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liberté de tous les accusés. La semaine étoit bonne pour les faiseurs d'émeutes; et puisqu'on venoit d'acquitter à Chartres les gens de Lêves qui étoient beaucoup plus chargés, il eût été trop dur de condamner les gens de Clichy, qui n'avoient pas poussé si loin la révolte, et qui n'avoient point pillé.

Les trois militaires qui ont subi à Chambéry la peine capitale en vertu des sentences du conseil de guerre, Tombarelli, Tolla et de Gubernatis, ont manifesté le plus grand repentir. Ils ont reconnu qu'ils avoient mérité leur sort, et ont exhorté leurs camarades à ne point s'écarter des voies de la religion, de la fidélité et de l'honneur. Tous les trois ont montré la plus touchante résignation, et ont reçu les sacremens avec édification; de Gubernatis, entre autres, a écrit à ses parens une lettre pleine d'expressions de repentir, et a fait le sacrifice de sa vie en expiation de ses fautes. Il a demandé qu'on luivattachất au cou l'image du Réil y a dempteur, et n'a plus voulu la quitter. Ayant obtenu d'entendre la messe, communié avec beaucoup de dévotion. En se rendant à l'exécution, il récitoit les prières que lui suggéroient les ecclésiastiques dont il étoit accompagné, et demandoit hautement pardon à Dieu, au roi et à ses supérieurs. Ces détails édifians sont du moins un sujet de consolation pour la famille et les amis du condamné, et nous ne voyons pas dans tout cela rien qui autorise le dégoût et l'indignation d'un de nos journaux. Les révolutionnaires endurcis pourront traiter Gubernatis de lâche; mais il est probable qu'ils penseroient autrement à l'article de la mort. En Piémont, les condamnés ont montré les mémes sentimens de religion. La Gazette du Piémont, du 25 juin, annonce que presque tous ont témoigné le plus grand regret de leurs erreurs, et que ceux qui ont été exécutés sont revenus sincèrement la religion. L'avocat Vochiusi, entre autres, a dit qu'il ne pouvoit que respecter les juges qui ont signé son arrét, et prier pour eux; si ses réponses avoient été négatives, ce n'avoit pas été pour sauver sa vie, mais pour ne pas être parjure, et pour ne pas trahir son ami. Il demandoit pardon à ses juges s'il avoit cherché à les tromper. Un seul, continue la Gazette du Piémont, n'a point démenti, jusqu'au dernier moment, sa frénésie de révolution et d'impiété; c'est le médecin Jacques Ruffini, qui a trouvé le moyen de se donner la mort dans sa prison.

Le Gérant, Adrien Le Clerc,

COURS DES EFFETS PUBLICS. — - Bourse du 8 juillet 1
1833.

Trois pour 100, jouissance du 22 déc., ouvert à 77fr. 75 c., et fermé à 77 fr. 60 c.
Cinq pour 100, jouiss. du 22 mars, ouvert à 104 fr. 30 e., et fermé à 104 fr. 30 m.
Actions de la Banque.

1710 fr. 00 c.

IMPRIMERIE D'AD. LE CLERE ET COMP.

JEUDI 44 JUILLET 1833.

(N° 2426.)

Du duché de Savoie, ou Etat de ce pays en 1833; par M. d'Héran, d'après les documens statistiques fournis par M. Darbier. In-8°. Paris, 1833.

Tel est le titre d'un livre qui vient de paraître, et dont quelques journaux ont fait l'éloge. Le but de cet ouvrage n'est pas douteux : l'auteur veut prouver la nécessité de porter les frontières de la France au Mont-Cenis et au petit SaintBernard, les seules limites naturelles entre la France et P'Italie. Il faut donc envahir la Savoie, et, si on ne peut pas l'envahir, il faut au moins tâcher d'y exciter une révolution, il faut Y fomenter des mécontentemens, il faut peindre des plus noires couleurs le gouvernement qui régit la Savoie, il faut faire haïr la religion et détester les prêtres, il faut tonner sans cesse contre le despotisme et prêcher la liberté. Or, c'est bien là ce que fait l'auteur du présent livre; et, afin qu'on n'en ignore, il termine son introduction par ce vœu pacifique : Puisse notre voix être le bruit du tonnerre éloigné qui présage le moment où il éclatera sur le despotisme avec d'autant plus de violence qu'il aura été plus long-temps retardé! Cela est assez significatif; ainsi, quand l'auteur dit par la suite qu'il ne veut de révolution que par les lumières, et d'insurrection qu'exempte de désordres et de crimes, c'est une illusion qu'il fait aux autres ou qu'il se fait à lui-même. Il n'y a pas d'exemple de révolution qui n'ait donné lieu à des excès et à des violences. La révolution de 1830, que l'auteur admire, n'en a pas été avare; mais il y a plus, il regrette pour la Savoie les temps de la première révolution, et il dit que les Savoisiens, depuis 1792 jusqu'en 1814, avoient goûté les douceurs d'un gouvernement riche en institutions favorables; les douceurs du régime de 1793 et de 1794! les douceurs de la convention! les douceurs du directoire! les douceurs de l'empire! Il oppose à ces douceurs les crimes de la cour de Sardaigne, C'est à elle qu'il reproche une tyrannie odieuse et abrutissante. Jugez par-là de l'équité et de l'impartialité de l'historien.

