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merveilles de la lumière reluisent dans les cieux: Et facta est lux. Adorons le mystère dont nous ne pourrions récuser les effets, et dont le principe est un acte de la volonté de l'esprit incréé, voluit.

Hé bien! cet être qui est esprit, dont le vouloir est le principe de tout ce qui existe, plane au-dessus de toute la nature pour la diriger, il la pénètre pour l'animer, il l'environne pour la contenir. Cet esprit simple remue le monde entier, le porte dans sa pensée, et toute cette matière s'anime, se développe et n'existe que par l'acte de son simple vouloir. Omnia quæcumque voluit fecit in cælo et in terrá. Comment cet être simple a-t-il fait passer à l'existence tous les êtres sensibles? Nous ne pouvons le concevoir. Ainsi en est-il de l'union de l'ame avec le corps; car, messieurs, Dieu, cet esprit créateur, éternel, qui a produit tout ce qui existe, a voulu créer aussi des esprits à son image et à sa ressemblance: Faciamus hominem ad imaginem et similitudinem nostram; il leur a fait porter ce caractère de sa ressemblance, à savoir : que de meme que Dieu régit l'univers, toute la matière sensible, par son vouloir, l'homme, aussi semblable par son ame à l'esprit de Dieu, fut uni à un corps pour le gouverner, Cette union se fit par l'acte de la volonté divine, qui donna à l'ame un empire souverain sur le corps, au point que cette ame, par un simple vouloir, sans connoître même la matière à laquelle elle est unie, ni la structure de son organisation, ni le mouvement de ses fibres, quand elle est dans les rapports établis par Dieu même, régit tous les actes de ce corps, image de la souveraineté de Dieu sur l'univers. Sans doute que cet empire de l'ame sera troublé souvent; mais ce vice est survenu depuis l'institution divine; c'est une dégradation qui n'existoit point à l'origine; et ce défaut, ce vice, cette dégradation peuvent être corrigés par le retour de l'ame vers son Dieu,

L'union de l'ame avec le corps se manifeste par l'action même : l'ame pense et veut, et aussitôt le corps se meut. Je veux marcher, je marche. Je dispose mes membres comme il me plait; je dirige mes yeux, je prête l'oreille, je parle, je ne tais; et j'ignore comment tous les muscles concourent à me faire voir, entendre, et à former des sons: je veux, cela suffit, l'effet arrive. Quel empire, quelle souveraineté ! Mais cette ame qui agit ainsi, où est-elle ? dehors? dedans? Un être simple n'a pas de lieu, il n'a que vertu et action pour

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manifester sa présence, ainsi que Dieu existe invisible dans l'univers, qu'il anime et fait agir. Saint Grégoire de Nysse, et Bossuet après lui, tiennent le même langage sur ce point. Telle est donc l'union de l'ame avec le corps, union de présence, de commandement et d'action: c'est tout ce qu'on peut dire ; mais rien n'est plus certain que cette démonstration.

Considérons actuellement l'excellence de cette union; elle produit deux effets remarquables, le premier dans l'ordre général de la création, le second dans l'immortalité future du corps humain. Et d'abord, étudions le premier effet de cette union. Dieu a créé des esprits purs, des anges; il a aussi tiré du néant la matière. Voyez-vous ces deux extrêmes? L'ange, esprit pur; la matière, brute et inerte. Cette matière organisée ne sent pas; elle n'a pas conscience de son existence, ne connoit pas les lois qui la régissent, et, toutefois, c'est l'œuvre de Dieu qui devroit glorifier son auteur. Ici, admirez le dessein du créateur; voyez ce qu'il va faire, si j'ose ainsi parler : il animera cette matière, il la rendra intelligente, capable de rendre hommage au Dieu qui la produit. Comment cela? Il va allier intimement un esprit à cette matière, qu'il organisera dans ce but, puis il opérera un mélange d'esprit et de corps et par ce mot de mélange n'entendez pas cette idée grossière de la pénétration de deux corps ensemble; non; mais il y aura mélange en ce sens seulement que l'ame, par sa 'vertu, pénétrera dans toutes les parties du corps pour le mouvoir et le régir: action double, ainsi que nous l'avons vu en expliquant le système organique nerveux qui nous met en rapport avec le monde extérieur, et auquel correspond un autre système organique nerveux qui sert à la conservation du corps intérieur, favorise son existence et son développement. L'ame pénètre donc cette matière, non à la manière de Dien, qui pénètre les choses comme les ayant faites, mais par un acte simple de pouvoir, sans avoir la vue actuelle de ce qui se passe dans ce corps: c'est une action virtuelle de dépendance réciproque. Le corps dépend de l'ame, l'ame régit le corps; elle est obligée de vivre inséparablement avec lui. Depuis la dégradation, l'ame est souvent abattue, mortifiée par la chair; mais ici redisons encore qu'il n'en étoit pas ainsi dans l'institution primitive. Maintenant, considérez l'action de la personne humaine, de l'ame et du corps réunis, sur toutes les créatures extérieures ; voyez comme tout ce qui est sensible est possédé

