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-Dans da dernière moitié du mois d'avril, le chargé d'affaires d'Italie alors (chargé d'affaires de Sardaigne, m'a donné connaissance que SuMeterói Victor-Emmanuel, par suite d'un vote du Parlement, avait pris (pour lui et ses descendants le titre de roi d'Italie. A cette communication, j'ai répondu qu'il m'était impossible de prendre unet décision immédiate, mais que le gouvernement délibérerait. Cette réponse fut reçue avec la plus grande bienveillance. La décision à prendre était importante puisqu'elle pouvait heurter des opinions respectables. En outre, il n'était pas sans intérêt pour nous de savoir ce que d'autres gouvernements, qui avaient reçu la même communication, feraient à cet égard. Nous aurions désiré, il est vrai, que le voté qui donna le titre de roi d'Italie au roi Victor-Emmanuel eût été sanctionné d'une manière légale, c'est-à-dire par la coopération, sinon de toutes, du moins de la majeure partie des puissances européennes.

Il était question alors de la réunion d'un congrès; on parlait de certain protocole du congrès d'Aix-la-Chapelle, en vertu duquel aucun prince ne peut adopter un titre nouveau sans le consentement des autres puissances. Or, aussi longtemps qu'il n'était pas avéré qué cette voie ne serait pas suivie, le gouvernement n'était pas tenu de se déclarer. Il pouvait s'abstenir d'autant plus, qu'à l'exception de l'Angleterre, toutes les autres puissances avaient suivi cette même marche. Les réponses de la Suède et du Danemark à la communica tion du cabinet de Turin peuvent être qualifiées d'exceptions dila toires. Dans ces réponses, il est dit qu'on était disposé à reconnaître. si la notification se faisait plus tard d'une autre manière. Le Portugal donna une réponse évasive, et je vous prie de bien remarquer que, bien qu'au mois d'avril déjà les journaux eussent annoncé que la reconnaissance par le gouvernement portugais avait eu lieu, cette reconnaissance s'est faite presque simultanément avec la nôtre. Pro bablement on aurait ajournéencore davantage cette résolution, si une circonstance n'avait contribué à hâter le dénoûment. Cette cir constance est la reconnaissance du roi d'Italie par la France Bom Il était difficile d'admettre que des gouvernements qui ne s'étaient pas trouvés mélés dans les affaires d'Italie fussent tenus de recons naître le nouvel ordre de choses, aussi longtemps que la France, à qui on peut attribuer un certain droit de paternité sur le nouvel État, renierait son propre enfant. La reconnaissance de la France cependant fût hâtée par la mort du grand homme d'État, le comte Cavour! M

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Après la reconnaissance de la France, nous nous sommes demandé si le moment n'était pas venu pour nous de prendre une résolution. Une réponse était nécessaire, parce que tout faisait supposer que dès ce moment on allait insister pour l'obtenir. Quelle devait être cette réponse? Dans l'opinion du gouvernement, elle ne pouvait être

qu'affirmative. Nous avons avec l'Italie d'importantes relations commerciales. En tardant plus longtemps, il était à craindre que le cal binet de Turin ne nous fit sentir d'une manière ou de l'autre que nous lui devions une réponse. N'aurait-on pas eu raison alors de faire de justes reproches au gouvernement? Ce dernier a donc pensé que le moment était venu de se prononcer, d'autant plus que la réponse du baron Ricasoli à la note de M. Thouvenel nous avait indiqué la portée que le cabinet de Turin attachait à l'acte de la reconnaissance. aotic al oldat: -91

Je crois que, quelle que soit l'opinion qu'on puisse émettre sur les affaires d'Italie, quelles que soient les sympathies qu'on éprouve pour le nouveau royaume, on ne peut, d'autre part, accorder une approbation anticipée aux moyens qu'on emploiera encore pour le compléter. On ne devait donc pas, par la reconnaissance, blesser des droits exis tants, droits qui, jusqu'ici, s'opposent à l'accomplissement de l'unité italienne. Lorsqu'on eut appris que le cabinet de Turin ne demandait qu'une reconnaissance pure et simple, ne renfermant ni approbation du passé, ní approbation anticipée de ce qui était projeté pour l'avenir, le gouvernement fut d'avis qu'on pouvait reconnaître les faits sans se préoccuper du passé ou de l'avenir. Le gouvernement est d'avis qu'en agissant ainsi, il s'est trouvé d'accord avec la très-grande majorité de la nation néerlandaise, car je ne sache pas qu'on ait approuvé ici d'une manière absolue tout ce qui a eu lieu en Italie. Dans la presse, il n'y a qu'un seul journal qui ait écrit dans ce sens. S'il existait ici un parti radical, ce journal pourrait passer pour son organe; mais comme un tel parti n'existe pas chez nous, on doit considérer l'opinion de ce journal, comme n'exprimant qu'une opinion isoléé. Mais, je le répète, la très-grande majorité de la nation n'approuve pas sans réserve des événements qui se sont passés en Italie. i. On a publié ces jours-ci dans les journaux, j'ignore dans quel but, des extraits d'une circulaire que j'aurais adressée à nos agents diplo matiques, pour expliquer les motifs sur lesquels se fonde la reconnaissance. On a reproché au gouvernement néerlandais l'existence d'une pareille circulaire. Je ne conçois pas qu'on se soit tant occupé de nous det si peu des autres gouvernements, car la dépêché que le gouvernement suédois a adressée à ses agents diplomatiques est presque sur tous les points semblable à la nôtre. La dépêche de M. Thouvenel, adressée au chargé d'affaires à Turin, renferme une désapprobation de la politique italienne beaucoup plus forte que nous n'avons pensé à l'exprimer.

