Images de page
PDF
ePub

LIVRE IV.

DÉLITS ET CRIMES COMMIS PAR DES FONCTIONNAIRES ET DES MILITAIRES.

TITRE PREMIER.

DÉLITS ET CRIMES COMMIS PAR DES FONCTIONNAIRES.

SECTION PREMIÈRE.

DÉLITS ET CRIMES NON SPÉCIAUX aux foncTIONS.

ART. 507. (186, 198 et 462.) Tout fonctionnaire, officier public ou administrateur, tout agent ou préposé du gouvernement ou de la police, tout exécuteur de mandats de police ou de jugements, tout commandant en chef ou en sous-ordre de la force publique qui, dans l'exercice de ses fonctions, aura, sans motifs légitimes, usé ou fait user de violences envers les personnes,

Tous fonctionnaires ou officiers publics qui se seront rendus coupables, comme auteurs ou comme complices, de délits ou de crimes qu'ils étaient chargés de surveiller, de constater et de réprimer,

Seront punis,

Si le fait ne constitue qu'un délit, du maximum des peines prononcées contre lui;

Et s'il constitue un crime, du maximum des peines temporaires qu'il aurait emportées à l'égard de tout autre coupable.

SECTION II.

DÉLITS ET CRIMES SPÉCIAUX AUX FONCTIONS.

S1r. EXERCICE ANTICIPÉ OU PROLONGÉ DES FONCTIONS.

ART. 508. (196.) Tout fonctionnaire public qui sera entré en exercice de ses fonctions sans avoir prêté le serment,

Pourra être poursuivi et puni d'une amende de 16 à 150 francs.

ART. 509. (197.) Tout fonctionnaire public révoqué, destitué, suspendu ou interdit légalement, qui, après en avoir eu connaissance offi cielle, aura continué l'exercice de ses fonctions, ou qui, étant électif ou temporaire, les aura exercées après avoir été remplacé,

Sera puni d'une amende de 100 à 500 francs,

D'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans,

Et de l'interdiction de toutes fonctions publiques pour 5 ans au moins et 10 ans au plus, à compter du jour où il aura subi sa peine.

S 2. REFUS DE SERVICE ET DÉNI DE JUSTICE.

ART. 510. (234.) Tout commandant, tout officier ou sous-officier de la force publique qui, après en avoir été légalement requis par l'autorité civile, aura refusé de faire agir la force à ses ordres,

Sera puni d'un emprisonnement de 1 à 3 mois.

ART. 511. (185.) Tout juge ou tribunal, tout administrateur ou autorité administrative qui, sous quelque prétexte que ce soit, même du silence ou de l'obscurité de la loi, aura dénié de rendre la justice qu'il doit aux parties, après en avoir été requis, et qui aura persévéré dans son déni, après avertissement ou injonction de ses supérieurs,

Sera puni d'une amende de 200 à 500 francs

Et de l'interdiction de l'exercice de fonctions publiques depuis 5 jusqu'à 20 ans.

S 3. ABUS D'AUTORITÉ PAR FAVEUR, HAINE OU PARTIALITÉ.

ART. 512. (183.) Tout juge ou administrateur qui se sera décidé faveur pour une partie ou par inimitié contre elle, Sera puni de la dégradation civique.

par

ART. 313. (44 de la loi du 21 mars 1832.) Tout fonctionnaire ou officier public, civil ou militaire, qui, sous quelque prétexte que ce soit, aura, en matière de recrutement, autorisé ou admis des exemptions, déductions ou exclusions autres que celles déterminées par la loi,

Ou qui aura donné arbitrairement une extension quelconque, soit à la 'durée, soit aux règles ou conditions des appels, des engagements ou réengagements,

Sera puni d'une amende de 200 à 500 francs

Et de l'interdiction des fonctions publiques depuis 5 jusqu'à 20 ans.

S 4. EMPLOI ILLÉGAL DE LA FORCE PUBLIQUE.

