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corps dans sa station naturelle, c'est-à-dire la pointe en haut; ceci est une convention, et nous allons rentrer dans la fameuse discussion des petits boutiens et des gros boutiens.

Corolle en phytographie signifie l'ensemble d'une fleur et ne désigne aucune forme particulière; cela est si vrai que, pour prendre une valeur botanique, ce substantif a besoin d'être accompagné d'un déterminatif, comme rosacée, caryophyllée, crucifère, labiée, campanulée. La corolle n'est donc pas une forme, et la campanule, F. 3, est une corolle.

Quant aux vases canopiens et phocéens, leur dénomination est non moins arbitraire. Privé de sa tête d'Isis ou d'Anubis, le premier n'est plus reconnaissable; le second n'a pas été plus particulier à la Phocée qu'à l'Inde, à la Germanie ou à la Scandinavie.

Il est donc à craindre que, malgré son désir, les vingt-quatre figures de l'éminent céramiste de Voisinlieu ne deviennent pas d'un emploi aussi usuel que les lettres de l'alphabet.

En terminant l'étude sur la nomenclature, M. Ziegler annonce avoir soumis son plan à l'illuste Alexandre Brongniart qui y portait le plus vif intérêt. Ceci est vraisemblable; l'auteur du Traité des arts céramiques avait dû retrouver, dans le livre du peintre, beaucoup de noms déjà consacrés. En effet, sans prétendre à l'invention d'une méthode complète, M. Riocreux, en publiant, avec la collaboration nominale du directeur de Sèvres, le Catalogue du musée céramique, avait jeté de lumineuses idées sur la manière de décrire les vases. L'ingénieux conservateur avait imaginé une distinction radicale entre les vases basiques, c'est-à-dire ceux qui, comme l'œuf de Christophe Colomb, acquièrent la station par le retranchement d'une partie de la figure qu'ils affectent, et les vases basés, pourvus d'un cercle formant rebord ou pied. Pour le reste, sa nomenclature était empruntée aux sciences naturelles. Or, s'il peut paraître séduisant de se poser en législateur d'une science, il est bien préférable d'employer les doctrines de ses prédécesseurs, d'adopter un langage admis déjà, connu de tous, et de faire jaillir la lumière en groupant des faits épars pour en former un corps rationnel et logique.

On peut dire que la théorie des formes est née avec les sciences naturelles, dont la mission spéciale est de classer tous les êtres d'après leurs caractères physiques. Linné, Haüy, Jussieu, ont trouvé des épithètes lucides, concises, pour décrire les minéraux avec leurs prodigieuses cristallisations, les plantes dont les racines, les tiges, les fleurs et les fruits ont reçu de si admirables formes sous l'ébauchoir divin. Que chercher de plus? Pourquoi renoncer à des nomenclatures qui, depuis longtemps, ont passé du domaine scientifique dans le langage vulgaire?

On ne doit pas l'oublier, d'ailleurs, si les pousses d'une acanthe ont inspiré le chapiteau de Callimaque, les roses, les myrtes, les lis de l'Attique n'ont pas été sans influence sur les travaux des potiers grecs. N'est-ce pas toujours aux sources physiques que l'homme emprunte ses premières inspirations? Après avoir bu dans la calebasse ou le couroupita, le sauvage imite leurs formes dans ses premiers vases en terre : le rhyton, cette corne embellie, l'amande de l'Attique transformée en lecythus, les vases figuratifs des anciens Mexicains, prouvent que cette marche est universelle.

Seulement les produits de l'art céramique se doivent ranger en deux classes distinctes, suivant que leur forme est simple ou complexe. Dans la première classe, on doit comprendre les vases dont l'ensemble est une figure primitive à peine modifiée dans ses parties accessoires; dans la seconde, il faut réunir les ouvrages composés où des membres divers, ayant chacun un principe distinct, concourent à un tout monumental.

Il importe donc d'abord de fixer la nomenclature applicable aux formes simples ou partielles, afin de s'entendre sur la définition des ouvrages composés. Nos lecteurs trouveront figurée à la page 221 celle que nous proposons.

Ces onze formes, jointes à l'hémisphère, paraissent suffire à exprimer les diverses modifications des vases simples. En adoptant, d'ailleurs, avec les termes de cette nomenclature certains mots admis dans les sciences naturelles pour indiquer le renversement et la diminution, on peut rendre sans embarras des nuances d'aspect qui semblaient devoir réclamer exclusivement la souplesse des arts du dessin. Ainsi, le mot sub, signe d'infériorité, de diminution, ajouté à certains adjectifs, en détermine nettement le sens; subhémisphérique se dira d'une coupe extrê mement ouverte et très-basse; subcampanulé, d'un vase floriforme ayant un diamètre très-grand relativement à sa hauteur, etc. Le mot ob indique le renversement; placé devant les mêmes adjectifs, il leur donnera une signification inverse de l'ordinaire; obhémisphérique s'appliquera aux couvercles; obcampanulé signifiera la forme d'une campanule renversée, et pourra désigner la figure de certaines bouteilles orientales surmontées d'un col qui leur donne l'apparence d'une cloche pourvue de sa poignée.

