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sur coup en sont la triste preuve. Le 9 février dernier, au soir, six jeunes gens d'Ymeray, près Maintenon, diocèse de Chartres, entrèrent dans un cabaret revêtus de costumes ridicules. Le chef, Philidor Doye, portoit une chemise blanche par-dessus son' habit avec une espèce d'étole, et, sur sa tête, une espèce de bonnet carré; un autre agitoit une sonnette. Arrivés dans le cabaret, ils se mirent à genoux, et Doye, tirant de sa poche une boîte à savonnette où étoient des morceaux de pomme découpés en forme d'hostie, en mit dans la bouche de chacun de ses compagnons en marmottant quelques mots. Cette dérision sacrilége pouvoit d'autant moins rester ignorée, que les jeunes gens allèrent ensuite avec leur costume dans différentes maisons du village. Ils ont été traduits en cour d'assises, et, malgré l'évidence des faits, ils ont été acquittés. Un jury n'a pas pensé que ce fût là insulter la religion. Quelque chose de semblable vient d'arriver dans le diocèse du Mans. Le 9 avril dernier, des jeunes gens de Gesvres, arrondissement de Mayenne, se réunirent le soir dans une auberge de la 'commune; l'un d'eux étant complètement ivre, ses camarades le mirent dans une toile, le portèrent comme un corps et le promenèrent dans le village, simulant les cérémonies d'un enterrement. Des flambeaux étoient allumés, un seau tenoit lieu de bénitier et une fourche disposée d'une certaine manière figuroit là croix. Ainsi rien ne manquoit à cette parade sacrilége, et un capitaine de la garde nationale y présidoit. L'autorité n'a rien fait pour réprimer ce scandale. Y aura-t-il des poursuites? On ne sait si on doit le désirer; car, traduire ces jeunes gens en justice pour les acquitter avec éclat, ce seroit ajouter un scandale à un autre. Quelle législation qui ne donne aucun moyen de réprimer de tels outrages à la religion!

Le maire d'Orsival, diocèse de Cambrai, se plaignoit depuis long-temps de son curé, qui est aussi celui de Villers-Pol, commune contigue. Il vouloit qu'on destituât le curé, ou au moins qu'on le plaçât ailleurs. L'autorité ecclésiastique ayant examiné les plaintes, ne les a sans doute pas trouvées fondées, et a maintenu le curé. Comme les principes qu'elle professe ne sont pas suspects, son jugement auroit dû calmer l'esprit d'opposition contre le curé de Villers-Pol. Au contraire, cet esprit a pris une nouvelle force. Le maire d'Orsival et le conseil municipal ont donné tous à la fois leur démission. Ils ont espéré sans doute que cette mesure forceroit l'autorité à faire droit à leur demande. Le maire de Villers-Pol a suivi cet exemple : c'est une petite insurrection municipale contre un curé qui déplaît.

Il a paru la semaine dernière, dans un de nos journaux politiques, un article sur la vacance prolongée du siége épiscopal d'Ajaccio. Il y a bientôt un an et demi que l'évêque M. Sébastiani

