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une autre carrière. Il donna avant la révolution quelques pièces de théâtre, et fut secrétaire du duc d'Uzès. Les idées philosophiques avoient séduit sa jeunesse, et le disposèrent favorablement pour la révolution. Il obtint alors des places, fut juge au tribunal de cassation, député au corps législatif en 1798, puis membre du tribunat, dont son esprit d'opposition le fit éliminer. Parmi ses pamphlets irréligieux, nous citerons une Epitre au Pape en 1790, Saint Roch et Saint Thomas, pièce de vers sur l'enterrement de mademoiselle Chameroy en 1803, la Bulle d'Alexandre VI, etc. Il travailla long-temps à la Décade philosophique, fondée en 1794 par Ginguené, et qui étoit entièrement dans le sens de l'école voltai rienne. Nommé professeur de littérature au collège de France et à l'Ecole polytechnique, il y étoit un apôtre très-ardent de l'impiété, et, jusqu'à ces derniers temps y tournoit en ridicule la religion et les prètres avec un zèle qui alloit jusqu'au fanatisme. Ceux qui ont suivi son cours savent avec quelle affectation maligne il recherchoit les occasions de se faire applaudir par ses épigrammes philosophiques. C'est sans contredit un de ceux qui ont le plus contribué de nos jours à égarer la jeunesse qu'attiroient à ses leçons ses saillies piquantes, déguisées sous une apparence de bonhomie. Nous avons autrefois examiné dans ce journal, no 195, t.VIII, l'esprit général des productions de M. Andrieux, qui se maintint en place pendant la restauration, tant la tyrannie étoit alors terrible, et tant le parti-prétre avoit d'influence! L'académicien succéda comme secrétaire perpétuel à M.Raynouard, Il étoit d'une très-mauvaise santé, et persista cet hiver à faire son cours, malgré le dépérissement de ses forces, comme s'il n'eût pas voulu perdre l'occasion d'insinuer ses idées d'irréligion. C'est à ce zèle que ses amis attribuent sa mort. Son convoi a offert une réunion très-nombreuse de députés, de littérateurs, d'artistes, d'acteurs, etc. Des discours ont été prononcés sur sa tombe par MM. de Cessac, de Sacy, Droz, Tissot, par deux élèves de l'Ecole polytechnique, et par un Anglais, M. Spien. M. Tissot, entre autres, a loué dans Andrieux le disciple de Voltaire, l'héritier de ses doctrines. Il y avoit, a-t-il dit, plus d'une sympathie entre Andrieux et Voltaire; tous deux avoient compris la nécessité d'assaisonner la raison du sel de la plaisanterie; tous deux attribuoient les malheurs du monde au fanatisme et à la tyrannie, ligués ensemble pour opprimer les nations. Et cela a été dit sur une tombe! On l'auroit pris plutôt pour une reminiscence des clubs de 1793.

Le Gérant, Adrien Le Clerc.

COURS DES EFFETS PUBLICS. · Bourse du 22 mai 1833.

Trois pour 100, jouissance du 22 déc., ouvert à 78 fr. 85 c., et fermé à 79 fr. 00 e. Cinq pour 100, jouiss. du 22 mars, ouvert à 103 fr. 20 e., et fermé à 103 fr. 30 c. Actions de la Banque.

• 1790 fr. 00 c.

IMPRIMERIE D'AD, LE CEERE' AT COMP“.

SAMEDI 25 MAI 1833.

(N° 3006.)

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Lettre pastorale de M. l'évêque de Chartres.

Cette lettre pastorale, qui est datée du 12 mai, auroit été insérée ici dans son entier, si cela eût été possible; elle se recommande à la fois et par l'exactitude des faits, et par la sagesse des réflexions. On en jugera par quelques extraits. La pastorale commence par un exposé succinct de l'origine du schisme de Lèves :

« Dans tous les temps, les premiers pasteurs, éprouvés par quelque grande affliction, ont déposé leur douleur dans le sein des chrétiens fidèles placés sous leur conduite. Les préventions dont ils étoient l'objet, dissipées, et l'attachement de leur troupeau ranimé par les injustices mêmes dont ils avoient eu à gémir, ont été leur consolation la plus sensible et la plus chère. C'est cet adoucissement à nos peines que nous cherchons aujourd'hui, N.T. C. F., et votre droiture, comme aussi la connoissance que vous avez de nos sentimens et de notre caractère, nous persuadent que nous ne l'aurons pas cherché en vain. Vous connoissez les événemens arrivés à Chartres le 28 avril ; ils firent sur nous une impression d'autant plus douloureuse qu'ils étoient moins prévus, et que l'esprit des habitans de cette contrée, la douceur de leurs moeurs, les rendoit plus invraisemblables. Mais ce ne sont point les violences dont ce jour fut témoin qui nous ont le plus affligé. Les calomnies qui les ont précédées, et dont les excès auxquels on s'est porté envers nous n'ont pu tarir la source, voilà notre croix la plus triste et la plus pesante. On veut à tout prix affoiblir à notre égard votre affection et votre confiance, auxquelles nous tenons plus qu'à la vie. Nous opposerons à cette tentative le moyen le plus propre à la faire échouer. Nous vous retracerons exactement les faits, et c'est presque la seule défense que pourra nous arracher la nécessité de ne pas paroître confirmer l'imposture par notre silence.