ART. 514. (188, 189, 191.) Tout fonctionnaire, agent ou préposé du gouvernement, de quelque état et grade qu'il soit, qui aura requis ou ordonné, fait requérir ou ordonner l'emploi ou l'action de la force publique contre l'exécution d'une loi, ou contre la perception d'une contribution légale, ou contre l'exécution d'une ordonnance ou mandat de justice, ou de tout autre acte de l'autorité légitime,

Sera puni de la reclusion ou de la déportation temporaire ;

Et si ces ordres ou réquisitions ont été suivis d'effet,

Du maximum de l'une ou l'autre de ces peines.

Si même il survient, par suite desdits ordres ou réquisitions, d'autres crimes punissables de peines plus fortes que celles ci-dessus, les fonctionnaires, agents ou préposés qui les auront donnés,

Seront punis de ces peines plus fortes.

S 5. IMMIXTION DANS LES AFFAIRES INCOMPATIBLES Avec les fonctions.

ART. 515. (176.) Tout commandant des divisions militaires des départements ou des places et villes, tout préfet ou sous-préfet, qui aura, dans l'étendue des lieux où il a droit d'exercer son autorité, fait ouvertement ou par des actes simulés, ou par interposition de personnes, le commerce de grains, grenailles, farines, substances farineuses, vins ou boissons, autres que ceux provenant de ses propriétés,

Sera puni d'une amende de 500 à 1,000 francs,

Et de la confiscation des denrées appartenant à ce commerce.

ART. 516. (175.) Tout fonctionnaire, tout officier public, tout agent du gouvernement qui aura pris un intérêt quelconque dans une affaire dont il était chargé d'ordonnancer le payement ou la liquidation,

Ou qui aura, soit ouvertement, soit par acte simulé, soit par interposition de personnes, pris ou reçu quelque intérêt que ce soit dans les actes, adjudications, entreprises ou régies dont il a ou avait au temps de l'acte, en tout ou en partie, l'administration ou la surveillance,

Sera puni d'une amende du douzième au quart des restitutions et des indemnités,

D'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans,

Et de l'interdiction d'exercer à jamais aucune fonction publique.

S 6. CORRUPTION.

ART. 517. (177 et 178.) Tout fonctionnaire de l'ordre administratif et judiciaire, tout agent ou préposé d'une administration publique qui aura agréé des offres ou promesses, ou reçu des dons ou présents pour s'abstenir d'un acte qui entrait dans l'ordre de ses devoirs, ou pour faire un acte de ses fonctions ou de son emploi, même juste, mais non sujet à salaire,

Sera puni d'une amende double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues, sans que ladite amende puisse être inférieure à 200 francs,

Et de la dégradation civique,

Et même de toute autre peine plus forte qu'entraînerait le fait criminel qui serait l'objet de la corruption.

ART. 518. (179.) Quiconque aura contraint ou tenté de contraindre par voies de fait ou menaces,

Corrompu ou tenté de corrompre, par promesses, offres, dons ou pré

sents, un fonctionnaire, agent ou préposé de la qualité exprimée en l'article 517, pour obtenir, soit une opinion favorable, soit des procèsverbaux, états, certificats ou estimations contraires à la vérité, soit des places, emplois, adjudications, entreprises ou autres bénéfices quelconques, soit enfin tout autre acte du ministère du fonctionnaire, agent ou préposé,

Sera puni des mêmes peines que le fonctionnaire, agent ou préposé

corrompu.

Toutefois, si les tentatives de contrainte ou de corruption n'ont eu aucun effet, les auteurs de ces tentatives seront simplement punis d'une amende de 100 à 300 francs,

Et d'un emprisonnement de 3 à 6 mois.

ART. 519. (181.) Si c'est un juge prononçant en matière criminelle, ou un juré qui s'est laissé corrompre, soit en faveur, soit au préjudice de l'accusé,

Il sera puni, outre l'amende ordonnée par l'article 517, de la reclusion ou de la déportation.

ART. 520. (182.) Si, par l'effet de la corruption, il y a eu condamnation à une peine supérieure à celle de la reclusion,

Cette peine, quelle qu'elle soit, sera appliquée au juge ou juré coupable de corruption.

