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côté nous en méditons aussi pour le bien de ces bonnes populations. Avec l'aide de Dieu, leur exécution exacte suffira, car il faut seulement de prudentes modifications et non des changements fondamentaux. »

Cette allocution, indépendamment de sa portée politique, réfutait victorieusement les calomnies répandues avec tant de malveillance, contre le roi des Deux-Siciles, par la haine de la presse démagogique.

Chaque jour le Seigneur envoyait à son vicaire quelques nouvelles consolations; c'est ainsi que le 18 décembre, un détachement de carabiniers commandé par un brigadier, vint se présenter au Saint Père, sollicitant la grâce de réster près de sa parsonne. Le pape, après y avoir consenti, répondit à ce détachement fidèle:

<< Braves soldats, je vous bénis, et quoique vous soyez en petit nombre, je me trouve extrêmement heureux de vous voir près de moi, parce que vous donnez une preuve d'attachement à votre souverain et de fidélité à la cause de la religion....

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A cette époque, le Saint Père qui avait déjà fait, ainsi que nous l'avons l'avons vu, une première protestation contre les actes accomplis à Rome depuis la sédition qui l'avait obligé de fuir son ingrate capitale, en publia une seconde, dans laquelle il rappelait l'assassinat de son ministre et les excès dont ce crime avait été le signal. Après avoir déploré de nouveau l'ingratitude d'une partie de son peuple, il déclara

illégale et sans effet la récente nomination de la junte suprême d'État. En même temps il frappait de nullité tous les actes qui en émaneraient, et il se référait entièrement à la nomination qu'il avait faite d'une commission gouvernementale (1).

Dans cet état de choses, le ministère usurpateur avait promis aux clubs que la constituante romaine serait définitivement proclamée le 29 décembre. A cet effet, à l'ouverture de la séance de la Chambre des députés, qui eut lieu le 26 du même mois, l'un des ministres, Armellini, donna lecture d'une lettre que la junte avait adressée au cabinet, déclarant que si le ministère et les Chambres ne décrétaient pas immédiatement la convocation de la constituante romaine, la junte elle-même se verrait forcée de prendre l'initiative. Après cette lecture, le ministre prononça un discours, pour démontrer la nécessité de convoquer la constituante, disant que le moindre retard serait un sujet de nouveaux troubles populaires.

Les tribunes où les agitateurs s'étaient rendus en grand nombre pour exercer leurs priviléges de pression, applaudirent cette proposition, qui plaçait les députés dans l'alternative d'opter pour la loi ou pour les conséquences inévitables de l'émeute.

Cependant la majorité de la Chambre, entraînée malgré elle sur un terrain gros de tempêtes, se refusait à renier la loi fondamentale mise en péril par

(1) Voir les documents historiques, N. 6.

les

un acte qui remettait tout en question: quoique placée sous les cris et sous les menaces des tribunes publiques, elle aborda cette fois franchement la discussion. Quelques orateurs, plus résolus que autres, établirent que la Chambre, incompétente pour changer les lois de l'État, dépasserait les limites de son mandat, en donnant suite à une proposition contre laquelle ils protestaient d'avance. Ces paroles courageuses, auxquelles la minorité factieuse et dominatrice n'était point accoutumée, firent éclater l'orage sur les bancs des tribunes publiques. Cet orage devint une tempête. Il redoubla lorsque plusieurs députés ayant déclaré que les délibérations n'étaient plus libres, prirent le parti de se retirer. La Chambre saisit avec empressement l'occasion de cette retraite pour déclarer à son tour que les députés ne se trouvant plus en nombre légal pour voter, la discussion était fermée de droit. Alors l'exaspération des tribunes publiques ne connut plus de bornes; les députés se levant au milieu des sifflets et des huées se dispersèrent à travers les outrages. Un peuple qui comprenait ainsi la majesté de la représentation constitutionnelle, prouvait qu'il était indigne de la liberté !

Les ministres, restés seuls sur leurs bancs, annoncèrent aux clubistes que, dès le lendemain, ils agiraient par eux-mêmes, et qu'en attendant, le projet de la loi proposée serait imprimé.

En voici le texte :

<< Vu les adresses et les manifestations de la capi

tale et des provinces; vu la note présentée par la junte suprême d'État au ministère et communiquée par celui-ci à la Chambre des députés ;

<< Considérant qu'attendu le danger d'une scission entre les provinces et d'une dissolution sociale, et aussi le besoin impérieux de remédier à la détresse des finances, la loi suprême du salut public commande de convoquer la nation pour que, au moyen d'une représentation universelle et munie de tous les pouvoirs, elle manifeste sa volonté et prenne les mesures nécessaires;

« Sur la proposition des ministres, la Chambre des députés décrète :

« Une assemblée nationale, qui représentera avec plein pouvoir l'État romain, est convoquée à Rome, etc. >>

Les ministres intrus de Rome, sans tenir compte aucun de la différence qui existait entre deux peuples, dont l'un, depuis un demi-siècle, parcourait toutes les gammes du régime constitutionnel, et dont l'autre en possédait à peine la clef, calquèrent leur projet de constitution sur le modèle de la loi inaugurée récemment en France par les hommes du National.

La junte suprême d'État et les ministres romains cherchant tous les moyens de régulariser la situation anormale du pays et d'éviter de nouvelles complications populaires, repoussaient la seule solution raisonnable, la soumission au pape et la possibilité du retour du saint Pontife qui, le premier, avant le

temps peut-être, avait institué le régime parlementaire et donné le premier essor à la liberté politique. Cette liberté régnait alors si peu à Rome, que pas un seul député, pas un seul journal, n'osèrent proposer cette solution unique qui pouvait mettre un terme à tous les embarras.

En attendant, s'enfonçant de plus en plus dans une série d'illégalités, la junte suprême d'État et le ministère prononcèrent, le 28, la dissolution du parlement romain, dernier simulacre du droit légal qui avait résisté aux désastres de la révolution du 16 novembre. Le ministère et la junte s'arrogeaient le pouvoir de voter désormais, de promulguer et de faire exécuter la loi refusée par la Chambre des députés au sujet de la convocation d'une assemblée constituante. Le lendemain 29, la loi de convocation fut affichée sur tous les murs de Rome. Ce fut alors que le chef d'une des plus nobles familles de l'Italie, le sénateur prince Corsini, qui, par dévouement seul à l'ordre public, avait cru devoir rester à la tête des affaires et jeter la puissance de son nom au-devant du flot révolutionnaire, donna sa démission de membre de la junte d'État.

Par suite de cette démission, la junte suprême d'État se trouvait incomplète, car ayant été créée par les deux Chambres du parlement, il était nécessaire que la nomination du successeur du prince Corsini fût revêtue de la même formalité rendue impossible par la dissolution des Chambres. Les deux membres restants de la junte et les ministres parèrent à cet

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