est mort, et il n'a pas encore de successeur. Cependant tout est à faire dans ce diocèse qui n'a même pas encore de séminaire. Il faudroit à Ajaccio un évêque actif et zélé, un 'évêque qui pût visiter son diocèse et former des établissemens. Tout languissoit sous le dernier évêque, tout languit encore aujourd'hui, tout languira bien davantage, si on envoie un évêque vieux ou indolent, qui n'ait pas l'esprit de son état ni le sentiment de ses devoirs. C'est pour le troupeau qu'il faut un évêque, et non dans l'intérêt de telle ou telle famille. Qu'elle veuille gouverner le diocèse sous le nom d'un autre, c'est une prétention qu'une politique étroite peut avouer, mais que la religion repousse et que le gouvernement même n'a pas intérêt à favoriser. Seroit-il vrai qu'on portât au siége vacant un prêtre un peu révolutionnaire, qui a été autrefois employé dans les vivres de l'armée et qui n'a jamais perdu les habitudes militaires? Ce seroit une désolation dans tout le clergé et parmi les fidèles. Le gouvernement ne connoît pas assez l'esprit de la Corse. Il faut envoyer dans un pays religieux un homme dont la conduite soit en harmonie avec le caractère dont il sera revêtu, qui puisse y obtenir une considération et une influence qui serviroient même les intérêts politiques du pouvoir. Déjà les Corses se plaignent qu'on les néglige beaucoup, qu'on ne fait rien pour les attacher à la Métropole, qu'ils sont livrés à la partialité d'un seul homme qui dispose à son gré de tout dans l'île. Il importe de faire cesser ces bruits; le bien de la religion, le bien de la Corse, le bien du gouvernement le demandent également. Donnez à ce pays un évêque capable et zélé, et tout s'y remettra de soi-même sa place.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Nos lecteurs doivent se rappeler que la révolution de juillet nous est toujours apparue sous les formes et avec le même caractère que celle qui avoit déjà couvert la France de misère et de deuil. Dès les premiers jours, quand tout le monde s'accordoit à la trouver pure, nous prouvions qu'elle ne l'étoit pas, au moins sous le rapport de la dévastation et du pillage. A mesure que nous avan¬ çons, elle se charge de confirmer de plus en plus ce que nous avons toujours dit et pensé d'elle. Après avoir chanté la Marseillaise et la Carmagnole, la voilà maintenant qui arrive à chanter les Aristocrates à la lanterne; à crier : Vive la république! vive la guillotine! et à demander dans ses épanchemens la fraternité ou la mort. On présume, à la vérité, que ce ne sont pas les directeurs en chef de la révolution qui donnent encore ces mots d'ordre. Mais, comme les inférieurs du parti n'entendent pas la politique transcendante, ils y mettent moins de façon et de mystère, et ils se hâtent d'aller aú fait de la manière dont ils le comprennent. A cela près qu'ils commettent peut-être une indiscrétion, ils raisonnent juste. Les patriotes qui les dirigent leur promettent de les tirer de

misère sans leur dire précisément avec quoi; et ces pauvres gens conçoivent trèsbien qu'il n'y auroit pas de bon sens à vouloir les enrichir par d'autres moyens que ceux qu'ils connoissent. Voilà pourquoi ils crient: Five la guillotine! parce qu'ils savent que c'est le balancier avec lequel l'autre révolution battoit monnoie; et pourquoi ils demandent la fraternité ou la mort, parce qu'ils savent que l'une fait hériter de l'autre, à raison de la qualité de frères.

Dans toutes leurs discussions, les patriotes prétendent qu'il n'y a de question vivante qu'entre la révolution de juillet et la restauration. Ils se trompent certainement, et il seroit beaucoup plus exact de dire qu'il n'y a dispute qu'entre la révolution et la révolution; entre la révolution qui tient le pouvoir et le budget, et la révolution qui court après; en un mot, entre ceux qui sont contens du lot qu'elle leur a fait, et ceux qui ont manqué leur coup, comme M. de Lafayette l'a fort judicieusement observé. Quant à la restauration et aux carlistes, on ne les fait intervenir dans tout cela que pour la forme. On sait fort bien qu'ils ne courent pas après les faveurs de la révolution de juillet, et qu'ils lui laissent très-volontiers ses pensions, ses tables d'airain, et ses rubans bleus. En retour de l'argent qu'ils apportent à ses budgets, ils ne lui demandent qu'un peu de repos, de tolérance et de sécurité; et encore ne l'obtiennent-ils pas.

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Le duc d'Orléans est parti, le 3 mai, pour Londres, où il restera, dit-on, un mois. Il est accompagné des généraux Baudrand et Marbot, et de M. Montguyon, officier d'ordonnance.