Passons maintenant à quelques démonstrations pratiques de nature à prouver combien ce système est applicable à la description des vases connus. On le sait, les compositions simples annoncent les commencements ou le summum de l'art : les commencements, parce qu'au moment où son esprit conçoit l'idée du convenable et du beau, l'homme eu cherche l'inspiration dans les formes de la nature et les combinaisons

facilement saisissables; le summum, car, après avoir erré longtemps dans les recherches du fini, l'artiste véritablement savant retrouve le grandiose dans la subordination des détails à l'ensemble et dans l'heureuse simplification des lignes. Le naïf et le sublime sont donc les deux points où vient se fermer le cercle des efforts de l'esprit humain. Comment s'étonner dès lors si le vase grec et le pot du sauvage peuvent être définis par des expressions semblables?

Pour commencer, d'ailleurs, par des formes connues et acceptées avec leurs dénominations singulières, nous aborderons les principaux spécimens de la céramique orientale.

CORNET. Ce vase, l'un des plus simples, est un cylindre dont la partie supérieure présente un évasement convolvulacé. D'accord avec M. Ziegler, nous le classons parmi les tiges (vases cauliformes évasés); en effet, son idée première a été fournie par le palmier couronné de ses feuilles nouvelles, ou par la gerbe aux épis mûrs et pesants. Certaines colonnes égyptiennes pourvues de leurs chapiteaux sont une application gigantesque de la même idée rendue dans tous ses détails.

Le cornet, véritable composition céramique, ne saurait se confondre avec le tronc et le bambou, vases figuratifs d'un diamètre égal dans toute la hauteur, ornés de reliefs destinés à rendre l'imitation plus parfaite; ainsi, sur le bambou, les nœuds, les bourgeons et quelques feuilles naissantes révèlent l'intention formelle de l'artiste.

Tous les cornets ne sont pas exactement cylindriques; quelques-uns s'évasent légèrement par le pied, puis rentrent, par un quart de rond, jusqu'au filet circulaire qui leur sert de pied; d'autres présentent, vers leur milieu, un renflement brusque de nature à leur donner l'apparence d'une gerbe avec sa ligature.

Au surplus, en Orient, toute forme dessinée par des lignes simples se trouve sous les deux conditions solides dérivant du cylindre ou du cube; ainsi le cornet, le plus souvent formulé au tour, peut aussi se rencontrer avec quatre surfaces, c'est-à-dire carré de plan; il est fréquent dans cette forme parmi les vieux bronzes chinois.

Le pi-tong, ou porte-pinceau, est un cylindre peu élevé et voisin du bambou; parfois sa surface est parsemée d'ornements en relief percés à jour, ou de fleurs et de sujets gaufrés dans la pâte.

POTICHE. On nomme ainsi, dans la curiosité, un vase oriental à couvercle en dôme surmonté d'un bouton ou d'une figurine. C'est la forme canopienne de M. Ziegler. La potiche concourt avec les cornets à former des garnitures, c'est-à-dire un assemblage régulier de pièces en nombre

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impair, soit trois potiches et deux ou quatre cornets, ou bien cinq potiches et quatre vases cauliformes.

Les potiches de grande dimension sont ordinairement turbinées; leur partie supérieure (hanches) est arrondie et surbaissée près du collet formé d'un listel plus ou moins épais; le corps proprement dit est obconique presque en lignes droites et tronqué.

On trouve parmi les potiches toutes les variétés imaginables de galbe, de plan et de proportions relatives; parfois elles deviennent élancées au point de n'avoir plus de station possible sans une monture ou un support artificiel; dans d'autres cas, leur partie inférieure s'évase sensiblement par une courbe nouvelle en sens inverse de la supérieure. Il existe des potiches prismatiques, hexagonales, octogonales, ovales de plan, lobées, côtelées, anguleuses sur leur grand axe, etc. Chercher à les décrire toutes serait une vaine tentative. On peut, par la nomenclature, donner une idée générale des formes; mais les finesses du modelé, les inflexions délicates de la ligne échappent au langage pour passer dans le domaine de la graphique.

BOUTEILLE, OU LAGÈNE. De tous les produits céramiques orientaux, voilà certes le plus variable; il réalise toutes les modifications d'aspect que peut rêver l'imagination dans la donnée d'une panse cubique cylindrique ou sphéroïdale surmontée d'un tube ou col plus ou moins long. Nous avons choisi pour type des vases bulbiformes une charmante lagène chinoise de notre collection, rappelant la forme de l'oignon de scille surmonté de sa tige naissante; d'autres, à panse obturbinée, se rapprochent assez de la bulbe de jacinthe. Souvent le corps des lagènes est sphéroïdal, piriforme, obcampanulé, cylindrique, obhémisphérique, avec compressions latérales, etc. Le col, plus ou moins élevé, n'est pas toujours égal dans toute son étendue; il se rétrécit parfois au point de n'offrir plus qu'une ouverture capillaire comme celle du guttus des Romains, ou du qéniné, vase à aspersion des Arabes. Comme celui-ci, la lagène à goulot capillaire contient les eaux de senteur dont les Orientaux se plaisent à parfumer leurs hôtes. La surahé, vase dans lequel les Persans servent le vin délicieux de Schiraz, a la panse sphérique et le col droit; une autre bouteille persane assez fréquente est hémisphérique à la base, avec le corps conique allongé sans col, et se termine par un renflement assez peu commode pour verser. Quelques lagènes chinoises portent aussi une sphère supérieure surmontée d'un collet subconvolvulacé.

Le plus ordinairement, la bouteille orientale repose sur un filet ou anneau circulaire. Il en existe pourtant dont le pied est assez élevé et subconique.

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