Tome LXXVI. L'Ami de la Religion.

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AL.

Que peut-on attendre de lui sous le rapport de la religion? Dès son introduction, il nous avoit fait pressentir son système, lorsqu'il avoit dit : Par cela seul qu'il est notre dernier principe, le besoin doit être aussi notre dernière fin... L'homme fait tout pour ses besoins, il ne peut jamais rien devoir qu'à eux seuls, et il se doit tout pour les contenter. Excellente théorie morale, en vertu de laquelle apparemment celui qui n'a rien, mais qui a des besoins, se doit tout pour les contenter! Il est aisé de voir où cela conduit, et quelle application les pauvres pourroient faire de cet axiome. Le besoin est notre dernier principe, et doit être notre dernière fin. Nous autres chrétiens, nous croyons que c'est Dieu qui est notre principe et notre fin. Mais l'auteur a réformé ces vieilles idées; on s'en convaincra par la définition qu'il donne de la religion :

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La religion est tout ce qui lie et civilise les hommes; elle consiste dans l'amour qu'on a pour ses parens, dans le souvenir de leurs bonnes actions, dans le respect et l'obéissance que l'on doit aux lois utiles, dans la recherche et la manifestation de la vérité, dans l'élévation et l'étendue des facultés de l'humanité, dans la pratique de toutes les vertus, et enfin dans une sympathie générale entre les hommes de toutes les doctrines, de tous les gouvernemens, de tous les pays et de toutes les couleurs.

C'est la première fois peut-être que le nom de Dieu est omis dans une définition de la religion. Les déistes reconnoissent un Dieu, quel qu'il soit; les théophilantropes honoroient aussi Dieu, ou du moins prétendoient l'honorer. Robespierre lui-même avoit proclamé l'Etre suprême. Toute religion suppose des rapports avec Dieu. Dans la définition nouvelle, pas le plus petit mot de Dieu, aucun devoir envers Dieu, aucunes croyances, aucunes pratiques. Cela s'appelle simplifier beaucoup les choses. On ne dira pas que le symbole de l'auteur est court, il n'a pas du tout de symbole : il n'admet que la religion de la morale, qui, dit-il, n'a jamais produit et ne peut jamais produire aucun désordre, aucune guerre, aucune cruauté. Effectivement, les philosophes de 1793 disoient aussi qu'ils ne connoissoient d'autre religion que la reli gion de la morale, et l'on sait tout ce que cette belle religion leur a inspiré d'idées philantropiques. On sait que leur heureuse domination n'a produit ni désordre, ni guerre, ni cruauté. Cela ne doit-il pas donner aux peuples l'envie de voir recom

mencer cette touchante expérience? L'auteur regrette que les missionnaires n'aient pas dit à tous les peuples qu'ils visitoient : Toutes vos religions sont bonnes, conservez-les. Ainsi, il auroit fallu dire aux mahométans, aux sectateurs de Brama, aux adorateurs des fétiches et des idoles, à ceux même qui immolent à leurs dieux des victimes humaines: Toutes vos religions sont bonnes, conservez-les. Aimable tolérance! On trouve que toutes les religions sont bonnes, on veut les conserver toutes, même les plus absurdes et les plus barbares, et en même temps on poursuit, on dédaigne, on livre au ridicule la religion de son propre pays, on flétrit ses pratiques, on accable de reproches ses ministres n'est-ce pas là une charmante impartialité?