— La loi qui 'accorde des pensions de 250 fr. aux vainqueurs de la Bastille vient d'être sanctionnée.

Le préfet de la Seine a fait examiner, en comité de quelques maires, un projet pour l'établissement des douze siéges d'arrondissement. Il est question d'établir douze hôtels des mairies, comprenant tout ce qui est de la dépendauce d'une maison commune: archives, bibliothèque publique, école des deux degrés, justice de paix, salles d'armes, cours plantées pour exercices de la garde nationale.

Plusieurs journaux témoignent leur étonnement de ce qu'il n'y a point eu d'amnistie à l'occasion de la fête du 1er mai, aiusi qu'on en avoit laissé entrevoir l'espérance.

– La cour royale de Paris a décidé ¡que les pères et mères ne doivent des alimens à leurs enfans, auxquels ils ont donné d'ailleurs une éducation convenable, que lorsque ceux-ci sont dans l'impuissance de pourvoir personnellement à leur subsistance. Il s'agissoit d'un capitaine de la garde royale qui, n'ayant qu'un traitement de réforme de 600 fr., mais encore jeune, réclamoit de sa mère une pension. La cour royale, chambre des mises en accusation, a rejeté l'appel de MM. Petit-Jean et Delauine, avocats, contre les mandats décernés contre eux pour prévention politique, et qui prolongent leur détention depuis fort long-temps.

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La loi du 16 avril 1832 autorise le mariage entre beaux frères et belles

sœurs; mais elle ne s'est point expliquée sur le sort des enfans nés de ces maions avant l'époque où la loi fut promolguée. La cour royale d'Orléans vient de-décider en audience solennelle que, dans le silence de la loi, l'enfant né d'une semblable union ne pourra recevoir le bienfait de la légitimation.

- Dimanche 5 mai, anniveraire de la mort de Buonaparte, quelques individus sont venus déposer des couronnes d'immortelles au pied de la colonne de la place Vendôme il ne s'est passé aucun désordre.

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- M. de Brian, gérant de la Quotidienne, s'est rendu à Angers où il est cité pour le 7 mai, au sujet d'un article qui remonte an 7 août de l'année dernière, et qui est relatif aux vexations commises en Vendée.

Le premier n° du Républicain, journal qui a paru le 4 mai, a été saisi de suite à la poste et dans ses bureaux.

Le barreau de Charleville refuse d'admettre dans son sein M. Flavigny de Doncourt, ancien substitut, parce qu'il n'a pas prêté serment, et qu'il a signé une protestation en faveur de madame la duchesse de Berry. Cette résolution vient d'être combattue dans un mémoire à consulter, rédigé par M. Garnier, avocat à la cour de cassation.

- Par suite de perquisitions, le procureur du Roi et le juge d'instruction de Domfront se sont assurés que le meûnier de Lépinay-le-Comte et celui de NotreDame, près Domfront, mêloient du sable dans leurs farines. On a trouvé chez le premier 1,200 livres de sable de mer: ces deux meûniers ont été arrêtés.

Un accoucheur de Domfront, le sieur Hélie, qui, en délivrant la femme d'un boulanger de cette ville, avoit coupé les deux bras de l'enfant, a été condamné, à la suite d'une enquête et d'un rapport de l'Académie royale de méde cine, à faire à cet enfant, qui avoit survécu à cette opération, une pension de 100 fr. jusqu'à l'âge de dix ans, et de 200 fr. ensuite, afin de l'indemniser de ce qu'il l'avoit mis, par son ignorance, hors d'état de gagner sa vie. Le docteur Hélie a payé le premier mois de pension; mais l'enfant est ensuite mort en peu d'heures, au milieu d'affreux vomissemens.

Le tribunal de police de Pontarlier a condamné à trois jours de prison et II francs d'amende des personnes qui auroient troublé la tranquillité publique, à Cléry, en donnant un charivari ́dans cette commune.

