos semel fuit laicum rursus fieri posse; anathema sit. Sess. xxii, can. IV.

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