» Au mois de décembre, nous jugeâmes de notre devoir de révoquer le desservant de Lèves. Nous n'aurions pu en effet, sans prévariquer essentiellement, nous abstenir de prendre cette mesure; nous l'adoucîmes par tous les égards qui pouvoient en tempérer la rigueur. Toutes les marques d'intérêt, et d'intérêt effectif que nous croyions pouvoir se concilier avec notre conscience, furent données. Celui qui en fut l'objet le sait bien, et nous fûmes étonné

Tome LXXVI. L'Ami de la Religion.

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qu'il ne démentît point les récits insultans et mensongers qu'on publia à ce sujet, et qui se répandirent dans tout le diocèse. Non, l'empire du devoir ne nous fit point oublier les condescendances de la charité! Nous accordâmes un délai qui eut un effet contraire à celui que nous attendions. Au lieu de préparer la récipiscence, il ne fit que mûrir des projets de résistance ouverte. Quand il fut expiré, le desservant révoqué continua ses functions, au mépris de notre interdit. Bientôt après, il érigea une église schismatique; les esprits s'échauffèrent à Lèves dans un sens favorable à la nouveauté. La religion qui venoit d'y être introduite eat un temple à part, et des solennités qu'on n'a jamais, depuis, ni traversées mi troublées. Les fidèles attachés à notre communion eurent-ils le même avantage? Hélas! si nous l'avancions, nous serious démentis par le cri général et par la notoriété publique. Non, ils ne purent ui exercer leur culte, ni pénétrer dans le temple où avoient adoré leurs pères. Un prêtre envoyé par nous pour procéder à la sépulture, et remplir la dernière volonté d'un chrétien de ce lieu, fut repoussé. Peu après, on fut obligé de faire voyager le corps d'une autre personne défunte pour lui rendre les honneurs funėbres dans une église voisine.

» Enfin, pressé par les instances d'une partie des habitans de Lèves, et de concert avec l'autorité civile, nous envoyâmes, le dimanche 28 avril, un prêtre de la ville pour célébrer l'office dans cette paroisse. Nous choisimes pour cette mission le sujet qui nous parut le plus propre à la remplir avec succès. Notre sollicitude pleine, nous osons le dire, d'une tendre charité pour ceux que le schisme avoit pu séduire, nous dicta ce choix. Nous prétendions leur envoyer un ange de paix. L'ecclésiastique désigné par nous réunit à la piété et aux talens le zèle le plus sage et la douceur la plus aimable. Le 28 au matin, avant de partir pour Lèves, où nous ignorions l'un et l'autre que des troupes dussent se porter, il vint nous demander notre bénédiction paternelle. Nos cœurs étoient serrés par la connoissance que nous avions des préventions et peutêtre des obstacles que son dévoûment alloit rencontrer. Nous prononçâmes sur lui avec effusion ces touchantes paroles que l'Eglise met sur les lèvres des premiers pasteurs, et qui répandent dans l'ame du chrétien la joie, la consolation et la force. Il se rendit au lieu de sa mission; il ne put l'accomplir vous savez le reste. Quand vous l'ignoreriez, ce n'est ni de sa bouche ni de la nôtre que vous pourriez l'apprendre. Il ne parle que des bonnes intentions des personnes qui l'accabloient d'outrages apparens dans la vue de le sauver. Pour nous, conduit par la Providence au pied des autels dans le moment où notre demeure envahie étoit un théâtre de pillage et de dévastation, nous ne saurions accuser personne. Dieu a été doublement bon pour nous en nous faisant éviter le péril, et en nous empêchant de reconnoître des ennemis, parmi ceux qu'il

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nous a confiés, et dont le vrai bonheur est notre unique pen

sée.

que

:

On remarquera aisément avec quelle modération le prélat s'exprime ici; il est beaucoup plus occupé du schisme de Lèves de la dévastation de son évêché le reste de la pastorale est écrit dans le même esprit. M. l'évêque de Chartres prouve qu'il avoit le droit de lancer un interdit; ce droit est reconnu même par l'autorité civile. La conduite postérieure du desservant de Lèves a justifié la mesure prise par le prélat. Ce n'est point pour ses opinions politiques que le desservant a été interdit; M. l'évêque proteste qu'il ne les connoissoit pas. Il ne parle des habitans de Lèves que pour excuser leurs torts; il se flatte qu'ils ouvriront enfin les yeux, et qu'ils reconnoitront leur égarement. Il termine de la manière la plus tou

chante:

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Nous finissons, N. T. C. F., par une observation que nous rougissons d'énoncer, mais que les circonstances nous forcent de mettre au jour. On a excité contre nous pour quelques instans une haine factice, à la vérité, mais dont les résultats auroient pu être cruels et sinistres. Quel fondement, nous vous le demandons, à cette animosité? Quel grief a-t-on à nous reprocher? Par où avonsnous mérité l'emportement furieux auquel nous sommes en butte, de la part surtout de quelques écrivains qui cherchent à soulever contre nous les passions les plus violentes? Depuis près de neuf ans que nous sommes au milieu de vous, quel scandale, quel trait indigne de notre caractère, quelle démarche propre à vous refroidir, à vous aliéner, a marqué notre conduite? Quelle occasion d'obliger s'est offerte à nous, que nous n'ayons saisie avec empressement, sans égard à la différence de rang et de fortune, comme aussi sans distinction d'opinion et de parti? Quel service avons-nous refusé ? Quel pauvre avons-nous renvoyé sans secours? A qui avons-nous fait un accueil dont il ait eu à se plaindre? Il n'y a point de ville dans notre contrée où nous n'ayions paru plusieurs fois; presque point de village que nous n'ayons vísité; s'il est quelqu'un dans ces divers lieux que nous ayons scandalisé, blessé, affligé, qu'il élève la voix pour nous accuser à la face de tout ce diocèse, Ah ! si nous ne nous faisons pas illusion, il nous semble qu'un profond silence suivra cette interpellation, et que nous n'avons faissé nulle part de semblables traces de notre passage! Pardonnez-nous, N. T. C. F., cet épanchement de notre coeur et ce témoignage qu'un acharnement implacable et de trop criantes injustices nous ont contraint de nous rendre à nous-même.

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Puissent de si touchantes paroles ramener les esprits prévenus! Déjà nous apprenons qu'à Lèves même l'illusion est loin d'être générale à la messe du prêtre catholique, il y avoit, dimanche dernier, de trois à quatre cents personnes.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. Il y a eu lundi à la chambre des pairs un débat inattendu. On discutoit la loi départementale. Il s'agissoit de savoir si les ecclésiastiques seroient exclus des conseils d'arrondissement et de département. On se rappelle que la chambre des députés a introduit une exclusion pour eux. M. A. de La Rochefoucault, dans la séance des pairs du 20 mai, a proposé de rétablir cette exclusion. Làdessus M. de Montlosier est monté à la tribuire et a parlé pendant une heure au milieu des signes évidens d'une désapprobation générale. Il a évoqué ce fantôme du parti-prêtre qui lui avoit valu tant de popularité il y a sept ou huit ans. Parler de l'influence redoutable du clergé au temps qui court, c'est bien l'anachronisme le plus complet. L'orateur est remonté spirituellement au temps de saint Louis et de Philippe-le-Bel, parce qu'apparemment les circonstances sont les mêmes. Il a vu dans sa sagesse que les prêtres étoient une puissance dans l'état, et leur a reproché leurs sermons, leurs refus de sépulture, leur ambition à intervenir dans les affaires de l'état.... Il a mêlé habilement la plaisanterie à la déclamation, et a voulu faire rire avec le damné imaginaire. Il faut le dire, ces tristes railleries ont eu peu de succès, et des murmures fréquens auroient dû avertir l'orateur qui a persisté jusqu'au bout dans son long et ennuyeux plaidoyer. M. de Sacy a pris immédiatement la parole; il a fait sentir combien ces craintes de l'influence du clergé étoient ridicules aujourd'hui. Parce qu'il y a eu des abus il y a quelques siècles, ces abus sont-ils possibles dans l'état actuel des choses? En vérité, a dit M. de Sacy, c'est se faire des chimères pour le plaisir de les combattre. M. de Sacy a combattu avec force l'amendement. M. Roederer est fort effrayé aussi de l'ambition et de l'esprit d'envahissement du clergé, et il a cherché à communiquer ses frayeurs à la chambre qui a paru fort disposée à en rire. M. Portalis a parlé dans le même sens que M. de Sacy. M. d'Argout a nié que le gouvernement songeât à faire rentrer le clergé dans les affaires civiles; il n'a pas eu de peine à prouver ce qui saute aux yeux. L'amendement a été rejeté à l'unanimité. Toute la chambre paroît avoir senti ce qu'il y avoit d'inique, d'arbitraire, d'odieux dans une exclusion portée contre toute une classe. On feint de redouter l'influence du clergé. Estce donc par excès de dévotion, dit un journal ministériel, que nous péchons aujourd'hui ? Est-il fort à craindre que le clergé n'enva

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