– Une rebellion a eu lieu le 22 avril dans la commune de Lantabat (BassesPyrénées) contre la gendarmerie de Larceveau. Plus de cent individus se sont jetés sur les gendarmes qui mettoient à exécution un mandat d'amener, et leur ont ar raché violemment le prisonnier. La garde nationale est demeurée impuissante. Les gendarmes, après avoir eu un des leurs grièvement blessé, se sont retirés.

M. Calomarde, ancien ministre en Espagne, est retiré à Toulouse, où s'est rendu aussi le général comte d'Espagne.

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La Gazette du Languedoc a été saisie le 26 avril, à Toulouse, pour avoir inséré un article de la Voix de la Vérité, de Modène, qu'avoient reproduit plusieurs journaux.

• La tranquillité a été troublée à Nîmes, le dimanche 28 avril. A onze heures du soir, un rassemblement de trente individus sorti du café Lafayette s'est dirigé vers le pont de la Bouquerie, et s'est bientôt renforcé de deux cents ou trois cents jeunes gens. Ce rassemblement parcourut quelques quartiers en faisant entendre le Chant du départ et les cris de Vive la république. Une patrouille ayant été envoyée à leur poursuite, les perturbateurs l'assaillirent à coups de pierres.

Huit ou dix militaires ont été blessés.

-Dans la nuit du 24 avril dernier, un incendie a réduit en cendres quarante maisons au Locle, canton de Neuchâtel, en Suisse.

La chambre des communes d'Angleterre a reculé devant la démission du ministère Grey. Ce ministère vient d'être dédommagé de sa défaite du 26 avril par un triomphe complet. La motion de sir J. Key, pour l'abolition de la taxe des portes et fenêtres, a été rejetée, le 1er mai, par 355 voix contre 157; majorité 198. Celle de sir W. Ingilby, relative à la drèche, a été repoussée par 285 voix contre 131; majorité 154. La résolution proposée par lord Althorp a été votée ensuite sans división. On se rappelle qu'elle consistoit à déclarer que le déficit, résultant de la diminution de ces deux taxes, ne pouvoit être comblé que par un impôt funeste, l'impôt de la propriété. La question de l'impôt foncier se trouve ainsi résolue pour la session actuelle. Les fonds anglais ont remonté.

On vient de voir en Belgique un premier exemple de disgrâce à l'égard d'um représentant qui votoit avec l'opposition. M. de Smet, commissaire du district d'Alost, vient d'être destitué.

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Lord Aberdeen a présenté le 3, à la chambre des pairs d'Angleterre, sa motion, tendant à obtenir des explications sur l'expédition des Français à Alger et sur leur prise de possession de ce pays. Il a conclu en demandant communication de la correspondance à ce sujet, entre le ministre anglais et l'ambassadeur britannique à Paris; et d'une dépêche récente de lord Grandville, dans laquelle il rend compte d'une conversation qu'il a eue avec Louis-Philippe sur Alger. Lord Grey a promis la communication de ces pièces à l'exception de la dernière, et il a annoncé que l'on négocioit avec la France au sujet d'Alger. La chambre a approuvé la conduite du ministre.

- Le maintien de la taxe des portes et fenêtres cause quelque agitation en Angleterre. Il y a eu quelques assemblées populaires et l'on a adopté, dit-on, des résolutions violentes. On cite principalement, à Londres, une réunion à la taverne de la Couronne et de l'Ancre sous la présidence de M. Hume, et une du conseit politique de Birmingham, où M. Attwood, député, a pris la parole.

Le duc régnant de Brunswick se rend à Londres, en passant par le nord de la France.

A la date du 3 avril, don Pédro a reudu un décret, par lequel l'entrée à Porto des vins étrangers est permise, sauf un droit de 20 pour cent.

La population de Saint-Pétersbourg a été constatée en 1832 à 449,368 individus, dont 294,461 du sexe masculin, et 153,900 du sexe féminin. ́

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