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Le gouvernement néerlandais a cru que les intérêts du pays exi→ geaient une réponse affirmative, mais il a en même temps voulu respecter les droits d'autres États, dont les intérêts sont liés à la question

italienne. Ici se place la différence qu'on a voulu établir entre la reconnaissance du roi d'Italie et celle du royaume d'Italie.

Je vous ferai d'abord observer qu'il eût été difficile pour nous d'aller dans notre adhésion au delà de ce qu'on avait demandé. Les termes de la notification ne nous demandaient que de reconnaître le roi Victor-Emmanuel comme roi d'Italie. Mais en reconnaissant ce titre de roi d'Italie, on a aussi reconnu le royaume d'Italie, non tel qu'il existe en projet, mais tel qu'il existe réellement dans ce moment.

On prétend que la manière dont la reconnaissance s'est faite n'a satisfait ni le gouvernement italien ni ceux qui, par principe, sont opposés à cette reconnaissance; en sorte qu'on n'aurait contenté personne. Je suis heureux de pouvoir vous dire que les suites fâcheuses de cette reconnaissance n'existent que dans l'imagination de ceux qui les ont inventées. Il n'est pas à ma connaissance un seul fait de nature à justifier la supposition que la mnière d'agir du gouvernement néerlandais ait mécontenté le gouvernement italien. Au contraire, la reconnaissance de la Néerlande a été reçue avec la plus grande bienveillance. J'ajouterai seulement que s'il survenait des difficultés inattendues, on devrait les attribuer, non au gouvernement, mais à ceux qui s'évertuent à envenimer une question qui, dans le principe, n'a donné lieu à aucune difficulté.

On a voulu voir une preuve de mécontentement présumé dans le fait qu'il n'y a pas eu ici de mission extraordinaire. Je ferai remarquer que des missions extraordinaires furent envoyées en Suède et en Danemark sur la demande expresse de ces gouvernements. La mission extraordinaire à Paris avait une raison toute naturelle dans le rétablissement des relations officielles entre la France et Turin, momentanément interrompues. Au surplus, je veux bien déclarer que le gouvernement néerlandais n'a pas demandé à recevoir une seconde notification par un envoyé extraordinaire, parce que le gouvernement ne l'a pas jugé désirable. Une communication par la voie ordinaire lui a paru suffisante. Si l'on considère la divergence d'opinions sur cette question et les passions qu'elle soulève, on saura gré au gouvernement d'avoir cherché à éviter tout ce qui pouvait les réveiller. Du reste la notification s'est faite de la même manière à Londres. Nous n'avons donc aucunement à nous plaindre de ce qu'on n'ait pas envoyé une mission extraordinaire à la Haye. Loin d'en être blessés, nous n'avons qu'à nous louer de la délicatesse du cabinet de Turin, qui a si bien compris les difficultés où nous nous trouvions, et qui s'est abstenu de tout ce qui pouvait les augmenter. Vous savez les manifestations qui ont eu lieu à Stockholm et à Copenhague, à l'occasion de la mission du marquis de Torrearsa. Supposons qu'ici aussi

de pareilles démonstrations eussent provoqué des démonstrations dans un sens contraire, n'aurait-on pas reproché au gouvernement d'avoir manqué de prudence et de prévoyance?

Après ce discours, la Chambre a procédé an vote et a adopté le projet d'adresse dans son ensemble, par 58 voix contre 2.

PÉROU.

Note-circulaire adressée par le ministre des affaires étrangères du Pérou à tous les gouvernements d'Amérique des anciennes colonies espagnoles, au sujet de l'annexion de Saint-Domingue à l'Espagne.

Lima, 24 août 1861.