par le corps de l'homme, comme il s'en approprie une partie qu'il dévore pour exister! Comprenez l'excellence de cette union par laquelle Dieu gouverne, pour ainsi dire, les êtres extérieurs : il les a confiés à l'homme, esprit et corps, esprit pour trouver en Dieu la règle de la direction, corps pour saisir toutes les créatures, les diriger de manière à leur faire atteindre le dessein de Dieu, et par là lui rendre l'hommage con

venable.

:

Le second effet de l'union de l'ame avec le corps, avons-nous dit, est l'immortalité future de ce même corps. Oui, cette union de l'ame avec le corps devoit être indissoluble tel est le caractère inappréciable de l'innocence de la nature humaine, elle auroit été créée immortelle : le Dieu bon n'a pu produire la mort. Creavit hominem inexterminabilem: vérité de foi que les conciles de Milève, d'Orange et de Trente ont si clairement définie. Le grand apôtre proclame la même vérité quand il dit que la mort est entrée dans le monde par la désobéissance d'un seul : Per peccatum mors, et ità in omnes homines mors pertransiit. Mais il viendra un jour où tous ces hommes qui sont dans le tombeau entendront la voix créatrice du Sauveur, qui leur rendra une vie d'immortalité, et les rétablira, s'ils ont été fidèles à sa grâce, dans le bonheur primitif.

En terminant, le professeur a en quelque sorte électrisé son auditoire lorsqu'en développant le sentiment naturel qu'ont tous les hommes pour l'immortalité, il s'est livré à un mouvement de la plus entrainante éloquence.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. D'après la manière dont le Moniteur avoit annoncé les événemens de Lèves, on devoit croire que le gouvernement remonteroit à la source de ces désordres, et qu'il couperoit le mal dans sa racine. Il étoit trop visible que ce n'étoit pas là un culte, mais un foyer d'exaltation, de licence et de révolte. Que pouvoit-on attendre de gens à qui on souffle perpétuellement la haine des prêtres? Est-il bien étonnant que des hommes grossiers, devant qui on déclamoit contre leur évêque, se soient portés contre lui à des actes de violence? N'est-il pas clair que, si on laisse les déclamations continuer, les mêmes résultats peuvent se reproduire? Cependant, on a laissé Châtel et Auzou tenir leurs réunions comme à l'ordinaire : attend-on qu'ils aient provoqué quelque émeute à Paris, et fait

piller quelque église? Nous trouvons à ce sujet d'excellentes réflexions dans l'Orléanais :

« On a parlé à cette occasion, dit il, d'atteinte à la liberté religieuse, de violation des croyances par les baïonnettes. Nous aussi, nous comprenous et voulons la liberté des cultes. Nous avons protesté, nous protesterons encore contre l'oppression que certains individus font, au mépris des lois et du vœu public, peser dans notre cité sur le libre exercice du catholicisme; mais nous ne pouvons, en vérité, consentir à prostituer le nom de culte aux momeries sacriléges du premier charlatan qui viendra se qualifier primat ou pontife. Ce prétendu culte de M. Chátel a-t-il des croyances, une morale, un symbole? Est-ce rien autre chose qu'une indécente parodie de ce qu'il y a de plus saint et sacré dans les rites du catholicisme? Et, lorsque cette parade sacrilége sert de prétexte aux plus déplorables désordres, qu'elle fait naître et entretient une effervescence séditieuse; lorsque des individus sans mission viennent chasser de leurs paroisses les pasteurs légalement établis, interrompre violemment les exercices du culte catholique, usurper par violence les édifices qui lui sont consacrés, l'autorité n'accomplit-elle pas le premier de ses devoirs en rétablissant l'ordre dans les communes, eût-elle besoin de la force pour y parvenir ?