ART. 521. (180.) Dans tous les cas, les choses données par le corrupteur seront confisquées au profit des hospices des lieux où la corruption aura été commise.

§ 7. CONCUSSION.

ART. 522. (174.) Tous fonctionnaires, tous officiers publics, leurs commis ou préposés, tous percepteurs des droits, taxes, contributions, deniers, revenus publics ou communaux, et leurs commis et préposés, qui se seront rendus coupables du crime de concussion, en ordonnant de percevoir, ou en exigeant, ou en recevant ce qu'ils savaient n'être pas dû, ou excéder ce qui était dû pour droits, taxes, contributions, deniers ou revenus, ou pour salaires ou traitements,

Seront punis, savoir :

Les fonctionnaires et officiers publics, de la reclusion ou de la déportation,

Et leurs commis ou préposés, d'un emprisonnement de 2 à 4 ans. Les coupables seront de plus condamnés à une amende du douzième, au quart des restitutions et des dommages-intérêts.

S 8. SOUSTRACTIONS DE FONDS OU DE PIÈCES COMMISES PAR DES
DÉPOSITAIRES ET FONCTIONNAIRES PUBLICS.

ART. 523. (169, 170, 171 et 172.) Tout percepteur, tout commis à une perception, dépositaire ou comptable public, qui aura détourné ou soustrait des deniers publics ou privés, ou effets actifs en tenant lieu, ou

des pièces, titres, actes, effets mobiliers qui étaient entre ses mains en vertu de ses fonctions,

Sera puni,

Si les valeurs déterminées ou soustraites sont au-dessous de 3,000 francs, et en outre inférieures,

Soit au cautionnement, s'il s'agit d'une recette ou d'un dépôt attaché à une place sujette à cautionnement,

Soit, dans le cas contraire, au tiers de la recette ou du dépôt, s'il s'agit de deniers ou effets une fois reçus et déposés, ou du produit commun de la recette pendant un mois, s'il s'agit d'une recette composée de rentrées successives,

De la reclusion.

Si elles sont au-dessus de 3,000 francs, ou supérieures aux conditions et proportions ci-dessus,

De la déportation temporaire (1).

Les coupables seront en outre, dans tous les cas, punis d'une amende du douzième au quart des restitutions et indemnités.

ART. 524. (173.) Tout agent, préposé ou commis, soit du gouvernement, soit des dépositaires publics, tous juges, administrateurs ou fonctionnaires publics, qui auraient soustrait, détourné, supprimé ou détruit des actes ou titres dont ils étaient dépositaires en ces qualités, ou qui leur auraient été remis ou communiqués à raison de leurs fonctions,

Seront punis de la reclusion ou de la déportation temporaire.

SECTION III.

DÉLITS ET CRIMES POLITIQUES COMMIS PAR DES FONCTIONNAIRES PUBLICS.

S 1er. EMPIÉTEMENTS DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES.

ART. 525. (131.) Les préfets, sous-préfets, maires et autres administrateurs qui entreprendront sur les fonctions judiciaires, en s'ingérant de connaître des droits et intérêts privés du ressort des tribunaux, et qui, après la réclamation des parties ou de l'une d'elles, auront néanmoins décidé l'affaire avant que l'autorité supérieure ait prononcé,

Seront punis d'une amende de 16 à 150 francs.

ART. 526. (180.) Les mêmes administrateurs qui se seront immiscés dans l'exercice du pouvoir législatif,

Soit par des règlements contenant des dispositions législatives,

Soit en arrêtant ou suspendant l'exécution d'une ou de plusieurs lois, Soit en délibérant sur le point de savoir si les lois seront publiées ou exécutées,

(1) Nouvel exemple de la valeur de la chose, prise comme matière de la criminalité des faits et de la gravité des peines. Cependant le code pénal de 1810 me semble avoir été trop indulgent en fixant dans le premier cas de l'article la peine à un simple emprisonnement. Il y a bien des soustractions moins graves qu'il punit de la reclusion.

« PrécédentContinuer »