L'attaque qu'ont eu à souffrir les institutions démocratiques et la sécurité continentale dans la république de Saint-Domingue; le funeste exemple qu'a donné le général D. Pedro Santa-Ana par son apostasie; l'opinion fâcheuse et équivoque à laquelle ce fait peut donner lieu en Europe, relativement à la stabilité du système politique adopté en Amérique, par la conjoncture honteuse qu'il s'est accompli simultanément avec la tentative, prouvée par des documents authentiques, du président d'une autre république qui projetait aussi une transformation semblable en sollicitant l'appui des puissances européennes; la circonstance aggravante qu'il se trouve dans cette autre république une haute autorité qui exerce toute son influence nuisible dans les conseils du cabinet, un personnage qui, il y a quelques années, tenta de reconquérir ce pays, et arma dans ce but une expédition comme lieutenant de Christine: tous ces graves motifs ont obligé mon gouvernement, fidèle à l'honorable tradition de la liberté et obéissant à la politique qui l'a fait agir avec les autres États du continent, chaque fois que l'Amérique a couru un péril commun ou que son indépendance a été menacée, à s'adresser à eux, ensuite d'une mûre délibération adoptée en conseil des ministres, à protester contre la réincorporation de la république de Saint-Domingue à la monarchie espagnole, à cause du principe commun qui a été foulé aux pieds, des dangers sérieux de l'avenir et du mode illégal employé; et à proposer une alliance défensive pour repousser la réincorporation, et dans le cas dont il s'agit, quel que soit le nom sous lequel elle se déguise, et quelle que soit la puissance qui entreprenne de la réaliser.

Depuis que les colonies qui dans un temps ont appartenu à l'Espagne se sont affranchies de la métropole, leur droit d'exister comme nations. libres et souveraines a été reconnu mutuellement par toutes, comme le principe sur lequel reposait l'indépendance de chacune d'elles. Ce

principe a été et est encore une des maximes fondamentales du droit public américain, sur lequel s'appuie son code international, reconnu aussi par les nations de l'Europe. De là il résulte qu'en attaquant l'indépendance de l'une d'elles, on attaque en même temps les autres, non-seulement parce qu'en levant la même bannière, et d'accord sur les motifs et sur l'objet, elles ont lutté pour secouer le joug de l'étranger, mais aussi parce que, en méconnaissant l'existence légale d'un république américaine, qui autrefois fut une colonie, on méconnaît virtuellement le droit de souveraineté des autres.

L'occupation de Saint-Domingue par la couronne d'Espagne n'a pas été non plus, par la manière dont elle s'est accomplie, un de ces actes qui révèlent les tristes légèretés et inconséquences qui parfois émanent des peuples. Elle a été, au contraire, une haute trahison, un crime de lèse-patrie du mandataire auquel le peuple dominicain avait confié son sort pour qu'il le gouvernât conformément à une constitution républicaine, sans lui donner le pouvoir de changer sa condition de nation libre pour celle de colonie d'un monarque étranger. Un décret du général Santa-Ana comme président de la république, voilà tout le fondement de la transformation politique que dans ce moment on est en train de réaliser. En vertu de ce coup d'État, car le fait mérite ce nom, on a arboré l'étendard de Castille dans un pays où, il y a quatre siècles, il fut planté pour la première fois, et où il fut légitimement remplacé par une bannière nationale. Le capitaine général de Cuba, à la nouvelle de cet événement sans doute attendu, a envoyé une escadre ayant à bord des troupes de débarquement; et ces forces sont venues surprendre par leur présence et par des actes hostiles les habitants de Saint-Domingue, qui n'ont pas eu le temps d'exprimer librement leur volonté, car depuis ils se sont prononcés bien clairement contre la domination étrangère, en défendant leur nationalité et en se livrant à une guerre d'indépendance. Le cabinet de Madrid a accepté les propositions à lui faites par le général Santa-Ana, et se fondant sur un prétendu contrat qui manque de la valeur d'un pacte international, et dans lequel l'intérêt privé d'un individu a été mis au-dessus des droits d'une nation, il s'est décidé définitivement à déclarer Saint-Domingue partie intégrante de la monarchie espagnole et à lui concéder le droit de représentation aux Chambres législatives. Ainsi l'Espagne se présente appuyée sur son système rétrograde de colonisation, et daigne noter en passant qu'elle n'a pas aboli l'esclavage en principe, mais comme une mesure de circonstance qu'elle peut révoquer; elle sanctionne la doctrine du plébiciste, qu'elle a condamnée en Italie un an avant de la mettre en pratique, et qu'on ne peut pas considérer comme la signification de la volonté des habitants de l'île de Saint-Domingue, car l'occupation s'est faite par l'invasion de forces espagnoles qui se

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