» Les magistrats de Chartres n'ont donc violé en cette circonstance, ni les droits, ni la liberté de personne, ou, pour mieux dire, ils ont servi la liberté en protégeant les droits acquis; car, sans ordre et sans droit, il n'y a pas de liberté, et, s'il étoit besoin de les justifier davantage, un seul fait suffiroit pour prouver la sagesse de leur conduite. Ces soi-disant fidèles de l'Eglise française, ces paisibles disciples de l'abbé Châtel, qu'ont-ils fait lorsque la force publique vint, à tort selon eux, s'opposer à l'exercice de leur culte ? Ont-il invoqué le martyre pour la foi qu'ils professent? Se sont-ils au moins contentés de protester contre la violence qu'on leur faisoit subir? Ils sont partis en bande de 4 à 500 hommes, et aux chants de la Marseillaise, pour aller où? à Chartres, maltraiter des citoyens paisibles, piller des propriétés particulières et dévaster l'évêché. Un tel fait en dit plus que de longues discussions.

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- M. le préfet de police vient de publier un arrêté, qui porte ce qui suit:

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Considérant que différentes sectes se sont établies, en dernier lieu, dans plusieurs communes rurales du département de la Seine ;

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Considérant que les adhérens à ces diverses sectes ont tenté, à diverses reprises, de pratiquer ces cérémonies dans les rues et places publiques, et compro mettent la tranquillité publique, eu donnant même lieu à des scènes tumultuenses;

» A l'avenir, tontes cérémonies religieuses, hors des édifices qui leur sont destinés, ainsi que l'exercice extérieur d'un culte ou d'une secte quelconque, sont interdits dans les communes rurales du département de la Seine, et dans celles du

département de Seine-et-Oise, où il existe des temples destinés à différens cultesi

on sectes. »>

Cet arrêté n'est qu'un acte de foiblesse et de partialité. Comment! on frappe les catholiques parce qu'il s'établit des sectes ridicules! L'église française, il faut le répéter, n'est point un culte c'est une dérision monstrueuse : un homme qui dit la messe et qui prêche contre la divinité de Jésus-Christ et la présence réelle, n'est-ce pas une momerie absurde? Le gouvernement qui la tolère ne comprend pas mieux ses intérêts que ses devoirs.

-Auzou a donné dans son journal une relation des événemens de Lèves (1). On sent bien que les habitans de ce village ont dans son récit tous les honneurs de la victoire. L'auteur raconte leurs exploits avec complaisance, et se garde bien d'énoncer aucun blâme contre les plus coupables violences. Il résulte de sou récit même que l'autorité civile ne mettoit aucun obstacle aux offices de l'abbé Ledru; mais les habitans n'ont pas voulu la laisser pénétrer dans l'église. Ils avoient élevé deux barricades et fait de gros amas de pierres. Ils obligèrent les militaires de reculer, puis, fiers de leur victoire, ils marchèrent à Chartres. Voici en quels termes Auzou rapporte le pillage de l'évêché : En quelques minutes les vitres, les glaces, les pendules, le billard, une calèche, et d'autres meubles de Monseigneur furent brisés; heureusement pour lui-méme qu'en ce moment il étoit en train de chanter vepres à la cathédrale, et. qu'il pút facilement se tenir à l'abri. Les gens de Lèves ne pourront se plaindre du ton de ce récit; il est évident que le sieur Auzou ne déplore pas trop ce pillage. Dans le même article, il parle de l'évêque dans le style le plus grossier; il l'appelle l'impudent Clausel. C'est ainsi qu'Auzou compâtit au désastre du prélat. Les deux ecclésiastiques envoyés à Lêves avoient, dit-il, toute l'arrogance de leur digne patron. Effectivement il est bien vraisemblable que dans' la position critique où ils étoient, ils devoient être disposés à l'arrogance. Des gens qui ont été pendant plusieurs heures entre la vie et la mort, insultés, menacés, frappés, devoient être bien tentés de faire des bravades. Un mot échappé au narrateur nous prouve de plus en plus que les habitans de Lèves ne partageoient pas tous l'exaltation des révoltés. Quelques individus, dit-il, se porterent chez l'adjoint, qui s'étoit caché; on le dénonçoit, et il eut à supporter quelques mauvais traitemens, ainsi que le maître d'école au domicile duquel on commit quelques dégats. Ainsi l'adjoint et le maître d'école n'étoient pas pour l'église française, cela est clair; et, à cause de la liberté des cultes, on les a un peu dénoncés, un peu maltraités et un peu pillés. Voilà qui est clair encore; des gens qui respectent ainsi la liberté des cultes pour les

(1) La plupart des journaux écrivent Levès; le nom véritable est Lèves.

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