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Un chapitre entier de l'ouvrage est consacré à parler du parti-prêtre et de son influence en Savoie. Ce chapitre a certainement été fait avec des centons de M. de Montlosier et du Constitutionnel. Vous y voyez passer en revue tous les grands mots de la fabrique libérale, la théocratie, l'ignorance, le jésuitisme, le sacerdotisme, l'intolérance, l'hypocrisie, la superstition, la friponnerie monacale, le fanatisme..... Tout cela est retourné dans tous les sens et accompagné des épithètes les plus propres à faire peur aux enfans. Pour prouver à quel point la terreur règne en Savoie, l'auteur nous apprend que les registres de l'état civil sont confiés au clergé y a-t-il rien de plus monstrueux? Les fêtes sont excessivement multipliées, il est sévèrement défendu de travailler ce jour-là. Il est vrai que la même défense existe dans la Suisse protestante; mais il est convenu de ne crier que contre les catholiques. L'auteur prétend que depuis 1814 tous les colléges ont été érigés en séminaires, ce qui est faux. Il prête au clergé le projet d'interdire l'instruction à tous ceux qui n'auront pas une certaine fortune : l'archevêque de Chambéry a, dit-il, fait un projet d'édit à ce sujet. Or, cet édit est une imposture pour rendre le clergé odieux. Au surplus, tout ce chapitre est plein d'exagération, de suppositions gratuites, de mensonges, de niaiseries. L'auteur se plaint du fanatisme et de l'intolérance, et c'est lui qui se montre intolérant et fanatique à l'excès par le ton qui règne dans son livre, par les injures et les accusations qui y sont répandues, par les vœux qu'il forme, et par les vengeances qu'il provoque.

Nous ne savons à qui il faut imputer toutes ces déclama

tions révolutionnaires et irréligieuses est-ce M. d'Héran ou M. Darbier qui en est l'auteur? ou bien sont-ils tous les deux responsables de ces manœuvres pour troubler la paix d'un pays heureux et tranquille? Quoi qu'il en soit, la médiocrité de l'ouvrage en atténue peut-être le danger. Ce livre est aussi mal écrit que mal pensé : le style est lourd, diffus et incorrect; souvent les phrases ne sont même pas françaises. Nulle grâce, nul intérêt, rien qui attache. Toujours le ton d'un homme en colère qui gronde, qui gourmande, qui menace. Espérons que les bons Savoisiens ne se laisseront point prendre à un appât si peu flatteur, et qu'ils préféreront leur état paisible et leur régime paternel aux agitations inséparables de la révolution qu'on cherche à fomenter parmi eux. En ce moment même les journaux s'évertuent pour égarer l'opinion publique sur ce pays. La Sentinelle génevoise publioit dernièrement sur la Savoie un article qui n'est qu'un extrait du livre de MM. d'Héran et Darbier. Elle présentoit comme des faits certains les allégations mensongères des deux mécontens sur la puissance du clergé, sur l'oppression du peuple, sur les crimes du prince, etc. Hier encore, un de nos journaux répétoit ces déclamations. Nous engageons nos lecteurs à se défier de ce qu'ils publient à ce sujet.

NOUVELLES ECCLÈSIASTIQUES.

ROME. Le 24 juin, jour de la fête de saint Jean-Baptiste, le souverain pontife se rendit à Saint-Jean de Latran, où il assista, sur son trône, à la messe célébrée par M. le cardinal Pacca, archiprêtre de cette basilique. Les cardinaux, prélats et autres assistoient à la cérémonie.

Le 16 juin, est morte à Rome, à l'âge de 54 ans, madame Justinienne Sambiasi, duchesse de Fiano. Elle étoit restée veuve de bonne heure, avec trois enfans, dont elle s'occupa de rétablir la fortune, dérangée par les révolutions; mais elle travailla bien plus à leur inspirer l'amour de la religion et de la vertu. Les ayant tous établis, elle se donna toute à Dieu. Il n'étoit point d'œuvre de charité et d'exercice de piété auxquels elle ne prît part. Une longue infirmité, qui l'affligea plus d'une année, acheva de la purifier. Elle vit approcher la mort avec sérénité, et recommanda au duc son fils de ne mettre aucune pompe dans ses obsèques.

PARIS. Jeudi dernier, jour où M. l'archevêque présida à la première communion de Saint-Sulpice, le prélat donna successivement la

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